Pauvres pêcheurs !

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Robert et Yvonne ne se supportent plus et se disputent à longueur de temps. À bout, Robert décide de faire une mauvaise blague à sa femme : disparaître pendant deux jours, histoire de provoquer chez son épouse un électrochoc susceptible de changer son humeur et la faire revenir à de meilleurs sentiments. Il parie même ses économies avec son ami et voisin Pierrot, qu’elle sera dans tous ses états, et s’en délecte à l’avance…Mais son plan va prendre une tournure imprévue. Qui va vraiment s’inquiéter ? En attendant, un plombier arrive au domicile pour réparer la douche, et va se trouver malgré lui mêlé à l’affaire. Mais il va peut-être profiter de s’engouffrer dans la faille, et saisir les occasions qui s’offrent à lui…et pas des moindres !

 

ACTE I

 

Yvonne est assise et feuillette nerveusement un magazine en soupirant. Robert entre, tenue et attirail de pêcheur.

Yvonne, désagréable. – Ah te voilà ! C’est pas trop tôt ! Alors, t’as pêché quoi ?

Robert. – Une vieille.

Yvonne. – C’est tout ??

Robert. – C’est mieux que rien !

Yvonne. – Elle est grosse au moins ?

Robert. – Non, d’ailleurs je l’ai relâchée, je sais que tu ne les manges pas, alors…

Yvonne. – Et alors, t’aurais pu la manger, toi !

Robert. – Oh tu sais, moi je me tape une vieille tous les jours déjà, alors j’ai ma dose.

Yvonne. – Ah qu’elle n’est pas originale celle-là ! T’es vraiment un goujat. T’as pas pris de bar ?

Robert, agacé. – Non, j’ai pris qu’une vieille, je t’ai dit ! Et en plus j’ai perdu un plomb.

Yvonne. – Ah bah bravo ! T’as plus qu’à prendre un rendez-vous chez le dentiste !

Robert. – Un plomb, que j’ai perdu ! Pas un plombage !

Yvonne. – Oui eh bien que ce soit l’un ou l’autre, peu importe, tu te débrouilles vraiment comme un gland !

Robert. – Je te remercie ! Très aimable. Comme d’habitude…

Yvonne. – Non mais c’est vrai ! Parti pendant 4 heures pour rien ramener, tu parles si c’est rentable !

Robert. – Je ne vais pas à la pêche seulement pour ramener du poisson.

Yvonne. – Ah bon ? C’est pour ramener quoi d’autre alors ? Des entrecôtes ?

Robert. – Non, c’est pour prendre l’air !! Si tu vois ce que je veux dire !!

Yvonne. – L’air, tu pourrais le prendre dans ton jardin ! Ça ferait pareil.

Robert. – Y’a pas le bruit de la mer dans le jardin. Même si tu es agitée et que tu fais de l’écume, ça m’procure pas les mêmes sensations du tout !

Yvonne. – Monsieur se croit drôle ! Bon, eh bien je n’ai plus qu’à me taire, comme d’habitude, et qu’à aller préparer à manger, encore comme d’habitude !

Robert. – Et qu’est-ce qu’on mange ?

Yvonne. – Du maquereau !

Elle claque la porte et sort côté cuisine.

Robert – Vipère… (Il décroche le téléphone et compose un numéro.) Allo ? Salut Pierrot, ça va ?... Ouais, bien, bien… Dis donc, je reviens de la pêche, là, si tu veux passer… Ah ben tu penses, j’ai pris 2 beaux bars ! Si tu veux les manger avec Monique… Hein… Nan nan, je préfère te les donner, au moins je sais que ça te fait plaisir… Mais non Yvonne n’en sait rien, t’es fou toi ? De toute façon elle a acheté du maquereau alors imagine !… Non mais t’as qu’à passer, je vais te les donner discrètement, ok ?... Allez à tout de suite…

Entrée de Claire et son amie Josy par la porte d’entrée.

