Recherche femme désespérément

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Pour obtenir un prêt qui le sortirait de l’impasse, Rémi Dupuis a eu l’idée d’inviter son banquier et son épouse à un apéritif dînatoire suivi d’une partie de bridge. Tout semble se présenter pour le mieux, jusqu’à ce que Sophie, la petite amie de Rémi qu’il escomptait faire passer pour sa femme, lui annonce qu’elle le quitte. Que faire pour ne pas perdre la face ? Trouver une remplaçante au pied levé, tout simplement ! Pas si facile que cela en pratique. Surtout quand la femme de ménage s’en mêle. Vont alors débarquer coup sur coup une escort girl plus que séduisante, une secrétaire franchement coincée et une nymphomane insatiable. Si l’on ajoute à cette pagaille un cousin de province très timide, un huissier de justice sérieux au possible et, pour couronner le tout, une brute épaisse, on obtient une comédie pétillante, sans temps mort, aux répliques explosives, où règnent en maîtres les quiproquos étourdissants, au service de personnages détonnant. Bref, un vaudeville brillant qui ravira tous les publics. “Recherche une femme désespérément” est la petite dernière de l’auteur des pièces “Monsieur Claude”, “Fred”, “Filles au pair” ou “Drôles de couples”, mais elle a déjà tout d’une grande !

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ACTE 1

SCÈNE 1

 

Au lever du rideau, on découvre Rémi, fort élégant, qui s’évertue à nouer sa cravate. Son portable sonne.

Rémi - Allô ! (…) Oui, c’est moi… (…) Ah ! c’est toi, Philippe ? (…) Je te l’ai dit : laisse-moi un petit délai… (…) Je vais trouver les fonds nécessaires, aucun souci ! C’est une question d’heures… (…) Oui, je dois voir mon banquier. C’est un vieil ami. Il ne peut rien me refuser, tu penses bien ! (…) Allô ! Allô !… Je t’entends plus trop… (…) Oui, mon portable passe mal ici, comme d’habitude. (…) Attends, je vais aller dehors et… (…) Comment ? (…) Tu me rappelleras ? Comme tu veux… (…) A plus tard ! (Il range son portable, décroche le téléphone fixe, consulte son calepin et compose un numéro.) Allô ! (…) Jacques ?… Enfin, monsieur Saumon ? (…) Non, « madame » ?… (…) Ah ! ben dites donc ! A la voix, on croirait vraiment que… (…) Mes hommages, madame. Pourrais-je parler à votre mari s’il vous plaît ? (…) De la part de ? Rémi Dupuis. (…) Oui, merci, j’attends. (Pour lui-même.) Qu’est-ce que je peux faire d’autre, triple buse ?! (Après un temps.) Allô ! Bonjour ! Rémi Dupuis à l’appareil… (Insistant.) Rémi Dupuis… (…) Voilà, c’est ça… (Pour lui-même.) Encore plus idiot que sa femme ! (Au téléphone.) Comment allez-vous, cher ami ? (…) Parfait. (…) Oui, oui, moi aussi ! Quand les affaires marchent, le moral suit, hein ! (…) Dites, vous ne seriez pas libre ce soir, par hasard, pour une partie de bridge à la maison ? (…) Oui, je sais que votre femme et vous en raffolez… Parce que naturellement, nous l’invitons aussi… (…) Oui, Sophie y tient tout particulièrement. (…) (Quelque peu gêné.) Oui, oui, c’est ça, évidemment. C’est… c’est mon épouse comme vous dites… (…) Donc nous serions quatre. Pas de problème : Sophie sera de la partie si j’ose dire. Elle adore le bridge elle aussi ! (…) Un autre rendez-vous ?… Aïe… (…) Vous allez l’annuler ? Je ne voudrais pas que… (…) Alors c’est entendu… (Avec emphase.) Sophie sera ravie, comblée… (…) Vers dix-huit heures… (…) Vous connaissez mon adresse, naturellement ? (…) Ah non ?… 8 rue des Eglantiers… (…) A ce soir donc ! Et présentez à nouveau mes hommages à votre charmante épouse ! (…) Euh… non, je ne l’ai encore jamais vue, mais j’anticipe… et j’ai surtout hâte de faire sa connaissance ! (…) C’est cela, à plus tard ! (Il raccroche et se frotte les mains.). Eh bien, voilà ! Moi, je sens que la journée s’annonce très bien ! (Il appelle en direction de la cuisine.) Louisa ! Louisa !

Louisa apparaît. Elle porte un tablier de cuisine.

Louisa (sèche) - Vous m’avez sonnée ?

Rémi - Euh… oui. Louisa, il va falloir mettre les petits plats dans les grands !

