Scène 1 – Une lettre
Sigmund Freud, Anna Freud.
Dans le cabinet de travail de Freud
Sigmund Freud – Ah ! Anna, te voilà ma fille ! J’ai eu une dure journée aujourd’hui encore, tu sais…ce n’est plus de mon âge d’écouter toutes ces histoires compliquées, tous ces gens qui souffrent, ou du moins qui ont l’air de souffrir. Parfois je me demande s’ils n’en rajoutent pas un peu, juste pour s’accrocher encore à moi…tu sais, je me demande si notre collègue hongrois, comment s’appelle-t-il déjà…Hermann, oui c’est ça, Imre Hermann – je me demande s’il n’a pas un peu raison avec sa pulsion de cramponnement. Les patients ne me lâchent pas, et je me demande si parfois ils se créent des problèmes pour que je continue à les écouter. Je vais devoir être plus ferme avec eux, ils ont besoin de grandir et de se débrouiller un peu sans moi, tout de même… Il se trouvera bien quelque part – pourquoi pas en France après tout ? Ils sont ingénieux ces français… – un psychanalyste un peu original qui trouvera une astuce pour résoudre ce problème – il pourrait bien faire des séances plus courtes, et pourquoi pas à durée variable ? Il arrêterait la séance quand il en aurait assez… Une bonne manière d’éviter le transfert, non ? N’avais-je pas reçu la thèse d’un français qui prônait ce genre de subterfuge ? Je ne me rappelle pas son nom. Un analyste qui serait maître du Temps, de Kronos, quel rêve ! – Mais inaccessible, heureusement. Tu vas avoir du travail, Anna, pour contrer toutes ces fantaisies quand je ne serai plus là. Tu sais je suis un peu soucieux pour ce patient qui rêve de loups,[i] il faudra que je t’en reparle. Son arbre avec des loups perchés dessus, je crois que finalement, c’est un arbre généalogique, c’est de ses ancêtres qu’il parle sans le savoir – et qui menacent de le dévorer, qui minent sans cesse son existence. Très intéressant, mais bon, il n’avance pas beaucoup, c’est une thérapie sans fin !
Anna Freud – Papa, tu n’es vraiment pas raisonnable ! Maman a raison, tu sais bien que tu travailles beaucoup trop, tu es en train d’y laisser ta santé, et en réalité tu ne peux plus te passer des patients ! Ce n’est pas seulement eux qui s’agrippent à toi, c’est surtout toi qui t’accroches à eux, et à ton travail, tes élèves, ton association, tes écrits. Nous savons bien, toi et moi, que si tu arrêtes, tu ne tiendras pas longtemps : ce travail, c’est ta vie, c’est ce qui te tient, alors pas d’histoires à ta fille qui te connaît bien, non ?
Freud – Tu as raison Anna, comme toujours. Mais bon, passons à autre chose. Attends, j’allume un bon cigare, un de ceux que m’a envoyés Landauer. Que ferais-je sans toi, ma chère Anna. Tu es mon espoir pour l’avenir de la psychanalyse. As-tu eu le temps de dépouiller un peu mon courrier ? Alors, qu’est-ce qui nous attend ce soir comme nouvelles complications ?
Anna – Je t’ai apporté ton café. Oui, j’ai vu le courrier – bon, je passe sur toutes les lettres de compliments, et toutes les demandes d’aide pas très réalistes, tu les regarderas plus tard, si tu trouves le temps. Tu as une longue lettre de ton problème hongrois, je sais bien que cela risque de te contrarier – si tu veux on peut la remettre à plus tard ?
