Tableau 1 : Suzie et Juvénal assis à la table de leur cuisine dans la ferme :
Suzie : L'amour, ah l'amour... cette petite flamme qui jamais ne s'éteint et n'attend que le vent de la passion pour redevenir un brasier tumultueux.
Juvénal : L'amour, c'est quand je lui dis : « ce soir, on ne regarde pas le foot à la télé, tu peux mettre ce que tu veux » ... de toute façon, j'aime pas le foot
Suzie : L'amour, cette fièvre qui nous emmène au-delà de nos limites dans des élans d'euphorie.
Juvénal : L'amour, c'est quand je lui dis « t'embête pas avec la vaisselle, ce soir … tu la feras demain matin »
Suzie : L'amour, ce nectar à la fois fort et suave que l'on boit à deux !
Juvénal : L'amour, c'est quand elle me dit, « t'es trop bourré, je prends le volant »
Suzie : L'amour c'est bâtir à deux nos projets en regardant ensemble vers l'infini
Juvénal : C'est par ou l'infini ?
Suzie : Mais c'est une image, bourricot. L'amour, c'est pouvoir supporter ses défauts, tous ses défauts ! … Et parfois, y'en a un paquet
Juvénal : L'amour, ben c'est quand on est deux à rentrer la récolte de patates, parce que tout seul, c'est fatigant !
Suzie : L'amour, ce doux parfum d'irrationnel qui nous incite à nous sublimer, à être tout, l'un pour l'autre
Juvénal : L'amour, c'est bien, mais faut pas abuser non plus parce qu’il y a le travail. Allez hop ! Au boulot !!!
Suzie : Et ben voilà ! l'amour, c'est le piège à con ! Les 20 ans de bagne ! Quand j'étais petite, je lisais des histoires de princesse qui embrassait un crapaud. Sous l'effet du baiser, le crapaud devenait prince charmant... Eh bien moi-aussi, j'ai trouvé mon crapaud, je l'ai embrassé et... et c'est resté un crapaud, vulgaire, rustre, difforme et répugnant. Et ça ne s'arrange pas avec le temps, ben non, comme il vous a trouvé, qu'il n'est plus seul, plus besoin de faire d'efforts pour vous séduire, relâchement assuré ! Il prend 30 kilos, se met à péter au lit ! Ah ! Le pet au lit, c'est le préliminaire de la routine qui s'installe, c'est la sortie de la romance pour arriver dans le quotidien pur et dur ! Et ça se lâche ! Au nom de tous les pets contenus par galanterie pendant ces mois où il vous camouflait ses mauvaises habitudes ! De toutes les créatures de ce monde, l'homme est le seul qui, pour vous séduire, cache sa vraie nature... remarquez, avec lui, je n’ai pas eu a attendre longtemps... il est du genre naturel et spontané, il n'a même pas conscience que ça peut incommoder !! je pense à ceux qui m'ont dit « mais il a une bonne situation ! Il a une grande propriété, du terrain... Non vraiment, tu n'as pas tiré le mauvais cheval... (elle rit) pas un mauvais cheval ! C’est un bourricot, oui ! Bon, j'avoue, je suis plus non plus vraiment une jeune princesse. Mais j'ai été, vous pouvez me croire une jeune fille romantique. Limite ingénue.
Juvénal (de retour) : ah ben ici, t'es ingénue agronome !
Suzie : Le lourdaud !!! Enfin, j'étais une élève studieuse, je suis allée au lycée !
Juvénal : Au quoi ?
Suzie : Le lycée !
Juvénal : C'est quoi ça ?
Suzie : oh un truc où tu n'es jamais allé ! Et c'est là que un jour à la sortie des cours, j'ai rencontré Gino, avec sa grosse bagnole, sa belle gueule,
Juvénal : Alors t'as eu que des beaux hommes dans ta vie !
Suzie : Avant toi, oui ! Donc Gino, sa gueule d'ange, ses costumes grande classe, ses cabriolets, son boniment !!! Ah, celui-là ! il m'a bien monté le bourrichon, il m'a fait plaquer les études, m'a mis en brouille avec ma famille. Il m'avait promis la vie de château et au final après quelques claques, il m'a offert un sac à main et 2 mètres carrés de trottoirs sur la rue du Faubourg de Roubaix, avec vue imprenable sur le vieux Lille ! Il rigolait pas le Gino, mais bon, quand t'es jeune que t'es amoureuse, tu peux être idiote. Ça rapportait bien notre petit bizness.... Enfin, ça rapportait surtout à Gino. Moi, j'étais devenue le parcmètre qu'il venait relever tous les jours. Enfin sur un instant de lucidité, j'ai décidé de changer de vie, me faire la belle, m'évader. voilà, mon histoire avec cet ostrogoth (elle montre Juvénal) a commencé par une fuite, que dis-je, un exode. Echapper au trottoir ! Mais on va vous la raconter :
(noir)
Tableau 2 : Juvénal seul sur scène, téléphone en main
Juvénal : Allo ? Quoi ? Ah, l'annonce sur Tinder ? Oui ! C'est moi le beau male ténébreux. Si on peut s'voir ? Ben j'ai pas claqué 60 balles d'annonces juste pour rester au téléphone ! Vous connaissez un petit restaurant ? Ben vous avez les moyens vous ! Non, non, je plaisante ! Bon, on dit à quelle heure ? Midi, ah ben oui, c'est mieux pour manger, midi ! Bon et comment que je vous reconnaitrais ? Moi ? Ben, je serais l'homme le plus séduisant du restaurant !
