Un sacré cadeau

Le jour de son anniversaire, Alain reçoit un drôle de cadeau de la part de son beau-père : Une grosse caisse et à l’intérieur de celle-ci, Alex, qui devra se mettre au service d’Alain et exaucer tous ses désirs pendant une semaine. En dehors du fait qu’Alain n’est pas du tout demandeur de ce genre de cadeau qu’il trouve déplacé, Alex, le « cadeau » se montre d’une maladresse chronique en endommageant tout ce qu’il touche. Malgré sa bonne volonté, il ne met pas longtemps à énerver Alain mais aussi Mme Pointu, la femme de ménage ainsi que Flora, la belle-sœur d’Alain. Lorsque Roberto le footballeur, amoureux éconduit, de Flora déboule, il devient fou furieux car Flora lui fait croire qu’Alex l’a remplacé. En dépit du soutien de Nathalie, l’épouse d’Alain, et d’Alice, célibataire séductrice, qui aurait adoré recevoir Alex en cadeau, celui-ci devient peu à peu le bouc émissaire sur qui se déchaînent toutes les rancœurs jusqu’au moment où…

Situations burlesques, jeux de mots et personnages hauts en couleur ponctuent cette comédie où la tendresse et l’émotion finiront par côtoyer le rire.

ACTE I

Un appartement bourgeois. Sur scène, une grosse caisse, elle peut être entourée de papier kraft ou de papier cadeau. Alain arrive de l’extérieur.

ALAIN, avisant la caisse. – Qu’est-ce que c’est que ça ? Nous n’avons pourtant rien commandé. (Faisant le tour du colis.) Je me demande ce que ça peut être… Nathalie pourra certainement lever ce mystère. (Élevant la voix.) Nathalie ! Nathalie ! Tu m’entends ? Nathalie !

MME POINTU, sortant de la cuisine. – Pas la peine d’aboyer, nous ne sommes pas dans un chenil. Qu’est-ce qu’il y a Monsieur Alain ? C’est vous qui gueulez comme ça ?

ALAIN. – Je vous en prie Madame Pointu ! Sachez que je ne… Gueule pas, comme vous dites et j’aboie encore moins… Au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, je ne suis pas un chien... Mesurez un peu vos expressions tout de même !

MME POINTU. – Oh la la ! Ne vous fâchez pas pour si peu. Moi, je disais ça comme ça… Y a vraiment pas de quoi défriser un caniche. Si on ne peut plus rien dire dans cette maison… Y a plus qu’à se mettre des muselières pendant qu’on y est. (À elle-même.) En tous les cas, moi j’en connais un qui a vraiment un caractère de chien.

ALAIN. – Sans vous commander Madame Pointu, pourriez-vous, s’il vous plait, arrêter avec vos allusions canines.

MME POINTU. – Quelles canines ? De quoi vous me parlez ? Bientôt vous allez me dire que j’ai une dent contre vous ?

ALAIN. – Mais non, mais non… Laissez tomber Madame Pointu… Auriez-vous vu madame ?

MME POINTU. – Madame Nathalie ? Elle doit être par là. (Désignant la porte qui mène aux appartements.)

ALAIN, désignant la caisse. – Et ça ? Vous êtes au courant ?

MME POINTU. – Ah non… C’était déjà là quand je suis arrivée. J’espère que c’est la nouvelle machine à laver parce que celle qui est ici, elle n’essore plus rien. Si je veux que ça sèche, je suis obligée de tordre le linge avec mes petits bras et au bout du compte, c’est moi qui suis essorée, complètement rincée ! Si, je vous assure… Je ne sais pas pourquoi je continue à le faire… Ma bonté me perdra… Pour ce que je suis payée !

ALAIN. – Pour les réclamations, vous verrez cela avec madame. C’est curieux… L’adresse est à mon nom…

MME POINTU. – Et à tous les coups, vous n’avez pas commandé de machine à laver.

ALAIN. – Ben non.

MME POINTU. – J’aurais dû m’en douter ! De toute façon, ils ne pensent qu’à eux dans cette maison ! La mère Pointu, elle peut continuer à faire de la musculation avec le linge, elle peut bien se crever à la tâche, quelle importance ! Quand elle sera dans le trou, morte d’épuisement d’avoir trop travaillé, on en prendra une autre. Ce ne sont pas les femmes de ménage qui manquent. Je suis même bien sûre qu’ils ne prendront même pas le temps de venir à mon enterrement, ces ingrats.

Entrée de Nathalie pendant la réplique d’Alain.

ALAIN. – Soyez sans crainte Mme Pointu, je viendrai à votre enterrement et je fleurirai votre tombe avec de jolies fleurs. Des soucis par exemple, ça me rappellera le temps où vous m’en donniez… Ne faites pas cette tête-là, Mme Pointu, je plaisante !

