Salade de saison
Suite de sketches ou saynètes comiques, indépendants les uns des autres, sur les relations amoureuses entre les hommes et les femmes.
🔥 Ajouter aux favorisSuite de sketches ou saynètes comiques, indépendants les uns des autres, sur les relations amoureuses entre les hommes et les femmes.
🔥 Ajouter aux favorisARSENIC (et jeunes dentelles)
La scène se passe dans une pharmacie. Le pharmacien est au comptoir, une cliente entre.
La cliente : - Bonjour Monsieur.
Le pharmacien : - Madame. C'est pour quoi ?
La cliente : - C'est bien une pharmacie, ici ?
Le pharmacien : - Ben oui ! Il n'y a pas de poireaux, pas de carottes : ce n'est pas une épicerie !
La cliente : - Oh ! que vous êtes drôle ! Mais, c'est bien la pharmacie Dumartin ?
Le pharmacien : - Oui, c'est ça.
La cliente : - Et vous êtes monsieur Dumartin ?
Le pharmacien : - Oui.
La cliente : - Le pharmacien ?
Le pharmacien : - Lui-même. Mais enfin, Madame, c'est pour quoi ?
La cliente : - Eh bien ! voilà : je voudrais de l'arsenic !
Le pharmacien : - Pardon ?
La cliente : - De l'arsenic. Mais une assez importante quantité.
Le pharmacien : - De l'arsenic ? Mais enfin, Madame, l'arsenic, ça ne s'achète pas comme ça ! Ce n'est pas en vente libre. C'est un poison.
La cliente : - Oui. C'est justement ce qui m'intéresse.
Le pharmacien : -Non, mais attendez, là : ça ne va pas la tête ?
La cliente : - Si, si, très bien.
Le pharmacien : - Et c'est pour quoi faire ?
La cliente : - C'est pour tuer mon mari.
Le pharmacien : - Non, mais, on aura tout entendu ! Et en plus vous me dites ça comme ça !
La cliente : - Et comment voulez-vous que je vous le dise, hein, monsieur Dumartin ?
Le pharmacien : - Écoutez, Madame, ce n'est pas possible. Allez, sortez, avant que j'appelle la police.
La cliente : - Monsieur le Pharmacien Dumartin, calmez-vous. (Elle sort une photo de son sac.) Regardez cette photo.
Le pharmacien : - Quoi ? Quoi ? (Il regarde la photo.) Eh bien ! dites-donc ma petite dame, c'est
une photo intime, ça ! Un peu cochonne, même ! Une belle partie de jambes en
l'air. Bon, mais pourquoi vous me montrez ça ? Qu'est-ce que vous voulez avec
cette photo ?
La cliente : - Le monsieur, là, c'est mon mari.
Le pharmacien : - Ha ! ben ! il s'embête pas le bougre ! Il a ce qu'il faut, hein ? Et puis, il a l'air de bien s'en servir !
La cliente : - Et la dame, là. Vous avez vu la dame ?
Le pharmacien : - Ben, quoi, la dame ? Elle a l'air d'aimer ça, non ?... Ha ! Mais c'est ma femme !
La cliente : - C'est madame Dumartin, en effet.
(Le pharmacien sort un gros sac d'arsenic. Il le donne à la cliente.)
Le pharmacien : - Tenez : arsenic première qualité . Après tout, vous avez une ordonnance !
UNE DEVINETTE PEUT EN CACHER UNE AUTRE
L'amoureux : - Hélas ! Cruelle ! Puisque de moi point d'envie
Vous n'eûtes, et bien qu'à vos genoux, ma vie
Je vous offris entière, et que d'un amour fou
Mon cœur s'est consumé devant vos yeux si doux,
Je ne puis plus, baigné par votre indifférence,
Rester dans quelque lieu où est votre présence.
J'ai pris la décision, je vous l'avoue, Madame,
De fuir cette contrée où réside votre âme.
Oui, je m'en vais ce soir, je quitte le terroir.
Mon cœur a trop souffert : rien que de vous revoir
Il saigne de nouveau. Je viens vous dire adieu .
Je referai ma vie dessous de nouveaux cieux.
L'adorée : - Monsieur, je vous l'avoue, mon âme est malheureuse
D'avoir meurtri la vôtre ; or, pour être amoureuse
Une femme a besoin de voir vibrer son cœur.
Malgré vos qualités, je n'eus cette douceur.
L'amour est capricieux, et jamais Cupidon
Ne décocha vers moi un de ses traits profonds.
L'amoureux : - Souffrez qu'en vous quittant, je vous propose un jeu :
Une devinette, pour vous donner l'adieu.
L'adorée - Je vous en prie, Monsieur, Oui, je veux essayer
D'en trouver la réponse, et de vous égayer.
L'amoureux : - Madame, vous savez qu'avec des mots fleuris
Tous les adorateurs de Vénus ont écrit
Des poèmes, des vers, et des sonnets charmants.
Or, moi, pour vous louer, je n'ai pas ce talent :
Aux roses de Ronsard, et aux blancs lys d'Homère,
J'oppose quelques fruits, et légumes vulgaires.
Vous le voyez, ma muse est quelque peu bancale .
Voulez-vous que toujours j'expose mon oral ?
L'adorée : - Faites, je vous en prie. Cela me plaît assez
D'avoir à raisonner devant quelque pensée.
L'amoureux : - Soit. Vous le savez, nous, les hommes, nous pouvons
Mourir pour de beaux seins, ces superbes fleurons
De votre anatomie. Aussi, quand à vingt ans
Ils sont fermes et durs, et leurs tétons pointant ;
Qu'ils sont bien lourds en main, et d'un dessin bien rond,
On peut les comparer sans faillir aux melons.
L'adorée : - À ces fruits en effet, ils ressemblent beaucoup,
Mais je ne pense pas qu'ils aient le même goût !
L'amoureux : - Après, vient la trentaine, ils sont comme des poires
Qui pendent au verger avec ce fol espoir
Qu'ils soient cueillis, choyés avant d'être trop mûrs !
L'adorée : - Je m'attends pour la fin à une image dure...
L'amoureux : - Savez-vous à quel fruit, quand ils sont vieux et las,
On les peut comparer ?
L'adorée : - Ma foi, je ne vois pas.
C'est votre devinette, instruisez-m'en sur l'heure.
L'amoureux : - Aux oignons.
L'adorée : - Aux oignons ?
L'amoureux : - Quand on les voit, on pleure !
Oui, c'est cruel. Et je le dis sans patenôtres :
C'est ce que demain il adviendra des vôtres!
L'adorée : - Sûrement avez-vous quelque ressentiment
À n'avoir jamais pu être de mes amants ?
Sans vous en tenir grief, Monsieur, permettez
Que je brocarde aussi votre virilité.
Pour ce jeu, moi aussi, j'ai une devinette.
Acceptez, je vous prie, que je paye ma dette.
L'amoureux : - Faites. Si par malheur, solution, je n'aie pas,
Je donnerai content ma langue à votre chat !
L'adorée : - Bien sûr, bien sûr... Pour l'homme adolescent,
La force et la fougue emplissent plein de sang
Son fier membre viril. On peut le comparer
Pour sa solidité au Prince des forêts,
Au chêne, veux-je dire.
L'amoureux : - Ha ! oui, cela convient :
C'est un prince en effet qui gouverne nos reins !
L'adorée : - L'âge adulte arrivant, c'est à un peuplier
Qu'il ressemble le plus : souple, il plie sans ployer,
Et sais rester debout dans toutes les tempêtes,
En conservant sa force.