Tableau 3 : table restaurant, Suzie attablée, Juvénal arrive
Suzie : Juvénal ?
Juvénal : Suzie ? Ah vous m'avez reconnu, j'en conclue que je suis bien l'homme le plus séduisant ! (Regardant autour) En même temps, y'a pas d'autre homme dans le restaurant
Suzie : Ben voilà, vous comprenez vite, vous !!! Je vous en prie, ne restez pas debout...
Juvénal : Je ne vous ai pas reconnu tout de suite, la photo que vous avez mis sur Tinder, vous étiez beaucoup moins vieille !
Suzie : C'est vrai qu’on ne peut pas se fier à une photo, moi, sur la vôtre, je trouvais que vous aviez un brin d’élégance !!! Enfin, bon, puisqu'on est là, on va causer ! Juvénal, le moins qu'on puisse dire, c'est que c'est original comme prénom
Juvénal : Oui, mon père et mon grand-père s'appelaient aussi comme ça. Ça remonte à loin, dans la famille, on appelait à chaque fois le fils ainé comme ça. C'est la tradition
Suzie : Ah oui, les traditions à la con dans les familles, je connais. Chez nous c'était le bridge le dimanche
Juvénal : Et vous, c'est Suzie, donc ?
Suzie ; Enfin, oui, c'est un pseudonyme pour le travail, mon vrai prénom, c'est Suzanne
Juvénal : Ah, oui, c'est bien aussi Suzanne
Suzie : Oui, je vois, vous devez aimer le rustique, vous. Sinon, vous avez vu, j'ai choisi un restaurant romantique ! Repas à la chandelle !
Juvénal (s'asseyant) : Ils ont pas payé EDF pour mettre des bougies ?
Suzie : Sinon, vous pouvez enlever votre casquette ! Ça se fait en intérieur !
Juvénal : Ah oui, désolé !
Suzie : Ah, ben vous n'êtes pas très chevelu, vous !
Juvénal : C'est vrai ! Mais c'est depuis tout jeune que je les perds ! je me souviens mon grand-père y m'disais : « T'as plus un poil sur le caillou, on dirait ta grand-mère, à la libération »
Suzie : Votre mamie aurait été une pionnière dans l’amitié Franco-Allemande ?(Suzie lui tend la carte)
Juvénal : Ben, non, je suis venu pour manger, pas pour lire !
Suzie : Mais vous n'êtes jamais allé au restaurant ?
Juvénal : Ben non pas le temps, mais ici, c'est restaurant ou bibliothèque ?
Suzie : Non, mais c'est la carte des menus, vous choisissez ce que vous mangez
Juvénal : Ah, d'accord, ils ont mis là-dedans tout ce qu'il y a à manger ? ...Des Gamba ? C'est quoi ce machin ?
Suzie : Et bien ce sont des grosses crevettes
Juvénal : Ils ne peuvent pas juste dire crevettes, c'est juste pour m'embrouiller avec des grands mots, ça !!
Suzie : Mais non, gambas, c'est crevette en espagnol
Juvénal : Je m’en fous qu’elles soient espagnoles, c’est pour les manger, c’est pas pour causer avec. Quoi ? Elles sont à 29€95 ? Elles sont arrivées d'Espagne en jet privé pour être aussi chères ? … Ben, moi, je vais prendre un jambon purée !
Suzie : mais c'est le menu enfant !
Juvénal : Ben oui, mais c'est ce qu'il y a de moins cher. Moi, ça me suffit !
Suzie : Comme vous voulez. Vous ne savez pas ce que vous perdez... En même temps, avec le resto, faut que je fasse attention ! J'essaie d'arrêter de manger mais ce n'est pas simple
Juvénal : Ben si c'est simple !
Suzie : Vous avez un truc pour arrêter de manger ?
Juvénal : Ben oui, Pour arrêter de manger je mange, comme ça quand j'ai mangé beaucoup, ben j'ai plus faim !