NATHALIE. – Encore en train de vous chamailler tous les deux ! Et qui donc nous parle d’enterrement ? C’est vous, Madame Pointu? Que signifient ces inquiétudes irraisonnées ? Vous savez bien que vous avez une santé de fer.

MME POINTU. – C’est pourtant ceux qui ont une santé de fer qui bien souvent rouillent les premiers. Je ne vais pas rester perdre mon temps à bavarder, on pourrait ensuite me le reprocher. Je reviendrai quand vous aurez déballé votre colis.

ALAIN. – Ne vous faites pas trop d’illusions, je suis prêt à parier que ce n’est pas une machine à laver.

MME POINTU. – Eh bien, faudra en commander une vite fait sinon moi, je rends mon tablier et vous laverez votre linge sale en famille. (Elle sort.)

ALAIN. – Je ne sais pas comment tu fais pour la supporter cette vieille grincheuse. Il faut toujours qu’elle cherche à avoir le dernier mot.

NATHALIE. – Un peu comme toi, mon chéri. C’est probablement pour cela que vous vous provoquez sans cesse. Avoue, au moins, que tu n’es pas toujours le dernier à la chercher. Ne le nie pas, je te soupçonne d’adorer cela.

ALAIN. – Et toi, reconnais tout de même qu’elle est un peu brut de brut, cette chère Madame Pointu.

NATHALIE. – Chien et chat te dis-je ! Si elle n’était plus là, elle te manquerait.

ALAIN. – Je te laisse à tes élucubrations. Dis-moi plutôt qu’est-ce donc que ceci ?

NATHALIE. – Je n’en sais pas plus que toi. J’ai simplement remarqué que l’envoi t’était destiné, c’est pourquoi je me suis bien gardée de l’ouvrir.

ALAIN. – Je n’ai rien demandé. Qui donc peut bien m’expédier un tel colis ?

NATHALIE, lui tendant un papier. – Tiens, le livreur m’a laissé les coordonnées de l’expéditeur.

ALAIN. – Qui cela peut-il bien être ? Mais… C’est ton père ! Ton père ? Ça alors !

NATHALIE. – Je ne vois pas ce qu’il y a d’étonnant à recevoir un cadeau, surtout le jour de son anniversaire. Parce que je te rappelle que c’est aujourd’hui ton anniversaire. Tiens, je vais même prendre un peu d’avance… (Elle l’embrasse.) Bon anniversaire mon chéri ! Vivement ce soir afin que nous puissions le fêter comme il se doit.

ALAIN. – Un cadeau de mon beau-père ! Permets-moi de m’étonner. Tu connais nos rapports. Tu sais bien qu’ils ne sont pas toujours au beau fixe.

NATHALIE. – Je ne le sais que trop bien, mon cher petit mari misanthrope.

ALAIN. – Je ne suis pas du tout misanthrope, qu’est-ce que tu racontes !

NATHALIE. – Tu n’aimes pas Madame Pointu, tu n’aimes pas mon père et tu n’es pas misanthrope ?

ALAIN. – C’est pourtant simple à comprendre, j’aime bien les gens mais je n’aime pas les emmerdeurs, voilà tout ! Ceci dit, tu te trompes, je n’ai rien contre Madame Pointu sauf quand elle m’aboie dessus, quant à ton père, c’est différent… Mais avoue qu’il ne fait jamais rien pour m’être agréable.

NATHALIE. – Et c’est bien souvent réciproque… Mon petit mari, tu vois parfaitement la paille dans l’œil de papa mais la poutre qui est dans ton œil, tu ne la distingues jamais, n’est-ce pas ?

ALAIN. – Tout de même en plus de vingt ans de mariage, c’est bien la première fois que je reçois un cadeau de la part de ton père. Tu me permettras d’être méfiant. Connaissant ton père, ce n’est pas « plaisir d’offrir, joie de recevoir », ce serait plutôt : « plaisir de nuire, joie de décevoir »

NATHALIE. – Alain ! Tu es injuste !

ALAIN. – Tu entends ?

NATHALIE. – Non… Qu’y a-t-il ?

ALAIN. – Ça a bougé. Je t’assure, ça a bougé.

NATHALIE. – Tu crois ?

Ils dressent l’oreille en tournant autour de la caisse. Des bruits se font entendre.

ALAIN. – Tu entends ? Ça gratte et ça tape !

NATHALIE. – Qu’est-ce que ça peut bien être ?

ALAIN. – Comme c’est un cadeau de ton père et vu la taille du paquet, tout est possible. Un tigre, un doberman… Un gorille peut-être ? Tu entends ce bruit ?… En tous cas, moi je n’ouvre pas. Je vais retourner le colis à l’expéditeur, il n’aura plus qu’à le donner au zoo le plus proche.

VOIX DANS LA CAISSE. – Il y a quelqu’un ? Faites-moi sortir.