Freud – Ce cher Sándor ? Oui, décidément je ne m’en sors pas si bien avec lui – il est incorrigible. Il en est encore à hésiter entre ses deux femmes, la mère et la fille ?[ii]
Anna – C’est ça, et en plus il revient sur sa demande d’une nouvelle tranche d’analyse avec toi. Il prétend que vous n’avez pas terminé le travail, il insinue que tu te défiles…
Freud – Oui, ça ne m’étonne pas, Anna, il n’arrive pas vraiment à grandir. Quand je pense à tout l’espoir que j’avais mis en lui – un analyste si créatif, si brillant – mais il fait encore trop d’hypnose à mon avis, même s’il n’ose pas toujours me l’avouer. Et puis trop d’intérêt pour l’occulte – bon ce n’est pas non plus comme Jung, avec sa passion pour la magie orientale – et je sais bien que Ferenczi a raison de s’y intéresser, mais il ne faut pas lui dire, car il ne saura pas se taire, et tout ça, cela ne va pas servir la réputation de la psychanalyse, qui est déjà bien fragile. On est encore attaqués de toutes parts, Anna, tu sais ?
Anna – Oui Papa, je sais, c’est moi qui réponds à la plupart des lettres que tu reçois, donc je suis un peu au courant ! Alors pour Ferenczi, tu vas lui répondre ? Tu sais qu’il est très malade…
Freud – Je me demande si je devrais, car avec lui c’est sans fin, et plus je réponds, plus il y revient. Je crois que je vais lui proposer de nous rejoindre cet été à Schneewinkl[iii], pendant une semaine. Comme ça nous travaillerons un peu en marchant dans la nature, et ça le calmera j’espère. Je n’aimerais pas me fâcher sérieusement avec lui, mais je crains que ça ne soit inévitable…
Anna – Papa, écoute : parmi ce monceau de lettres sans grand intérêt, il y en a une dont je dois te parler. Elle est d’un certain Alexandre Dumas.
Freud – Le Dumas qui a écrit les Trois Mousquetaires s’intéresse au vieux professeur de psychologie ? Tu m’étonnes beaucoup Anna…
Anna – Non, pas exactement, la lettre est de son fils, qui se prénomme lui aussi Alexandre, comme son père. Je me demande ce qu’il veut. Il s’inquiète pour son père, l’écrivain, qui vit à Bruxelles depuis peu. Tu veux que je te lise la lettre ?
Freud – Oui, bonne idée Anna, ça nous distraira un peu, lis-la-nous.
Anna – Voilà ce que ça dit :
« À l’attention du Professeur Freud, Vienne, IXe, Berggasse, 19 – Autriche.
« Très estimé Professeur Freud,
« Permettez-moi de vous présenter mes excuses pour vous déranger ainsi dans votre travail. On m’a dit que vous êtes très occupé. J’ai eu le privilège de lire certains de vos écrits, notamment ceux qui traitent des œuvres littéraires, comme l’essai sur la Gradivade Jensen,[iv] et je vous en fais mon compliment, c’est vraiment passionnant. Mais ce n’est pas pour cela que je vous écris.
« Je suis inquiet pour mon père, Alexandre Dumas, le célèbre écrivain. Vous connaissez au moins les Trois Mousquetaires, peut-être Monte Cristo, et vous avez sûrement entendu parler de lui. Je lui ai rendu visite à Bruxelles, où il vit depuis quelques années, et il m’a fait une forte impression. Il m’a semblé très préoccupé, ce qui n’est pas si nouveau chez lui, mais cette fois cela dépasse la raison. Il veut croire qu’il s’est exilé en Belgique pour des raisons politiques, pour fuir le régime, comme son ami Victor Hugo. Mais tout le monde sait bien qu’il est parti pour fuir ses créanciers. En Belgique aussi, il mène un train de vie princier, et n’a aucun sens de la mesure, comme dans d’autres domaines d’ailleurs. Tout cela n’est pas nouveau, mais je l’ai trouvé anxieux, ce qui n’est pas son habitude, et surtout triste, voire découragé. Il a toujours eu des moments de baisse de régime, et en général, il les résout en partant en voyage – Mais là, cet état morose s’installe depuis un peu trop longtemps, et cela commence à m’inquiéter sérieusement. Et puis il a une sorte d’obsession pour l’argent. Il a toujours couru après l’argent, et il a toujours fui ses créanciers, mais c’était d’une insouciance toute juvénile et plutôt sympathique, même si je n’approuve pas ces excès. Alors que ces temps-ci, cela le préoccupe constamment, il parle sans cesse de son château qu’il a dû laisser à Port-Marly près de Paris, de son Théâtre Historique, perdu lui aussi, de ses créanciers qui le poursuivent et le persécutent jusqu’à l’étranger, il en fait des cauchemars et en perd le sommeil. Au total, vous comprenez que je crains pour lui une grave dépression, ce qui serait catastrophique non seulement pour lui-même, pour ses proches, mais pour la situation financière de notre famille. Car il doit écrire sans cesse pour contrebalancer ses dépenses exorbitantes. Suivant la voie paternelle, je m’essaie de mon côté au théâtre, pour pallier ces inconvénients matériels, mais le succès n’est pas encore là, et quel succès permettrait de faire face à de telles dettes ?
