ACTE I
Un salon dans une confortable maison de campagne.
Trois portes à la cour et deux portes au jardin.
Au fond, au centre, la porte d’entrée de la maison.
À gauche, en pan coupé jardin, une baie vitrée.
Canapé, fauteuils, chaises, un pouf, un bar avec des verres, bouteilles et flacons, téléphone, une table contre le mur entre la porte 1 et 2 jardin.
Quand le rideau se lève, la scène est vide.
Jacqueline entre de 2 jardin avec trois assiettes et une nappe. Elle regarde autour d’elle, allume la lampe jardin qui se trouve devant la fenêtre, met la nappe et dispose les trois assiettes sur la table avec les deux chaises qui se trouvent au 3e plan jardin. Elle va allumer la 2e lampe cour et va ressortir au moment où le téléphone sonne. Elle décroche.
Jacqueline - Allo oui ?… Oui, cest ici !… Oui, c’est moi !… Ah, c’est l’agence ?… Vous m’avez finalement trouvé une femme de ménage ?… Une intérimaire ?… Oui, oui, extra !… Bon, eh bien alors c’est parfait !… Combien ?!… Cinq cents francs par jour ?!… Et 20 % pour vous ?!… Oui, oui bon c’est entendu !… Ah, elle s’appelle Brigitte ?… Très bien ! Bon ! Merci, au revoir Madame… oh pardon, Monsieur !…
Elle raccroche et va pour ressortir. Quand elle est devant la porte, on entend une sonnerie à l’entrée. Elle y va rapidement et elle ouvre. Robert est dans l’encadrement de la porte avec une valise à la main.
Robert - Bonjour ! C’est moi ! (Jacqueline le tire à l’intérieur, referme la porte derrière lui et lui saute au cou pour l’embrasser.)
Jacqueline - Oh, toi ! Toi !
Robert (la repoussant et regardant autour de lui) - Il n’est pas là ?
Jacqueline - Si, en bas !
Robert - Mais voyons, il pourrait remonter ! (Il la repousse sans l’avoir embrassée.)
Jacqueline - Impossible, il vient de descendre. (Elle se rapproche de lui et ils s’embrassent.) Je suis ravie que tu sois là, tu sais, ravie ! (Lui prenant la valise et la posant, elle lui ôte sa casquette qu’elle pose sur la valise également.) Et toi ?
Robert - Quoi ?
Jacqueline - Tu es heureux ?
Robert - Sans ça, est-ce que je serais là ? (Il la regarde pendant un temps minuscule et ils restent enlacés.) On est fous, non ?
Jacqueline - Mais oui ! Mais c’est merveilleux ! Quand il m’a dit qu’il t’avait invité pour le week-end, je l’aurais presque embrassé, tu vois !
Robert - Oui ! Et il avait vraiment l’air de tenir à ce que je vienne !
Jacqueline - Mais moi aussi ! (Tout près de lui.) Alors, j’espère qu’on arrivera à se retrouver tous les deux rien que toi et moi !
Robert - Oui, oui, on verra ! Mais il faudra faire très attention !
Jacqueline - Mais oui !
Robert - Et surtout, pas d’imprudences !
Jacqueline - Mais non, ne t’inquiète pas ! Regarde, je nous ai préparé cette chambre-là ! (Elle désigne la porte cour. On entend une porte à l’extérieur se fermer.)
Jacqueline - Eh bien ! tiens, le voilà ! (Robert toussote, il reprend sa valise et elle lui remet la casquette.)
Robert - Déjà !
Bernard entre de la porte du cellier, troisième plan cour.
Bernard - Ah ! tu es arrivé !
Robert - Oui, tu vois, j’arrive, j’arrive à l’instant !
Jacqueline - Oui, à l’instant, il n’y a pas cinq minutes ! Tiens ! Il a encore sa casquette !
Bernard - Oui, en effet ! Eh bien, je suis ravi de te voir !
Robert (ôtant sa casquette) - Ah ! mais moi aussi !
Bernard - Tu as une mine superbe !
Robert - Eh bien ! toi aussi !
Bernard - Merci.
Rrobert - Eh bien ! tant mieux, tant mieux ! Je suis bien content de vous trouver tous les deux en pleine forme ! Et je tiens à vous remercier beaucoup de votre invitation !
Bernard - Mais voyons ! Un copain comme toi, c’est tout naturel ! (À Jacqueline.) Si tu savais les manières qu’il a faites !
