Luce et les choses

Luce a une vision étrange : quand elle regarde un objet trop longtemps, elle prend sa forme. Un jour, le monde de Luce s’obscurcit : on veut lui enlever le pouvoir de ses yeux, couper le lien magique qui la relie aux choses. Ses parents et le médecin veulent la guérir de cette “maladie inconnue”, qui les effraie tant elle bouleverse l’ordre des choses. Quand Luce rencontre d’autres êtres singuliers, elle comprend qu’il est temps de partir. Mais Luce se connaît-elle assez pour affronter le monde? Est-elle folle comme ils le disent ? Ne s’est-elle pas égarée dans son rêve ?

Intérieur, matin. Les parents se lèvent et se préparent. Un cintre tombe, Luce entre. Le narrateur joue avec un tissu bleu.

Tout a commencé par un regard un peu long. Luce a plongé ses yeux noirs dans le ciel bleu et son iris peu à peu est devenue claire. Elle a maintenu le regard. Puis c’est sa peau, qui sans un bruit est devenue bleue. Soudain, Luce était profonde et bleue comme le ciel.

C’était une maladie encore inconnue : se perdre dans un regard. Les médecins étaient en colère, les parents de Luce étaient en colère. Tu trouves
toujours un moyen insensé pour bouleverser l’ordre des choses. Mais Luce, elle, n’était
pas en colère. Cela lui plaisait follement de refléter le bleu. Luce, elle, profitait de ce cadeau revenu depuis l’enfance : devenir ce qu’on regarde. Luce était ravie d’avoir été ravie par le bleu.

C’était un ravissement perdu depuis qu’on lui avait demandé de se distinguer, de
s’écarter, de taire le lien qui la reliait aux choses. Luce, toute bleue, souriait. Tout lui sembla de nouveau source de jeu et de lumière.

« Symptôme inconnu », elle répétait ces mots comme on répète un sortilège. Dans ces mots étaient contenus leur mal et sa joie.

Scène 1....

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