Double je

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Jérôme est marié à Lola depuis vingt ans. Mais il ne supporte plus les tocs et les troubles hypocondriaques de sa femme ! Ce soir s’est décidé, il la quitte pour rejoindre sa maîtresse.
Toutefois, un incident imprévu va bouleverser ses plans… Comment Jérôme va-t-il parvenir à gérer la situation et garder son sang-froid entre les allées et venues d’un collègue envahissant, et ceux d’une soeur acariâtre et de son époux insipide ?
Et qui est vraiment Lola ?

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ACTE I

Scène 1

 

Jérôme reçoit un appel de sa maîtresse.

Jérôme, sensuel. – Alex... Bébé c’est moi... oui... oui moi aussi je décompte les heures... Oui... Les minutes aussi... Non, je suis seul, elle n’est pas encore rentrée. Et toi, tu fais quoi ? Noon !... Nooon !... Arrête, tu me rends fou ! Je te jure, demain tu ne vas plus savoir comment tu t’appelles, toi ! Oui... Moi aussi... partout. à demain. (à lui-même.) Ah quelle bombe cette Alexia !

Il va dans la chambre.

Lola arrive chargée de paquets. Sur la table du salon, des revues de vacances sont étalées. Elle s’assure plusieurs fois que la porte est bien fermée.

Lola. – Jérôme ! Tu peux pas venir m’aider, je croule sous les paquets ! (Pas de réponse. Elle est prise d’éternuements.) Aa... Aa… tchi !

Jérôme, en off, il n’a pas envie de l’aider, imitant la voix du répondeur. – Bonjour, vous êtes bien chez Jérôme Donnéa. Je ne suis pas là pour le moment mais laissez votre message après le bip sonore. Bip !

Lola. – Jérôme !

Il sort de la chambre à coucher.

Jérôme. – On se calme ! Comme je vois, la journée a été fructueuse ! Alors, laisse-moi deviner : trois paires de chaussures, sept robes, un trench, un manteau, deux sacs et...

Lola. – Au lieu de faire de l’humour à dix balles, viens m’aider !

Jérôme, ne bouge pas. – Il manque quelque chose.

Lola. – Tu as raison... Tout de suite !

Jérôme, moqueur. – J’adore quand tu me parles comme ça ! (Il ne bouge pas d’un millimètre.)

Lola, du bout des lèvres, excédée. – Allez ! S’il... te... plaît...

Jérôme, ironique. – Demandé de manière aussi spontanée... Je les dépose où ?

Lola, hausse les épaules. – Dans le frigo ! Tu as parfois de ces questions...

Jérôme. – Note que dans le frigo, au moins il y a de la place. (Il va dans la chambre à coucher avec une partie des paquets.)

Lola, renifle. – ça sent le gaz ici ! Tu ne sens pas ? Si, ça sent le gaz ! Merde, j’ai oublié de fermer le gaz ! ! ! ! Atchi !

Jérôme. – ça, ça m’étonnerait. Tu as vérifié dix fois avant de partir ! (L’air faussement grave.) Mais tu as raison, une fuite ça arrive sans prévenir... Regarde l’immeuble qui a sauté la semaine dernière...

Lola, affolée. – J’y vais !

Jérôme. – Alors ?

Elle revient dans le salon.

Lola. – Non... Rien d’anormal… Bizarre…

Jérôme, en rajoutant de plus belle. – Tu es sûre ? Tu as fermé la vanne de gauche à droite ou de droite à gauche ?

Lola. – Mais je ne sais pas... T’es marrant, on fait ça machinalement.

Jérôme, moqueur. – Grave erreur ! Ils ont certainement dit la même chose quand l’immeuble a explosé et tu vois où ils en sont aujourd’hui...

Lola. – Ooooh mais arrête ! Tu me fais hésiter maintenant. Je retourne voir.

Elle revient.

Lola. – C’est bon, tout est fermé mais j’ai quand même un peu la tête qui tourne...

Jérôme. – Eh bien, tourne-la dans l’autre sens !

Lola. – Je vais peut-être m’évanouir et c’est tout ce que tu trouves à dire ?

Jérôme. – Oui... où vas-tu encore ?

Lola. – Je ne suis pas sûre d’avoir fermé la porte et je ne retrouve pas mes clés. (Elle fouille dans son sac et finit par les trouver.) Ah, je les ai ! (La porte est fermée.) Oh pourtant, j’aurais juré ne pas l’avoir fermée. Atchi !

Jérôme. – Dis donc, t’as pas le temps de t’emmerder toi la journée entre le rituel du gaz, des clés, le shopping et le rangement ! Heureusement que tu ne bosses pas ! Tu serais débordée !

Lola. – Oui, eh bien, en parlant d’ordre, demain c’est le 21 et j’aurai besoin de toi pour me donner un coup de main.

Jérôme, qui pense à son rendez-vous avec Alexia. – Demain… ça me paraît difficile voire... impossible.

Lola. – Arrange-toi comme tu veux mais le 21 avril, c’est sacré !

Jérôme, revient dans le salon, ironique. – Dieu que je suis con ! Et dire que j’ai failli oublier la fameuse tradition du 21 avril. Pas du 20 ou du 22, non, du 21 ! Et là c’est la migration ! Les gros pupulls en mohair, les merveilleuses doudounes matelassées de toutes les couleurs et les increvables chaussettes norvégiennes, au grenier !

Lola. – Et alors ? C’est ça être organisée !

