Chiche, t’es pas cap !

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Louise, jalouse comme un tigre, est persuadée que son mari, commercial, la trompe avec ses clientes. Devant le refus d’Adrien de l’emmener en tournée, elle menace de le tromper avec le premier homme qui franchira le seuil de la maison. Adrien, qui n’a rien à se reprocher, se promet d’en faire autant avec la première femme qui poussera la porte de la maison…
Le problème, c’est que dans leur petite commune, il y a peu de chances de voir débarquer, en plein repas de midi, George Clooney et Penélope Cruz, mais plus facilement le facteur qui vient déposer un colis… et l’envahissante voisine qui vient apporter quelques poireaux, histoire de discuter un peu. Pas vraiment les visiteurs espérés… Et comment ne pas perdre la face en renonçant aux promesses faites sous le coup de la colère ? Reste à jouer le jeu sans trop savoir où tout ça les mènera, en espérant que personne d’autre n’interviendra dans cette histoire…

Liste des personnages (7)

AdrienHomme • Adulte • 194 répliques
Commercial chez Sérénade, fabricant de lingerie fine.
LouiseFemme • Adulte • 194 répliques
Compagne d’Adrien. Excellente cuisinière mais jalouse comme un tigre.
MaximeHomme • Adulte • 156 répliques
Facteur très consciencieux. Célibataire, vit chez sa mère.
YvetteFemme • Age indifferent/Senior/Adulte • 142 répliques
Voisine d’Adrien et de Louise. Veuve un tantinet envahissante et bavarde.
JeanineHomme • Adulte • 71 répliques
Pompier bénévole de la commune. Bien connue de tous.
HélèneFemme • Senior • 70 répliques
Mère de Maxime.
ThibaudHomme • Senior • 80 répliques
Père de Maxime. Syndicaliste de la poste. A quitté la mère de Maxime pour une collègue syndicaliste.

Décor (1)

DécorL’action se déroule de nos jours, quelque part dans une petite localité en France. Un salon-cuisine assez moderne. À gauche et au fond de la scène, un escalier monte vers les quelques chambres de l’étage. Au fond et au centre de la scène, une porte donne sur l’arrière de la maison et le jardin. À gauche, près de l’escalier, une autre porte communique avec la chambre des propriétaires. À droite de la scène, mais plus au premier plan, la porte du bureau d’Adrien. Prévoir une porte de placard.

 

Acte I

Un salon-cuisine à l’heure du déjeuner. Adrien est attablé et s’apprête à manger. Il prend bien son temps, se sert un verre de vin, pose sa serviette sur ses genoux et positionne ses couverts de chaque côté de son assiette, tout ça sous le regard agacé de Louise, sa compagne.

Louise, agacée. — T’attends quoi pour goûter mon navarin d’agneau ?

Adrien. — Deux minutes, on n’est pas aux pièces. Et puis, eh, il ne va pas se barrer de la casserole, ton navarin !

Louise. — Quand je pense au temps passé à te préparer des bons petits plats et quand je vois l’empressement dont tu fais preuve pour les consommer, ça me met hors de moi !

Adrien. — T’énerve pas, ma Louise, je suis prêt. J’y goûte.

Il commence délicatement à manger. Louise le suit des yeux en mimant chaque mouvement de sa mâchoire.

Louise, impatiente. — Alors ?

Adrien, la bouche pleine. — Alors quoi ?

Louise, attendant un compliment. — C’est bon ?

Adrien. — Laisse-moi le temps d’avaler la première bouchée. (Ce qu’il fait. Louise déglutit en même temps que lui.)

Louise, encore plus impatiente. — Alors, c’est comment ?

Adrien. — C’est pas mauvais.

Louise, outrée. — Comment ça, c’est pas mauvais ? C’est tout ce que tu trouves à dire de mon navarin d’agneau que je t’ai mijoté avec amour pendant plus de trois heures ?

Adrien. — Je veux dire que ça change de ton éternel bœuf miroton.

Louise. — Dis carrément que tu en as marre de ma cuisine, tant que tu y es !

Adrien. — Je n’ai pas dit ça… (Se rattrapant.) Et ta sauce est particulièrement bien réussie.

Louise, s’énervant. — Une cuisinière, rien de plus… Voilà ce que je suis pour toi.

