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Marc croit avoir eu une bonne idée en retrouvant sur Internet tous ses copains de l’année du bac. Hélène, dont ils étaient tous amoureux à l’époque, elle aussi a été retrouvée. Ils se réjouissent tous de l’excellente initiative de Marc. Mais était-ce une bonne idée de les inviter à dîner ? Ils arrivent tous avec un cadeau surprise ; Hélène aussi. Mais quel cadeau ? Et quelle surprise ? Marc découvre ce soir-là que parfois il vaux mieux laisser le passé là où il doit être, c’est-à-dire dans le passé.

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1ère partie

 

Quand le rideau se lève, Marc est seul en scène.

Il est à moitié allongé sur un des deux canapés. Il tient à la main un journal, mais qu’il ne lit pas. Il a les yeux mi-clos et semble absorbé par ses pensées.

Tout près de l’entrée du corridor, on aperçoit un caddie dont on se sert pour aller au marché.

Une femme sort du corridor pour le prendre. Elle est vêtue d’un imperméable et d’un chapeau de pluie. On ne voit pas son visage car elle nous tourne le dos. Elle sort et, quelques secondes plus tard, on entend la porte d’entrée claquer.

Marc se lève et se dirige vers le bar. Il sort un seau à glace, avec dedans une bouteille de champagne, qu’il dispose sur une table basse devant le canapé. Puis il s’allonge à nouveau et ferme les yeux.

Une femme sort de la cuisine. C’est Sylvie. C’est une jolie femme que l’on sent s’être apprêtée pour une soirée. Elle est vêtue d’un pantalon et d’une chemise blanche en dentelle, le tout agrémenté de quelques bijoux.

Elle transporte des petits plateaux d’amuse-gueule qu’elle dispose sur le bar et sur des tables basses.

Sylvie - Tu dors !

Marc (sursautant) - Pas du tout, pas du tout, j’ai un peu peur, c’est tout.

Sylvie - De toute façon, il est trop tard, ils vont bientôt arriver.

Marc - Oui, mais reconnais que retrouver des amis qu’on a perdus de vue depuis plus de trente ans, ça peut filer le trac. Dix-huit ans ! On avait tous dix-huit ans !

Sylvie - Oui, l’année du bac ; on a tous passé le bac, tu sais.

Marc - Ah ! mais nous, tu n’imagines pas l’équipe que nous formions ! Cette année-là, je m’en souviens comme si c’était hier. Ce fut l’année de tous les rêves, de tous les projets, de toutes les peurs aussi. Ce fut pour nous tous une année magique ! Alors, quand j’ai découvert que, par Internet, c’était devenu aussi simple de les retrouver, je n’ai pas pu m’empêcher de cliquer. Si tu savais comme ils ont été heureux de m’entendre leur proposer de tous nous réunir ! Mais maintenant, à l’idée de les revoir tous, j’ai un de ces tracs !

Sylvie - Tu ne crains pas d’être déçu ? Car ils doivent tout de même avoir tous un peu changé.

Marc - Si déjà on se reconnaît, ce sera formidable. Ce n’est pas cela qui compte. J’ai besoin d’un petit remontant.

Sylvie lui sert un verre.

Sylvie - Tu te souviens bien d’eux ?

Marc - Comme si c’était hier ! Patrick avec ses cheveux longs, Jérôme le séducteur, Éric le fort en math, Dominique le poète, et puis Hélène ! Ah ! Hélène !

Sylvie - Ah bon ! À ce point-là ?

Marc - Un rêve qui passe. On était tous amoureux d’elle. On a tous séché des cours pour l’emmener au cinéma. On était prêts à tout pour Hélène !

Sylvie - Même rater son bac.

Marc - À part moi, tous les autres l’ont eu.

Sylvie - Tel que j’ai connu ton père, ton retour chez toi a dû être agité.

Marc - C’est simple : quand j’ai vu que mon nom ne figurait pas sur la liste, j’ai demandé à Patrick de m’héberger pour la nuit. Je ne suis rentré chez moi que la semaine suivante, après que ma mère ait négocié mon retour avec mon père.

Sylvie - Un tel échec, pour lui, cela a dû être très dur.

Marc - Tu parles ! Lui qui espérait que son fils ferait comme lui une carrière dans la Marine nationale !

Sylvie - Et tes copains, qu’est-ce qu’ils ont fait ?

