L’Art de la chute

Genres :
Thèmes : ·
Distribution : ·

Le deuxième tome de “L’Art de la Chute” réunit une vingtaine de textes courts à deux ou trois personnages.  Ces petits bijoux d’absurdité et d’humour, souvent grinçant, peuvent être autant des exercices à la disposition des comédiens, que des sketches à jouer. Avec ces situations savoureuses, Guy Foissy nous offre de nouveau son regard si particulier sur la vie. Et c’est une affaire à suivre…

L’Art de la chute

 

Un - Alors là, là, je suis tombé. Comme personne n’est jamais tombé.

Deux - Ça, ça m’étonnerait.

Un - Que voulez-vous dire ? Vous ne croyez pas que je sois tombé ?

Deux - Que vous soyez tombé, je le crois volontiers. Tout le monde tombe. Mais que vous soyez tombé, comme personne n’est jamais tombé. Ça non !

Un - Je vous assure bien que si !

Deux - Je vous assure bien que non. La preuve : moi je suis tombé de toutes les façons possibles et imaginables. Je dois être recordman.

Un - Vous monsieur ?

Deux - Moi monsieur !

Un - Ah là là… Quand vous serez tombé autant de fois que je suis tombé…

Deux - Laissez-moi rire.

Un - Moi, c’est bien simple, je tombe tout le temps. Et si vous me voyez debout, c’est soit que je vais tomber, soit que je viens de me relever…

Deux - Moi, monsieur, moi monsieur, mais moi en plus…

Un - Mais moi en plus, monsieur, je me fais mal…

Deux - Mais moi monsieur moi monsieur, j’allais le dire…

Un - Mais moi en plus moi en plus, j’ai de plus en plus de peine à me relever. Et je vois d’ailleurs venir le jour où je ne me relèverai plus du tout. Il arrive toujours un jour où on ne s’en relève pas.

Deux - Alors là moi alors là moi, je suis tranquille. Je ne m’en relèverai pas avant vous, c’est certain. Car non seulement, je fais entrer en ligne de compte le nombre de chutes, mais la qualité de la chute !

Un - Alors là, alors là monsieur, je ne vous crains pas là-dessus. J’ai fait les plus belles monsieur.

Deux - Et moi les plus bêtes.

Un - Et moi les plus sordides. Il m’est arrivé de tomber en beauté, monsieur, mais je suis tombé aussi dans la gadoue, dans la boue, dans la fange, dans l’ignoble, le puant, le purulent… oui, monsieur, plus d’une fois, il m’est arrivé de tomber dans la… oui monsieur… jusqu’au cou. Splaaaaash ! Pataugeant…

Deux - Mais moi, monsieur, moi monsieur, non seulement j’y suis tombé, non seulement j’y ai pataugé, mais en plus je m’y suis complu. (nageant-dansant) Splaaaaash ! Splaaaaaaaaaaaaaash ! …

Un - Vous avez vu cette cicatrice ? Là ? C’est quand je suis tombé sur un os. Et celle-là ? C’est quand je suis tombé sur un bec !

Deux - Et moi, celle-là, au front ? C’est quand je suis tombé dans le panneau ! Tête baissée ! Paf !

Un - Et moi, des chutes lamentables, monsieur, dérisoires, honteuses, médiocres, inavouables, ridicules, humiliantes, combien de chutes humiliantes, monsieur. Je tombe toujours mal.

Deux - Moins que moi, sûrement. Il m’arrive tellement de tomber comme des cheveux dans la soupe.

Un - Oui, mais moi, je tombe toujours à côté.

Deux - Oui, mais moi, je tombe toujours à plat.

Un - Paf je vise, toc je rate. Et même quand je ne vise pas, je rate.

Deux - Mais moi monsieur, moi monsieur, ce qu’il y a de terrible. De terrible. C’est qu’en plus, je suis heureux de tomber. J’en ressens une délectation. Morose certes, mais délectation quand même. Surtout quand je tombe de haut. C’est vertigineux.

Un - Ah monsieur… tomber sans avoir personne à qui se raccrocher.

Deux - On tombe au-delà du plaisir…

Un - Vous avez vu ce trou, là, oui, ce trou rectangulaire, à côté d’un autre trou rectangulaire, et puis… ?