Adrien. — Mais non, mais non. Ne te fâche pas, Louise.

Louise. — Jamais mon ex ne m’aurait traitée comme tu le fais. Il ne me méprisait pas, lui ! Et il appréciait ma cuisine, lui !

Adrien. — Il ne te méprisait peut-être pas, mais pour un fan de tes fourneaux, il t’a quand même laissée tomber comme une vieille chaussette, ton ex ! Et pour se coller avec une serveuse de chez McDo. Excuse du peu.

Louise. — J’étais sûre que tu me reprocherais d’avoir connu un autre homme avant toi.

Adrien. — C’est toi qui me parles sans arrêt de lui. Moi, j’en ai rien à fiche de ton ex !

Louise. — En fait, ma vie ne t’intéresse pas… Du moment que tu peux mettre les pieds sous la table et manger ce que bobonne t’a préparé, le reste t’importe peu.

Adrien, calmant le jeu. — Louise, tu es une femme épatante, une cuisinière hors pair…

Louise. — On ne dirait pas quand on voit la tronche que tu tires devant mon navarin d’agneau…

Adrien. — Une compagne très agréable… (Fort.) Mais tu as un caractère de cochon !!!

Louise, faisant feu de tout bois. — Tu ne me supportes plus, c’est ça ? Voilà pourquoi tu pars toute la semaine pour ne revenir à la maison qu’au week-end suivant !

Adrien. — Louise, je suis commercial chez Sérénade, le fabricant de lingerie fine, et mon secteur d’activité va de la Vendée à la Normandie…

Louise. — Tout de suite les alibis pour te justifier !

Adrien. — Je ne vais quand même pas quitter la Vendée à 7 heures du matin pour aller vendre une centaine de petites culottes et autant de soutiens-gorges dans le haut du Cotentin, et rentrer dormir le soir à la maison !

Louise. — Toutes les excuses sont bonnes pour aller les retrouver…

Adrien. — Retrouver qui ?

Louise. — Tes maîtresses ! Toutes ces blondes que tu rencontres dans ta clientèle !

Adrien. — Louise, il n’y a aucune blonde parmi mes clientes ; pas plus que de brunes, d’ailleurs.

Louise. — Ou des rousses ! Il n’y a pas pire que des rousses pour faire tourner la tête d’hommes tels que toi. D’ailleurs, ton ex-femme était rousse, non ?

Adrien. — Oui, et alors ? Je ne vois pas le rapport.

Louise. — Le rapport, c’est que tu cherches à la retrouver sous les traits d’une autre.

Adrien. — Ma pauvre Louise, tu me fais de la peine. Si c’était le cas, je t’aurais demandé de te teindre les cheveux il y a belle lurette.

Louise. — Dis carrément que je suis folle !

Adrien. — Par moments, je me le demande. En tout cas, tu es terriblement jalouse et tu deviens impossible à vivre.

Louise, pressante. — Emmène-moi en tournée avec toi.

Adrien. — Pour que tu regardes mes clientes de travers ? Pas question !

Louise. — J’en étais sûre… (Faussement larmoyante.) Tu ne tiens pas à me montrer tes conquêtes, c’est ça ?

Adrien. — Mais qu’est-ce que tu vas chercher ?

Louise, grandiloquente. — Je sais que ce jour viendra… où tu partiras un lundi matin en m’embrassant furtivement sur le front… pour ne pas revenir le vendredi soir… alors que moi, je t’attendrai à la porte du garage, épouse fidèle attendant le retour de son mari comme la femme du pêcheur attend le retour du sien après une violente tempête en mer…

Adrien. — Louise, arrête ton cirque ! Non seulement j’en ai marre de tes comédies, mais en plus ton navarin va être complètement froid et carrément indigeste.

Louise. — Adrien, pour la dernière fois : emmène-moi avec toi la semaine prochaine.

Adrien, ferme. — Non, c’est non !

Louise. — Je te préviens que si tu ne m’emmènes pas avec toi, je suis prête à toutes les folies ! (Menaçante.) Alors ?

Adrien. — Alors… rien !

Louise. — Tant pis pour toi, tu l’auras voulu.

Adrien, un peu inquiet. — Que vas-tu faire ?

Louise, ménageant le suspense. — Tu le sauras toujours assez tôt.

