Mystère au manoir Vallandry

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La vieille Éléonore Vallandry mène son petit monde à la baguette. Elle ne donnera pas un sou à son fils aîné qui se débat pour sauver son entreprise ni à son fils cadet qu’elle menace d’expulsion. Elle est ignoble avec ses belles-filles et ne ménage pas son aide à domicile. Pourtant elle convoque la police, car elle a une révélation à faire… En veut-on à son héritage ou à ses rubis qu’elle ne retrouve plus ?
Une enquête est menée tambour battant par une policière stagiaire, fan de séries télé, aux méthodes musclées, et une commissaire pragmatique, mais plus efficace.
Comme dans les romans d’Agatha Christie, tous les personnages seront suspects. Saurez-vous trouver qui est coupable avant la fin ?

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Mystère au manoir Vallandry

Acte I

Scène 1 : Nathalie, Jean-Baptiste
puis William.

Nathalie et Jean-Baptiste entrent du couloir.

Nathalie est assez agressive ; Jean-Baptiste, dès qu’il cite un proverbe, le déclare comme une vérité inébranlable.

Nathalie. — Jean-Baptiste, tu n’es qu’une chiffe molle ! Tu n’as jamais eu le courage d’affronter ta mère, mon chéri !

Jean-Baptiste. — Pourquoi l’affronter, Nathalie ? N’oublie pas, c’est écrit dans la Bible : « tu honoreras ton père et ta mère ».

Nathalie. — Oui, mais là, ta mère, elle vient de nous planter un couteau dans le dos !

Jean-Baptiste. — « Personne ne peut se défendre contre la trahison », proverbe allemand. Maman nous a tout de même beaucoup aidés, depuis le début !

Nathalie. — Beaucoup aidés ! Tu te moques de moi ! Tout est toujours pour ton frère William ! Je suppose que c’est parce qu’il est l’aîné et le préféré, surtout. Toi, comme à chaque fois, tu ne récoltes que les miettes !

Jean-Baptiste. — « Qui sème le vent récoltera… un rhume ! » (Il rit.) Chérie, elle nous laisse tout de même habiter un appartement de deux cent cinquante mètres carrés à Paris, avenue de Wagram !

Nathalie. — Qui ne nous appartient pas, je te le rappelle ! Jean-Baptiste, je perds patience.

Jean-Baptiste. — N’oublie jamais : « la patience est la clé de… de l’appart » ! (Il rit de sa blague.)

Nathalie. — Oui, oh ! Toi et tes proverbes… Vingt ans que nous habitons là-bas, et Mme Éléonore Vallandry, ta mère, veut nous virer comme des moins que rien !

Jean-Baptiste. — « Si tu es moins que rien, c’est déjà quelque chose. » Maman nous propose de racheter l’avenue de Wagram, ce n’est pas pareil !

Nathalie. — Un appartement dans le huitième arrondissement, qui cote, au bas mot, un million six. Elle sait très bien que l’on ne peut pas l’acheter. Donc, elle nous vire !

Jean-Baptiste. — C’est bien pour ça que nous sommes venus au manoir, ce week-end. « Le dialogue est notre arme la plus forte », proverbe africain.

Nathalie. — Le dialogue ! Toi, le froussard qui perd sa contenance dès qu’il doit demander quelque chose à maman ! Quand vas-tu te décider à lui en parler ?

Jean-Baptiste. — Aujourd’hui, chérie. Je t’en donne ma parole.

Nathalie. — Ta parole, ta parole… Ton proverbe préféré, ce ne serait pas plutôt : « pourquoi remettre à demain ce que l’on peut faire après-demain » ?

Jean-Baptiste. — Comme disent les Finlandais : « un homme doit tenir à sa parole comme un bœuf à ses cornes » !

Nathalie, se moquant de lui. —Tu fais bien de te comparer à un bœuf, mon chéri. Parce que les bœufs sont castrés et, comme eux, il te manque une sacrée paire qui te donnerait du courage !

Jean-Baptiste. — « Le train de tes injures roule sur les rails de mon indifférence et vient se heurter au butoir de mon mépris. »

Nathalie. — Moi, au moins, avec ta mère, je suis rentrée dans le vif du sujet dès hier soir !

Jean-Baptiste. — Ah oui ! Parlons-en de l’esclandre que tu as fait après le dîner ! C’était d’une violence ! Un Chinois te dirait : « la concorde attire le bonheur, la discorde donne naissance au crime ».

Nathalie. — Je voulais qu’elle comprenne notre mécontentement.

Jean-Baptiste. — « Qui sème la violence finit… dans l’ambulance. » Tu as même osé lui dire : « Vous n’avez pas envie d’aller rejoindre votre mari ? »

Nathalie. — Exactement ! Qu’elle aille le rejoindre au caveau familial !