Claire. – Entre Josy, ah tu es là papa !

Robert. – Ah Claire ! Viens embrasser ton vieux papounet ! (Elle s’exécute les yeux au ciel.) Bonjour Josy, ça va ?

Josy – Bof.

Robert. – Y’a longtemps qu’on t’a pas vue à la maison ! Comment ça va tes amours ? Ce gars, que t’avais rencontré sur… internet, c’est ça ?

Claire. – Euh, papa, c’est pas le moment…

Robert. – Comment il s’appelle déjà… Paul ? Hein ?

Josy. – C’est fini depuis un mois.

Robert. – Oh ben mince alors, moi qui me voyait déjà invité au vin d’honneur pour boire un coup !

Claire. – Papa…

Robert. – Bon, 1 de perdu, 10 de retrouvés, va… Qu’est-ce que tu lui as fait à ce pauvre garçon pour qu’il te laisse tomber ?

Josy. – Et qui vous dit que c’est lui qui m’a quittée ? Ce « salotard »! Ah ça y est, Claire, ça recommence…

Robert. – De quoi « ça recommence »?

Claire. – Bon, tu ne te moques pas, promis ?

Robert – C’est pas le genre de la maison !

Claire. – Josy a subi un traumatisme émotionnel à cause de sa rupture avec Paul. Elle recommence tout juste à ressortir de chez elle.

Robert. – Ah… Eh ben ?

Claire. – Depuis la séparation, elle ne peut plus faire de « p », le « p » de Paul. Enfin par moments, ça bloque. Ca ne sort pas…

Robert. – Comment ça, le pet ne sort pas ? C’est nouveau ça ! Tu sais que c’est mauvais pour la santé de retenir ses gaz, en plus !

Josy. – Claire, dis-lui…

Claire. – La lettre « p », papa !! Le « p » de Paul, elle ne peut plus prononcer son prénom, et sa bouche refuse de prononcer le « p » de tous les mots, c’est le choc qui a provoqué ça, c’est psychologique a dit le médecin, ça va revenir tout seul, mais il faut le temps. C’est le corps qui réagit à sa façon ! Alors c’est le « t » qui sort au lieu du « p », c’est comme ça.

Robert, légèrement moqueur. – Ah bon ? T’es une drôle de fille toi !

Josy. – Oui eh bien croyez moi, Robert, je m’en tasserai bien, de ce troblème !

Robert. – Oh la vache, dis donc ! C’est impressionnant ! (Il éclate franchement de rire.)

Claire. – Et voilà, tu te moques, t’es vraiment pas sympa !

Robert. – Oh le truc ! J’y crois pas dis donc ! (Il rit encore plus.)

Josy. – Oui bon ben ça va, c’est tas la teine de le crier sur les toits !

Robert s’esclaffe, plié en quatre, se moquant ouvertement d’elle en la pointant du doigt.

Josy. – Heureusement que je vous connais detuis que je suis toute tetite, je ne vous en tiendrai tas rigueur, mais j’aurai ma revanche un jour !

Claire – Allez, comme moi, il va s’habituer… De toute façon, je t’assure, Josy, au bout d’un moment on n’y prête même plus attention. Allez t’inquiète, tu le connais… laisse-le.

Robert. – Non mais dis-moi, Josy, en vrai, qu’est-ce qui s’est passé ? Claire disait que tu filais le grand amour avec Paul, alors… quoi ??

Josy. – Ah mais oui, tout allait bien ! Jusqu’à ce qu’il rencontre une « tétasse » ! (Robert essaie de se retenir de rire.)

Robert. – Ah le bougre… Donc il t’a quittée…

Josy. – Non, c’est moi. Je ne suis guère du genre « tartageuse ».

Robert. – Ah ma pauvre… mais bon, tu vas remonter la pente, je te connais.

Josy. – Oui je vais remonter la « tente », bien sûr, mais…

Robert. – Remonter la tente ! Idéal pour le camping ! Ah ah ah !! Oh pardon.