Suzie : D'accord, vous êtes de bon conseil, vous. Bon pour moi ce sera un chateaubriand sauce morilles
Juvénal : Ah, ben, Chateaubriand par contre, je connais !!
Suzie : Vous connaissez Chateaubriand ? Mais c’est merveilleux !
Juvénal : Ben oui, je connais même très bien !
Suzie : Vous avez ses livres ?? « Les mémoires d’outre-tombe » ?
Juvénal : Ben non, pourquoi ?
Suzie : Ben qu’est ce que vous connaissez de Chateaubriand ?
Juvénal : Ben que c’est le nom de ma rue !
Suzie : Ah oui, je me disais aussi ! C'était trop beau ! Et en boisson, on prend quoi ?
Juvénal : Ah, on doit boire aussi... ben, du vin !
Suzie : D'accord, on prend lequel ?
Juvénal : Pourquoi ? Y'a plusieurs vins ?
Suzie : Oui, y'a même un type qui ne s'occupe que de ça dans le restaurant
Juvénal : C'est qui ?
Suzie : Le sommelier !
Juvénal : Le sommelier, c'est pas celui qui vend des lits ?
Suzie : Ben non, c'est celui qui vous conseille pour les vins
Juvénal : Ben moi, j'ai pas besoin, je sais reconnaître les bons vins ! Y'a toujours 3 étoiles sur le litron
Suzie : Oui, je vois, avec les belles bouteilles en plastique ! ben si ça ne vous dérange pas, je vais choisir moi-même !
Juvénal : Non, non, faites ! Par contre, je sais que c'est vous qui avez choisi le restaurant, mais, rassurez-vous, je ne suis pas pingre ! je vais payer ma part !
Suzie : Ah oui, la grande classe ! Monsieur est un gentleman !
Juvénal : et sinon, vous ? vous faites quoi dans la vie ?
Suzie : je travaille … disons, je travaillais, ben j'étais, comment dire, je faisais du commerce, en quelque sorte !
Juvénal : Ah bon ? Et dans quoi ?
Suzie : C'est euh du... du Service à la personne, j’avais en charge le bien-être de mes clients, je les bichonnais, je leur fais des gate... enfin, je les gâtais
Juvénal : Ah bon et ça rapportait bien, votre truc ?
Suzie : Ça dépend, les services étaient divers, les tarifs très échelonnés c'est selon 20, 50, 100€. Ça variait en fonction de la prestation proposée, quoi !
Juvénal : et c'est quoi la différence de service entre 20 et 100€ ?
Suzie : Ben, 20€, c'était le passage express, en général on restait en voiture
Juvénal : ah, c'est comme un Drive in comme ils disent à Mc Donald ?
Suzie : C'est ça, un drive in, d'ailleurs l'argent allait en majeur partie à un Big Mac !
Juvénal : Et pour 100€, c’était quoi ?
Suzie : AH ! 100€ c'était le grand jeu, le manège ascensionnel, 7eme ciel garanti.
Juvénal : Ah, en fait, c'était un parc d’attraction ? Donc vos clients, c’étaient des enfants ?
Suzie : Ça ne va pas non ? J’avais déjà assez de problèmes comme ça avec la brigade des mœurs... Non, niveau clientèle, c'était assez varié... enfin, que des hommes, mais de tout âge et de toute situation. Des employés, des patrons, ça allait du promeneur furtif qui passe en coup de vent avant de retourner voir madame au célibataire endurcit, qui lui, avait tout son temps. Mais attention, une clientèle toujours distinguée
Juvénal : Ah, tiens c'est marrant, on avait une fille ici qui faisait un peu la même chose que vous.
Suzie : Ah bon ?
Juvénal : Oui, un joli petit brin de femme, la fille des Vanderdonk, je me souviens, elle avait quitté le patelin pour gagner sa vie en ville... Non j'rigole, ça n'a rien à voir, en fait, elle faisait la putain !
Suzie : Vous avez de ces mots ! Ça peut choquer mes prudes oreilles !
Juvénal : Mais vous, on voit bien que ce n’est pas votre genre, vous êtes bien trop... (il cherche ses mots)
Suzie : Prude ?
Juvénal : Ouais ça doit être ça !
Suzie : Monsieur est perspicace ! Et sinon, j’espère que vous aimez les sorties ?
Juvénal : Pas le choix, je suis tout le temps dehors, quand ce n’est pas les patates, c'est les moissons, quand ce n’est pas les moissons, c'est le maïs...
Suzie, Oui, je vois, non mais je pensais plus à des sorties de loisir, de divertissement !
Juvénal : Ha, ça ! Ben, oui, quand même, je sais m 'amuser
Suzie : Ah ben voilà !
Juvénal : Ben oui, je fais les fêtes dans les villages alentour dès que je peux, surtout la fête du porc à Ruminghem... Y’a deux ans, j’ai gagné l'concours du cri du cochon, Vous voulez que je vous montre ?