L'amoureux : - Qu'il donne à ses conquêtes !
Vous me voyez surpris : je ne vous savais pas
Érudite à ce point des choses... d'ici-bas !
7
L'adorée : - Or, savez-vous pourquoi, après, dans le grand-âge,
On compare son port, dans le floral langage,
Au sapin de Noël ?
L'amoureux : - Vraiment ? Je ne saurais...
Peut-être a-t-il tant fait, qu'au beau roi des forêts
On veut le comparer en ce très joli jour
Qui est, on le sait bien, celui du vrai amour.
Un monarque assagi, voilà qui est charmant.
L'adorée : - Il n'en n'est rien, hélas ! Le seul rapprochement
Que l'on peut faire avec le sapin de Noël...
Faut-il que je le dise ?
L'amoureux : - Je ne vois pas lequel...
L'adorée : - C'est bien que l'arbre est mort. Et pour vous cette veste :
Comme décoration, les boules seules restent !
LE TOUBIB DE LA DERNIÈRE CHANCE
La scène se passe dans le cabinet d'un docteur. Un patient vient de rentrer.
Le patient : - Ah !... Ah !... Mon Dieu, que j'ai mal, que j'ai mal !...
Le docteur : - Qu'est-ce qui vous arrive, mon vieux ?
Le patient : - Docteur, je n'en peux plus : il faut m'aider.
Le docteur : - Asseyez-vous, je vous en prie.
Le patient : - Ah !... Que je souffre, mais que je souffre...
Le docteur : - L'affaire a l'air sérieuse, en effet. Expliquez-moi, ça.
Le patient : - C'est bien vous qu'on appelle le ''Docteur de la dernière chance'' ?
Le docteur : - Oui, c'est bien moi. ''Last chance doctor'', comme ils disent sur internet.
Le patient : - J'ai vu votre page... Ah ! que j'ai mal ! Et vous soignez de façon naturelle ? Sans médicaments ?
Le docteur : - C'est cela même. Je suis un miracle vivant. Mais, vous connaissez mes tarifs ?
Le patient : - Oui, ils sont horriblement chers. Ah ! que j'ai mal ! Mais, si c'est garanti ?
Le docteur : - À 100 %, mon vieux : personne n'a jamais quitté ce cabinet sans être guéri. Allez, expliquez-moi votre cas.
Le patient : - Docteur, j'ai trop mal au ventre. Ça fait trois semaines que je ne peux plus faire mes besoins ?
Le docteur : - Les gros ou les petits besoins ?
Le patient : - Les gros, docteur, les gros... Ah ! que je souffre !
Le docteur : - Hum, hum !
Le patient : - J'ai été voir tous les médecins de la ville, généralistes, spécialistes, tous ! Ah ! Que j'ai mal, que j'ai mal.... Je prends tous les cachets prescrits, je suis tous les traitements : rien n'y fait . Docteur, je n'en peux plus.
Le docteur : - Rien que de très banal. Je vais vous soignez ça, vous allez voir.
Le patient : - Ah ! docteur, faites, faites !
Le docteur : - Vous avez le chèque pour le paiement ? (Le patient le lui remet.) Très bien, merci.
Je m'en fous de tes histoires !
Le patient : - Pardon ?
Le docteur : - Est-ce que moi je viens t'emmerder avec mes problèmes personnels ?
Le patient : - Euh !... Non... non... Mais ?...
Le docteur : - Tu crois quoi ? Que tu vas continuer à me gaver avec ta merde ? J'ai pas fait neuf ans d'études pour que tu viennes me faire chier avec tes problèmes de tripes ! (Il ouvre un tiroir, en sort un revolver, et tire.) Pan! Et merde ! Moi, j'ai ma femme qui s'est barrée hier avec mon meilleur ami, et qui a foutu le feu à mon 4X4. Pan ! Est-ce que je viens te faire chier avec ça ?
Le patient : - Non... non... Mais du calme, du calme...
Le docteur : - Du calme ? Tu veux quoi ? Pan !
Le patient : - Non, mais il est dingue, ce type !
Le docteur : - Hein ? Tu veux quoi ? Que je te flingue ? Tu veux que je me flingue, moi d'abord ? Eh bien ! Tiens, je me faire péter la cervelle devant toi !
Le patient : - Mais enfin, docteur, je...
Le docteur : -Ta gueule, je te dis ! Ça te ferait trop plaisir, hein, Ducon? Pan ! Tu sais quoi ? Je vais te butter direct, comme ça on en sera débarrassé de ta merde. Pan !
Le patient : - Ah !... Ah !.. Pitié ! Pitié !
Le docteur : - Va te faire foutre, connard !
On entend un immense schprout !
Le patient : -Oh ! Merde !
Le docteur : - C'est le cas de le dire.
Le patient : - Je me suis chié dans mon froc... Faut dire, vous m'avez fait peur, aussi !
Le docteur : - Eh bien ! voilà un problème de résolu ! Mais ça n'a pas été si facile : il a fallu sortir le grand jeu avec vous ! Les toilettes sont à côté.
Allez, patient suivant !
LES POIREAUX
Très chères et très chers compatriotes ; Françaises, Français ; l'heure est grave, et le moment, crucial.
Aussi, conscient des enjeux nationaux et internationaux qui sont les nôtres, me suis-je résolu à faire quelque chose de grand : vous être utile, ainsi que servir vos intérêts, les vôtres et ceux de vos proches, avec toute cette énergie et toute cette détermination que vous me connaissez. Quoi de plus important en effet que d’œuvrer pour le bien-être de notre nation, de notre pays, de notre France ; pour votre bien-être ?
Très chères et très chers compatriotes, j'ai décidé de me présenter à l'élection présidentielle.
Le premier engagement que je prendrai, lorsque que grâce à vos suffrages je serai élu, sera une loi d'intérêt national, une loi de salut public (et je pèse mes mots) ; une loi dictée par le bon sens collectif, mais aussi par l'urgence patriotique. Voici : j'interdirai la culture du poireau.
Ce sera une mesure forte.
Qu'on ne s'y trompe pas, le poireau est néfaste à l'être humain ! Il est une menace, non seulement pour le pays entier, mais aussi pour toute la planète.
Vous croyez bêtement ce qu'on vous dit : ''Le poireau est originaire d'Europe ou du Moyen-Orient'' ? Gnagnagnagnagna ! C'est faux ! Le poireau est d'origine extraterrestre. J'en ai la preuve. Je les ai vus ! Ces êtres étranges venus d'une autre planète. Leur destination : la Terre ; leur but : nous transformer en poireau. Pour moi, tout a commencé par une nuit sombre, le long d'une route de campagne, alors que je cherchais un raccourci que je n'ai jamais trouvé. Maintenant, je sais que les Envahisseurs sont là, qu'ils ont pris la forme de poireau, et qu'il me faut convaincre un public incrédule que le cauchemar a déjà commencé.
Regardez un poireau dans les yeux. Demandez-lui de vous serrez la main. Le bougre ne le fera pas ! Et pour cause : il aura peur d'être démasqué. (Il montre sa main avec le petit doigt décollé.)
Réfléchissez : qui mange du poireau à notre époque ? Hein ? Qui ? Une minorité. Et nous, enfants de la Démocratie, nous subirions la loi de la minorité ! Non, non, trois fois non ! D'ailleurs, je vais poser la vraie question, la question qui fâche : pourquoi toutes ces cultures de poireaux à perte de vue ? Hein ? Pourquoi ? Naïfs que vous êtes ! Je vais vous dévoiler le plan machiavélique ourdi par ces créatures néfastes : c'est pour perdre la race humaine. Je vous l'ai dit : le cauchemar a déjà commencé !