Josy. – Et voilà, vous vous moquez !

Robert. – Non mais avoue que c’est pas commun quand même !

Claire. – Bon allez viens Josy, t’occupe pas, va…

Josy. – Si tu crois que c’est facile…

Claire. – ça passera, le médecin te l’a dit, sois confiante, allez…

Sortie des 2 filles côté chambres. Robert rit tout seul, on sonne à la porte. Entrée de Pierrot.

Pierrot. – Alors mon ami, ça roule ? Ah ben t’as une mine réjouie, ça fait plaisir !

Robert. – Oh c’est Claire qui vient d’arriver avec une amie de longue date, j’ai passé un bon moment de rigolade, je t’expliquerai. Tiens, viens par ici, mon brave. Regarde, je te donne ça avant qu’Yvonne revienne, ils sont beaux non ? (Il lui donne le sac de poissons.)

Pierrot. – Wouah, les belles portions ! C’est drôlement sympa, merci !

Robert. – Au four avec des petites herbes, c’est super bon.

Pierrot. – Mais tu es sûr que tu ne veux pas les garder ? Yvonne en mangerait bien !

Robert. – Non, elle m’emmerde, j’ai pas envie de lui faire plaisir. Et toi, t’as pêché quelque chose hier, quand j’étais parti ?

Pierrot. – Pas une touche. Rien.

Entrée d’Yvonne porte cuisine.

Yvonne. – Ah, c’est toi Pierrot ? (Elle vient lui faire la bise.) Comment va notre voisin préféré ?

Pierrot. – Ça va. T’as le bonjour de Monique.

Yvonne. – Elle aurait dû venir avec toi !

Pierrot. – Elle est partie en courses. (Il tente gauchement de cacher le sac derrière son dos.)

Yvonne. – C’est Claire qui est rentrée ?

Robert. – Oui, avec Josy.

Yvonne. – Eh bien il y avait longtemps qu’on ne l’avait pas vue, elle… Je suppose qu’elles sont dans la chambre ?

Robert. – Elles cherchent le calme. C’est humain quand on entre ici. On recherche immédiatement où se cacher. Réflexe de survie ! (Yvonne le fusille du regard.)

Yvonne. – Mais t’as l’air bien embêté avec ton sac… Qu’est-ce que tu nous caches ?

Pierrot. – Ah ça ? Euh…

Yvonne. – Montre…

Robert. – Mais t’es pas gênée toi, de vouloir fouiner dans les affaires des gens !!

Yvonne. – C’est pas « des gens », c’est Pierrot !

Robert. – Fous-lui la paix, il n’a pas envie de te montrer !

Yvonne. – Bah bah bah, c’est quoi ces manières, allez, fais voir…

Robert. – Yvonne, je t’interdis !

Yvonne. – Oooh, tu m’interdis ! Comme c’est intéressant ! Tu sais que ça me motive encore plus !?

Pierrot. – Bon je vais vous laisser, moi vos disputes…

Yvonne. – Mais non Pierrot, t’inquiète pas, ton copain veut donner une bonne impression, mais je suis sûre qu’il meurt d’envie de voir ce qu’il y a là-dedans… Hein Robert ?

Robert. – Pas du tout. Je n’ai pas une curiosité déplacée comme la tienne. Tu es d’une impolitesse ! J’en ai honte !

Yvonne. – Allez fais pas ton timide. Montre !

Pierrot. – Euh… C’est-à-dire que… (Elle lui prend le sac des mains et l’ouvre, puis pousse un cri d’admiration.)

Yvonne. – C’est pas vrai !! 2 bars !! Superbes !! Tu les as pêchés hier ?

Pierrot, gêné. – Ah ça, ils sont tout frais.

Yvonne. – Et tu nous les apportes ? Ah t’es vraiment gentil, toi. Alors là, c’est pas Robert qui donnerait quoi que ce soit. Prends-en de la graine, toi ! Regarde-moi ça, ils les avait à peine en sa possession, qu’il vient nous les apporter !