Louisa - Ouh là là ! Je crains le pire !

Rémi - N’ayez aucune inquiétude ! Je voulais juste vous annoncer l’arrivée des Saumon ce soir.

Louisa (naturelle) - Mais je n’ai pas commandé de poisson, moi !

Rémi - Louisa ! Je vous parle des Saumon : Jacques Saumon et son épouse.

Louisa - Ah ?… Enchantée ! Remarquez, avec un nom pareil, même la plus maligne pouvait se tromper !

Rémi - Je vous l’accorde… C’est un nom plutôt rare.

Louisa (naturelle) - Et plutôt ridicule aussi…

Rémi - Oui, aussi… En tout cas, j’aimerais qu’on leur réserve le meilleur accueil possible !

Louisa - Comptez sur moi ! Vous me connaissez !

Rémi - C’est un peu ce qui me tracasse !

Louisa - Allons, faut pas ! (Après un temps.) Dites, je ne voudrais pas être indiscrète…

Rémi (ironique) - Ce n’est pas votre genre !

Louisa - Mais ce sont qui, au juste, ces Saumon ?

Rémi - Ça ne vous regarde pas !

Louisa - Vous savez bien que vous finissez toujours par tout me raconter, alors…

Rémi (de guerre lasse) - Vous avez raison.

Louisa - Eh oui ! Comme d’habitude !

Rémi - Jacques Saumon est mon banquier.

Louisa - Le pauvre !

Rémi - Je vous en prie ! Bon, c’est vrai qu’en ce moment mes affaires vont plutôt mal, j’en conviens.

Louisa - Et je parie que vous comptez sur lui pour vous sortir de là !

Rémi - Oui… S’il m’accorde le prêt que je souhaite, je pourrai enfin sortir la tête hors de l’eau et remettre mon compte à flot…

Louisa - Ah… Et au passage, vous pourrez réapprovisionner le mien… C’est pas que je veuille insister lourdement, mais j’aimerais bien toucher ma paie du mois, moi ! Et aussi celle du mois dernier par la même occasion.

Rémi - Ecoutez, Louisa, je ne demande pas mieux… (Assez peu convaincu et convaincant.) Je vous l’ai dit : je traverse une mauvaise passe, sans plus.

Louisa - Qui semble durer !

Rémi - L’ennui, c’est que mes créanciers ne lâchent pas prise… Certains m’ont même dit qu’ils allaient m’envoyer l’huissier.

Louisa - Ils n’oseront pas.

Rémi - Détrompez-vous ! Mais je garde bon espoir : j’ai comme le pressentiment que tout va basculer aujourd’hui !

Louisa - Ah ça ! Reste à savoir dans quel sens !

Rémi - Je suis persuadé que Saumon est mon sauveur.

Louisa - Et c’est donc bien pour ça que vous l’avez invité ce soir.

Rémi - Naturellement. Rien de tel qu’un verre et une partie de bridge pour se le mettre dans la poche ! Alors, à nous de jouer ! Et de jouer fin !

Louisa - La finesse, ça me connaît !… Dites, j’y pense : ils ne sont pas trop pique-assiette, vos invités ?

Rémi - C’est tout le contraire. Pourquoi ?

Louisa - Non, je me disais, ce serait amusant des Saumon qui s’incrustent assez !… Saumon, crustacé… Pas mal, non ?

Rémi - Hum…

Louisa - Décidément, mon humour ne sera jamais apprécié à sa juste valeur !

Louisa regagne la cuisine. Rémi va se servir un verre au bar.

 

SCÈNE 2

 

Une jeune femme descend les escaliers, bagages à la main.

Sophie - Rémi, je voulais te dire…

Rémi (sans se retourner) - Oui, oui, je t’écoute…

Sophie - Je pars.

Rémi (ailleurs) - Très bien.

Sophie - Je pars, tu comprends ?

Rémi - D’accord ! Tu pourras ramener un bouquet de fleurs à ton retour ? C’est pour décorer un peu la salle à manger, pour ce soir… Ça fera plus gai.

Sophie - Tu n’as toujours pas compris : je pars définitivement.

Rémi - Parfait ! (Se retournant enfin.) Comment ?

Sophie - Je te laisse !

Rémi - Quoi ?

Sophie - Je te quitte, voilà !

Rémi - Mais qu’est-ce que tu racontes ?

Sophie - Que c’est fini entre nous.

Rémi - Fini ?

Sophie - Oui, fini, cassé, rompu, brisé.

Rémi - Mais pourquoi ?

Sophie - Ça ne servirait à rien de chercher des explications inutiles.

Rémi - Il y a quelqu’un d’autre, c’est ça ?

Sophie (haussant les épaules) - Tu sais bien que non.