Deux - Si je le vois ? Il me fascine…

Un - Vous aussi. Et bien regardez, vous allez voir comment on tombe plus bas que terre. Vous allez voir comment on rate sa sortie !

Deux - Méfiez-vous. Il est profond. On n’en revient pas.

Un - Taisez-vous, monsieur… la chute finale… le rêve, le fin du fin… en pleine jeunesse, ou presque. La dernière chute…

Deux - Mais vous êtes fou ! Ne faites pas de l’équilibre sur son bord !

Un - Irons-nous de conserve ?

Deux - Bien sûr…

Un - Vous voyez…

Deux - Avec joie… Mais qu’avez-vous ? Vous vacillez ? Un malaise ?

Un - Mais non mais non…

Deux - Vous n’allez quand même pas tomber dans les pommes !

Un - Non. Muet comme une tombe. Foudroyé. Le cour. Paf !

Il tombe.

Deux - Et voilà… Naturellement il a fallu que ce soit sur moi que ça tombe !…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Tête à quoi ?

 

Deux hommes.

Un - Écoutez monsieur, écoutez bien…

Deux - C’est ce que je fais. Et difficile de faire autrement.

Un - Et bien, en vérité…

Deux - Vous me le dites…

Un - Je vous le dis… Des coups de pied au cul, ça m’étonnerait que vous en ayez reçu autant que moi !

Deux - Pensez donc…

Un - D’ailleurs tout le monde le dit que j’ai une tête à coups de pied au cul.

Deux - Ce n’est pas une question de tête.

Un - Pensez donc !

Deux - C’est une question de personnalité. Voilà. De personnalité. Et moi, j’ai une personnalité à recevoir des coups de pied au cul. Pas seulement la tête, la personnalité !

Un - De tout le monde, moi monsieur, de tout le monde. Partout. A propos de tout. A propos de rien.

Deux - Pensez donc…

Un - Au boulot, tiens, mon patron, paf, viré, à coups de pied au cul, parfaitement. Ma femme, ma femme monsieur, paf ! Dehors ! A coups de pied au cul. Viré. Avec ma petite valise sur le palier. Va te faire botter le cul ailleurs, qu’elle m’a dit. Dès l’école, monsieur, dès la Maternelle. Et pourtant, à la Maternelle, c’est plutôt les fessées. Pas moi ! Paf ! Les pompes ! Dans la rue ! Combien de fois ai-je pu l’entendre cette phrase : « Vous voulez mon pied au cul ? » Dans le métro : « Si tu continues, tu vas avoir mon pied au cul ! » Au cinéma, au théâtre, au supermarché, au commissariat de police, eh oui, dès qu’on me voit, c’est l’idée qui vient. Paf ! Si j’avais pris la peine de compter depuis le début, on serait étonné du chiffre !

Deux - Pensez donc…

Un - On dit ça…

Deux - Ce n’est pas le nombre qui compte, c’est la qualité. Les coups de pied au cul, j’ai reçu les plus terribles, les plus brutaux, les plus sauvages, les plus violents, les plus humiliants, les plus définitifs, monsieur. Vous savez ce que c’est qu’un coup de pied au cul définitif monsieur ?

Un - Pensez donc ! Et les coups de pied au cul mortels ? Mortels monsieur ! De ceux qui tuent. Qui vous tuent. Tout. L’honneur. L’amour-propre. Qui vous tuent l’âme, monsieur. Partout où je passe, partout où je vais, partout où je suis, partout où je vis, ça se termine par une partie de coups de pied au cul. Et le cul de la partie, c’est toujours le mien. Et les pieds de la partie, c’est toujours ceux des autres.

Deux - Mais moi, monsieur, en plus, ils me font mal. Ce ne sont pas des coups de pied au cul symboliques. Ce sont des douleurs, des tortures, appliquées avec haine, pour faire souffrir. Souffrir ! Pour me faire souffrir, monsieur. Moi ! Moi…

Un - Et s’il n’y avait que ça…

Deux - Il n’y a pas pire que les coups de pied au cul.