Vous n'êtes pas sans savoir qu'au XII° siècle, le célèbre médecin italien, Platearius pour ne pas le nommer, déconseille la consommation de ce légume ; et un siècle plus tôt, Sainte Hildegarde de Blingen affirme que le poireau diminue la vigueur sexuelle. Voilà l'affaire : diminution de la vigueur sexuelle ! Plus de crac-crac, plus de goulou-goulou dans la case... Je vois que pour certains, ici, ça a déjà commencé... Mmm, Mmm ! passons aux choses sérieuses, s'il vous plaît ! Donc, plus de naissance, zéro enfants à terme. Notre race ne pourra plus se reproduire. Ça en sera fini de nous ! Ils prendront notre place !
Des Envahisseurs partout, des poireaux comme s'il en pleuvait ! C'est cela que vous voulez ? Hein ? C'est cela ? Alors, pour sauver l'humanité, défendre notre patrie, ne pas laisser périr notre planète, préserver notre France, votez pour moi !
Vive la République, vive la nique ! À bas les poireaux. Et vive la France !
L'EXTRATERRESTRE
La scène se passe dans un square. Une femme est assise sur un banc.
Un homme entre
L'homme : - Salut ma belle ! La place est libre à côté de toi ? Je peux m’asseoir ?
La dame : - Non, la place est réservé à mon mari. Il dispute un match de boxe au gymnase. Il ne va plus tarder... Ha ! le voici qui arrive !
L'homme : - Ha ! d'accord, très bien ! Au plaisir... (Il sort.)
La dame : - Encore un tocard !
Un autre homme passe à proximité du square avec sa voiture. Il s'arrête à hauteur de la dame.
L'autre
homme : - Tu viens faire un tour dans ma décapotable, poupée ?
La dame : - Pas de problème, papy, j'arrive ! Justement, je devais amener mes enfants à l'école. Je les appelle, et on monte.
L'autre
homme : - C'est cela, oui... Allez, bye, poupée. (Il sort.)
La dame : - Pff ! que des nuls ! J'ai pas de bol : il n'y a que les zéros qui s'intéressent à moi. Mais ça va changer ! Si, si, je le sens. Aujourd'hui, c'est le grand jour : je vais faire la rencontre de ma vie. Déjà, j'ai lu mon horoscope ce matin. Il y avait d'écrit : Mars va pousser votre Vénus dans les anneaux de Neptune. Oh ! les anneaux de Neptune ! Ça veut tout dire. Ensuite, j'ai fait le test de mon magazine ''Cosmométropolitain
-Tagada-Tsoin-Tsoin''. J'ai été classée dans la catégorie des bêtes de sexe... Ha ! tout de suite !... Soyez pas jalouses. Après, j'ai été amené mon ordi à réparer. Le monsieur, oh! très gentil, très comme-il-faut, m'a dit : « Vous avez toutes les gigabytes en place. » Ho ! ça m'a fait, mais ça m'a fait !... Ha ! Je me suis sentie bien. Tout ça c'est des signes, quand même !
Un type entre d'une démarche robotique. Il a une sacoche. Il s'assoit à côté d'elle.
Le type : - Bip, bip !
La dame : - Non, mais, faut pas vous gêner, vous !
Le type : - Bip, bip. ! I come from the outer space, bip, bip, bip !
La dame : - Vous savez, je n'ai jamais été très forte en latin...
Le type : - Bip, bip ! (Il sort une machine de sa sacoche.)
La dame : - Qu'est-ce que c'est que ce truc ? Vous n'allez pas faire exploser le quartier au moins ?
Le type : - Bip, bip ! (Il pianote sur sa machine. On entend des bruits électroniques.)
La dame : - Qu'est-ce que vous voulez faire avec ça ?
Le type : - Bip, bip ! Translater... French language... Bip, bip !... French... Français, OK ! Bip, bip!(Une sonnerie téléphonique, venant de sa machine, se fait entendre. Le type décroche un combiné .) Excusez... Bip, bip !... Oui, chef ?... Je suis bien arrivé... Bip, bip, bip ! Je vous rappelle, bip, bip, dès que mission accomplie... Bien, chef... Bip, bip !
La dame : - Mission accomplie ? Vous êtes un agent secret ?
Le type : - Non... Bip, bip !... Extraterrestre... Bip, bip, bip !
La dame : - Extraterrestre ? Waow ! Quand je raconterai ça aux copines ! Elles vont être vertes de jalousie. Et d'où venez-vous exactement ?
Le type : - Je viens de Mars. Bip, bip !
La dame : - Waow ! Mars ! Mais c'est à la mode, Mars! Et c'est quoi votre mission ?
Le type : - Ma mission est de trouver femme, bip, bip, pour étudier, bip, bip, mode de reproduction sexuée, bip, bip, des humains.
La dame : - Oh ! Étudier le mode de reproduction sexué !
Le type : - Êtes-vous femme ? Bip, bip !
La dame : - Grand fou, va !
Le type : - Je répète : êtes-vous femme ? Bip, bip !
La dame : - Ce que t'es drôle, toi ! Tu le vois bien, non ? Regarde. (Elle lui désigne ses seins.)
Le type : - Bip, bip, bip ! (Il ''manipule'' les seins de la femme.)
La dame : - Tu es direct, toi ! Ça me plaît.
Le type : - 85 B . Bip, bip ! Pas terrible.
La dame : - Attends, regarde ça. (Elle lui montre son fessier.)
Le type : - C'est un peu mieux, bip, bip, mais c'est mou.
La dame : - Mais ma volonté est ferme :
Je veux être entre tes antennes, ô Martien !
La victime expiatoire des désirs humains !
Et, je le jure, je veux être pour l'Histoire
La première terrienne à faire... balançoire.
Oui, je l'avoue, la rime n'est pas terrible
Le type : - Bip, bip ! Qu'est-ce que vous racontez ?
La dame : - Je dis : ne cherche plus, Martien, tu as trouvé celle qu'il te faut. Oh ! Quand je raconterai ça aux copines ! Mais ça fonctionne comme chez nous, chez vous ?
Le type : - Oui, bip, bip, et même beaucoup mieux, bip, bip : beaucoup plus longtemps.
La dame : - Allons-y. Il me tarde essayer.
Le type : - Très bien, bip, bip, je vais vous montrer ma soucoupe.
La dame : - Une soucoupe... violente ? Est-elle grosse ?
Le type : - Grande et grosse, bip, bip.
La dame : - Quand je raconterai ça aux copines !
Le type : - Allez-y, bip, bip, je vous suis.
La dame sort. L'extraterrestre enlève son masque de martien. Apparaît alors un homme normal.
Le type : - Quelle époque ! Ce qu'il ne faut pas faire pour draguer les meufs, maintenant !
JE SUIS MAL !
Un homme entre. (À un certain moment, sa femme entrera aussi).
L'homme : - Ouïe ! Aïe ! Ouille ouille ouille ! La salope ! Mais elle est complètement dingue cette meuf ! Complètement barge ! Elle m'a foutu le bitos en sang ! Mais quand elle va s'en apercevoir... Qu'est-ce que je vais pouvoir dire à ma femme ?
«Oh ! Chéri ! Mais qu'est-ce que t'as fait à la zigounette ? T'en as fait installer une nouvelle, version chou-fleur ? Super ! On va pouvoir l'essayer ! »
Ha ! je suis mal, je suis mal ! Je vous le dis : je suis mal ! Aïe ! Mais ça brûle ! La chienne ! Elle m'en a bouffé au moins la moitié !
