ARSENIC (et jeunes dentelles)

La scène se passe dans une pharmacie. Le pharmacien est au comptoir, une cliente entre.

La cliente  : - Bonjour Monsieur.

Le pharmacien  : - Madame. C'est pour quoi ?

La cliente  : - C'est bien une pharmacie, ici ?

Le pharmacien  : - Ben oui ! Il n'y a pas de poireaux, pas de carottes : ce n'est pas une épicerie !

La cliente  : - Oh ! que vous êtes drôle ! Mais, c'est bien la pharmacie Dumartin ?

Le pharmacien  : - Oui, c'est ça.

La cliente  : - Et vous êtes monsieur Dumartin ?

Le pharmacien  : - Oui.

La cliente : - Le pharmacien ?

Le pharmacien  : - Lui-même. Mais enfin, Madame, c'est pour quoi ?

La cliente  : - Eh bien ! voilà : je voudrais de l'arsenic !

Le pharmacien  : - Pardon ?

La cliente  : - De l'arsenic. Mais une assez importante quantité.

Le pharmacien  : - De l'arsenic ? Mais enfin, Madame, l'arsenic, ça ne s'achète pas comme ça ! Ce n'est pas en vente libre. C'est un poison.

La cliente  : - Oui. C'est justement ce qui m'intéresse.

Le pharmacien  : -Non, mais attendez, là : ça ne va pas la tête ?

La cliente  : - Si, si, très bien.

Le pharmacien  : - Et c'est pour quoi faire ?

La cliente  : - C'est pour tuer mon mari.

Le pharmacien  : - Non, mais, on aura tout entendu ! Et en plus vous me dites ça comme ça !

La cliente  : - Et comment voulez-vous que je vous le dise, hein, monsieur Dumartin ?

Le pharmacien  : - Écoutez, Madame, ce n'est pas possible. Allez, sortez, avant que j'appelle la police.

La cliente  : - Monsieur le Pharmacien Dumartin, calmez-vous. (Elle sort une photo de son sac.) Regardez cette photo.

Le pharmacien  : - Quoi ? Quoi ? (Il regarde la photo.) Eh bien  ! dites-donc ma petite dame, c'est

une photo intime, ça ! Un peu cochonne, même ! Une belle partie de jambes en

l'air. Bon, mais pourquoi vous me montrez ça ? Qu'est-ce que vous voulez avec

cette photo ?

La cliente  : - Le monsieur, là, c'est mon mari.

Le pharmacien  : - Ha ! ben ! il s'embête pas le bougre ! Il a ce qu'il faut, hein ? Et puis, il a l'air de bien s'en servir !

La cliente : - Et la dame, là. Vous avez vu la dame ?

Le pharmacien  : - Ben, quoi, la dame ? Elle a l'air d'aimer ça, non ?... Ha ! Mais c'est ma femme !

La cliente : - C'est madame Dumartin, en effet.

(Le pharmacien sort un gros sac d'arsenic. Il le donne à la cliente.)

Le pharmacien  : - Tenez : arsenic première qualité . Après tout, vous avez une ordonnance !

UNE DEVINETTE PEUT EN CACHER UNE AUTRE

L'amoureux  : - Hélas ! Cruelle ! Puisque de moi point d'envie

Vous n'eûtes, et bien qu'à vos genoux, ma vie

Je vous offris entière, et que d'un amour fou

Mon cœur s'est consumé devant vos yeux si doux,

Je ne puis plus, baigné par votre indifférence,

Rester dans quelque lieu où est votre présence.

J'ai pris la décision, je vous l'avoue, Madame,

De fuir cette contrée où réside votre âme.

Oui, je m'en vais ce soir, je quitte le terroir.

Mon cœur a trop souffert : rien que de vous revoir

Il saigne de nouveau. Je viens vous dire adieu .

Je referai ma vie dessous de nouveaux cieux.

L'adorée  : - Monsieur, je vous l'avoue, mon âme est malheureuse

D'avoir meurtri la vôtre ; or, pour être amoureuse

Une femme a besoin de voir vibrer son cœur.

Malgré vos qualités, je n'eus cette douceur.

L'amour est capricieux, et jamais Cupidon

Ne décocha vers moi un de ses traits profonds.

L'amoureux  : - Souffrez qu'en vous quittant, je vous propose un jeu :

Une devinette, pour vous donner l'adieu.

L'adorée   - Je vous en prie, Monsieur, Oui, je veux essayer

D'en trouver la réponse, et de vous égayer.

L'amoureux  : - Madame, vous savez qu'avec des mots fleuris

Tous les adorateurs de Vénus ont écrit

Des poèmes, des vers, et des sonnets charmants.

Or, moi, pour vous louer, je n'ai pas ce talent :

Aux roses de Ronsard, et aux blancs lys d'Homère,

J'oppose quelques fruits, et légumes vulgaires.

Vous le voyez, ma muse est quelque peu bancale .

Voulez-vous que toujours j'expose mon oral ?

L'adorée  : - Faites, je vous en prie. Cela me plaît assez

D'avoir à raisonner devant quelque pensée.

L'amoureux  : - Soit. Vous le savez, nous, les hommes, nous pouvons

Mourir pour de beaux seins, ces superbes fleurons

De votre anatomie. Aussi, quand à vingt ans

Ils sont fermes et durs, et leurs tétons pointant ;

Qu'ils sont bien lourds en main, et d'un dessin bien rond,

On peut les comparer sans faillir aux melons.

L'adorée : - À ces fruits en effet, ils ressemblent beaucoup,

Mais je ne pense pas qu'ils aient le même goût !

L'amoureux  : - Après, vient la trentaine, ils sont comme des poires

Qui pendent au verger avec ce fol espoir

Qu'ils soient cueillis, choyés avant d'être trop mûrs !

L'adorée  : - Je m'attends pour la fin à une image dure...

L'amoureux  : - Savez-vous à quel fruit, quand ils sont vieux et las,

On les peut comparer ?

L'adorée  : - Ma foi, je ne vois pas.

C'est votre devinette, instruisez-m'en sur l'heure.

L'amoureux  : - Aux oignons.

L'adorée  : - Aux oignons ?

L'amoureux  : - Quand on les voit, on pleure !

Oui, c'est cruel. Et je le dis sans patenôtres :

C'est ce que demain il adviendra des vôtres!

L'adorée  : - Sûrement avez-vous quelque ressentiment

À n'avoir jamais pu être de mes amants ?

Sans vous en tenir grief, Monsieur, permettez

Que je brocarde aussi votre virilité.

Pour ce jeu, moi aussi,...

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