Suzie : Euh non merci, Ce n’est pas l’endroit pour…Réservez-moi la surprise pour la prochaine fête ! Sinon, vous en avez, des cochons ?
Juvénal : 300 qu'j'en ai !
Suzie : Dites-moi, ca doit pas sentir la rose votre ferme !
Juvénal : Ah, ça ! l'cochon, vous verrez, c'est salissant. Faut mettre une tenue spéciale quand on travaille avec
Suzie : Une tenue spéciale quand on travaille avec des cochons ? Ca ne me changera pas beaucoup de mon ancien métier
Juvénal : Mais moi, j'aime bien mon travail, surtout travailler à l'extérieur ! Et Vous ?
Suzie : Moi, on démarchait en extérieur pour une prestation en intérieur ! Vous savez dans mon métier, les clients on va prospecter dans la rue et on les amène dans un endroit discret
Juvénal : Dans la rue ? Comme les témoins de Jéhovah ?
Suzie : Pas vraiment, nous, notre congrégation n’avait pas trop les faveurs de la religion !
Juvénal : Ah bon, et comme vous deviez être une bonne commerciale ben je suis sûr qu'avec vous ça ne devait pas arrêter, du genre, ça rentre, ça sort, ça rentre, ça sort, ça rentre, ça sort…
Suzie : Je n’aurais pas pu expliquer mieux mes missions... Et vous êtes seul, vous avez déjà été marié ?
Juvénal : Oui, mais ma femme est morte
Suzie : Oh désolée !
Juvénal : Ben c'est rien, vous pouviez pas savoir et puis c'est le passé, hein !
Suzie : Ah ! C’était il y a longtemps ?
Juvénal : Oui, c'était...lundi
Suzie : Lundi ? Elle est morte lundi et vous avez déjà un rendez-vous ? Ben, vous n’avez pas perdu de temps ! Vous êtes rapide à faire votre deuil, vous !
Juvénal : Ben, elle est morte lundi et j'ai fait mon deuil mardi... mercredi, je me suis dit « Juvénal, faut pas te lamenter sur ton sort, faut réagir vite !
Suzie : Mais dites-moi... ses obsèques ont déjà eu lieu ?
Juvénal : ses obsèques, ben non, c'est samedi ! (Il réfléchit) Ben vous qui aimez tant les sorties, ça nous en fera une première !
Suzie :Ben oui, un enterrement, y’a pas mieux pour s’amuser! Sinon, plus sérieusement, elle est morte comment ?
Juvénal : Ben, elle donnait à manger aux poules... quand tout à coup, au milieu de la basse-cour, couic, eul cœur qui lâche ! Comme ça !
Suzie : Oh, mon dieu ! Ça a dû être terrible
Juvénal : Ben oui, surtout que les poules sont restées une journée sans manger ! Et quand elles ont faim, ben elles pondent moins !
Suzie : Non mais je pensais surtout à votre dame ?
Juvénal : Ha ben non ! Elle, elle ne pondait pas !
Suzie : Décidément, vous n'êtes pas banale !
Juvénal : Désolé, je dois m'absenter !
Suzie : Ah ! Vous allez vous rafraichir ?
Juvénal : Mais non, j'vais faire caca !
Suzie (gênée) : Vous n'étiez pas obligée de me le préciser
Juvénal : Vous me demandez, j'vous dis ! j'reviens, Vous restez là ?
Suzie (riant nerveusement) Je sais pas, j’hésite… Non, je plaisante, allez-y (il sort) Mais surtout, ne vous pressez pas ! (Une fois seule) mais qu'est-ce que je fous là ? Qu'est-ce que c'est que ce truc ! (Elle prend son téléphone) Allo ? Collette, oui, c'est Suzie, ça va ? J'ai fini par t'écouter, Non, justement, j’ai quitté le vieux Lille, Je me suis exilée... Le patelin s'appelle Bourbourg, tu m'avais dit la cambrouse, je ne pouvais pas faire plus rural. J'ai rencontré un gars, ben oui, pour me recaser. Là, je déjeune avec lui...oui, oui, un paysan. Euh non, pas vraiment un gentleman Farmer...plutôt du genre... comment dire… un plouc, mais attention du plouc de compétition ! Si on le met au milieu de ses cochons, on le reconnaîtra juste parce qu’il porte une casquette ! d'ailleurs paraît qu'il les imite, les cochons. Vraiment hâte de voir ça ; et en plus très con ! Quoi ? son niveau de connerie sur une échelle de 0 à 10 ? Ben... 15 ! Et c'est pingre avec ça... il ne m’a même pas offert le resto. Et tu sais la première sortie qu'il me propose ? L'enterrement de sa femme ! Non, il n’est pas là, il est parti ...faire caca !! C'est vraiment parce que je sais que Gino peut être un taré dangereux ? Parce que ma mise au vert, je ne la sens vraiment pas. Et à propos de Gino, des nouvelles ? Il est passé hier soir dans le quartier ? Il était furibard ? À ce point ? Non si je reviens je vais dérouiller et ça, fini, j'en veux plus, j'ai assez donné. Mais tu penses que je ne peux pas trouver une autre solution ? Parce que le péquenaud flamand, je sens que je vais avoir du mal à m'adapter ! Oui, c'est sûr que Gino ne viendra pas me chercher dans la ferme de ce gugus ! Bon, je te laisse, le revoilà ! (Souriant à Juvénal) Tout s'est bien passé ?