Mais tout ça, c'est de la faute à ma femme aussi. Elle veut tout le temps baiser ! Merde !Y en a marre ! Je suis à plat, moi. Matin, midi, et soir, on baise, on baise, on baise ! C'est pas possible, c'est pas une vie, ça ! On peut pas continuer ! Je vous le dis, mesdames : il faut que ça change !
Moi... j'aimerais bien... de temps en temps... le repos du guerrier... tranquille, peinard... être allongé dans le plumard... ne rien faire... le pied... une petite gâterie. Normal, quoi ! La prime de risque. Mais ma femme ne veut rien entendre : matin, midi, et soir, on baise, on baise, on baise ! Y en a marre !
Aïe ! Ouille ! (etc) Stop à la baise ! (Il est en pleurs.) J'en peux plus. Mais qu'ai-je fait au ciel pour mériter ça ? Pourquoi moi ? Je ne veux plus baiser, je ne veux plus...
Sa femme : - Chéri ?
L'homme : - Oui, mon ange ?
Sa femme : - Tu vas bien ?
L'homme : - Oui, très bien. Pourquoi ?
Sa femme : - Tant mieux. Je viens faire mon mea culpa.
L'homme : - (Bas.) Hou ! Là, là ! Mais qu'est-ce qui va encore m'arriver ?
Sa femme : - Oui, chéri. Pardonne-moi. Pendant toutes ces années de mariage, de vie de couple, je n'ai pas été beaucoup à ton écoute. Aussi, le cœur gros, j'ai décidé de changer.
L'homme : - Ha ?
Sa femme : - Oui, de changer, chéri. Je sais que tu aimes les gâteries, aussi, je vais t'en faire une maintenant.
L'homme : - Maintenant ?
Sa femme : - Ben, oui, mon chéri.
L'homme : - Euh !... Ben, là, c'est à dire que...
Sa femme : - Allons, allons...
L'homme : - Mais faut pas prendre au pied de la lettre tout ce que je te dis, mon ange...
Sa femme : - Si, si, si. Tout de suite !
L'homme : - Mais chérie, ça peut attendre un peu... Un jour, ou deux...
Sa femme : - Tout de suite ! Viens !
L'homme : - Oh ! là, là, je suis mal, je suis mal ! Je vous le dis : je suis mal !
JOURNÉE TÉLÉ
Un couple chez lui. La femme s'apprête à sortir.
L'homme : - Je rêve pas, chérie ! Tu sors, là ?
La femme : - Mais oui, je te l'ai déjà dit plusieurs fois : je vais faire les boutiques avec Flo, et puis après on va chez le coiffeur et chez l'esthéticienne.
L'homme : - La totale, quoi !
La femme : - Ben, oui, il faut ça ! T'aimes bien quand ta petite femme est toute belle, hein ?
L'homme : - Ouais... d'accord... Tu reviens quand ?
La femme : - Ben, là, j'en ai pour pas mal... Pas avant le milieu de l'après-midi.
L'homme : - Quoi ? Toute la journée ! Mais qu'est-ce que je vais faire, moi ?
La femme : - T'as qu'à bouquiner.
L'homme : - J'aime pas bouquiner.
La femme : - T'as qu'à bricoler.
L'homme : - J'aime pas bricoler.
La femme : - T'as qu'à sortir faire les courses.
L'homme : - J'aime pas sortir faire les courses.
La femme : - T'as qu'à réparer la voiture .
L'homme : - J'aime pas réparer la voiture.
La femme : - Bon, ben ça va ! T'as qu'à regarder la télé !
L'homme : - Peut-être bien... Mais je sais pas ce que je vais regarder : un match de foot, ou un film porno.
La femme : - Très bonne idée, le porno ! Oui, regarde plutôt ça. Parce que le foot, tu sais y jouer, non ?
HOLD-UP
La scène se passe dans une banque. Une ''mise au point'' entre une femme et son mari.
L'homme : - Mais enfin, ma chérie, tu es sérieuse quand tu dis que tu veux annuler ma procuration . sur ce compte ?
La femme : - Laisse-moi !
L'homme : - Ma chérie... Quand même !
La femme : - Bas les pattes ! Tu n'y auras plus accès. Et même, je vais te dire : on sort de la banque, . je demande le divorce.
L'homme : - Mais, Chérie, qu'est-ce qu'il te prend ?
La femme : - Comment ? Après ce que tu m'as fait ?
L'homme : - Chérie, pardonne-moi... C'est elle qui m'a dragué.
La femme : - C'est ça ! Tu t'es bien laissé faire, hein ?
L'homme : - Un moment de faiblesse, mon cœur. Tu sais bien que tu es mon seul amour.
La femme : - Arrête avec tes ''mon cœur'' ! Arrête tout !
L'homme : - Mais, Chérie...
La femme : - Stop ! Tu n'es qu'un être vil, incapable de suivre la route la plus droite. Tu n'es qu'une girouette : Tu tournes avec le vent. Tu as gâché ma vie. Tu m'as pris mes meilleures années. Mes parents avaient raison : je n'aurais jamais dû me marier avec toi. Ils me le disaient : « Ce type est de classe inférieure, méfie-toi ! Seul ton argent l'intéresse. » J'aurais dû les écouter. Je t'ai sorti du trou où tu croupissais, de ta vase. Que serais-tu devenu sans moi ? Hein ? Tu serais à la rue, oui ! Eh bien ! vas-y, retourne vers là où tu aurais dû échouer ! Ha ! tu m'as trompée, hein ? Ça devait bien rigoler avec ta pouf- fiasse ? Eh bien ! je te rends ta liberté : va retrouver ta grosse ! Mais tu vas comprendre ce que sont les furies d'une femme à l'honneur abusé : je coupe les vivres !
Branle-bas de combat dans l'entrée : des gangsters cagoulés et armés entrent.
L'un d'eux : - Haut les mains ! Ceci est un hold-up. Que personne ne bouge, et il ne vous sera fait aucun mal.
Tout le monde lève les mains. Un des gangsters attrape la femme, l'entraîne avec lui contre un mur, et lui met le pistolet sur la tempe.
La femme : - Oh ! Chéri, Chéri !
Le
gangster : - Le premier qui lève le petit doigt, je tue cette femme !
Et on voit le mari commencer à bouger une main, les deux ; puis un un bras, les deux ; puis faire des pas ; puis commencer à sautiller...
LE MENTEUR
Un homme arrive menaçant sur scène.
- Je vous emm... Je vous emm... Tous !... Je vous ...aime ! Oui, je suis comme ça, moi. Vous n'y croyez pas, hein ? Mais pourtant, c'est la vérité. La vérité ? Ha, ha, ha ! Je vous ai bien eu. Vous pensez réellement qu'un type qui arrive comme ça, hyper menaçant, il va vous dire qu'il vous aime?Non, franchement ? Bah ! peut-être que vous avez raison après tout ! Moi, je ne sais plus où j'en suis... Je mens. Je mens tout le temps. C'est plus fort que moi. C'est terrible. Ça m'angoisse.
C'est Jean Cocteau qui a écrit un monologue sur le menteur. Tout en finesse, en légèreté, mais avec une certaine gravité. Sa marque de fabrique, quoi ! Et il concluait en disant : « Je suis un mensonge qui dit toujours la vérité. » Belle formule, hein ? Chapeau ! Eh bien ! moi, je pourrais dire : je suis une vérité qui dit toujours des mensonges ! Je mens tout le temps, je vous dis. Tenez, je vais vous raconter une histoire.
