Fausse baronne mais vraie g…

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Lucie ne porte pas dans son cœur sa belle-sœur Ludivine, une bêcheuse de première classe, or celle-ci s’annonce inopinément dans la retraite de Lucie. Marie et Rémy se coaliseront pour faire descendre la “baronne” de son piédestal. Gags et situations comiques sont au rendez-vous pour rire et se détendre.

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ACTE 1

 

Lucie, assise dans un fauteuil, parcourt distraitement le journal.

Léa (entre) - Le courrier de Madame est avancé.

Lucie - Tu es d’une humeur fracassante. J’ai horreur que tu dises « Madame », tu me présentes toujours le courrier de cette façon, tu es agaçante à la fin.

Léa - Je vous ferai respectueusement remarquer que je suis quand même l’employée de Madame, Madame.

Lucie - Par-dessus le marché tu te moques de moi. Tu es ma collaboratrice et surtout, après toutes ces années, ma meilleure amie.

Léa - C’est vrai. Mais il n’empêche que le matin, il me faut un temps de chauffe. T’es pas marrante, avoue, quand nous sommes seules, ou presque, je te tutoie et t’appelle par ton prénom et lorsque nous sommes en société, je t’appelle toujours par ton prénom, mais le vouvoiement est de rigueur. Il y a de quoi s’y perdre, non ?

Lucie - Dans mon métier il faut toujours garder un peu de distance avec ses équipiers du même sexe sinon les langues vont bon train.

Lucie - Celle-ci tu ne me l’avais jamais faite. Tout le monde connaît ton penchant et le mien, pour le sexe dit fort.

Lucie - Le doute pourrait être permis, nous ne nous quittons pratiquement jamais.

Léa - Bien sûr, je suis à la fois ton majordome, ta gouvernante et ta secrétaire. J’ai de plus en plus de mal à assumer tous ces rôles. Il ne manquerait plus que je sois ta petite copine. (Rires.) C’est Rémy qui serait surpris d’apprendre ça !

Lucie - D’apprendre quoi ?

Léa - Que nous sommes plus liées que les deux doigts de la main. Enfin, tu vois ce que je veux dire.

Lucie - Qu’est-ce que tu racontes ? Tu es folle. Je l’aime, Rémy, figure-toi ! Alors, ne t’avise pas de lui raconter des bêtises ou…

Léa - Ce que c’est facile de te faire grimper aux arbres ! C’est toi qui as commencé avec tes allusions. Je te rappelle que j’ai également un charmant garçon dans ma vie.

Lucie - J’aimerais d’ailleurs bien faire sa connaissance. Je vais finir par croire qu’il s’agit de l’homme invisible.

Léa (évitant le sujet) - Bien, si on l’ouvrait ce courrier ? Je me charge de tout ce qui est pub, à toi l’honneur pour le reste. Et hop ! (Elle prend la pile de courrier, remet les lettres à Lucie et lance joyeusement toute la pub dans la poubelle.) Eh bien, tu n’es pas rapide. Moi j’ai terminé.

Lucie - Si je pouvais mettre toutes ces lettres à la poubelle, je m’éviterais bien des corvées mais je me créerais bien des problèmes.

Léa - Allez, donne-m’en un peu, je suis brave fille. Plus vite nous aurons terminé, plus vite nous profiterons de ce grand week-end.

Lucie - Rien de tel qu’un retour aux sources pour recharger ses batteries. Comme j’ai eu raison de conserver la maison de mes grands-parents !

Léa - D’autant plus que ton grand amour vit dans ce charmant petit trou perdu.

Lucie (rêveuse) - Et pas de téléphone pour rompre le calme. Le bonheur !

Léa (parcourant une lettre) - Dis donc ! Oh ! ça, je n’en reviens pas !

Lucie - Tu n’en reviens pas de quoi ?

Léa - Tu te souviens du jeune couturier que tu as descendu en flamme dans ton dernier article ?

Lucie - Je ne risque pas de l’oublier. Et alors ?

Léa - Alors, il est furax. Ouh là là ! Sa littérature est très imagée.

