Le Projet W.

Le Projet W. nous laisse entrevoir par la fiction, à la manière d’un thriller historique, ce qu’aurait pu être la vie de l’auteur anglais William Shakespeare, d’un
comédien ayant repris sa troupe les King’s Men, et d’une jeune juriste dans l’immobilier.
À travers trois histoires dont deux se déroulent au XVIe siècle et l’une dans notre monde contemporain, le récit mis en scène est un hommage aux résiliences
d’hier et d’aujourd’hui. Combats des auteurs de l’ère élisabéthaine face à leurs censeurs, mais également combat pour trouver du sens à une carrière
professionnelle de nos jours.
Cette pièce chorale construite autour d’une dramaturgie non-linéaire met en abîme la volonté de vivre des protagonistes et démontre la nécessité de l’imaginaire et le courage de ses auteurs hérauts.

#Scène 1 Introduction

(Emilia attend avec un bébé dans les bras devant le couvent. Elle marche et semble agitée, surveillant les alentours tout en berçant son bébé.)

LA JEUNE MÈRE SUPÉRIEURE

Que désirez-vous ?

ÉMILIA

Je m’appelle Émilia Lanier. C’est ma fille. Je reviendrai la chercher lorsqu’elle ne sera plus en danger…

LA JEUNE MÈRE SUPÉRIEURE

De quel danger parlez-vous ?

ÉMILIA

Je.. Nous avons dû nous enfuir d’un château où nous étions retenues depuis plus d’un an par un noble…

LA JEUNE MÈRE SUPÉRIEURE

Un noble ? Mais vous vous rendez compte, nous sommes catholiques, si vous êtes recherchée par un puissant, vous nous mettez en grand danger !

(Lucie se fait réveiller par son téléphone portable.)

LUCIE

Allo Thierry ? Mais pourquoi tu appelles si tôt ? Non, non, ça va. Juste un drôle de rêve. Une femme qui confie son bébé à une nonne, alors qu’elle est en danger. Je sais pas pourquoi, ça m’a glacée. Non, rien à voir avec mon rendez-vous de ce matin. Oui oui c’est du tout cuit, le dossier est béton. Non pas encore, mais vu le quartier, je vois bien le potentiel. De rien. Oui on mange ensemble après. Bon, je te laisse, je vais me préparer. À tout à l’heure oui.

(Elle regarde vers Émilia, qui est restée immobile. Puis secoue la tête. Emilia disparaît.)

#Scène 1 Introduction // Au vieux théâtre

LUCIE

(elle entre depuis le public)

Suite de la description de l’intérieur. Le Lot est composé de 4 pièces attenantes à la pièce principale nommée le foyer. Je me trouve dans la plus grande de ces 4 pièces. (Elle va chercher un interrupteur, qu’elle trouve et actionne. La pièce se remplit de lumière. Elle ne voit pas Matt, de dos dans un siège.) Un gradin occupe à peu près la moitié de la surface, soit environ 100m2, le reste de la surface est une scène de théâtre délabrée sur laquelle je me trouve.

(Elle trouve un document et un petit boîtier à bijou, qu’elle ouvre. Elle regarde, un temps et repose tout. Son téléphone sonne.)

Oui Thierry ? Oui j’y suis. Je sais. Oui, on signera. Ne t’inquiète pas. Dix ans d’expérience, ça va marcher, il pourront pas refuser l’offre.. Ok, je te rappelle en sortant.

MATT

(il entre par l’arche centrale)

C'est une histoire racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur, et qui ne signifie rien.

LUCIE

Quoi ? Qui êtes-vous ? (il ne répond pas) Vous connaissez mon chef Thierry Lancard ?

MATT

Un pauvre acteur qui se pavane et s’agite une heure sur la scène et qu’ensuite on n’entend plus. (Il s'approche d'elle)

LUCIE

OK super, vous êtes sans doute euh…

MATT

Les peurs présentes sont moins que des imaginations horribles.

LUCIE

Ok, c’est du théâtre c’est ça ? On est dans un théâtre et donc vous jouez…

MATT

Macbeth, bravo ! Vous connaissez ?

LUCIE

Oui bien sûr, c’est bien de Shakespeare, c’est ça ? C’est avec vous que j’ai rendez-vous ? Monsieur Heminges ?

MATT

Heminges (avec l’accent anglais).

LUCIE

C’est un nom anglais ?

MATT

Je m’appelle Matt. Alors vous aimez Shakespeare ?

LUCIE

Euh… Je ne le connais pas vraiment. Vous savez, en France, on étudie surtout Molière…

MATT

Oui quel dommage… des générations d’écoliers qu’on emmène voir du Molière mal monté et qui peinent à revenir voir du théâtre.

LUCIE

Monsieur Heminges, mon nom est Lucie Legrand. Je suis responsable juridique de la société Immobiplus, je suis ici pour finaliser les termes de la destruction de ce théâtre, comme vous le savez. Mais j’ai une excellente nouvelle à vous annoncer : nous aimerions vous proposer une relocalisa...

MATT

Ah non !

LUCIE

Quoi non ?