Rémi (plutôt abasourdi) - J’avoue qu’à cet instant, je ne sais plus grand-chose.

Sophie - Ecoute, j’y ai pensé toute la matinée et j’ai enfin compris que j’avais besoin de construire quelque chose de solide et j’ai peur que ce ne soit pas possible avec toi. C’est tout.

Rémi - C’est tout ?

Sophie - C’est assez.

Rémi - Mais tu as bien réfléchi ?

Sophie - Trop peut-être… Je pense que c’est mieux pour nous deux.

Rémi - Pour toi peut-être, mais pour moi ?

Sophie - Pour toi aussi.

Rémi (tragédien) - Mais qu’est-ce que je vais devenir sans toi ?

Sophie - Oh ! je ne me fais pas trop de soucis pour toi !

Rémi - Eh bien, tu devrais ! Tu devrais !

Sophie - Avant moi, il y en a eu d’autres, et je sais très bien qu’après moi, il y en aura d’autres !

Rémi (naturel) - Sans doute, mais…

Sophie - Tu vois ! Tu le reconnais toi-même !

Rémi (cherchant à se rattraper) - Non, je…

Sophie - Je suis sûre que tu pourras facilement me remplacer.

Rémi - Bien sûr, mais…

Sophie - Charmant !

Rémi (maladroit) - Non, je voulais dire… enfin… pas si facilement que ça !

Sophie - Tiens donc !

Rémi - Et pas du jour au lendemain !

Sophie - Quelle délicatesse !

Rémi - Attends un peu… Donnons-nous du temps !

Sophie - Inutile.

Rémi - Reste au moins jusqu’à demain matin !

Sophie - Pourquoi demain matin ?

Rémi - Euh… pour rien… Ça m’aurait arrangé !

Sophie - Qu’est-ce que tu veux dire ?

Rémi (se reprenant) - Que ça allait s’arranger, voilà. Que ça allait s’arranger… Et puis, ç’aurait été l’occasion de mettre la robe de soirée que je t’avais offerte.

Sophie - La noire ?

Rémi (maladroit) - Je ne t’en ai offert qu’une, il me semble.

Sophie - Je confirme… Mais je te rassure : je suis sûre qu’elle ira à d’autres !

Rémi - Ben c’est pas évident : toutes les femmes n’ont pas ta taille !

Sophie - Hum… Mais inutile d’insister. Ma décision est prise !

Rémi - Mais enfin, tu ne peux pas partir comme ça !

Sophie - Si.

Rémi (peu convaincant) - Tu sais que si tu pars, ce n’est pas la peine de revenir !

Sophie - Oh ! mais n’y compte pas trop !

Rémi - Mais ma porte te reste ouverte, hein ?

Sophie - C’est sympa.

Rémi (plein d’espoir) - Tu vas donc revenir ?

Sophie - Tu peux toujours rêver !

Sophie quitte l’appartement.

Rémi (une fois Sophie partie) - C’est ça ! Bon vent !… Toutes les mêmes !

 

 

SCÈNE 3

 

Rémi avale son verre, s’en sert un autre et s’installe sur le canapé. Retour de Louisa qui, dans un premier temps, n’a pas vu Rémi. Elle entonne la chanson « Reviens ».

Rémi - Dites, vous n’auriez pas un autre disque en réserve ?

Louisa - Oh là là ! Ça n’a pas l’air d’aller !

Rémi - Ah ! si, si… L’extase !

Louisa - Je ne voudrais pas une nouvelle fois me mêler de ce qui ne me regarde pas.

Rémi - Oui, ce serait mieux.

Louisa - Même si ça me regarde un peu quand même. En tout cas, ça m’intéresse.

Rémi - Je n’en doutais pas une seconde.

Louisa (directe) - Alors comme ça, Sophie est partie ?… D’un côté, ça m’arrange plutôt.

Rémi  - Tiens donc !

Louisa - Elle était charmante, je vous l’accorde, mais bordélique, avouez-le ! (Après un temps.) Entre nous, vous teniez vraiment à cette fille ?

Rémi (faussement outré) - Dites donc !

Louisa - Vous la connaissiez depuis deux semaines à peine !

Rémi (consultant sa montre) - Ah ?… Tant que ça ? Mais la valeur n’attend pas le nombre des années !

Louisa - Ni même des mois ! (Après un temps.) Allons, ce n’est pas si grave.

Rémi - On voit que ce n’est pas vous qui vous êtes fait larguer !

Louisa (soupirant) - Non, ça ne m’est jamais arrivé, hélas ! Mais ce n’est pas la fin du monde tout de même !