Marc - Je crois que Jérôme est entré dans une école d’administration, Dominique en fac de médecine, Éric en fac de droit, Patrick en science, et Hélène a fait une école de journalisme. Enfin, si je me souviens bien ; c’est si loin tout ça…

Sylvie - Vous vous êtes perdus de vue tout de suite ?

Marc - Pas du tout ! On s’est tous revus pendant deux ou trois ans, et puis un jour Patrick s’est marié, Éric aussi, et ensuite la vie et ses emmerdements ont fait le reste.

Sylvie - Reconnais que pour moi qui ne connais personne, cela risque d’être une soirée un peu spéciale.

Marc - Tu ne seras pas seule, puisque Patrick et Éric viennent avec leurs femmes, qui sont dans la même situation que toi.

Sylvie - Autre angoisse : ne connaissant aucun des goûts de chacun, j’ai fait un hachis Parmentier comme tu me l’as demandé.

Marc - Je te remercie, mon amour, mais j’ai voulu qu’ils retrouvent les menus de chez Martine, le resto juste à côté du lycée.

Sylvie - Es-tu certain de ne pas être déçu ?

Marc - Je ne sais pas, à l’époque nous faisions tous tellement de projets que, maintenant que nous sommes presque à la fin du parcours, je suis très curieux de découvrir quelle a été la destinée de chacun.

On entend un coup de sonnette.

Sylvie - Je crois que tu ne vas pas tarder à le savoir.

Marc - Tu ne veux pas y aller ? Je n’ai plus de jambes.

Sylvie se lève et disparaît dans le couloir. Marc s’est levé. On le sent très ému.

On entend dans le couloir la voix d’un homme.

Un homme entre très lentement. On le sent également assez tendu.

Il est vêtu d’un costume gris foncé, assez classique, et porte une cravate. Il donne l’impression d’une certaine rigidité.

Il tient à la main une rose emballée dans un grand paquet.

C’est Jérôme.

En apercevant Marc, il s’est arrêté.

Il y a un grand silence.

Marc - Jérôme… C’est toi, Jérôme ?

Jérôme - Pour un choc, c’est un choc.

Marc - C’est moi, Marc !

Jérôme - Oui, eh bien ça, je m’en doute.

Marc - Oh ! excuse-moi, mais je ne savais pas si tu me reconnaîtrais !

Jérôme - Chez toi, qui voulais-tu que ce soit ?

Marc - Oui, c’est complètement idiot, mais… je… Trente ans ! Tu te rends compte ?

Jérôme - Et moi ? Comment me trouves-tu ? Pas de complaisance, veux-tu !

Marc - Toi ? Le portrait de Dorian Gray. Comment fais-tu ? Tu n’as pas pris un gramme.

Jérôme - Je m’en occupe et, crois-moi, c’est un vrai boulot.

Marc - Moi aussi je fais attention à ce que je mange ! Hein, Sylvie ? Oh ! je ne t’ai pas présenté Sylvie ! Sylvie, voici Jérôme qui était le plus sérieux de la bande.

Jérôme (offrant la rose) - Ce n’est pas grand-chose, mais j’ai toujours peur d’embarrasser les maîtresses de maison avec un trop gros bouquet. C’est vrai, on ne possède pas toujours un grand vase !

Sylvie - Alors qu’on est toujours certaine de trouver un verre !

Jérôme - Exactement.

Sylvie se dirige vers la cuisine.

Sylvie (pour elle-même) - Ça commence bien : un radin !

Marc - Je t’en prie, assieds-toi. Je te sers quelque chose ? Scotch, champagne ?

Jérôme - Comme je te l’ai dit, le régime, c’est un vrai boulot, c’est une attention de chaque instant. Un jus de tomate.

Marc (assez haut à l’intention de Sylvie) - Sylvie ! Un jus de tomate pour notre ami. Oui, maintenant je me souviens qu’à l’époque, tu faisais déjà très attention à ta petite santé.

Jérôme - Et avec l’âge, je suis encore plus intraitable, car si on ne fait pas attention, on a vite fait de devenir un tas, alors nourriture bio, le hammam, et trois fois par semaine je soulève de la fonte dans une salle de gym. Et toi ?

Marc - Oh ! moi, certains matins j’ai du mal à soulever mon stylo, alors de la fonte !

Jérôme - Ah oui ! Tu me l’as dit, tu « écris »… Qui doit venir encore ?

Marc - Mais tous ! Patrick, Éric, Dominique et Hélène.