« Vous comprenez sûrement pourquoi je m’adresse à vous, très estimé Professeur. J’ai tenté d’emmener mon père chez un médecin, mais il se méfie beaucoup de la médecine. Vous savez tout le mal qu’il en dit dans ses livres. Je me suis dit que vous deviez être un médecin très spécial, extra-ordinaire, en tant que spécialisé dans les maladies de l’âme. J’ai entendu dire à Paris que vous aviez inventé une nouvelle méthode, la psychanalyse, pour traiter ce type de maladie. Un ami qui est de la famille des Charcot m’a conseillé de m’adresser à vous.
« Comme vous l’imaginez bien, mon père refuse absolument toute idée d’une affection psychologique, et il n’est même pas question de lui suggérer un traitement par la psychanalyse. Il se croit au-dessus de tout. Il me faudra donc trouver un stratagème pour le faire venir à vous ; je vais y réfléchir.
« Professeur Freud, c’est un fils dans la détresse qui vous appelle à l’aide pour son père. Me donnerez-vous une idée ? Accepteriez-vous de pratiquer votre nouveau traitement sur une telle personnalité ?
« Attendant anxieusement votre réponse éclairée, je vous prie de croire, Très Respecté Professeur Freud, à l’expression de mes salutations les plus distinguées.
Alexandre Dumas fils »
Anna – Que dis-tu de cela, Papa ? Le fils Dumas semble un peu plus sage que son père, non ? Tu ne devrais pas te lancer là-dedans, tu as déjà bien trop de travail…
Mais tout de même, ce Dumas, quelle œuvre ! Quel succès !
Freud – Anna chérie, ce soir tu n’auras pas ta séance d’analyse, ton vieux père malade est bien trop fatigué, il faut remettre ça à demain. Et puis nous avons encore du travail. Ferenczi, toujours le même problème… et il faut répondre à Abraham, à Rank, préparer ma communication sur la fin d’analyse pour la conférence au B’nai B’rith…[v] Donne-moi un autre cigare, et passons aux lettres plus sérieuses.
Anna – Mon analyse est déjà assez avancée, tu ne crois pas ? J’ai déjà beaucoup à faire pour l’Association Internationale, la correspondance, et puis je voudrais essayer un peu plus le travail de psychothérapie avec les enfants. Il y a tout un champ nouveau à explorer là, tu sais ?
Freud – Attention Anna, tu résistes à ton analyse ! Tu profites de l’occasion pour tenter de l’écourter. Mais j’ai besoin que tu pousses cette analyse aussi loin que possible, et tu en as les capacités. J’ai beaucoup d’espoir en toi, tu dois poursuivre l’œuvre de ton père, et assurer la continuation de toute cette entreprise scientifique. La psychanalyse doit encore se développer, s’affirmer comme science nouvelle, dans le monde entier, et ce n’est pas sur les Américains qu’il faut compter, tu le sais bien. Tu dois devenir un modèle de psychanalyste pour pouvoir défendre mes découvertes. C’est intéressant, tes recherches avec les enfants… Je crois depuis longtemps que les névroses se constituent dans la petite enfance, comme tu le sais. Mais tu dois aussi affronter le monde des adultes, qui est un monde dur, une jungle où tu seras constamment attaquée. C’est pourquoi il ne faut pas que tu renonces à l’analyse. Tu ne peux pas te contenter d’être toute ta vie la petite fille sérieuse de ton père. Au fait que devient ce jeune Karl, tu l’as revu récemment ?