Rémi - Du monde, je ne sais pas, mais de mon monde ! Figurez-vous que c’est la première fois qu’une femme me quitte ! Si, si ! D’habitude, c’est moi qui décide de rompre !

Louisa - Il faut un début à tout !

Rémi (cherchant la compassion) - C’est plutôt la fin pour moi !

Louisa - Et puis, comme on dit : une de perdue, dix de retrouvées !

Rémi - Oh ! une seule me conviendrait.

Louisa - Vraiment ? Vous deviendriez moins gourmand ?

Rémi - Pour ce soir en tout cas…

Louisa - Je me disais aussi !

Rémi (qui a retrouvé son aplomb) - Je vous rappelle que j’ai invité les Saumon ce soir.

Louisa - Oh ! mais je m’en souviens ! Un nom pareil, pour l’oublier, faut être fortiche. Mais je ne vois pas en quoi le départ de Sophie remet en cause leur venue.

Rémi - Oh ! c’est tout simple : je leur ai dit que nous les invitions.

Louisa - Nous ?

Rémi - Oui, nous.

Louisa (ne comprenant pas) - Vous voulez dire vous et moi ?

Rémi - Mais non, pas vous ! Faut pas pousser !

Louisa - Ah bon ! Je préfère ! Moi, je veux bien me mêler de vos histoires, mais dans une certaine limite ! Faut pas exagérer !

Rémi - En parlant de nous, je voulais dire ma femme et moi…

Louisa - Ah oui !

Rémi - Sauf que je ne suis pas marié.

Louisa - Ah non ?… Ben oui, c’est vrai ! Suis-je bête !… Mais pourquoi avez-vous dit aux Saumon que vous étiez marié alors que vous ne l’étiez pas ?

Rémi - C’est eux qui m’ont poussé à le faire.

Louisa - Non ?!

Rémi - Si ! Quand je leur ai dit qu’on les attendait, Sophie et moi, Jacques Saumon m’a demandé si, naturellement, Sophie était ma femme… Moi, j’ai pas osé le contrarier… Vous comprenez, ça faisait mieux.

Louisa - Ah !

Rémi - Oui, ça nous mettait sur un pied d’égalité, Saumon et moi.

Louisa (réfléchissant) - Vu sous cet angle, ça peut se comprendre.

Rémi - En plus, à ce que je crois savoir, Jacques Saumon est très « vieille France » et très attaché à certaines valeurs comme le mariage.

Louisa - Ah ! (Songeuse.) Quand j’y repense, moi aussi j’aurais dû me marier !

Rémi - Rien ne vous en a empêchée.

Louisa - Moi, j’étais d’accord : la date, le lieu étaient trouvés… Bon, il ne manquait plus que le mari.

Rémi - C’est vrai que c’est gênant… Enfin, tout ça ne résout pas notre problème.

Louisa - Le vôtre surtout…

Rémi - Un peu le vôtre aussi : pensez à vos deux mois de salaire !

Louisa - Et vous ne vous êtes pas douté qu’en disant à Saumon que vous l’attendiez pour ce soir, vous et votre femme… enfin, votre femme virtuelle… ça allait clocher quand il arriverait ici ?

Rémi - Non, parce que c’est là que Sophie serait intervenue.

Louisa - J’y suis : vous l’auriez fait passer pour votre femme !

Rémi - Voilà ! Vous voyez que vous comprenez vite quand vous voulez !

Louisa (mettant son index contre la tempe) - Oh ! mais y’en a là-dedans ! Faut pas croire !

Rémi - Je ne crois que ce que je vois, et comme je ne suis pas radiologue…

Louisa - Hum… Mais y’avait quand même un risque dans votre plan : Sophie aurait vraiment accepté d’être votre femme pour un soir ?

Rémi - Je pense que oui… Mais maintenant, il ne faut plus y compter !

Louisa - Non, vu qu’elle vous a laissé tomber…

Rémi - Merci de le rappeler.

Louisa - … comme une vieille chaussette.

Rémi - N’en rajoutez pas non plus !

Louisa - Je comprends mieux maintenant pourquoi son départ vous met dans cet état !

Rémi - Vous savez, je croyais qu’il y avait vraiment quelque chose de profond entre elle et moi.

Louisa - Vraiment ?

Rémi - Oui, enfin, ça aurait demandé à être creusé…

Louisa - Tout ça n’est pas si grave, vous n’avez qu’à lui téléphoner.

Rémi - A Sophie ?

Louisa - Non, on s’en fiche de Sophie désormais.

Rémi - Moi pas !

Louisa - C’est à votre Saumon qu’il faut téléphoner !

Rémi - Pour lui dire que je me suis trompé ? Qu’en y réfléchissant bien, je viens de m’apercevoir que je suis célibataire ?

Louisa -...

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