MATT

Vous savez que notre association a eu un accord avec les élus. Ce bâtiment est historique. (il va montrer le vitrail)

LUCIE

Oui… Joli vitrail, mais aucune preuve sérieuse n’a été apportée pour un classement. La majorité a changé et notre société a été chargée de revaloriser les bâtiments municipaux, je suis là pour clore le dossier...

MATT

Treize ans d’expérience dans l’immobilier, j’imagine que vous savez ce que vous faites.

LUCIE

Non, si vous m’avez entendu parler à mon collègue, j’ai dix ans d’ancienneté chez Immobiplus.

MATT

Et trois ans chez StarImmo avant ça.

LUCIE

Comment vous savez ça ?

MATT

Les réseaux sociaux ? Linkedin, Facebook, Tiktok…

LUCIE

Tiktok ? Mais je… Bon écoutez, comme je vous le disais, je suis venue avec une bonne nouvelle. Immobiplus n’est pas une société inhumaine, j’ai avec moi une proposition financière de dédommagement généreuse que j’ai pu négocier pour vous avec la mairie, ainsi qu’une relocalisation de vos activités...

MATT

J’aimerais vous raconter l’histoire de ce bâtiment.

LUCIE

Malheureusement je n’ai pas le temps. Je vous parlais de ma proposition, elle est…

MATT

Si vous l’écoutez, je vous promets d’étudier sérieusement votre papier.

(Elle soupire et regarde sa montre.)

LUCIE

Ça ne changera rien à… Écoutez, votre histoire est certainement très instructive.

Instructive ?

Oui enfin j’imagine que vous allez me parler de ce bâtiment, des histoires qu’il a traversées ou quelque chose de ce genre. Mais je vais être honnête avec, ça ne sert à rien d'aller sur les sentiments, je ne suis que l'exécutante de tout ça, ne m’en voulez pas.

MATT

Oh je ne vous veux rien. Juste que vous écoutiez mon histoire. Vous vous déciderez après…

LUCIE

Mais c’est tout décidé ! Et d’ailleurs, ce n’est même pas moi qui décide, je viens de vous l’expliquer, je suis là pour la signature des contrats, c’est tout. Je suis juriste.

Juriste, c’est comme un huissier ?

Euh non, pas comme un huissier, je ne viens pas vous déposséder sans vous écouter, je suis juste là pour…

MATT

Alors vous avez bien un petit moment à me consacrer ?

LUCIE

(un moment) Écoutez, vous comprenez bien qu'on ne peut pas sauver tous les théâtres et la proposition d’Immobiplus vous permettra réellement de sauver votre activité. Ce n'est pas le plus important pour vous ? (elle se ravise) Bon, OK, je vous donne 10 minutes…

MATT

Aha ! Nous sommes au XVIIè siècle, en Angleterre.

(On entre dans l’histoire. Matt sort arche centrale. Lucie sort derrière vitrail)

#Scène 2 Scène d’exposition Liz et Alice // Dans un corps de ferme. 1618

(Arrive le personnage d’Alice, riant. Liz la rejoint, bruits de fête au loin. Arrive Charles . Liz arrive. Charles est en train de courir derrière les filles)

CHARLES

Alice ? Liz?? Je vous ai suivies, je suis là, j’arrive. Ah vous aimez me faire courir hein ! Friponnes !

ALICE

Oh Charles, venez par ici, occupons-nous de nos affaires. Vous m’avez promis de signer ce soir l’autorisation pour que nos amis communs puissent ouvrir une route navale avec les Turcs.

CHARLES

Chut !!! Pas si fort !! Enfin Alice, on ne prononce pas si fort ce mot ! Liz, dites-le lui, on parle tout de même de musulmans !

LIZ

Alice ne craint rien, vous le savez bien !

CHARLES

Ah oui et c’est bien pour ça que je l’aime ! Vous lui répéterez bien hein ? Que je l’aime !

ALICE

Elle le répétera ! À nos affaires Charles, voici l’autorisation qui n’attend plus que votre signature.

CHARLES

Oui oui oui oui, bon allons, c’est bien parce que je connaissais bien votre père le Comte d’Essex !

ALICE

Signez, Charles.

(Il commence à s’exécuter. Puis s’arrête.)

CHARLES

Enfin des Turcs, tout de même… Je risque gros moi vous savez ? Je pense que je vais en parler à la compagnie des Merchants.

ALICE

Vous savez qui m’envoie. Vous n’imaginez pas que l’Ordre ferait du commerce avec des musulmans s’ils n’avaient pas leurs raisons. Et vous savez bien que l’Ordre attend de vous une totale coopération...

CHARLES

Je sais ce que je dois à l’Ordre, mais je sais également ce qu’il me doit ! (un temps. On tape à la porte, c’est un soldat de Charles.)

LE SOLDAT

(arrivant par l’arche de côté) Tout va bien monseigneur ?

CHARLES

Oui oui…

(Liz rit et va s’occuper du soldat.)

LIZ

Bonjour bel homme….

(Elle sort pour continuer à le draguer. Alice fait la triste et va récupérer le contrat, dépitée.)

CHARLES

(l’observant) Ah Alice, que ne ferais-je pas pour vous. Voilà. Et cela mérite bien tout de même un baiser non ?

ALICE

Une femme repousse...

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