L'été dernier, avec ma petite copine Odile... Non, c'est pas vrai, j'ai pas de petite copine... Voyez, je fais un effort pour ne pas mentir. L'été dernier, avec Odile... C'est même pas une copine, c'est juste une collègue de la ligue... Quoi, quelle ligue ? Vous ne devinez pas ? La ligue des menteurs. Vous ne saviez pas que ça existait ? Menteurs, va ! J'en reconnais certains, là, là, et là, qui sont adhérents. Soyez tranquilles, je dirai rien, je suis pas du genre. Ha, ha, ha ! Vous me croyez? Vous avez tort. Hein ? Monsieur ? Monsieur ? Oui, vous. Quand vous avez dit à votre femme que vous aviez une réunion de travail... Ha ! Elle était jolie la réunion de travail ! 95 C, quoi !
Donc, avec ma collègue Odile, de la ligue, on a été au zoo. On a été direct voir les ours blancs. Qu'est-ce que vous voulez que j'y fasse, moi ? Elle aime les ours blancs. Ils batifolaient, là, dehors, faisaient des roulades, des cabrioles... Il fallait les voir gambader parmi les fleurs jolies des champs... Ouais ! Des cabrioles... Les fleurs des champs... Non, mais, hé ! il n'y a personne qui suit, là ! Ce qu'il y a de bien avec vous, c'est que je peux mentir tranquille ! Vous y croyez à ça ? [Avec le cagnard qu'on s'est tapé l'été dernier, 42 à l'ombre,] vous pensez vraiment que les ours blancs [faisaient] font des cabrioles parmi les fleurs ? [Déjà, il n'y avait plus de fleurs, tout était cramé. Ensuite,] ils sont plutôt sur la banquise, les ours, non ? Enfin, moi, je dis ça, j'en sais rien . Peut-être qu'ils aiment aussi se siroter un bon cocktail dans une chaise longue ?
Non, on n'a pas été voir les ours blancs. On n'a pas été voir non plus les gorilles. Gare au gori-i-i-i-i-i-lle ! On n'a pas non plus été voir les éléphants parce que les éléphants ça trompe énormément et j'aime pas qu'on me mente ! J'aime pas les menteurs. C'est vrai, quoi ! parfois, il y en a qui mentent mieux que moi ! Il n'y a qu'à allumer la télé. Un débat de politiciens : ils mentent. Concurrence déloyale, je suis désolé ! Ils mentent, mais ils ne disent même pas qu'ils sont menteurs Moi, je le dis. Et j'ai ma carte à la ligue. Eux, ils ne l'ont même pas. Non, mais, où va-t-on ?
En fait on a été voir les sauriens. Les grands sauriens. Vous ne savez pas ce que c'est un saurien ? Tant pis, vous n'aviez qu'à le savoir. Fallait bûcher vos leçons de science nat à l'école. C'est bien beau de mentir à la prof en disant qu'on a appris sa leçon. Hein ? Voilà où ça mène le mensonge ! Tant pis pour vous !
En fait, Odile, elle m'énerve. Elle m'a toujours énervée. Elle ment mieux que moi. Elle travaille dans une boutique de vêtements. Vendeuse. ''Oh ! oui, Madame, cette robe vous va très bien ! Ça met en valeur votre silhouette''. T'as raison, la femme, splatch ! Bonjour la silhouette ! Et les clients la croient. C'est une bonne vendeuse. Moi, j'aime pas ça. Faut qu'elle choisisse : soit, elle vend des mensonges ; soit, elle vend des fringues. On peut pas vendre les deux.
Donc, ils étaient là les sauriens ? Crac, crac, crac ! Les pauvres petites bêtes ! Pour les attendrir, on leur donnait des cacahuètes. On leur a même servi un coup de rouge, et puis après des petits fours avec de la chantilly. Ils adorent ! Mais attention, avec de la chantilly artisanale ! Parce qu'avec de le chantilly trafiquée, c'est même pas la peine : ils n'en veulent pas.
Moi, elle m'énerve cette fille. J'en ai marre d'elle. Alors, comme elle se penchait pour faire guili-guili sous le menton à un gros mâle qui riait de toutes ses dents, j'ai fait un clin-d’œil à l'animal. Et lui il m'a appelé sur le portable... Ha ! non, c'est pas vrai, je dis un mensonge, là ! Il m'a juste envoyé un SMS. Voyez, je suis incapable de mentir ! Il m'a texté : ''Vas-y mon gars, le Bon Dieu te le rendra.''.Alors, qu'est-ce que vous auriez fait vous ? Eh bien ! moi, j'ai poussé Odile ! Dans la fosse. Clac, clac, clac ! En quelques secondes, nettoyée, Odile, plus rien. Elle m'embêtera plus. C'est bien fait pour elle : elle n'avait qu'à pas mentir.
Deux infirmiers arrivent.
Le premier : - Le voilà !
Le deuxième : - Votre Majesté va bien ?
Le menteur : - C'est pour quoi ?
Le premier : - Majesté, nous sommes les Rois-Mages.
Le deuxième : - On apporte à votre Grandeur la myrrhe et l'encens.
Le menteur : - Très bien, donnez, donnez.
Les deux infirmiers lui font une piqûre d'un produit somnifère.
Le premier : - Pff ! Faudra plus qu'il s'échappe, lui !
Le deuxième : - C'est sa copine qui lui a tourné la tête.
Le premier : - C'est sûr, il en croque pour Odile.
Le deuxième : - Ouais ! Crocodile.
Le premier : - Il n'aurait jamais dû s'inscrire à cette ligue .
Le deuxième : - Ouais ! La ligue a tort .
Le premier : - De toutes façons, ligue ou pas ligue, c'est caïman la même la même chose.
Le deuxième : - Ouais ! Dans tous les cas i ment !
Le premier : - Tu crois qu'il finira par dire la vérité un jour ce type ?
Le menteur : - Ça, on n'en saurien !
LES CLÉMENTINES
La scène se passe dans le cabinet d'un psychanalyste. Une patiente entre.
La patiente : - Bonjour Docteur.
Le docteur : - Bonjour Madame.
La patiente : - Docteur, docteur, j'avais hâte, mais hâte , que cette séance débute !
Le docteur : - Très bien. Ça prouve que vous avez des choses à dire. Allongez-vous, je vous en prie, nous allons commencer.
La patiente s'allonge sur le divan, souffle, et ne dit mot.
Le docteur : - Alors ?
La patiente : - J'en avais tellement envie de cette séance, j'en ai tellement rêvée que... je ne sais plus par quoi commencer...
Le docteur : - Tranquillisez-vous, ce n'est rien que de très banal : quand on désire fortement quelque chose, et qu'ensuite on se trouve face à sa réalisation, on est un peu perdu. Calmez votre esprit, remettez un peu d'ordre dans vos pensées, et allez-y.
La patiente : - Bon, je vais commencer par... le commencement ! J'ai eu comme une révélation il y a quelques jours : j'ai compris la grande cassure de ma vie. Voilà : mon prénom est Clémentine.
Le docteur : - Clémentine ? Ha, ha !...