Jacqueline - Oui, tu me l’as dit !
Robert - Mais non, mais c’est parce que… n’est-ce pas, j’avais peur de vous déranger…
Bernard - Nous déranger ? Mais tu plaisantes ou tu cherches des compliments ?
Robert - Pas du tout, mais…
Bernard - Eh bien ! on est enchantés que tu sois là ! (À Jacqueline.) N’est-ce pas, ma chérie ?
Jacqueline - Ah ! ça oui !
Robert - Eh bien ! moi aussi !
Bernard - Alors, qu’est-ce que tu veux de plus ?
Jacqueline - Bon ! Tu n’oublieras pas qu’il faut qu’on retourne au village, parce que demain tout sera fermé !…
Robert - Mais ne vous croyez surtout pas obligé de mettre les petits plats…
Bernard - Dans les grands pour toi ? Mais bien sûr que si !
Jacqueline - Et nous y tenons absolument ! (À Bernard.) N’est-ce pas ?
Bernard - Ça absolument !
Robert - Je suis confus, vraiment !
Bernard - Mais non, mais non ! C’est la première fois que tu viens ici, je crois ?
Robert - Oui, oui ! C’est très joli, c’est arrangé avec un goût…
Bernard - C’est Jacqueline qui a tout fait !
Robert - Ah ! ça, on… on sent la… enfin la… enfin, on la sent, quoi !
Jacqueline - Je suis ravie que ça vous plaise ! Mais je n’ai pas tellement de mérite !
Bernard - Ah ! si, tout de même ! Elle garde pour nous ce qu’elle a de mieux dans son magasin !
Jacqueline - Oui, c’est bien ce que je dis, je n’ai qu’à choisir dans mon stock…
Bernard - Eh bien ! bravo pour ce choix !
Jacqueline - Merci.
Bernard - A propos, tu lui as montré sa chambre ?
Jacqueline - J’allais le faire quand tu es arrivé.
Bernard - Bon, eh bien ! c’est là ! (Il désigne la porte 1 cour. À Jacqueline.) C’est bien celle-là que tu veux qu’il ait ?
Jacqueline - Oui, oui, c’est la plus grande ! (À Robert.) Alors, si vous voulez déballer vos affaires…
Robert - Volontiers.
Bernard - Eh bien ! alors, tu es chez toi !
Robert (prenant sa valise) - Merci. (Il sort 1 cour et referme derrière lui.)
Jacqueline - Ah ! à propos, l’agence m’a téléphoné. Elle nous envoie une intérimaire. J’espère qu’elle sera bien !
Bernard - Oh ! Une femme de ménage, on ne lui demande pas la lune !
Jacqueline - Oui, hein, enfin elle sera là dans une heure ! Elle s’appelle Brigitte !
Bernard - Ah bon ! Brigitte ?
Jacqueline - Oui, pourquoi pas ?
Bernard - Ah ! bien sûr ! Pourquoi pas ?
Robert rente de 1 cour.
Robert - Formidable, cette chambre !
Jacqueline - Elle vous plaît ?
Robert - Ah ! beaucoup ! Elle est vraiment épatante cette maison !
Jacqueline - Malheureusement, on n’en profite pas assez ! Bon, je vais finir la liste de ce qu’il faut acheter.
Bernard - C’est ça !
Jacqueline - À tout de suite ! (Elle sort 2 jardin, cuisine.)
Robert - Oui, oui, à tout de suite.
Bernard - Eh bien ! assieds-toi ! Tu veux boire quelque chose ?
Robert - Oui, merci.
Bernard - Whisky ?
Robert - Oui, très bien ! Sans glace ! (Bernard va servir pendant ce qui va suivre.)
Bernard - C’est épatant que tu sois venu, tu sais ! Épatant !
Robert - Eh bien ! tant mieux !
Bernard - Oui, tant mieux, parce que… voilà, j’avais absolument besoin de t’avoir sous la main !
Robert - Ah bon ? Pourquoi ?
Bernard - Eh bien ! voilà ! (Il lui donne son verre.) Ça fait quoi ? Cinq ans qu’on se connaît, non ?
Robert - Oh oui ! au moins !
Bernard - On se voit le plus souvent possible ?
Robert - Ah ! ça, évidemment ! Mais tu sais, je suis débordé !
Bernard - Eh oui, moi aussi ! On en est tous au même point ! Mais ça n’est pas parce qu’on ne se voit pas très souvent… qu’on n’est pas des amis !