Pierrot. – Ah ça, c’est vrai que je ne les ai pas eus longtemps…

Yvonne. – Tu es admirable. Quelle générosité !

Pierrot. – Oh, tu sais, j’ai pas de mérite…

Yvonne. – Modeste en plus ! Viens là que je te fasse une bise… (Elle l’attrape et l’embrasse.)

Robert. – Et moi j’ai pas de bise ?

Yvonne. – T’as du bar ? Non ? Ben voilà. T’es un perdant : pas de bar, pas de bise.

Robert. – Quel chameau tu fais ! Et s’il voulait les garder, hein ?

Yvonne. – S’il voulait les garder il ne serait pas venu ici avec ! Pas vrai Pierrot ?

Pierrot. – Euh…

Yvonne. – Alors ! Tu vois ! Tu réfléchis de temps en temps ?

Robert. – Oui, comme un miroir.

Pierrot. – Comment ça tu réfléchis « comme un miroir » ?

Yvonne, ignorant complètement la remarque de Pierrot. – Ouais, tu ne réfléchis pas beaucoup, c’est bien ce qu’il me semblait.

Robert – Ben ça dépend tout simplement de ce que j’ai devant moi !

Yvonne, elle se plante devant lui, le défiant du regard. – Eh bien vas-y, te gêne pas, ose ! Qu’est-ce que tu as devant toi ?

Robert, la regardant de haut en bas. – Le néant.

Yvonne. – Oh ! Alors ça, c’est petit… comme le reste d’ailleurs !

Pierrot, gêné. – Bon je vais vous laisser moi…

Yvonne. – Non non Pierrot, reste ! C’est moi qui décampe. J’ai de l’occupation.

Robert. – Pour une fois ! Ça te changera de d’habitude ! Ha ha, et qu’est-ce que t’as donc à t’occuper ?

Yvonne. – J’ai 2 beaux bars à avaler ! Bon courage Pierrot ! Et bonjour à Monique !

Sortie d’Yvonne.

Robert. – Je vais la tuer.

Pierrot. – Oh c’est pas grave, tu sais, c’est que du poisson…

Robert. – Je ne la supporte plus, elle me rend la vie impossible.

Pierrot. – Faut dire que t’es pas tendre non plus.

Robert. – C’est sa faute ! T’as vu comment elle me cherche ?

Pierrot. – Oui… Enfin c’est un peu réciproque on va dire !

Robert. – Tu prends sa défense ?

Pierrot. – Moi ? Alors là non, tu plaisantes, ah non alors là… et euh… (Essayant de changer de sujet.) Sinon, Claire, ça va ?

Robert. – Bah ouais, ça va, ça nous change un peu de l’avoir à la maison, mais elle est juste en transit pendant un mois, entre 2 apparts, tu sais, elle ne va pas rester… Mais on ne la voit pas beaucoup. Et puis vu l’ambiance dans la maison, je peux te dire qu’elle ne traîne pas dans les parages. Avec sa mère qui m’empoisonne la vie sans arrêt, ça se comprend ! J’en ai tellement marre qu’un de ces quatre, je vais me barrer, j’ te jure.

Pierrot. – Pff… Tu parles ! Et t’irais où ?

Robert. – J’sais pas, j’vais y réfléchir. J’pourrais me planquer dans mon gabion ! Mais elle me retrouverait vite fait.

Pierrot. – En supposant qu’elle te cherche, bien évidemment.

Robert. – Tu penses ! Elle serait perdue sans moi, oui !!

Pierrot. – T’en es sûr ?

Robert. – Ah que oui ! Elle pleurerait toute la journée, elle brûlerait des cierges pour que je revienne, pendant que moi, je siroterais tranquillement des bières sans entendre une seule réflexion, ah ça fait rêver, hein Pierrot ?

Pierrot. – Mouais, ben...

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