Lucie - Donne.

Léa - Non, je vais te faire la lecture de sa prose. « C’est une ignominie de voir qu’une vieille fille acerbe comme vous souhaite faire avorter la carrière du jeune artiste créateur que je suis. Mon sens du volume et ma vision du futur auraient dû, au contraire, vous enchanter. Si votre esprit n’était pas si hermétiquement clos au renouveau, vous auriez pu ouvrir une fenêtre sur l’avenir. La soie et la dentelle doivent, comme vous, être mises au placard. »

Lucie - Il m’a l’air plus doué pour le verbe que pour la couture.

Léa - Avoue que sa réplique est à la hauteur de ton article. Peut-être y es-tu allée un peu fort.

Lucie - Attends ! Tu étais présente lors de la présentation de sa collection et, que je sache, tu n’as pas vraiment apprécié.

Léa - En effet, mais peut-être est-il le précurseur de la nouvelle vague, comme ces peintres méconnus de leur vivant et passant à la postérité le jour de leur mort.

Lucie - Je t’interdis de prendre sa défense. Quelle femme pourrait être suffisamment allumée pour porter de telles tenues ? Tu aurais dû, comme moi, venir dans les coulisses. Ces pauvres mannequins, toutes vêtues de métal, revenaient du défilé les yeux pleins de larmes. On leur interdit de sourire, mais elles n’en avaient guère envie. Que dirais-tu si l’on t’enfilait de force un soutien-gorge fait de boîtes de conserve ?

Léa - L’image est un peu surréaliste. Cela m’a plutôt fait penser au concert de Madonna. Tu sais bien, son bustier en cône alumine.

Lucie - À la différence près que le sien était à sa taille. Cette fille faisant un bon 85C, s’est vue contrainte de porter du 80A sous prétexte que ce demeuré n’aime pas les gros seins. La tige de métal servant de fermeture avait mordu ses chairs.

Léa - Mon dieu !

Lucie - Ce jean-foutre, pardonne-moi l’expression, aurait pu être un digne représentant de l’inquisition. Que penser du corset ? Vu de face ce n’était pas trop mal, une cotte de maille très légère, très articulée, l’ondulation des hanches et l’orientation parfaite du projecteur le faisait miroiter. Un « oh ! » admiratif a couru parmi les spectateurs.

Léa - Tu vois, tout n’était pas négatif.

Lucie (furieuse) - Laisse-moi finir ! Lorsque le mannequin s’est retourné, tout le monde a déchanté. Il s’agissait en fait d’une ceinture de chasteté améliorée. Pas question de galipettes. Pour déshabiller la belle il faut des clés pour ouvrir les cadenas. Eh oui ! Un pour le haut, un pour la ceinture et un pour l’entrejambe. L’amant éventuel a tout intérêt à prévoir la caisse à outils, ouvre-boîte, pince coupante et peut-être coupe-boulons, sans oublier une trousse de premier secours et…

Léa - Stop ! O.K., c’est un minable. Tu réponds à sa lettre.

Lucie - Non !

Léa - Alors au panier.

Entrée de Marie.

Marie - Bonjour mes petites dames.

Léa et Lucie - Bonjour Marie !

Marie - Vous m’avez l’air chagrin. Voyez-moi ça, ce teint gris. Décidément l’air de Paris ne vous vaut rien. Notre bonne campagne et moi-même allons vous redonner des couleurs. J’ai pensé à vous, regardez ce que je vous apporte : de bonnes brioches bien dorées pour accompagner le café.

Léa - Merci pour les brioches.

Lucie - Et le café ?

Marie - Vous ne sentez pas ? Il est en train de passer. Plus d’odorat non plus. J’en ai pour deux minutes. (Elle sort.)

Lucie - Marie est une femme épatante.

Léa - Et une cuisinière du tonnerre. Heureusement que nous ne restons pas un mois, sinon bonjour les kilos.

Lucie - Le courrier attendra jusqu’à mardi. Profitons de ces trois jours de détente et des bons petits plats de Marie.