Robert - Ah, ça bien sûr !
Bernard - Alors, j’ai une confiance totale en toi !
Robert - Oh, mais tu peux, tu peux !
Bernard - Tu me le jures sur ta tête ?
Robert - Ah ! il te faut une tête aussi sérieuse que la mienne ?
Bernard - Ne plaisante pas ! C’est très important !
Robert - Bon, bon ! Eh bien, je te jure sur ma tête que… que quoi ?
Bernard - Que ce que je vais te dire restera entre nous !
Robert - Oui, oui, eh bien ! c’est… c’est juré !
Bernard - Alors, voilà ! Il y a un mois j’ai rencontré par hasard… un mannequin…
Robert - Ah ! bon ?
Bernard - Oui… euh… un petit bijou !… enfin quelque chose de superbe !
Robert - Ah ! bon ? De superbe ?
Bernard - Oui ! Ça a l’air de t’étonner ?
Robert - Non, non, non, mais enfin…
Bernard - Bon ! Bref, alors voilà, je… me suis très attaché à cette fille !…
Robert - Ah ! bon ?
Bernard - Oui, alors ne te vexe pas, hein… en dehors du plaisir que j’ai à te voir, c’est surtout la raison pour laquelle je t’ai demandé de venir !
Robert - Ah ! bon.
Bernard - Mais ne répète pas tout le temps « Ah ! bon », veux-tu !
Robert - Eh bien ! c’est parce que, n’est-ce pas, je… je ne vois pas du tout ce que moi je viens faire là-dedans !
Bernard - Mais c’est très simple ! Comme je ne pouvais pas donner à Jacqueline un prétexte valable pour lui refuser de quitter Paris ce week-end, je t’ai invité pour ne pas être obligé de laisser Brigitte toute seule le jour de son anniversaire.
Robert - Brigitte ?
Bernard - Oui ! C’est le nom de ma… enfin… c’est son nom !
Robert - Ah !… bon ! Oui, oui, d’accord. Mais je ne vois toujours pas le rapport qu’il y a avec moi !
Bernard - Eh bien ! c’est pourtant clair ! Je t’ai invité pour qu’elle puisse venir ici.
Robert - Parce qu’elle va venir ?!
Bernard - Naturellement !
Robert - Eh bien ! tu ne manques pas de culot ! Faire venir ta maîtresse chez toi !
Bernard - Ah ! non, non, non ! Tu n’y es pas du tout ! Ce n’est pas moi qui la fais venir, c’est toi !
Robert - Je ne comprends pas !
Bernard - Enfin, voyons ! Comme je ne pouvais pas l’inviter moi-même, c’est toi qui seras censé l’avoir amenée !
Robert - À quel titre ?
Bernard - Eh bien ! tu feras comme si c’était TA maîtresse !
Robert - Quoi ?!
Bernard - Oui !
Robert - Ah ! mais non !
Bernard - Comment non ?
Robert - Eh bien ! parce que… Parce que non !
Bernard - Pourquoi ?
Robert - Mais comment, pourquoi ? Enfin, voyons, mais ça ne va pas !
Bernard - Ah ! mais si, ça va très bien !
Robert - Non, non, non ! Ça ne peut pas aller !
Bernard - Pourquoi pas ?
Robert - Pourquoi pas ? Pourquoi pas ? Enfin, réfléchis ! Vis-à-vis de Jacqueline, enfin, je veux dire… j’aurai l’air de quoi ?
Bernard - Mais de rien du tout ! C’est ton droit d’avoir une copine et de venir avec elle !
Robert - Oui ! Eh bien ! non, justement, je n’ai pas de copine !
Bernard - Enfin, ça, c’est ce que tu dis ! Mais tu as une vie privée, n’est-ce pas ?
Robert - Elle ne regarde que moi !
Bernard - Eh bien ! justement, ça m’arrange très bien !
Robert - Comment ça ?
Bernard - Eh bien ! personne ne connaissant tes… enfin tes copines… et quand je dis personne, je pense aussi bien à moi qu’à Jacqueline… elle ne pourra donc jamais supposer que Brigitte n’est pas réellement ta maîtresse ! C’est du béton !
Robert - Oui, eh bien ! béton ou pas, je ne veux pas !
Bernard - Tu ne veux pas, tu ne veux pas, c’est trop tard !
Robert - Comment trop tard ?