La patiente : - Euh !... Oui. Mes parents en me prénommant comme cela, ont malgré eux orienté toute ma vie. Petite fille, j'adorais les oranges, les mandarines, les clémentines bien sûr, les pamplemousses, et tous les agrumes. Pour mes études, après le bac, j'avais commencé un cursus de philo, mais je ne suis arrivé à rien. J'ai abandonné juste avant la licence. Malgré l'intérêt que j'avais pour cette matière, et malgré mes bons résultats, non, ça me passait tout à fait à côté. Mais je m'en suis toujours voulu d'avoir arrêté, et toute ma vie j'ai essayé de comprendre ce qui m'était passé par la tête ce fameux jour où j'ai quitté la fac. Or, figurez-vous qu'il y a trois jours en man- geant des clémentines...
Le docteur : - Ha ! des clémentines !
La patiente : - Euh !... Oui, Docteur . Vous faites bien de souligner ce point : vous voulez sans doute me faire comprendre que je me prénomme comme ces fruits, et que...
Le docteur : - Étaient-elles bonnes ?
La patiente : - Excellentes, Docteur.
Le docteur : - De bonnes clémentines ! Ça ne court pas les rues.
La patiente : - Je saisis le parallèle. Bonnes ? Ma vie a-t-elle été bonne jusqu'à présent ? À quoi suis-je bonne ? C'est cela, hein ? Eh bien ! en mangeant ces fruits, j'ai eu comme une
illumination : j'ai compris toute mon histoire ! Après la fac, pour m'aérer les esprits, je suis parti travailler dans les pays qui bordent la Méditerranée : l'Espagne, l'Italie, le Maroc, la Tunisie. Mon choix n'était pas innocent : toutes ces contrées ont un point commun avec moi.
Le docteur : - Les clémentines ! N'est-ce pas ?
La patiente : - Oui... oui... Après ces années de voyage, je me suis orienté dans la vente de fruits et de légumes. Plutôt les fruits, d'ailleurs. J'ai maintenant une boutique à moi où j'ai un
large choix...
Le docteur : - De clémentines ! J'adore les clémentines !
La patiente : - Oui... oui... tout à fait... Alors, l'autre jour en mangeant ces agrumes, j'ai compris qu'en fait toute ma vie, je n'ai cherché qu'à me rapprocher de ces fruits.
Le docteur : - Votre peau est-elle fine comme celle des bonnes clémentines, ou épaisse à l'image de ces maudites mandarines ?
La patiente : - Euh !... Ha ! Docteur, je vois : vous pensez peut-être qu'en voulant m'identifier à ces fruits, j'ai attrapé la peau d'orange ? Cela en effet aurait pu se passer : voulant res- sembler à ces agrumes, j'aurais pu modifier mon métabolisme, et...
Le docteur : - Et les clémentines que vous vendez, vous ressemblent-elles ? C'est à dire, sont-elles meilleures que celles que vous avez ''rencontrées'', si l'on peut dire, sur les rivages méditerranéens ?
La patiente : - Ça n'a rien à voir, Docteur : les miennes sont excellentes.
Le docteur : - Je m'en doutais !
La patiente : - Je comprends votre remarque : c'est leur goût, fin, délicat, fruité, en un mot, divin, qui m'a fait réaliser que ma vie est à l'image de ces fruits.
Le docteur : - Les bonnes clémentines sont difficiles à trouver. Vous êtes une bonne Clémentine. Voulez-vous être ma femme ?
La patiente : - Ben, c'est à dire... là, Docteur...
Le docteur : - Je m'appelle Clément. Clément et Clémentine Psycho, ça irait bien ensemble.
La patiente : - Psycho ? C'est votre nom ?
Le docteur : - C'est mon nom de famille.
La patiente : - Vous étiez prédestiné, alors...
Le docteur : - J'étais prédestiné à vous. Appelle-moi Pat. C'est un surnom qu'on m'a donné, je ne sais pas pourquoi.
La patiente : - Ha ! Vous êtes Psycho Pat, alors ?
Le docteur : - Oui. Veux-tu m'épouser ?
La patiente : - Docteur, je ne puis : je suis fiancée à un Chinois, un Mandarin.
Le docteur : - Horreur ! Une Mandarine ! (Il sort un revolver, et la tue.) Maudite Mandarine. Il vaut mieux que ce se soit fini comme ça entre nous : sinon, elle m'aurait causé trop de pépins !
LE COMIQUE
Le mari : - Mon cœur ?
La femme : - Oui ?
Le mari : -Voilà, j'ai une question à te poser qui me trotte dans la tête depuis quelque temps, et pour laquelle je voudrais une réponse précise.
La femme : - Oh, oh, oh... ! Que tu es drôle, mon chéri ! Je t'écoute.
Le mari : - Mon cœur, te souviens-tu de ce fameux jour où je t'ai demandé en mariage ?
La femme : - Hi, hi, hi... ! Oui, je m'en souviens comme si c'était d'hier.
Le mari : - J'étais un peu timide, un peu gauche ; je ne connaissais pas la nature exacte de tes sentiments envers moi. Je ne savais pas comment faire... pour te prendre le mieux possible.
La femme : - Ha, ha, ha... ! Cela a-t-il vraiment changé aujourd'hui ?
Le mari : - Que veux-tu dire, mon cœur ?
La femme : - Rien, rien... Continue, Chéri. Oh, oh, oh... ! Que tu es drôle !
Le mari : - Je t'ai demandé ta main : tu me l'as donnée. Oh ! quel jour merveilleux ! Sûrement le plus beau de ma vie.
La femme : - C'est gentil, ça, Chéri.
Le mari : - C'est la vérité, mon cœur. Mais depuis quelque temps, je me rejoue la scène. Tous les garçons te tournaient autour. Bien sûr, nous sortions ensemble, et... tu avais pu constater que... j'assurais pas mal au lit. Hein ? N'est-ce pas ?
La femme : - Hi, hi, hi... ! Mon chéri !
Le mari : - Alors, la question que je me pose... Parmi tous tes prétendants, Raphaël était plus beau que moi, Pierre était riche, Benjamin était un séducteur né... Alors, pourquoi moi ? Pourquoi m'as-tu choisi, mon amour ?
La femme : - Oh, oh, oh... ! Que tu es drôle, Chéri ! Je ne m'ennuie jamais avec toi, je rie toujours !
Le mari : - Dis-le moi, s'il-te-plaît ! Tu peux bien me dire la vérité maintenant, mon cœur.
La femme : - Hi, hi, hi... ! Tu me fais trop rire, Chéri ! C'est pour ça que je t'ai choisi. Je t'ai toujours trouvé comique !
Le mari : - Mais ? Et mes performances sexuelles ? Mon côté premier de la classe au lit ? Dis la vérité : c'est pour ça que tu m'as choisi, hein ? Allez, avoue, avoue...
La femme : - Hi, hi, hi... ! Chéri ! Tes performances sexuelles ? Ton côté premier de la classe au lit ? Tu vois ? C'est bien ce que je te disais : tu me fais trop rire ! Hi, hi, hi... !
BIS REPETITA
(OU À PEU PRÈS)
La femme : - Mon chéri chouchou ?
Le mari : - Oui ?
La femme : - Voilà, j'ai une question à te poser qui me trotte dans la tête depuis quelque temps, et pour laquelle je voudrais une réponse précise.
Le mari : - (Bas) Pfff ! Quand elle s'y met ! (Haut) Oui, mon cœur, je t'écoute.
La femme : - Mon chéri chouchou, te souviens-tu de ce fameux jour où tu m'as demandée en mariage ?
Le mari : - (Bas) Hélas ! je m'en souviens comme si c'était d'hier ! (Haut) Oui, mon cœur, je m'en souviens comme si c'était d'hier.