Anna – Tu sais, c’est un peu lourd, un peu écrasant pour moi, cette mission de défenseure de la psychanalyse que tu me laisses en héritage. Je me demande souvent si je serai à la hauteur de tes attentes… Et puis tu ne crois pas que c’est un peu difficile pour moi, de faire une analyse avec mon propre père ? Comment veux-tu que je te parle à fond de mon complexe d’Œdipe, de ma vie intime et sentimentale ? C’est vraiment délicat. Tu devrais m’adresser à un de tes élèves. Une femme peut-être, comme Lou par exemple, non ?
Freud – Oui, c’est vrai que la situation peut être parfois délicate. Mais tu sais quand je travaille, même pour toi, je me glisse dans la peau du chirurgien, complètement détaché et insensible, je te traite alors comme n’importe quelle autre patiente. Ce n’est pas vraiment un problème… Et puis les élèves, j’ai une confiance modérée. Ils sont souvent brillants, inventifs et très intelligents, comme Lou ou Sándor, mais ils n’ont pas encore saisi tout le fond de l’analyse. Non, tu dois continuer ce travail avec moi, et bénéficier du peu de temps que la vie me laissera. Je veux te transmettre, à toi d’abord, l’essence même de mes découvertes sur l’Inconscient et les mécanismes psychiques. J’ai eu trop de déceptions avec des collègues en qui j’avais tellement investi. Tu auras bien le temps, quand je ne serai plus là, de faire d’autres expériences.
Anna – Bon, eh bien je m’incline une fois de plus, mais alors peut-être que trois séances par semaine suffiraient – cinq séances, c’est un peu beaucoup pour moi, maintenant…[vi]
Freud – Ça, on en reparlera lors de ta prochaine séance.
Anna – Alors pour Dumas, tu ne m’as pas dit ce que tu en penses.
Freud – Écoute Anna, j’aime bien les quelques feuilletons que j’ai lus de Dumas, c’est de la littérature facile et agréable, très distrayante. Son d’Artagnan, et surtout son Monte-Cristo qui me parle, tu devines pourquoi… Mais ça semble être une personnalité narcissique, plutôt immature, pour qui il n’y a pas grand-chose à faire. Il est certainement brillant, peut-être assez cultivé, mais il part dans tous les sens, et n’arrive pas à canaliser ses pulsions. De toutes façons, il n’a aucune demande, et tu sais bien que nous ne pouvons pas travailler pour quelqu’un qui ne le demande pas. J’aurais plaisir, à l’occasion, à faire sa connaissance, si j’en avais le loisir, de manière tout à fait mondaine et désintéressée – mais ces plaisirs-là ne sont plus de mon âge. Tu vas lui écrire poliment, comme tu l’as suggéré, je compte sur toi.
Bon, maintenant, laisse-moi seul s’il te plaît, ma chère fille, j’ai encore à prendre quelques notes, et travailler un peu sur mon Moïse.
Anna – Je m’en occupe, d’accord. Ne te couche pas trop tard, Papa, tu sais que tu as encore une longue journée demain. Il y a la princesse Marie, qui va encore essayer de prolonger sa séance…Elle ne te vampirise pas un peu avec son hystérie… ? Enfin, tu sais que nous sommes assez amies maintenant, elle est bien attachante, et nous risquons fort d’avoir besoin d’elle, avec ce que l’Allemagne nous réserve.
Freud – Ces Allemands sont vraiment devenus fous, et ce n’est pas sur les Français qu’il va falloir compter. Beaucoup sont très antisémites, et voient d’un œil complaisant la montée de ce grand paranoïaque en Europe. Elle semble bien loin, cette Allemagne romantique de Goethe, de Schiller, et d’autres… Bon allez, bonne nuit ma fille, et n’oublie pas ce que nous avons dit.