Bernard - Eh bien ! c’est… c’est convenu avec Brigitte ! Quand elle arrivera, elle fera comme si elle était ta maîtresse !
Robert - Ah ! oui !? Eh bien ! ne compte pas sur moi pour le laisser croire à ta femme ! Ça, je ne marche pas !
Bernard - Mais enfin pourquoi ?
Robert - Mais pourquoi, pourquoi ? Cesse de me répéter tout le temps pourquoi, veux-tu, c’est assommant !
Bernard - Mais je le répète parce que je ne comprends pas pourquoi tu refuses de me rendre ce service.
Robert - Parce que c’est impossible !
Bernard - Pourquoi ?
Robert - Arrête avec ces pourquoi ! Réfléchis une seconde ! Ça ne tient pas debout !
Bernard - Ah ! si, très bien !
Robert - Non !
Bernard - Mais enfin pourquoi ?
Robert - Parce que ! Parce que si j’ai soi-disant une copine, on aurait dû arriver ensemble, là !
Bernard - Mais non ! Justement pas ! Je lui ai fait prendre le train exprès pour que tu arrives avant elle et que je puisse te mettre au courant ! C’est très bien organisé !
Robert - Mais j’aurais pu tomber en panne !
Bernard - Oui ! Mais tu es là !
Robert - Oui, bon, peut-être ! Mais moi, je pense tout à coup que je ne peux pas rester !
Bernard - Pourquoi ?
Robert - Ah ! non, non, je t’en prie ! J’en ai marre de tes pourquoi ! C’est une manie !
Bernard - Ne t’énerve pas !
Robert - Je ne m’énerve pas ! Mais je vais te le dire pourquoi ! C’est parce que j’ai… un vendeur… un vendeur qui… qui…
Bernard - Qui quoi ?
Robert - Qui quoi ! Qui quoi ! Qui quoi ! Comme tu es dans les assurances, tu ne connais rien aux ascenseurs ! Ça ne sert à rien que je te l’explique.
Bernard - Si ! C’est une occasion de m’instruire ! Alors, ton vendeur, qu’est-ce qu’il t’a fait ?
Robert - Eh bien ! il m’a vendu trois cabines au prix plancher, là !
Bernard - Et alors ?
Robert - Eh bien ! alors, il a joué sur les mots ! Et il les a vendues sans… sans les côtés !
Bernard - Et alors ?
Robert - Et alors, et alors… alors, si y’a pas de côtés, on ne peut pas poser les boutons ! Bref, l’ascenseur ne marche pas ! Tu comprends ?
Bernard - Ah ! oui, oui, je comprends très bien !
Robert - J’étais tellement content de ton invitation que cette affaire m’était momentanément sortie de l’esprit ! Mais il faut que je rentre dare-dare à Paris !
Bernard - Ah ! oui, ça, c’est très embêtant !
Robert - Eh bien ! oui ! Enfin, qu’est-ce que tu veux… dans tous les métiers, il y a des hauts et des bas ! Surtout dans les ascenseurs ! (Il rit, soulagé de penser qu’il va pouvoir filer.) Bon ! Eh bien ! je vais chercher ma valise !
Bernard - Ah non, non ! Je dis : c’est très embêtant, parce que si tu pars, moi je vais quand même être obligé de dire à Jacqueline que Brigitte est ta maîtresse !
Robert - Dis ce que tu veux ! Débrouille-toi ! Mais je t’interdis de me faire passer pour l’amant de cette fille ! Et en mon absence en plus !
Bernard - Alors, ne pars pas ! Puisque de toute façon, que tu sois là ou pas, c’est ce que je dirai ! Puisque je ne peux plus rien dire d’autre, c’est l’évidence !
Robert - Quelle évidence ? Il n’y a aucune évidence puisque c’est faux !
Bernard - Naturellement que c’est faux ! Mais comme c’est combiné pour avoir l’air vrai… je ne peux plus changer !
Robert - Mais je n’accepte pas !
Jacqueline entre du 2 jardin.
Jacqueline - Mes enfants, nous n’avons plus rien ! C’est terrible ces maisons qu’on n’habite pas tout le temps, quand on arrive, on s’aperçoit qu’il y a des tas de choses qui manquent !
Robert - Oui, eh bien ! ne vous fatiguez pas pour moi, parce que je pars !
Jacqueline - Comment ?
Bernard - Oui, figure-toi qu’il veut s’en aller !