La femme : - J'étais un peu timide, un peu gauche ; je ne connaissais pas la nature exacte de tes sentiments envers moi. Je ne savais pas comment faire pour te montrer que je n'étais pas une fille facile, qu'il fallait me mériter ; que tu ne pouvais pas prendre mon cœur facilement.
Le mari : - (Bas) Ni le cœur ni autre chose !
La femme : - Tu parles tellement bas, je ne te comprends pas. Que dis-tu ?
Le mari : - Rien, ma chérie, rien, continue, continue.
La femme : - Je t'ai offert ma main, tu l'as prise. Oh ! quel jour merveilleux ! Sûrement le plus beau de ma vie.
Le mari : - (Bas) Il pleuvait ce jour-là. Un signe que je n'ai pas su décoder.
La femme : - Depuis quelque temps, je me rejoue la scène. Beaucoup de filles te tournaient autour. Bien sûr, nous sortions ensemble, et tu avais donc pu te rendre compte de ce que j'étais. N'est-ce pas, mon chéri chouchou ?
Le mari : - Mouais !
La femme : - Alors, la question que je me pose est celle-ci : pourquoi m'as-tu choisi ?
Le mari : - (Bas) Parce que j'avais sûrement besoin de lunettes ! (Haut) Mais je ne sais pas, mon cœur.
La femme : - Tu m'as choisi pour une raison précise, n'est-ce pas ? Alors, je vais t'aider à trouver cette raison. Quel genre de femme t'attire ? est-ce une femme belle, ou une femme intelligente ?
Le mari : - Mais ni l'une ni l'autre, ma chérie : tu sais bien que je ne suis attiré que par toi !
LE ROBOT
Le maître de maison entre chez lui, suivi par un homme.
Lui : - Bonsoir Chérie. Pfff ! quelle journée aujourd'hui !
Sa femme : - Chéri, attention ! Il y a un type qui te suit, là derrière toi !
Lui : - T'inquiètes, t'inquiètes, c'est pas un type, c'est un robot. Mate un peu : robot, stop !
Sa femme : - Un robot ?
Lui : - Oui, un robot. Regarde bien. Robot, fais trois pas. Robot, stop ! Robot, va t'asseoir. Robot, croise les jambes. Robot, relève-toi.
Sa femme : - Ha ben ! ça alors !
Lui : - Ben, oui, il m'obéit au doigt et à l’œil, lui. C'est pas comme certains.
Sa femme : - Non, mais, ça veut dire quoi, ça ?
Lui : - Rien, rien...
Sa femme : - Et tu l'as trouvé où ce robot ?
Lui : - Je l'ai acheté chez Ikaka.
Sa femme : - Mais alors, il était en kit ?
Lui : - Oui. C'est moi qui l'ai monté.
Sa femme : - (Elle se déplace vers le robot, et l'examine de haut... en bas ! ) Mmm ! Il m'a l'air même très bien monté, ce robot...
Lui : - N'est-ce-pas ?... Chérie ?
Sa femme : - Oui... oui...
Lui : - Mais qu'est-ce que tu fais ?
Sa femme : - Rien. Mais pourquoi tu l'as acheté ?
Lui : - C'est un robot détecteur de mensonges. Si tu dis pas la vérité, il t'en colle une.
Sa femme : - Comment ça, il t'en colle une ?
Lui : - Il te fout une baffe.
Sa femme : - Non, mais, je ne vois pas pourquoi t'as acheté ça ?
Lui : - C'est pour notre fils, Romuald. Tu sais, il revient très tard le soir, et je pense qu'il ne nous dit pas la vérité.
Sa femme : - La vérité sur quoi ?
Lui : - Ben, c'est pas ses cours au lycée qui le retiennent si tard. Il doit y avoir autre chose.
Le fils entre.
Le fils : - B'soir les poteaux !
La mère : - Je t'ai déjà dit de ne pas nous appeler comme ça !
Le fils : - Bô ! C'que vous pouvez être scrabble, quand même !
La mère : - Qu'est-ce que le scrabble a à voir ici ?
Le fils : - Scrabble ! Vieux jeu, quoi ! Mais c'est grave : vous captez rien !
Le père : - Romuald, arrête avec ton portable !
Le fils : - Ho ! p'tain ! ça craint !
Le père : - Mets-toi à côté de ce type, là.
Le fils : - Céki c'type ?
La mère : - Discute pas, c'est un robot.
Le fils : - Un rob ? Non, mais ça squeeze sec dans vos têtes, là !
Le père : - Mets-toi là. Bien. Dis-nous maintenant ce que tu fabriques le soir après les cours ?
Le fils : - Je vous l'ai déjà dit : je bosse le latin avec les potes. (Le robot lui met une baffe.) Waow ! Mince ! Mais c'est grave ! C'est quoi ce plan ?
Le père : - C'est un robot détecteur de mensonges : dès que tu dis pas la vérité, il t'en colle une.
Le fils : - Non, mais c'est Hiroshima dans vos têtes, là ? (À part soi, la phrase suivante) Je vais te le niquer le rob, là !
Le père : - Bon alors, qu'est-ce que tu fais le soir après les cours ?
Le fils : - Je vais au catéchisme.
Romuald se baisse. Le robot envoie une baffe, mais Romuald en se baissant l'évite. Romuald se relève.
Le fils : - Niqué !
Le robot entraîné par son élan fait un tour complet sur lui-même. Et la baffe, augmentée par la violence de l'élan, s'écrase sur Romuald.
Le fils : - Ha ! Merde ! J'ai mal... Il m'a pété la mâchoire, ce con !
Le père va assister son fils.
Le père : - Mon fils, mon fils ! Mais aussi, pourquoi tu dis pas la vérité T'as qu'à faire comme moi : j'ai jamais menti à mes parents.
Le robot lui en met une.
Le père : - Punaise ! C'est vrai qu'il y va fort, ce con !
La mère va vers son mari et son fils.
La mère : - Rien de cassé, Chéri ?
Le père : - Non, non, ça va...
La mère : - Mais aussi, pourquoi vous dites pas la vérité tous les deux ? Ha ! c'est bien ton fils, tiens !
Le robot envoie une baffe à la mère !
LE JUGEMENT (DERNIER SKETCH)
Un juge d'instruction, suivi d'un inspecteur de police, entre.
Le juge : - Hop, hop, hop ! Que personne ne sorte, s'il vous plaît. Gardes, bloquez toutes les issues. Machinistes, envoyez la lumière dans la salle que je vois un peu à quoi res- semble tout ce beau monde. C'est bon, c'est bon, j'ai vu, éteignez tout. Avec ça, on est bien parti ! Inspecteur, les yeux sur eux tout de même : le premier qui bouge, vous me le coffrez net.
L'inspecteur : - Bien, M. le Juge.
Le juge : (À l'inspecteur) - Envoyez-moi les faits, s'il-vous-plaît.
L'inspecteur : - Ha bon ? Je dois aller les chercher ?
Le juge : - Mais évidemment mon vieux. Allez, allez, dépêchez-vous !
L'inspecteur : - Bien, M. le Juge. (Il sort.)
Le juge : - Un crime a été commis, et bien sûr, aucun indice exploitable sur scène. Et que faisaient tous ces messieurs-dames pendant ce temps-là ? Ils étaient au spectacle ! Ils rigolaient comme des baleines ! Ha ! elle est belle la France d'aujourd'hui !
Deux dames grimées en fée traversent la scène. L'inspecteur entre.
Le juge : - Non, mais, je rêve ! C 'est quoi, ça, inspecteur ?