Anna – Bonne nuit Papa.
Scène 2 – Indécision
Sigmund Freud, Anna Freud.
Cabinet de travail de Freud
Freud – Anna, tu as eu ta séance aujourd’hui. Tu fais des progrès, tu avances ma fille, tu grandis – mais il va bientôt falloir te trouver un mari, non ?
Anna – Tu me parles comme à une enfant, Papa ! Un mari ! Tu n‘y penses pas sérieusement ! Un homme qui va me faire quatre ou cinq enfants, qui peut-être m’empêchera de travailler…non, ma vie est dans la psychanalyse, tu le sais bien, et c’est d’ailleurs ce que tu attends de moi au fond. J’ai déjà trop à faire pour m’occuper d’un mari.
Freud – Et ce Jones, cet anglais…un psychanalyste serait-il plus ouvert et tolérant à tes activités scientifiques ?
Anna – Parce que tu crois que les psychanalystes seraient plus accommodants que les autres avec leurs femmes ? Je me demande si tu es de ce siècle, ou alors tu te fais encore quelques illusions sur les psychanalystes. C’est vrai que tu as poussé un certain nombre de femmes intellectuelles, tu les as aidées à s’émanciper. Mais si tu crois que les hommes analystes sont tous comme toi… Enfin, n’en parlons plus…
J’avance bien dans la thérapie avec le jeune Karl, tu sais. Aujourd’hui il a fait un dessin superbe : un chevalier flamboyant, devant un magnifique château médiéval, et au fond, la mer. Le tout très coloré. Les nuages sont bien blancs et le ciel bien bleu. Cela se met en place, non ? À mon avis, le château symbolise son for intérieur qui est en train de se constituer, son jardin secret. La mer (la mère) est au loin, donc il prend ses distances par rapport à ses désirs œdipiens, et veut sauver le monde. Un peu comme nous, non ? Enfin pour le moment, il veut surtout conquérir la pauvre princesse qui est enfermée dans le château. Je crois qu’on aborde la phase finale de sa thérapie.
Freud – Je suis fier de toi Anna, et je suis décidemment convaincu que tu vas reprendre le flambeau paternel. Mais tu vas avoir à te battre : il y a en Angleterre une Juive polonaise qui a des théories bizarres sur les fantasmes chez l’enfant. Évidemment elle est de l’école de ce cher Sándor ! Pleine d’idées, mais un peu excentrique à mon goût. Elle fait des psychothérapies plutôt audacieuses. Elle joue avec les enfants, et elle croit y voir l’expression de leurs fantasmes inconscients. Tu en as surement entendu parler, c’est Mme Klein. Il faut que tu saches que l’avenir de la psychanalyse va se jouer en Angleterre. Les nazis vont tout paralyser en Europe, et seule l’Angleterre tiendra peut-être le coup. Il ne faut pas trop compter sur la France : même les premiers psychanalystes non Juifs y sont, pour certains, antisémites ; je ne parle pas de la princesse, bien sûr. Regarde, les deux analystes Juives très brillantes que j’y ai encouragées ont été neutralisées par cette branche française de notre société. Eugénie Sokolnicka a fini par se suicider, il est vrai qu’elle était un peu instable… – Et Sophie Morgenstern, qui innove elle aussi avec les enfants, n’a même pas le droit d’utiliser son diplôme russe en médecine. Elle va mal finir, je le crains, avec la montée du nazisme qui n’a pas l’air d’inquiéter l’étrange optimisme Français. Je compte sur Loewenstein pour mettre un peu d’ordre là-dedans, mais je me demande combien de temps il pourra rester en France ; et je compte surtout sur la princesse, bien sûr, qui est notre pilier en France. Il est vrai que là-bas, il y a de quoi faire. Un jour ou l’autre, tu vas devoir partir en Angleterre, Anna, pour ta sécurité, et pour l’avenir de la psychanalyse. Ne compte pas sur moi pour y aller, je mourrai ici, je suis trop vieux et...