Juvénal : Ben c'est à dire que quand je suis rentré, y'avait plus de papier alors...
Suzie : Merci, pas besoin d'en savoir plus ! C'est moi, je suis désolée, je n’aurais pas dû vous demander !
Juvénal : Mais je me suis lavé les mains
Suzie : Ravie de le savoir ! Mais on va en rester là pour les détails de votre escapade aux toilettes !
Juvénal : D'accord, en même temps, y'avait rien de bien passionnant, mais comme vous vouliez savoir, moi, j'vous dis. (Silence)Et sinon, vous, vous avez été mariée ?
Suzie : Euh, moi, c'est compliqué ! J'ai eu un homme, pas facile, du genre brutal
Juvénal : Ah, je vois ! Le genre de jaloux qui supporte pas que les autres hommes regardent sa femme !
Suzie : Euh non, pas vraiment, de ce point de vue là, il était même plutôt conciliant ! Même partageur !
Juvénal : Un homme partageur ? C'est curieux, ça !
Suzie (observant Juvénal) : Oui, j'ai l'art de trouver des types curieux ! Ça doit être une malédiction
Juvénal : Il était agriculteur aussi ? Et il produisait quoi ? De la betterave ? Du blé ?
Suzie : Non, lui, c'était plus pêches et avoines !
Juvénal : Ah bon, il avait sa ferme où ?
Suzie : Non, il n’était pas agriculteur
Juvénal : Il faisait quoi ?
Suzie : Il... relevait les compteurs !
Juvénal : Un gars d'EDF ?
Suzie : C'est ça ! Mais il prenait cher du kilowattheure ! Bon assez parlé de lui... Sinon, vous ne m'avez pas dit : comment vous m’avez trouvé ?
Juvénal : ben avec la petite annonce !
Suzie : Mais non, comment vous me trouvez physiquement ?
Juvénal : Ahhhh, je suis bête. Ben... vous êtes bien costaud ! Bien charpentée !
Suzie (déstabilisée) : Ah vous savez parler aux femmes, vous. Enfin, ça doit être un compliment rural !
Juvénal : Mais c'est un sacré compliment ! A la ferme, on a besoin de filles comme vous ! Faut porter les sacs, pousser les cochons, faut traire les vaches, ça à l'air de rien, mais c'est du sport la vie à la ferme.
Suzie : Au moins, on sait ce que vous voulez, vous. Mais, pour vous, une femme, ce n'est qu'une bonniche qu'on fait travailler ?
Juvénal : Ben non, on va faire les choses du sexe aussi ! Avec Martine, mon ex-femme, on faisait ça, le deuxième dimanche du mois
Suzie : Ah oui, vous n’êtes pas du genre à faire ça à l’improviste derrière une botte de foin !
Juvénal : Ben c'est à dire qu'y a plein de choses à s'occuper dans une ferme !
Suzie : Oui, j'ai compris ! En même temps, le sexe sur un planning, c'est un peu l'histoire de ma vie ! Sauf que là, ce sera un planning allégé ! Mais vous savez, moi, j'aime bien qu'un homme sache m’étonner, me faire des surprises, m'aborder avec originalité ! je ne sais pas si vous vous souvenez de cette publicité : « Tout d'un coup, un inconnu vous offre des fleurs ! » J'aurais tellement aimée qu'on me fasse un truc pareil, mais ça, ça ne doit pas être votre genre !
Juvénal : Ben si, justement, , je l'ai fait une fois
Suzie : Vous avez offert des fleurs à une inconnue ?
Juvénal : Ben oui, elle s'appelait Jeannine Vancopenol
Suzie : Vous m'intriguez !
Juvénal : Elle était à coté de ma grand-mère !
Suzie : Une voisine ?
Juvénal : Oui, j'ai lui ai laissé les fleurs mais c’est ma femme qui s’est rendu compte que je m’étais trompé, je n’avais pas regardé le nom sur la tombe.
Suzie : Moi, je préfèrerais quand même que ça m’arrive de mon vivant. Bon, sinon … Les toilettes sont propres ?
