Télé-sketches. Vol. 13. 8 sketches

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Jean Legeay a longtemps écrit pour la télévision. Dans la série Télé sketches, il livre ses sketches interprétés par les plus grand au cours des émissions « La Classe » et «Bouvard du rire.»
« La peuplades des gens de la télé »
« Les méfaits du coca »
« L’important, c’est le dialogue »
« Leçon d’algèbre »
« J’aime l’Afrique et sa gaieté »
« La cheminée »
« Les déclarations d’amour »

La peuplade des gens de télé

Personnages :

Une présentatrice (ou un présentateur) de conférences de vulgarisation scientifique

Un(e) ethnologue

Le directeur des programmes d’une chaîne de télévision

Son adjointe

Le présentateur (ou la présentatrice) du journal télévisé de la chaîne

Deux vigiles (rôles muets)

 

Sketch prenant la forme d’une conférence faite par un ethnologue interrogé par une présentatrice, avec illustration de ses propos par des saynètes censées être des documents filmés.

D’abord la présentatrice, seule, debout et s’adressant directement au public.

La présentatrice : Mesdames et messieurs, bonsoir… Et bienvenue à cette soirée de notre association « La science pour tous », avec comme toujours une suite d’invités passionnants, tous savants de haut niveau qui viendront nous parler de leurs dernières découvertes… Nous commencerons par une page d’ethnologie, avec le professeur Jacardovitch, le célèbre spécialiste des peuplades primitives… Je vous demande de l’applaudir ! (Elle tend le bras vers les coulisses. L’ethnologue fait son entrée.) Bonsoir, professeur…

L’ethnologue : Bonsoir…

La présentatrice : Je vous en prie, asseyez-vous… (Ils s’assoient face au public.) Ce qui nous a amenés à vous inviter, professeur, c’est une découverte renversante que vous venez de faire… Tout le monde a en mémoire votre découverte il y a quelques années de la peuplade des Ngaoulé-ngaoulé, une peuplade jusqu’alors inconnue vivant au coeur de la forêt tropicale… Cette fois, c’est en plein Paris que vous avez découvert une peuplade primitive…

L’ethnologue : Oui… La peuplade des Gens-de-télé…

La présentatrice : Il s’agit essentiellement, je crois, d’une peuplade de guerriers…

L’ethnologue : Oui… La chasse et la cueillette, c’est pas leur truc… Ou alors la chasse au gros contrat et la cueillette de patates… Non, leur passion, c’est la guerre… La peuplade est partagée en plusieurs tribus, qui se livrent sans cesse des guerres sanglantes, qu’ils appellent “guerres des chaînes”…

La présentatrice : Vous nous avez fourni à ce sujet, professeur, un document filmé passionnant… Si vous le voulez bien, nous allons le faire découvrir au public… Et nous poursuivrons notre entretien après…

 

Saynète 1. Le directeur des programmes d’une chaîne de télévision, son adjointe.

Le directeur : Alors, coco ? Quelles sont les nouvelles du front ?

L’adjointe : Pas bonnes, Monsieur le directeur… Sur le front du 18-19 heures, ça va, avec notre jeu de la cragnotte magique, on tient nos positions…

Le directeur : J’espère bien ! Un jeu où on voit des candidats risquer leur peau pour des clopinettes et où un blaireau sur deux finit à l’hôpital quand ce n’est pas à la morgue ! Si avec ça on ne gagnait pas la bataille du pré-access prime time, ce serait à désespérer…

L’adjointe : Mais sur le front du 19-20 heures, c’est la débâcle… Chauchard n’a pas tenu le choc… Son talk-show humanitaire est à 6% de parts de marché…

Le directeur : Qu’est-ce que j’avais dit ? Bon Dieu, j’aurais jamais dû me laisser convaincre de mettre à l’antenne ce foutu talk-show humanitaire ! Je le savais  bien, que c’était pas avec des bataillons de crève-la-faim et de myopathes qu’on gagnait la bataille de l’audience ! En plus, il faut bien dire, Chauchard est en dessous de tout… Cette idée d’aller filmer dans les bidonvilles des 5 continents la vie quotidienne de vrais pauvres et de montrer ce qu’il appelle “le vrai visage de la misère”… Si la misère était télégénique, ça se saurait ! T’as regardé son émission d’hier, coco ?

L’adjointe : Non, j’avoue que non…

Le directeur : Tiens-toi bien, il nous a montré pendant un quart d’heure la vie d’une famille de Portoricains qui vivaient à 8 dans 12 mètres carrés… Quel intérêt ? Mais quel intérêt ? Ils vivraient à 60 dans 12 mètres carrés, là oui, ça deviendrait intéressant, on pourrait les filmer en train d'entrer 60 à la queue leu leu dans leurs 12 mètres carrés, les gens se bidonneraient… Mais 8 personnes vivant dans 12 mètres carrés, ça n'intéresse strictement personne…

L’adjointe : Là, vous exagérez un peu…

Le directeur : Mais non je n'exagère pas ! Que veux-tu que j'y fasse, si les pauvres sont incapables de renouveler le concept de misère ? Ils n'ont qu'à se prendre par la main, aussi ! Donner un coup de neuf au spectacle ! Ils nous montrent la même chose depuis des décennies… Des rats, de la poussière, des tôles rouillées et des gosses dépenaillés… Quand on veut passer à la télé, on fait un effort de créativité, que veux-tu que je te dise ! Bon, c’est pas tout ça… Il s’agit de reconquérir le terrain perdu… On n’a pas le choix, il faut tailler dans le vif… Pour commencer, les pauvres et les myopathes, aux oubliettes ! Le général Chauchard, à la retraite d’office ! Et dans la foulée, une vigoureuse contre-attaque menée par les troupes de choc !

L’adjointe : Les troupes de choc ?

Le directeur : Oui, le général Bibip et son commando de comiques…

L’adjointe : Bibip et ses comiques ? Vous n’y pensez pas, Monsieur le directeur ? Et notre image de marque ?

Le directeur : Notre image de marque, je m’en fous ! À la guerre comme à la guerre ! Ça va saigner, coco, c’est moi qui te le dis ! Il va y avoir de la viande collée aux murs ! Pas...

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