Un - Il y a aussi les baffes dans la gueule. Les baffes, monsieur. Les paires de baffes, elles vont toujours par deux. Les paires de claques. Les paires de giffles, les crachats en pleine figure… Non seulement, il y a les coups de pied au cul, monsieur, mais il y a les baffes dans la gueule, les crachats dans la gueule, à croire que c’est vraiment une gueule qu’on a ! À croire, monsieur, que de la tête aux pieds, je ne suis qu’une cible à glaviots ! Et flop ! Une giclée ! Et paf ! Une baffe ! Et flop ! Re-giclée ! Et paf ! Et flop ! Et si tu n’es pas content, tu vas voir les coups de pied au cul !

Deux - Pensez donc ! Monsieur se pense unique ! Monsieur se pense le seul ! Et puis quoi encore ! Non mais sans blague ! On connaît ça. On connaît tout ça. Par cœur ! Avec en plus, les bousculades, les rentre-dedans, les ôte-toi-de-là-que-je-m’y-mette, les dégage, les tire-toi et tout le reste ! Vous vous croyez un prototype ! Non mais sans blague !

Un - Et s’il n’y avait que ça !

Deux - Je sais, il y a les insultes.

Un - Oui les insultes ! A toutes. Toutes j’ai droit ! Les plus incisives, les plus vulgaires, les plus vexantes, les plus blessantes, les plus meurtrières ! Jamais, jamais monsieur, un mot qui ne soit une blessure, qui ne soit une plaie ! Des mots frappants comme des coups de pied au cul !

Deux - Plus bas que terre, moi monsieur. On me traite toujours plus bas que terre. A se demander ce qu’on dira de moi quand je serai sous terre ! Comme de la merde, monsieur, et encore une merde, on y fait attention, on y prend garde, surtout quand on marche dedans. J’ai droit à tout, monsieur. A tout ! Alors, je vous en prie, ne me faites pas rigoler avec vos petits malheurs. La vie, on sait ce que c’est. Pensez donc…

Un - Et s’il n’y avait que ça…

Deux - Que voulez-vous dire ?

Un - Il y a les regards.

Deux - Non ! Ça non ! Je dis non ! Les regards, moi. Moi. Je ne supporte pas !

Un - Moi non plus, je ne supporte pas. Je meurs…

Deux - Moi aussi monsieur…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La bouffarde

 

Un banc. Un est assis. Il fume une énorme pipe d’où sort une fumée noire. Il s’applique avec conscience. Il tousse. Se lève. Se rassied. Fume. Étouffe. Refume… Entre Deux. La dégaine… Il porte un très gros carton à chapeaux. Hésite. Fait le tour du banc. Un est sur ses gardes. Un temps. Puis Deux s’approche…

Deux - C’est ici ?

Un - Quoi ?

Deux - Rien.

Un - Bon.

Deux - Soit.

Il s’assied. Un temps. Ils se surveillent. Un fume. Deux ouvre son gros carton à chapeaux, en sort des victuailles : énormes gâteaux surtout. Une bouteille. Commence à grignoter, puis franchement s’empiffre. Un fume avec âpreté. Puis… ils soufflent un peu…

Un - Dur dur…

Deux - Oh là là…

Un - A qui le dites-vous !

Deux - Vous permettez ? Il faut que je boive, sinon je cale. C’est plus fort que moi : je cale.

Un - Ne jamais caler, c’est la règle. Moi-même je…

Deux (le coupant) - Au bout d’un moment, j’ai l’impression…

Un - Moi-même je…

Deux (le coupant) - L’impression de manger du plâtre. Au bout d’un autre moment j’ai l’impression… l’impression de manger du ciment. Alors là, c’est plus fort que moi : je cale.

Un - Moi-même je… (Puis.) Du ciment ?

Deux - Armé.

Un - Mon Dieu…

Deux - Comme vous dites…

Il boit.

Un - Moi-même je…

Deux (le coupant) - Je bois, je souffle, et ça repart. Il faut savoir ce qu’on veut.

Un (vite) - Moi-même au bout d’un moment ça me brûle ! J’ai l’impression de fumer du piment.

Deux - Ouille ouille ouille ! ! ! Le piment ! Ne pas boire surtout !

Un - Non. Je vaporise. Vous permettez ?

Il se vaporise la bouche.

Deux - C’est quoi ? Un adoucisseur ?

Un - Oui. Une sorte de dépimentateur.

Deux - Il faut vraiment vouloir, le vouloir. Quelle vie… Vivement que ça vienne. Mon Dieu vivement que ça vienne. Et vite !