Juvénal : Ben avant que j’y aille, elles l’étaient ! Mais j’ai pas vu chez les dames !
Suzie : excusez-moi, je vais me rafraichir
Juvénal : Ah d'accord... (Suzie se lève et s'éloigne vers les toilettes, Juvénal lui crie à travers la pièce) Par contre, si c'est pour faire caca, demandez au garçon pour le papier-derrière !
Suzie (excédée) : Je vais me laver les mains !!!!
Juvénal(seul) : Je ne sais pas pourquoi, mais je sens que c'est bien engagé... y'a un truc qui passe entre elle et moi. L'air de rien, t'es un sacré séducteur Juvénal !!! Allez, on va fêter ça ! Garçon, y'est à combien votre champagne ? Quoi ? On peut payer en plusieurs fois ? Non, laissez tomber... j'ai plus soif !
Suzie revient
Juvénal : Alors, c'est oui ?
Suzie (rire nerveux): Est-ce que j'ai le choix... ah si seulement Gino cognait moins fort! (Sourire forcé) C’est oui !!
Juvénal : Vous n'avez pas pu résister à mon magnétisme animal ! Alors, on s'embrasse (approchant son visage de Suzie)
Suzie (esquivant) : Holala ! On va attendre un peu pour ça peut-être
Juvénal : Ah, je vois, vous n'êtes pas du genre à coucher le premier soir ! Vous !
Suzie : C'est ça ! Enfin sauf quand il n'y a qu'un seul soir ! Bon, je vous laisse, faut que je me prépare psychologiquement à ma nouvelle vie
Juvénal : Vous allez voir ! A la campagne, c'est reposant, y'a pas de stress comme en ville. Vous allez aimer le calme ! Juvénal prend son téléphone : allo ? Amedé ? Comment que ça s’est passé ? Ben, elle a dit oui ! Quoi ? Mais non, ce n’est pas un laideron ! Non, elle est même très jolie ! Non, je n’ai pas dû faire de chantage ! Qu'est-ce que tu vas chercher ! Ah par contre, oui, c'est le genre de la ville ! Non, je suis pas sûr qu'elle soit encore vierge !mais je peux me tromper ! Enfin, tu diras, moi non plus je le suis plus ! Par contre, je sens qu'elle va adorer le travail de la ferme !
Noir
Tableau 4 Intérieur ferme, un siège
Suzie entre avec bottes et ciré, elle s'affale épuisée
Suzie : J'en peux plus, j'en peux plus ! Il m'a tuée ! Vidée ! Épuisée ! Quelle idée d'être venue m'enterrer ici... je me demande si je préfère pas le tapin ! Je me suis tout tapé ! ! Stockage du grain, collecte de patates, nettoyage de l'étable, de la porcherie, Ah mon cochon ! Enfin, non, tout sauf mon cochon, qu'on ne me parle plus de ces bestioles immondes ! Pourquoi j'ai écouté Colette ? Je croyais que l'enfer c’étaient les pavés du Vieux Lille. Non, l'enfer, c'est tout vert, l'enfer ça pue la bouse, l'enfer, on vous y emmène en tracteur ou en moissonneuse batteuse ! Ah ! Il m'a bien roulé, le croquant aux 300 porcelets, pire qu'un proxénète. Ah làlà !!!Ce n’est pas bon, ça, je commence à avoir la nostalgie des beignes de Gino ! Ressaisie toi, ma fille ! Après tout C'est la saine vie, les travaux des champs ! Pfffff !!!! (Elle gémit) Tu parles d'une vie saine ! La puanteur de la porcherie qui s'insère dans ta peau ! Les pesticides que tu avales à grandes gorgées ! Le goût de la terre dans les navets... La nourriture naturelle, j'en peux plus ! JE VEUX UN KEBAB !!! un gros bien dégoutant avec le graillon de jus de viande dans le pain rassis ! Avec de la viande bourrée d'hormones ! Je veux l'odeur des pots d'échappement ! Ras le bol du grand air ! Rendez-moi ma pollution chérie !
Juvénal (qui entre) : ben y'en a qui se la coulent douce !!!
Suzie : Tu permets, je suis sur le pont depuis 6 h ce matin ! Je peux me reposer un peu !
Juvénal : Ben oui, mais les animaux ça ne peut pas attendre ! T'as été traire les vaches ?
Suzie : Oui, elles sont comme moi les vaches, vidées ! totalement vidées !
Juvénal : T'as nourri les poules ?
Suzie : Elles ne savent pas se démerder toutes seules ? Elles pondent des œufs, elles n'ont qu'à se faire une omelette !
Juvénal : Comme si elles allaient manger leurs enfants !
Suzie : Mais qu'elles se bouffent entre elles !!! Là, je me repose !