Jean-Baptiste. — Nathalie, quand même ! « Laisse les vivants en paix et les morts en repos », proverbe danois.

Nathalie, comme une évidence. — Éléonore et Octave ont toujours tout fait ensemble, alors là aussi elle aurait dû faire comme son mari : un bon arrêt cardiaque !

Jean-Baptiste. — Papa n’est pas enterré depuis quatre semaines que tu souhaites déjà la mort de maman !

Nathalie. — Quand on arrive à un certain âge, il faut être raisonnable ; passé quatre-vingt-dix ans, on arrête d’ennuyer ses enfants et petits-enfants. On fait comme tout le monde : on glisse sur un tapis ou on oublie de respirer ! Elle nous avait promis qu’un jour cet appartement serait pour nous : « Je vous le léguerai à ma mort », avait-elle dit. Tu parles, elle veut le revendre de son vivant alors que nous y habitons encore.

Jean-Baptiste. — Tu sais qu’elle aime spéculer. Elle vend par-ci, elle achète par-là. Et « qui aime spéculer… aime les spéculoos ». (Il rit bêtement.)

Nathalie. — Et tu trouves le moyen de plaisanter, toi ! Ne lui trouve pas d’excuses, s’il te plaît. Spéculer à quatre-vingt-onze ans… C’est vraiment pour nous emmerder ! Comment peut-on vouloir amasser encore plus de fric, à cet âge ?

Jean-Baptiste. — Que veux-tu, elle a toujours été comme ça ! « Il faut bien que vieillesse se passe ».

Nathalie. — Avec ses goûts de luxe, elle veut peut-être se faire faire un cercueil en or avec des poignées en argent !

Jean-Baptiste. — Pourtant : « on n’a jamais vu un coffre-fort suivre un corbillard » !

Nathalie. — En fait, une boîte en carton avec quatre poignées en bois, ce serait moins cher et c’est plus écolo !

Jean-Baptiste. — Chérie ! Respecte maman, s’il te plaît ! « Qui dépasse les bornes n’a plus de limites. »

Nathalie. — Tout ça pour nous laisser des clopinettes !

Jean-Baptiste. — « Plaie d’argent n’est pas mortelle. »

Nathalie. — Oui, mais : « sans argent, va au motel ». Moi, je pense qu’elle va refiler cet argent à ton frère. J’ai cru comprendre que sa société est au plus mal. (William entre de son bureau.) Ah ! quand on parle du loup…

Jean-Baptiste. — … on fait peur aux enfants !

Nathalie. — Quoi ? Qu’est-ce que tu racontes ?

Jean-Baptiste. — Eh bien, oui : « quand on parle du loup, on fait peur aux enfants » !

Nathalie. — Non, c’est : « quand on parle du loup, on en voit la queue ».

William. — Qu’est-ce que vous dites ?

Jean-Baptiste. — Non, rien ! Nathalie vient de constater : « ta braguette est ouverte ».

William, regarde sa braguette. — N’importe quoi ! Bonjour, Jean-Baptiste !

Jean-Baptiste. — Bonjour, William. (Ils se font deux bises.)

William. — Bien dormi ?

Jean-Baptiste. — « Celui qui ne dort que d’un œil ne dort pas sur ses deux oreilles. »

William. — Et « celui qui sort des proverbes dès le matin va bien énerver son frangin ». Salut, Nathalie !

Nathalie, recule. — Je ne suis pas sûre de vouloir saluer un traître…

William. — Qu’est-ce qui te prend ?

Nathalie. — Ne fais pas celui qui ne comprend pas. Laisser ta mère nous jeter à la rue pour renflouer ton entreprise, c’est très petit, William. (Elle sort côté couloir.)

William. — Qu’est-ce qu’elle a ? À mon avis, cela fait trop longtemps que tu ne l’as pas fait grimper aux rideaux !

Jean-Baptiste. — « À cheval hargneux, il faut une étable à part. » Je vais au petit déjeuner ! Tu viens ?

William. — Non ! Je n’ai pas très faim !

Jean-Baptiste. — Pourtant « l’appétit vient en mangeant ». (Il sort côté couloir.)

Scène 2 : William (seul) puis Sammy.

Une fois seul, William sort son portable de sa poche, pianote un numéro puis le colle à son oreille.