Ils recommencent.

Un - Vous… vous en mangez combien par jour ?

Deux - Cinq. À la crème.

Un - Cinq gâteaux ? Ce n’est pas tellement. Ça va être long pour vous.

Deux - Non ! Cinq cartons.

Un - Ah bon.

Deux - J’ai grossi de onze kilos.

Un - Ça ne se voit pas.

Deux - En cinq jours. Vous n’avez pas vu mes bourrelets ? Moi, qui était maigre comme une châsse. Mon taux de cholestérol a augmenté de 120 %, mes lipides de 80 %…

Un - Ah bon. Moi-même…

Deux - C’est parce que j’ai une certaine tendance à assimiler les graisses. Ma tension ne descend jamais au-dessous de vingt. Et vous-même ?

Un - Moi-même ?

Deux - Vous en êtes à combien ?

Un - De cholestérol ?

Deux - Non. De pipes ?

Un - Trois.

Deux - Trois pipes ? C’est peu. Vous n’y arriverez jamais.

Un - Trois kilos.

Deux - Trois kilos de tabac ?

Un - Trois kilos de tabac.

Deux - Chapeau bas.

Un - N’est-ce pas. Et pas du Virginie, du doux-doux-mentholé, mais de l’âpre, du dur, du sévère, de l’emporte-gueule, du brûle-gueule, du gris que l’on prend dans ses doigts. Avec un taux de nicotine approchant le seuil de fumabilité. Et des goudrons ! Un taux de goudron dépassant le seuil de goudronbilité ? Un demi-kilo de goudron par kilo de tabac. L’Enfer ! Sans compter le papier.

Deux - Non, avec la pipe, vous ne fumez pas de papier.

Un - Si.

Deux - Ah…

Un - Mélangé au tabac. Je maxe. Je malaxe. Je mixe.

Deux - Et… vous vous donnez combien de temps ?

Un - Pas longtemps…

Deux (doute) - Ah ?

Un - En tout cas moins longtemps qu’on ne le pense.

Deux - A peu près comme moi. A peu de choses près…

Un - L’embêtement c’est que, quand la fin approche, on réduit, par fatigue, alors ça se prolonge…

Deux - Moi non.

Un - On dit ça…

Deux - C’est différent. Avec les gâteaux, on arrive à surmonter l’écœurement. Donc, jusqu’au bout : plein régime. Et puis, on peut toujours se gaver de chantilly, en tube. Voyez-vous, c’est l’avantage sur la drogue : quand on arrête ça fait du bien. Jamais vu un drogué casser la vitrine d’un pâtissier pour voler un mille-feuilles !

Un - La drogue ! Quelle sottise !

Deux - Mourir en manque, vous avouerez quand même ! Moi j’ai choisi le sucre ! Et pourtant… attendez… Vous allez rire… il y a quelques années… j’avais suivi un régime amaigrissant, j’ai failli en crever.

Un - Et bien il fallait ! Pourquoi avez-vous arrêté ?

Deux - A l’époque je n’avais pas envie. J’étais amoureux…

Un - Ah !… L’amour ! L’amour ! C’est tout l’un ou tout l’autre, jamais tous les deux.

Deux - De la fille de ma concierge.

Un - C’est bien, c’était sur place, c’était plus pratique. Elle en a préféré un autre ?

Deux - Non… La différence d’âge. Il aurait vraiment fallu attendre trop longtemps.

Un - Mais après, quand vous avez voulu, pourquoi n’avez-vous pas gardé le même système, puisque vous saviez ?

Deux - J’y ai pensé… mais… vous allez me trouver bien épicurien… j’ai pensé que ce serait plus agréable de se faire éclater la panse que de faire la grève de la faim.

Un - Ça… la grève de la faim, on ne rigole pas tous les jours…

Deux - Là non plus, d’ailleurs…

Un - Oh non… la mort n’est jamais très drôle, quoi qu’on dise…

Deux - Alors, des fois, pour mettre un peu de piquant, je vais chez un autre pâtissier.

Un - Mais dites-moi… ça doit coûter cher tout ça…

Deux - Mourir devient hors de prix, cher monsieur, mourir devient un luxe réservé aux riches.