ALAIN. – Nathalie, tu as entendu cette voix ?

NATHALIE. – Evidemment que je l’ai entendue. Je trouve même que pour un tigre ou un doberman, il parle plutôt bien.

ALAIN. – Il y a quelqu’un dans cette caisse.

VOIX DANS LA CAISSE. – Oui, il y a quelqu’un. Ouvrez-moi !

Alain et Nathalie entreprennent de défaire l’emballage puis d’ouvrir la caisse. Alex apparaît alors, un joli ruban autour de la tête, il ressemble à un œuf de Pâques.

ALEX. – Bonjour ! Vous allez bien ?

ALAIN. – Qui êtes-vous ? Que faites-vous là ?

ALEX. – Je suis votre cadeau.

ALAIN. – Pardon ? Je ne comprends pas.

ALEX. – Je m’appelle Alex et je suis votre cadeau. Vous êtes Alain, je présume ?

ALAIN. – Oui, effectivement mais…

ALEX. – Je me suis rappelé de votre prénom parce que j’ai un frère qui s’appelle Alain comme vous.

ALAIN. – Ecoutez monsieur… monsieur ?...

ALEX. – Monsieur Térieur… Alex Térieur… Et je vous l’ai dit, mon frère s’appelle Alain comme vous.

NATHALIE. – Ah oui ! Alain Térieur. Vos parents avaient beaucoup d’humour.

ALAIN. – Certainement le sens de l’humour mais pas le sens du ridicule… Mais tout cela ne me dit pas ce que vous faites là, Monsieur Alex… Térieur ?

ALEX. – Je suis votre cadeau que je vous dis… D’ailleurs, si vous pouviez défaire le ruban, ça m’arrangerait… Tenez, tirez là ! (Alain défait le ruban.) Ah ! Merci ! Voilà, joyeux anniversaire de la part de Daddy, votre beau-père. Je sais, j’aurais dû attendre ce soir mais vous comprendrez que ce n’était franchement pas confortable de rester là dedans.

ALAIN. – Ecoutez… Vous êtes bien gentil mais je ne vous ai rien demandé, alors vous allez me faire le plaisir de dégager.

ALEX. – Ben non… Ce n’est pas possible.

ALAIN. – Mais si ! Vous allez voir que c’est possible, je vous laisse même le choix, soit par cette porte, ou si vraiment vous préférez, vous restez à l’intérieur et moi je vous réexpédie.

ALEX. – Alex, moi c’est Alex… Je vous l’ai dit, Alain, c’est mon frère… Non… C’est parce que vous avez dit : « Vous restez Alain Térieur… »

ALAIN. – Oui, oui… Ne vous fatiguez pas mon vieux, j’ai compris, vous faites des blagues super drôles et c’est pour ça que mon beau-père vous a embauché, pour essayer de me faire rire, eh bien bravo ! Alain Térieur, Alex Térieur… Très fin, très subtil… Si, si, je vous assure. Depuis que j’ai arrêté d’acheter des carambars, je n’en avais plus entendues d’aussi drôles. Vraiment hilarant… Rien que d’y penser, j’en rigole encore… Vous ne me croyez pas ? Alors soit, allons-y ! Démonstration : un, deux, trois : Ah ! Ah ! Ah ! Ah ! Voilà, c’est fait ! Vous m’avez entendu rire donc vous avez rempli votre contrat, vous pouvez partir la conscience tranquille… Maintenant je vais vous souhaiter une bonne fin de journée et nous en resterons là… Alors que décidez-vous ? Vous prenez la porte ou vous restez dans votre caisse en attendant que je vous réexpédie ?

ALEX. – Si je prends la porte, ça risque de faire des courants d’air.

ALAIN. – Mais c’est pas vrai ! Vous en avez encore beaucoup des blagues pourries comme celle-là ? (On sonne à la porte.) Quoi encore ?
Sans attendre qu’on vienne lui ouvrir, entrée de Daddy, il porte une petite valise à la main.

DADDY. – Bonjour, bonjour ! C’est moi ! (A Nathalie.) Tu vas bien, ma chérie ? (Il l’embrasse puis se tournant vers Alain.) Et vous mon gendre ? Vous allez bien ?

ALAIN, maussade. – Ouais.

DADDY. – Je constate que vous êtes toujours follement ravi de me voir, n’est-ce pas ?

NATHALIE. – Daddy, tu te fais des idées. Non… Nous sommes juste un peu surpris de te voir si tôt, nous ne t’attendions que ce soir pour fêter l’anniversaire d’Alain mais ce n’est pas grave, n’est-ce pas chéri ?

ALAIN, lugubre. – Ce n’est pas grave.

DADDY. – En fait, je voulais vérifier que mon cadeau était bien arrivé sans encombre mais je constate que vous n’avez...

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