Jérôme - Hélène…

Marc - Oui, tu te souviens ? Tu en étais fou.

Jérôme - C’est vrai, mais honnêtement, quand j’y repense, on dirait qu’il est question de quelqu’un d’autre, dans une autre vie, et sur une autre planète.

Marc - Tu as raison, j’ai un peu la même impression. On se croirait presque dans un voyage spatial où l’on remonte le temps.

Sylvie (revenant) - Méfiez-vous du mal de l’apesanteur !

Marc - Je pense que nous allons passer une superbe soirée. J’ai plein de souvenirs, qui déjà remontent à la surface, mais avant de les évoquer, je préfère que tout le monde soit là. Tu habites où ?

Jérôme - Le Marais ; nous sommes presque voisin.

Marc - Non, mais comment se fait-il que…

Jérôme - Cela fait très peu de temps. Toi finalement tu es resté dans le même quartier que le lycée.

Marc - Oui, j’ai eu de la chance, je passe souvent devant le « Pot d’étain » et, certains jours, je m’y arrête pour y prendre un verre. Bien entendu ce ne sont plus les mêmes patrons, mais le comptoir et le carrelage sont toujours d’époque.

Jérôme - L’été, la terrasse était pleine de fleurs.

Marc - Et de filles aussi. Ce qu’on a pu s’amuser…

Jérôme - Même pendant les cours… D’ailleurs il m’est revenu une de tes boutades que je n’ai jamais oubliée.

Marc - Ah oui ? Laquelle ?

Jérôme - C’était pendant le cours de géo. Le prof t’interroge : « Pouvez-vous me citer le nom d’un grand glacier dans le monde ? »

Marc - Je ne m’en souviens pas du tout. Qu’est-ce que j’ai répondu ?

Jérôme - Bertillon. C’est qu’il était drôle votre mari !

On entend un coup de sonnette.

Sylvie - Ah ! surprise ! Surprise !

Marc - Sylvie, s’il te plaît. (Sylvie se dirige vers le corridor.) Ça me fait peur, pas toi ?

Jérôme - Qui ça peut être ?

On entend un bruit de voix.

Celles d’un homme et d’une femme.

C’est Éric et Bernadette. C’est un couple qui dénote un petit peu par son allure et son langage. Ils sont habillés très modestement et l’air pas très à l’aise.

Marc et Jérôme se sont levés.

Il y a un grand silence.

Marc - C’est Éric !… Mais oui… C’est Éric ! C’est toi !

Éric - Je t’avais dit que je viendrais… Jérôme ! Mais c’est Jérôme !

Jérôme - Lui-même.

Éric - Oh là là ! Jérôme… Ça alors ! On attend encore beaucoup de monde ?

Marc - Patrick, Dominique et Hélène.

Éric - Hélène ! Tu as réussi à la retrouver, toi ?

Marc - Très facilement. Mais tu ne connais pas ma femme Sylvie…

Éric - Parfait ! Et moi je te présente Bernadette.

Marc - Asseyez-vous, Bernadette.

Éric - Jérôme, je te trouve dans une forme…

Jérôme - Je m’entretiens, mais c’est de plus en plus dur.

Sylvie - Vous voulez boire quelque chose ?

Bernadette - Oui, une bière.

Sylvie - Ah ! je crois que je n’en ai pas !

Bernadette - Alors, un Ricard.

Sylvie - Ça non plus, je suis désolée.

Bernadette - Oh ! ce n’est pas grave, n’importe quel pastis fera l’affaire !

Sylvie - Vous n’avez pas de chance décidément ! Un jus de tomate ?

Bernadette - Quelle horreur ! Vous avez du rouge ?

Sylvie - Oui ! Bien sûr ! J’ai un excellent bordeaux.

Bernadette - Alors, ça ira très bien…

Sylvie - Marc, je t’en prie, fais le service.

Sylvie entre dans la cuisine.

Marc sert à boire à Éric.

Bernadette regarde autour d’elle le décor.

Bernadette - Dites donc ! Ça rapporte !

Marc - Pardon ?

Bernadette - L’écriture… C’est Éric qui m’a dit que vous écriviez.

Éric - Oui, c’est vrai que lorsque tu m’as dit ce que tu faisais, j’ai vraiment été très surpris.

Marc - Ah bon ! Pourquoi ?

Éric - On réussit à vivre avec ça ?

Marc - Oui, ça fait...

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