Un - Pas forcément. Par exemple, avec mon système, on peut ramasser les mégots. C’est ce que je fais parfois. A la fin du mois. En plus, on risque d’attraper une sale maladie. Deux chances valent mieux qu’une… Mais on parle… on parle…

Deux - Et pendant ce temps, on se relâche.

Ils fument ou mangent avec avidité.

Un (entre deux bouffées) - Remarquez… Remarquez…

Deux (la bouche pleine) - Vous disiez ?

Un - Finalement…

Deux (qui avale) - Excusez… La bouche pleine impossible d’employer des mots en P, ni même en fe (feu), ni même en che (cheu) ! Ça ppppppprojette, ça chuinte, ça fffffuit, ça fffffuse ! Le papa du papy du pape Paul a pompé le pipeline du pompier. Flash ! Splaaaaash ! ! !

Il remange.

Un - C’est une sacrée bonne idée d’avoir créé ce lieu…

Deux (avale, vite) - Vous trouvez ?

Un - Un lieu où se retrouvent… les candidats…

Deux - C’est joli ça, les candidats. Dans candidat, il y a candide, il y a candeur. Il y a aussi candélabre.

Un - On aurait pu lui trouver un nom… le Jardin du Dernier Chemin… je ne sais pas… le Jardin du Grand Départ… le Jardin des Adieux… au lieu d’appeler ça le Jardin tout court.

Deux - Notez que ce n’est pas le jardin qui nous est réservé, mais ce banc. Juste un banc, il ne faut rien exagérer. Et puis le Banc du Dernier Chemin ça ferait…

Un - Vous avez raison. Et puis un banc, ce n’est déjà pas si mal. Nous ne sommes pas si nombreux.

Deux - C’est facile à compter : nous sommes deux.

Un - Moi, voyez-vous, je trouve ça bien de limiter, d’imposer des conditions, des restrictions, des règles enfin, comme dans un club. Sinon, vous verriez, on aurait droit aux coups de revolver, aux strangulations, aux égorgements, aux pendaisons, aux poisons imbéciles qui vous font râler de douleur pendant des heures interminables. Non… emplacement réservé à la douceur, à la durée, à la dignité. Voilà : la dignité. Rien que des produits naturels que tout le monde utilise. Le droit à partir dans la dignité.

Deux - Pour la dignité ! Merci…

Un - Que voulez-vous dire ? Vous ne trouvez pas que nous sommes dignes ? Vous m’inquiétez…

Deux - Nous, si. Mais les autres ? Ceux qui nous zieutent, qui prennent des photos ? Le dimanche, c’est insupportable, les parents qui amènent leurs enfants, comme au zoo, comme à Guignol : « Tiens, regarde le monsieur en train de se suicide… » Quelle misère… Dimanche dernier, on m’a offert vingt-neuf bonbons. C’est-à-dire vingt-neuf fois un bonbon… que j’ai mangé. Tant qu’à faire… Et les gens qui vous demandent une interview, une déclaration, qui veulent enregistrer la dernière tirade, les derniers mots, le dernier souffle, le dernier cri, quand il y a un dernier cri. Ou qui simplement viennent rigoler sous votre nez. C’est tout juste s’ils ne vous piquent pas vos gâteaux !

Un - Quelle horreur ! Vous êtes trop sensible…

Deux - C’est bien pour ça que j’en suis là. Quand on n’est pas sensible on continue à vivre.

Un - Mais non… ce serait sinistre de rester chez soi. On risquerait d’abandonner. Vous vous voyez devant votre armoire à glace, vous empiffrant avec désespoir ? Ici au moins on se rencontre, on se retrouve, on échange, on s’encourage, on fait un bout de chemin ensemble. C’est bon ça de faire un bout de chemin ensemble avec d’autres soi-même. Ça compte la convivialité, surtout au stade où nous en sommes.

Deux (boudeur) - Je ne dis pas.

Un - Franchement, cher monsieur, cher collègue, cher confrère, cher concitoyen, cher correligionaire, cher con ? … cher con ? … cher ami, n’est-ce pas important et agréable d’être là, côte à côte…...

Il vous reste 90% de ce texte à découvrir.


Achetez un pass à partir de 5€ pour accédez à tous nos textes en ligne, en intégralité.




Retour en haut
Retour haut de page