Juvénal : Bon, ben j'vais aux poules ! (Il sort)
Suzie : (imitant Juvénal) J'vais aux poules !!! Il parle vraiment comme mes anciens clients ! Va donc les nourrir ! TES poules ! (Téléphone sonne) Allo, Colette ? Comment ça se passe ici ? Oh ben pas le temps de s'ennuyer ! Avec lui ? Ben on a quelques petits différents sur l'équilibre alimentaire de ses gallinacés… quoi ? oui, ses poules ! Et puis y'a les betteraves ! C'est incroyable, la betterave, t'as l'impression que ça te rentre par tous les pores de la peau... j'ai encore l'odeur quand je vais me coucher... c'est simple, j'ai peur d'attraper le diabète! Si y'a que le boulot avec lui ? Ah ben non, deux sorties, ce mois-ci, l'enterrement de sa femme, et ça c'était la sortie la plus joyeuse des deux ! Si, si je t'assure, quand on est allé la veille aux pompes funèbres, figure toi qu il a fait scandale parce qu’il pensait que la mise en bière ça voulait dire qu’on lui payait un demi... Une lumière, je te dis... L'autre sortie, ben il m'a dit « ça te dirait de faire du shopping ? » Tu parles que j'ai dit oui !!! En fait tu sais où il m'a emmené, ce primate ? dans un salon d'outillage agricole ! C'est sûr que ça change des boutiques de la rue de la Monnaie ! Les seuls sacs à mains, ils étaient en jute et tu peux y mettre 10 Kilo de patates... Sinon chez toi ? Du neuf ? ! Gino veut encore me faire la peau… Décidément, il a les idées fixes ! (Regardant Juvénal qui rentre) en même temps, je me demande si c'est pas un moindre mal ! Si je plaisante ? Ben à peine ! Bon, je te laisse, revoilà mon homme.
Juvénal : C'était qui ?
Suzie : Rien, une ex-collègue.
Juvénal : et elle voulait quoi ?
Suzie : Ben disons qu'un cadre de mon ancienne boite voulait me revoir pour régler un dossier.
Juvénal : Tu peux y aller si tu veux !
Suzie : Oh non ! Il trouvera bien quelqu'un ! En fait, il n’était pas trop d'accord avec ma démission, et je crains qu'il n'insiste pour que je revienne travailler avec lui !
Juvénal : Et ben, t’as qu’à aller lui expliquer directement que tu veux plus travailler avec lui !
Suzie : Je n’y tiens pas trop… il a des arguments TRES percutants !
Juvénal : Bon, sinon fallait que je te cause ! C'est très important ! Je crois que l'heure est venue de me mettre à nu devant toi !
Suzie : Mais on n'est pas le deuxième dimanche du mois
Juvénal : Mais non ! Nu devant toi, c'est une façon de parler
Suzie : Ah, tu m'as fait peur !
Juvénal (s'agenouillant) : Suzie, ça fait maintenant 2 semaines qu'on est ensemble et comme après y'aura les moissons et qu'on aura plus le temps, je te le demande maintenant (Il tend un écrin) Veux-tu être ma femme (Suzie prend la boite, elle reste interdite) Y'a une bague hein, la dedans !
Suzie (devant la bague) : Oh mais tu as fait une folie ! C'est trop
Juvénal : Mais non, je te rassure.
Suzie : elle vient d'où ? Du bijoutier d'ici ?
Juvénal : Ah ben non !
Suzie : Un bijoutier Lillois ? Parisien ? Place Vendôme ?
Juvénal : Non, de la morgue !
Suzie : De la morgue ?
Juvénal : Ben oui, je l'ai récupéré sur mon ex-femme
Suzie : T'as pas fait ça ?
Juvénal : Ben si, Elle en avait plus besoin ! Je n’allais pas gâcher !
Suzie : Evidement ! Mais la bague d'une morte, j'espère que ça ne porte pas malheur ! Enfin, elle est jolie quand même ! Merci !
Juvénal : Ben oui, mais tu ne m’as pas dit
Suzie : Pas dit quoi ?
Juvénal : Ben si tu veux m'épouser ?
Suzie : Euh, ce n’est pas un peu rapide ? On se connait à peine
Juvénal : Alors, je m’appelle Juvénal Manequebeur, 56 ans, propriétaire agricole, je mesure 1m80 et pèse 92kg, Je suis né le 27 décembre 1966 à Pitgam, de Juvénal Gaston Isidore Mannequebeurre et Josiane Ernestine Mannequebeurre née Pluchot, J'ai fait les végétations à 6 ans, l'appendicite à 12 ans, j'ai redoublé mon CP, mon Ce1, mon Cm1
Suzie : Pas le CE2 ?
Juvénal : Ben non !