Jacqueline - Mais pourquoi ?
Robert - Mais je viens de lui expliquer que j’ai une affaire embêtante avec un vendeur, et il faut que je rentre !
Jacqueline - Mais enfin c’est ridicule !
Bernard - Mais c’est bien ce que je lui ai dit !
Jacqueline - Mais on était content que vous soyez là, voyons ! (À Bernard.) Tu lui as dit quelque chose qui l’a vexé ?
Bernard - Mais moi pas du tout, je l’adore !
Jacqueline - Eh bien ! alors, oubliez votre vendeur et restez !
Robert - Abs… Absolument impossible !
Jacqueline - Mais enfin voyons ! Vous ne pouvez pas me faire ça ! Enfin, je veux dire, j’ai prévu un merveilleux petit dîner pour trois…
Bernard - Non, pour quatre !
Jacqueline - Oui, enfin c’est pour trois, mais vous pourrez manger comme quatre si vous voulez !
Bernard - Mais non ! ( À Robert.) Ne t’inquiète pas, on achètera tout ce qu’il faut et il y aura assez !
Jacqueline - Pourquoi ? Il a peur de manquer ?
Robert - Mais non !…
Bernard - Non, mais nous allons vraiment avoir de l’appétit comme quatre !
Jacqueline - Comment le sais-tu ?
Bernard - Eh bien ! voilà…
Robert (coupant) - Mais c’est inutile de lui parler de tout ça puisque je pars !
Bernard - Que tu sois là ou pas, je t’ai dit que ça ne changerait rien !
Jacqueline - Mais de quoi parlez-vous ?
Bernard - Eh bien ! il a eu brusquement des scrupules !
Robert - Mais non !
Jacqueline - Des scrupules ?
Bernard - Oui !
Robert - Mais pas du tout !
Bernard - Mais si, enfin disons qu’il est gêné, c’est pour ça qu’il veut s’en aller !
Robert - Mais non !
Bernard (à Jacqueline) - Tu comprends ?
Jacqueline - Ah ! eh bien ! pas du tout ! Pas du tout ! À peine arrivé il veut partir et il est gêné ! Mais gêné de quoi ?
Robert - Mais de rien !
Bernard - Mais si ! Gêné de m’avoir dit la vérité au sujet de sa vie intime !
Jacqueline - Comment ?!
Robert - Mais non !
Bernard - Mais si ! Il m’a avoué sa liaison !
Jacqueline - Quoi ?!
Robert - N’écoutez pas ce qu’il vous dit, Jacqueline !
Bernard - Tu vois comme il est ! Devant toi, il n’ose plus le dire !
Robert - Mais je n’ai rien dit !
Bernard (coupant) - Mais pourquoi persistes-tu à nier puisque tu me l’as dit ? Puisque maintenant je suis au courant ! Puisque je sais que c’est ta maîtresse !
Robert - Mais non !
Jacqueline - Quoi ?!
Bernard (à Jacqueline) - Tu vois, tu vois, devant toi, il n’ose plus dire qu’il me l’a dit !
Robert - Mais je n’ai rien…
Bernard - Ce qu’il est drôle, alors ! Est-ce que j’en fais un drame, moi ? Non ! Alors ? On n’est pas né d’hier ! On connaît la vie ! (À Jacqueline.) N’est-ce-pas ?
Jacqueline - Eh bien !… c’est-à-dire que…
Bernard (à Robert) - Tu vois bien ! Alors, répète donc devant elle ce que tu viens de me dire !
Robert - Mais je n’ai rien dit !
Bernard (à Jacqueline) - Il est inouï, non ? De ne pas vouloir reconnaître devant toi qu’il me l’a dit ! Enfin, qu’est-ce que tu penses de ça ?
Jacqueline - Eh bien !… mais rien ! Rien ! Qu’est-ce que tu veux que j’en pense ?
Bernard (à Robert) - Mais puisque tu me l’as dit ! (Il se tourne vers Jacqueline.) C’est si simple d’avouer, non ?
Jacqueline - Eh bien ! c’est-à-dire que… Si tu me dis qu’il te l’a dit…
Robert - Mais non !
Bernard - Mais si ! Alors, avoue !
Jacqueline - Eh bien ! oui… j’avoue.
Bernard (la regardant, étonné) - Tu avoues ! Tu avoues quoi ?
Robert - Rien du tout ! Rien du tout ! Jacqueline veut dire que… que puisque je te l’ai...