Jérôme. – Organisée ? Robotisée oui ! (Imite la voix d’un robot.) Je... suis... Lola... le... robot... toc toc... qui... programme... toujours… tout... et... qui... ne... laisse... rien... au... hasard…

Lola. – Ah chez toi c’est sûr, la programmation a dû merder parce que comme fouteur de bordel, y’a pas mieux...

Jérôme. – Écoute Robocop, je n’ai pas envie de me prendre la tête. J’ai plutôt envie d’un bon apéro. Je te sers ?

Lola, offusquée. – Mais Jérôme, est-ce que tu penses une minute à mon diabète ? Non, bien sûr ! Tu t’en fous si je me transforme en pain de sucre !

Jérôme, excédé. – Allez ! Encore les grands mots ! Mais tu n’as pas de diabète, tu as fait un contrôle il y a 6 mois ! Tout était au top !

Lola, sur un ton angoissé. – Oui mais en 6 mois ça peut changer ces trucs-là et je n’ai pas envie de finir à l’insuline ! D’ailleurs, je refais un check la semaine prochaine. Et tu devrais en faire autant. (Regardant son estomac bedonnant.) ça doit être bourré de cholestérol là-dedans !

Jérôme. – Lola, tu me pompes !... à insuline bien sûr ! (Il part vers la chambre à coucher porter les paquets restants.)

Lola, hystérique, voyant le veston traîner sur le divan. – Jérôme, je te rappelle que je ne suis pas ta bonne. Je te confirme aussi que tu as deux mains, deux jambes et (en hurlant et tapant des pieds) que ça prend trente secondes de pendre cette veste sur un cintre ! Et ne fais pas semblant de ne pas m’entendre ! ! ! (À elle-même.) Oh ça y est, mes palpitations qui recommencent !

Jérôme, excédé. – Comment veux-tu que je ne t’entende pas ? (En hurlant.) Tu hurles ! Et je te signale que je ne suis pas sourd ! Et puis ma veste au moins, elle ne fait pas tache sur le divan ! Je n’en dirais pas autant de ton vieux plaid tout mité qui est en phase de décomposition et qui pue !

Lola, outrée. – Mon plaid, tout mité ! Touche pas à mon plaid, tu veux, il est beau mon plaid, j’adore mon plaid et puis lui au moins il est toujours là quand j’ai besoin de lui ! (Elle prend son plaid dans les bras et le berce.)

Jérôme. – Mais t’es complètement tarée ma pauvre Lola. Se bouffer la gueule pour une veste mal rangée.

Lola, piquée au vif. – Pas rangée !

Jérôme, retournant le couteau dans la plaie. – Et pour un plaid pourri  !

Lola. – Aa... atchi !

Jérôme. – Pourri et plein de poussière !

Lola. – Recommence pas… Oh la la.

Jérôme. – Quoi encore ???

Lola. – Oh la la ! Non, je ne peux pas voir ça !

Jérôme. – Tu ne peux pas voir quoi ?

Lola, pointe du doigt les catalogues de vacances qui ne sont pas bien alignés et angoisse. – Là, tu ne vois pas ? Les catalogues !

Jérôme, sur un ton condescendant. – Oui, c’est bien. Tu vois des catalogues. Je te rassure. Moi aussi !

Lola. – Mais non ! Regarde, ils ne sont pas alignés ! Je ne supporte pas ! (Elle se lève et range les catalogues pour qu’ils soient parfaitement alignés. Puis elle prend un spray désinfectant et s’en imprègne les mains qu’elle frotte ensuite énergiquement.) On ne sait jamais qui les a pris en main !

Jérôme. – Mais c’est moi !

Lola. – Eh bien raison de plus ! Tu as déjà seulement pensé où tes clients mettent leurs doigts en attendant leur tour dans ta salle d’attente ? Non évidemment. Et puis qu’est-ce qu’ils font après ? Eh bien ils te serrent la main ! Rien que d’y penser, ça me donne la nausée ! (Elle se désinfecte à nouveau les mains.)

Jérôme, désabusé. – Je ne te retrouve plus Lola, tu étais douce, pleine de projets, gaie, amoureuse et là je vis avec une hypocondriaque, aigrie, maniaque et pour qui la fantaisie n’a plus de place !

Lola, outrée. – Aigrie ? Mais je n’ai aucune raison d’être aigrie ! La vie m’a tellement gâtée ! Une fausse couche et toi si absent, si impénétrable. Puis tous les traitements difficiles qui ont suivi, en vain, tu te rappelles... Je devenais dingue parce que j’étais devant le fait accompli sans pouvoir rien changer. « Désolé madame, vous ne pourrez jamais avoir d’enfants. » Désolé... Et puis cette adoption que tu m’as refusée…

Jérôme. – Oh je sais, ça tu ne me l’as jamais pardonné ! Mais tu sais bien que c’était le parcours du combattant et tu étais si fragile. Je n’ai pas voulu aller jusqu’au bout. Par peur ou par lâcheté... Je ne sais pas… Peut-être la peur de ne pas être à la hauteur, de me battre pendant des années et des années pour rien et la lâcheté vis-à-vis de l’environnement extérieur, du qu’en dira-t-on, « l’arme des médiocres qui nous frappe en plein cœur »...

Lola. – Oui, eh bien, cette blessure-là, tu vois, jamais elle ne cicatrisera, jamais ! Et après tout ça, il a fallu gérer la perte de mon boulot dans lequel je m’étais réfugiée pour essayer...

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