William. — Gilbert, c’est moi ! Tu as vu les huissiers ?… On a jusqu’à quand ?… La fin du mois ? (Il soupire.) Et le banquier, il nous laisse un délai supplémentaire ?… Oui, mais t’es marrant, toi. On ne trouve pas un million deux en tapant dans un réverbère !… Oui, eh bien, ma mère, elle m’a dit non !… Je fais mon possible, mais on est associés à cinquante pour cent, Gilbert. Alors tu pourrais essayer toi aussi de nous trouver une solution. (Sammy entre du couloir. William ne l’a pas vu.) De mon côté, pour ma mère… Oh ! ce ne sera bientôt plus un obstacle ! Le problème va se résoudre très rapidement, tu peux me croire. (Il aperçoit Sammy.) Bon, je te laisse, Gilbert. On se tient au courant. (Il raccroche.)

Sammy. — Bonjour, pa… papa !

William. — Bonjour, Sammy ! (Ils se font la bise.)

Sammy. — Tu as un pro… pro… problème avec ma… ma… mamie ?

William, agressif. — Mais de quoi te mêles-tu ?

Sammy. — Qu’est-ce que… que… que tu veux ré… résoudre ra… apidement ?

William. — C’est pas tes oignons, Sammy ! Je n’aime pas beaucoup que tu écoutes des conversations privées.

Sammy. — J’écoute pas les con… les con… les conversations, je passais pour aller au petit… au petit…

William. — … au petit coin ! Ça ne m’intéresse pas !

Sammy. — Non ! Pas au petit… au petit… au petit coin. Au petit… au petit déjeuner ! Est-ce que mamie Éléo… Éléo…

William. — Elle est au petit déjeuner !

Sammy. — Non ! Mamie Éléo… Éléonore, elle est… elle est le… levée ?

William. — Je ne sais pas ! (Excédé.) Tu ne peux pas me laisser tranquille, Samuel ?

Sammy, va pour sortir puis revient. — Tu as peut-être la ré… la ré… la réponse, toi !

William, levant les yeux au ciel. — Quelle réponse ?

Sammy. — Je voulais sa… sa… savoir si c’est du lau… du laurier-rose qu’il y a dans le fond du… dans le fond du ja… ardin, à côté de la vévé… de la verrière ?

William, de plus en plus agacé. — Je n’en sais rien ! Tu m’énerves avec tes questions stupides. Quand vas-tu évoluer, Samuel ? J’ai l’impression que tu fais exprès de te comporter comme un attardé !

Sammy. — Parce que le laulau… le laulaurier-rose, c’est très dan… angereux. Une seule feuille avalée peut emp… emp… empoisonner quelqu’un.

William. — Mais pourquoi me parles-tu de tout ça, pauvre crétin ? Il faudrait, un jour, que j’interroge ta mère ; je ne suis pas certain d’être ton père !

Sammy. — Si, j’en… en suis sûr, pa… pa… papa : on a la même fa… açon de pa… arler !

William. — Si c’est ta seule preuve, je n’ai plus de doute !

Sammy. — Les parents trans… trans…

William. — … transpirent beaucoup quand ils voient leur progéniture !

Sammy. — Non, ils trans… mettent les gènes et moi je me deman… demandais qui m’avait trans… transmis mon in… mon intelligence ?

William. — Ce doit être ta mère car, moi, j’ai toujours la mienne !

Scène 3 : William, Sammy, Astrid.

Astrid entre côté couloir.

Astrid. — Ah ! vous êtes là, tous les deux !

Sammy. — Bon… bon… bonjour, maman !

William, assez froid. — Bonjour, Astrid !

Astrid, assez froide également envers William. — Bonjour, William ! (À Sammy, mielleuse.) Bonjour, mon chéri ! (Elle fait deux bises à Sammy.) Tu as déjeuné ?

Sammy. — J’y a… j’y allais, juju… justement.

William. — Allez, va manger tes céréales et fous-moi la paix une bonne fois pour toutes !

Astrid. — William ! Pourquoi faut-il que tu sois toujours cruel avec Sammy ?

William. — Il m’énerve à me poser, dès le matin, des questions sans intérêt. J’ai d’autres problèmes beaucoup plus importants que le laurier-rose, crois-moi !

Astrid. — Mais il est fragile, ce petit trésor ! (Elle sourit à Sammy.)

William. — Tu te rends compte que tu parles de lui comme s’il avait dix ans ? Il en a trente-deux, Astrid !

Astrid. — Ton fils est différent, mais tu ne l’as jamais accepté.

Sammy. — Il paraît que j’ai… j’ai… j’ai ton intelligence, maman !

Astrid. — Mais oui, mon chéri ! Allez, va déjeuner ! (Sammy sort côté couloir.) Tu as des problèmes, William ?

William. — Hein ? Non, non !

Astrid. — Je vois bien que tu me caches quelque chose.

William. — Non, je te dis !

Astrid. — Tu viens ? On va rejoindre les autres au...

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