Léa - À nous le farniente !

Marie (revient avec le plateau de café) - V’là le café, et du vrai, dans la capitale vous ne buvez que du jus de chaussette. Rien de tel qu’un petit noir pour vous mettre en forme.

Léa- Tout à fait d’accord.

Lucie - Si vous preniez le café avec nous ?

Marie - Ce n’est pas de refus, je suis crevée.

Léa - Vous, Marie, vannée à dix heures du matin ?

Marie (s’assied et se sert un café) - Pour tout vous dire, le Gustave et moi, on est plutôt du matin.

Lucie - Je vois ! La vie à la campagne, debout au chant du coq, un petit footing puis le jardin.

Marie - Le footing ? Tu rigoles ! C’est un sport inventé par vous, les citadins, afin d’avoir l’air de garder la forme. Je vous dis : Gustave et moi… (Petit geste de la main avec deux doigts.)… on est du matin.

Léa - Nous avons compris, vous êtes comme les deux doigts de la main et vous vous levez aux aurores afin d’avoir une journée bien remplie.

Marie (riant) - Vos neurones sont salement encrassés, il faut dire qu’avec la pollution… Je répète : Gustave et moi, le matin… Vous ne pigez toujours pas ? Le sport coquin… La gymnastique en chambre… Dites donc, va-t-il falloir que je vous fasse un dessin ?

Lucie - Non, non, surtout pas, nous avons compris.

Léa se tord de rire.

Marie - Vous êtes longues à la détente, et ça vous fait rire Mam’selle Léa.

Léa - Je ne vous imaginais pas en train de…

Marie - Ce n’est pas parce que nous avons presque l’âge de vos parents que nous faisons abstinence. Je suis assez bien conservée pour faire encore envie à mon homme.

Lucie - Nous n’en doutons pas.

Marie - Nous n’avons pas trouvé nos enfants dans des choux ou dans des roses. Nous avons fait comme tout le monde et peut-être mieux. Pas besoin de mode d’emploi et, entre nous, le septième ciel tous les jours.

Léa - Tous les jours ! (Sifflements admiratifs.)

Marie - Presque. Faut être honnête, il y a eu quelques ratés, mais on peut les compter sur les doigts de la main.

Lucie - Ça explique les cinq mômes.

Marie - Faire des enfants, vous appelez ça avoir des ratés ? Pour moi c’est une réussite à cent pour cent. On en voulait cinq, et nous en avons eu cinq. Il faut vous dire que le Gustave il était assez adroit pour ne pas me mettre de polichinelle dans le buffet tous les ans. Maintenant il faut la pilule, le préservatif, ces messieurs ne veulent plus faire d’effort. À ce qu’il paraît, c’est frustrant pour la relation. Et la conserve, ce n’est pas frustrant ?

Lucie - La conserve ?

Marie - Eh bien oui, quoi, le petit bout de plastique !

Léa - Alors comme ça, le Gustave est un amant de première.

Marie - Je vous vois venir avec vos gros sabots. Vous n’en saurez pas plus, c’est trop intime. N’empêche, quand j’étais plus jeune le… Vous voyez ce que je veux dire… C’était comme des amphétamines, je pétais le feu. Maintenant, la bricole agit plutôt comme un somnifère, ça me laisse toute vermoulue… Bon, ça suffit, parler pour ne rien dire ça ne fait pas le boulot. Allez, je m’y jette. Je vais déplacer un peu de poussière et me mettre aux fourneaux. Pour le repas j’ai prévu léger : une bonne salade lyonnaise, un gratin de pommes de terre, un rôti de porc, du fromage et un gâteau de riz. J’ai prévu large, au cas où un invité pointe son nez. (Clin d’œil à Lucie et elle sort.)

Lucie - Je n’en reviens pas.

Léa - Moi non plus. Tu parles d’un repas léger.

Lucie - Mais non, elle et Gustave.

Marie (pointe son nez à la porte) - À titre d’information, le Gustave et moi, on était très amoureux et nous le sommes toujours. C’est beau, non ?

Léa - Formidable...

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