L'inspecteur : - Ben... Vous avez demandé les fées, je vous les ai envoyées.
Le juge : - Les faits ! F. A. I. T. S. !
L'inspecteur : - En effet, je me suis fait avoir. C'est un fait. Ha, ha, ha... ! J'y re-fais.
Le juge : - C'est ça, c'est ça, faites de l'esprit, inspecteur, et vous allez finir à la circulation.
L'inspecteur : - Pardon, j'y revais. (Il sort.)
Le juge : - Hou là là ! va falloir se réveiller ! On n'est pas chez Monty Python, ici. J'ai une affaire sérieuse sur les bras, moi. Un jugement à rendre.
L'inspecteur entre. Il tient un procès-verbal dans la main, et le donne au juge.
L'inspecteur : - Voici les faits tout frais, c'est le double effet des fées !
Le juge : - Qu'est-ce que je vous ai dit à vous ? Hein ? La circulation, mon vieux, la circulation !
L'inspecteur : - Pardonnez-moi, M. le Juge.
Le juge : - Je lis : « Un crime de détournement de sentiments a été commis. » Détournement de sentiments. Rien que ça. Je continue la lecture du procès-verbal : « Des hommes et des femmes qui avaient de la peine, ou qui étaient affligés de toutes sortes de maux : tristesse, chagrin, ou pire, qui étaient frappés de désespoir, ont vu leurs sentiments détournés au profit de la joie. On soupçonne que l'inverse a pu aussi se produire. » Non, mais c'est grave ! Nous sommes devant un cas avéré de désobéissance sentimentale. C'est passible de la rigolade à perpétuité, ça !
Bon, on va voir ce qu'on peut faire. Inspecteur, faites entrer le premier suspect.
L'inspecteur : - Bien, M. le Juge. (Il sort pour aller chercher la dame du premier sketch, et revient avec elle.)
Le juge : - Madame, votre alibi, s'il-vous-plaît ?
La dame : - J'étais dans une pharmacie pour acheter des médicaments concernant mon mari. Tous ces messieurs-dames m'ont vu, ils peuvent en témoigner.
Le juge : - Alibi béton, rien à dire. Restez là pour la confrontation finale. Suspect suivant, s'il vous plaît.
L'inspecteur fait le même jeu que précédemment, et revient avec les ''Alexandrins''.
Le juge : - Vos alibis ?
L'amoureux : - Je voulais en public ma cour faire à Madame...
L'adorée : - Quand une devinette a contrarié son âme.
L'amoureux : - Cupidon, je n'ai vu ; et cela me messied.
Le juge : - Vous ne savez parler qu'en vers de douze pieds ?
L'adorée : - Ben oui. Pourquoi, Monsieur ? Est-ce que cela vous gêne ?
L'amoureux : - Nos mots enrubannés vous font-ils de la peine ?
Le juge : - C'est bon, c'est bon. Inspecteur, on ne va pas y passer la nuit. Tous les suspects potentiels, soit un extraterrestre, un patient constipé, un médecin, un psychanalyste, etc, etc, tous ont eu des alibis vérifiés ?
L'inspecteur : - Oui, M. le Juge.
Le juge : - Bien. Faites-les entrer.
L'inspecteur sort, et revient avec tous les comédiens restés en coulisse.
Le juge : - Messieurs-dames, je vais vous demander de jeter les masques. C'est aux individus que je m'adresse, aux comédiens, et non pas aux personnages. Vous êtes accusés de vous être emparés de sentiments pour les trafiquer. Vous êtes coupables de détourne- ment de sentiments. Dont acte.
Un comédien : - M. le Juge, que dites-vous ? Nous sommes comédiens, et alors ? C'est notre passion. Nous la faisons dans la plus grande légalité, et en toute honnêteté.
Le juge : - Oui, enfin, vous trafiquez avec les sentiments.
Le comédien : - Trafiquer n'est pas nuire, que je sache. Et d'ailleurs, c'est tout l'art de notre travail : faire passer des émotions . Nous produisons du rire, des pleurs, de la surprise, de la tendresse, etc. Où est le mal ?
Le juge : - Ce sont des sentiments volés ! Vous faites désobéir des émotions pour les rendre factices.
Le comédien : - Non : les sentiments que nous donnons au public sont réels. Lorsque nous jouons la tendresse, l'amour, le public sent réellement son cœur battre. Si nous voulons amuser notre auditoire, nous produisons de l'humour, du rire. Le public ne s'y trompe pas. Quand nous sombrons dans le pathos, et que nous tirons des larmes des yeux des spectateurs, elles sont véritables. Les sentiments que nous produisons sont authentiques. Ils naissent spontanément. Il n'y a pas de détournement, de désobéissance, de vol, ou que sais-je. ?
Le juge : - Le gonze a de solides arguments... C'est toujours sur moi que ça tombe les affaires
pourries. Bon, il me faut un coupable. La Justice le réclame. Pourquoi pas le public ? C'est vrai, aussi : pourquoi vous venez ici, vous, si ce n'est pour voler des sentiments ?
Le comédien : - M. le Juge, je suis désolé : il n'y a pas de vol de sentiments puisque nous les donnons. D 'ailleurs, il n'y a pas de vol du tout : tout est fait dans la légalité. Soit, les gens paient leur place, soit ils sont invités. Et puis, il y a les droits d'auteur qui sont payés, la location de la salle, la TVA, etc. Tout est légal.
Le juge : - Légal peut-être, mais pas recommandable !
Le comédien : - M. le Juge...
Le juge : - Stop ! On ne va pas s'en sortir si vous argumentez tout le temps, mon cher ! Voici ce que je propose : la sentence populaire. Vox populi, vox dei. Référendum par
applaudissements ou sifflets. Le couple d'Alexandrins, vous pouvez venir, s'il vous plaît ? Bien. Mettez en forme ce que je viens de dire. C'est votre travail, non ?
Les ''Alexandrins'' s'adressent au public.
L'amoureux : - En vertu du pouvoir qui nous est conféré,
Nous soumettons ce jour à votre autorité
L'adorée : - De juger cette pièce en votre âme et conscience :
Coupables sommes-nous ? Ou bien, plein d'innocence ?
L'amoureux : - Mais, vous-même, public, vous êtes accusé...
Aussi, voici un jeu qui va vous disculper :
L'adorée : - Oui, nous vous proposons pour laver cet affront,
D'être unis avec nous,
L'amoureux
et l'adorée : - de faire un même front.
L'adorée : - Voici : si vous pensez que tous sommes innocents,
Auteur, acteurs, public, vos applaudissements
Feront jurisprudence.
L'amoureux : - Mais si vous supposez
Coupables sommes tous, vos sifflets, vos huées,
Pourront le confirmer.
L'adorée : - Que votre jugement
Fasse du même coup justice aux points suivants.
L'amoureux : - Comment percevez-vous des acteurs la prestance ?
Leur jeu vous a-t-il plu ? A-t-il eu consistance ?
L'adorée : - Avez-vous pris plaisir à voir la mise-en-scène ?
Et les mots de l'auteur, sont-ils pure fredaine ?
L'amoureux : - Ou bien ont-ils charmés vos oreilles sévères,
Comme le fait Vénus dans les grands lits de chair ?
L'adorée : - À vous donc, Messieurs-dames d'émettre un jugement
L'amoureux : - Par vos huées ou bien vos applaudissements.
L'adorée : - Pour nous, saltimbanques des sentiments, repos.
L'amoureux : - La magie plein les yeux nous vous disons :
Tous les comédiens ensemble : - RIDEAU !