Adrien, de plus en plus inquiet. — Tu ne vas quand même pas mettre fin à tes j…

Louise. — Pour te laisser le champ libre afin que tu puisses courir la gueuse tout à ton aise ? Certainement pas ! Je vais te remplacer toute la semaine et meubler ton absence.

Adrien. — Tu veux prendre un amant ?

Louise. — Un amant doublé d’un gastronome culinaire.

Adrien. — Et tu vas la trouver où, cette perle rare ? Ça ne doit pas courir les rues.

Louise. — Si je suis tombée amoureuse de toi, je suis parfaitement capable d’aimer le premier clampin venu.

Adrien. — Chiche ?

Louise. — Ne me pousse pas à bout. (Doigt tendu.) Tu vois cette porte ? Le prochain bonhomme qui en franchit le seuil, j’en fais mon affaire !

Adrien. — Tu me remplacerais, comme ça, de but en blanc, par n’importe quel pingouin ?

Louise. — Sans aucun remords, et je n’aurai pas grand peine à trouver mieux que toi.

Adrien. — Eh bien, dans ce cas, œil pour œil, dent pour dent ! La prochaine femme qui entre ici, je me la prends comme maîtresse… Rousse ou pas !

Louise. — Il te les faut toutes ! Tu es un vrai chien en rut.

Adrien. — Une seule me suffira pour que tes reproches vis-à-vis de moi soient au moins justifiés. (Louise prend une chaise et s’assoit face à la porte.) Qu’est-ce que tu fais ?

Louise, très digne. — J’attends mon destin.

Adrien, même jeu qu’elle. — Eh ben, dans ce cas, moi aussi j’attends le mien. (Silence entre eux. Ils se regardent en chiens de faïence. Ils sursautent au moindre bruit venant de l’extérieur. Adrien regarde sa montre.) Ça peut durer longtemps, cette histoire, on ne voit pas grand monde en journée.

Louise. — M’en fiche, j’ai l’habitude d’attendre. (On sonne à la porte. Ils sursautent.) Tu ne veux toujours pas m’emmener avec toi ?

Adrien, ferme. — Nan !

Louise. — C’est ton dernier mot, Adrien ?

Adrien. — C’est mon dernier mot, Louise.

On sonne à nouveau.

Louise. — Tu l’auras voulu. (Fort.) Entrez !

La porte s’ouvre, livrant le passage au facteur.

Adrien et Louise, ensemble. — Le facteur !

Maxime. — Eh ben, dites donc, j’ai l’impression d’être attendu comme le Messie !

Louise, se levant. — Tu ne crois pas si bien dire, mon petit Maxime.

Maxime. — Fallait pas me faire une haie d’honneur pour autant. Pour un peu, j’aurais eu droit à la fanfare !

Louise, enthousiaste. — Rien n’est trop bien quand on a la chance d’avoir un facteur tel que toi.

Maxime, fier. — Avec Maxime comme postier : disponibilité, efficacité, discrétion assurée…

Adrien. — Au lieu de faire le bravache, tu ne pouvais pas déposer le courrier dans la boîte aux lettres, comme d’habitude ?

Maxime, tendant un colis. — Colis de chez Nozama… Ça sentait l’urgence, alors disponibilité, efficacité… Pour vous, madame Louise.

Louise, séductrice, prenant le colis. — Merci, mon petit Maxime, tu es un amour.

Adrien, le reconduisant vers la porte. — Il serait peut-être temps que le petit amour reprenne sa tournée… Et puis, y a la voiture jaune de la poste qui doit être mal garée devant la maison.

Maxime. — Risque pas, je suis venu en vélo. (Tête des deux autres.) Que je vous explique… Normalement on fait grève aujourd’hui, alors tous les véhicules sont bloqués sur le parking du centre de tri.

Adrien. — Vous faites grève ? C’est pas possible !

Louise. — C’est le destin, mon pauvre Adrien. On ne peut rien contre lui.

Adrien. — Et précisément aujourd’hui ?

Maxime. — Trop de cadences infernales. On n’a même plus le temps de lire les cartes postales en triant le courrier.

Adrien. — Mais pourquoi tu ne fais pas grève avec les autres ? La solidarité avec les camarades, t’en fais quoi ?

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