Suzie : Ah, tu étais plutôt un élève doué !
Juvénal : J'ai 5 frères et sœurs, un compte épargne au crédit agricole et jepossède en hectars..
Suzie : Laisse-m’en un peu pour la suite !!! (A part) En même temps, si je me marie, je change de nom... et là, Gino, pour me retrouver, c'est tintin ! Par contre, Suzanne Mannequebeurre, ce n’est pas léger à porter ! Bon, entre la mort et le ridicule... je prends quoi, moi ? (Elle sort une pièce) Bon, allez, on laisse faire le hasard, Face, c'est oui (elle lance la pièce) Et merde !
Juvénal : Alors ?
Suzie : Alors, Ben, heu... c'est oui !
Juvénal : Chouette, ben pour fêter ça, j'vais tuer une pintade ! (Il sort en courant)
Suzie : Ben pourquoi ? Elle n’y est pour rien, la pauvre bête ! Dire qu'en tapinant, je risquais quelques mois de placard, là, je viens de prendre 20 ans ferme !!! Je me demande si je ne viens pas de faire la plus grosse bêtise de ma vie
Musique de mariage, final fondu
Tableau 5 : Juvenal assis consulte un album photos…
Juvenal: Ben voilà, c'était un chouette mariage, hein?
Suzie : Tu parles, 2 invités, Colette, mon témoin et le tiens, monsieur Gontier, le voisin
Juvénal : Pourquoi que les gens, y sont pas venu à notre mariage ?
Suzie : Ben deja, tes parents ? Pouvaient pas être là ?
Juvénal : Ben non, ma mère, quand je lui ai dit que c'était à midi à la mairie, elle m'a dit : « Tu crois vraiment que j'ai que ça à foutre ?
Suzie : ! Et ton père ?
Juvénal : Ben, il m'a demandé : « Faut ramener un cadeau ? » J'ai dit oui, il a dit « Alors, ce sera sans moi »
Suzie : Pas de doutes ! T'es bien son fils ! D'ailleurs, c'est bien cette idée que t'as eu de demander aux inviter de payer leur part qui fait qu'ils ne sont pas venus
Juvénal : Ben je n’allais pas payer le repas à tous ces crevards !
Suzie : Ben c'est un peu le principe du mariage, les invités sont invités ! Et donc, ils ne payent pas leur part !
Juvénal : Ben c'est une idée à la con !
Suzie : Je crois que l'idée à la con, c'est de t'avoir dit oui !
Juvénal : Ah cette fête, elle a duré quand même bien tard !
Suzie : Tard ? On n'a pas la même notion du temps ! À 23h on était au lit ! Et à 23h10 tu ronflais comme le moteur de ton tracteur, tu parles d'une nuit de noces !
Juvénal : Ben, c'est qu’ il y avait le mais à castrer le lendemain !
Suzie : Si je m'écoutais, c'est pas le mais que je castrerais !
Juvénal : Oh et puis, on a bien mangé ! C'était quoi déjà ?
Suzie : Des tripes à la mode de Caen !
Juvénal : Ah ben tu vois, t'as pas oublié !
Suzie : Des tripes pour mon mariage ! Je ne risque pas d'oublier !
Juvénal : Même que tu faisais la gueule parce que t'aime pas la viande !
Suzie : Pas que je n’aime pas, mais des tripes, quoi ! Pour un mariage ! Et puis toi, t'es un carnan !
Juvénal : Un quoi ?
Suzie : Un carnan, c'est le contraire d'un vegan ! Toi, tu remplaces tout ce qui est végétal par de l'animal ! Une ratatouille façon Juvénal, c'est fait avec des pieds de porcs, de la cervelle de mouton et des rognons de bœuf !
Juvénal : Hmm ! Ça doit être bon, ça !
Suzie: Tu parles !
Juvénal : De toute façon, ce n’était pas vraiment un mariage
Suzie : Ah bon ? Pourquoi tu dis ça ?
Juvénal : Ben on n’a même pas été à l'église !
Suzie : Parce que t'es croyant, toi ?
Juvénal : Ben, oui, on ne sait jamais ! Vaut mieux être prudent ! Imagine qu'il existe,
Suzie : Qui ca ?
Juvénal : Ben Dieu ! Je ne veux pas prendre de risque ! Pas envie d'être dans la merde !
Suzie : C'est vrai que si il existe, ça veut dire l'éternité avec toi... et là ! c’est moi qui serait pas dans la merde!
Juvénal : T'aurais pu faire un effort quand même !
Suzie : Excuse-moi, pour être croyant, faut croire à ce qui est écrit dans le grand livre ?... Sauf que ça ne tient pas la route leur histoire !
Juvénal : Ben pourquoi que tu dis ça ?
Suzie : Bon, si je résume, au début, il n'y avait qu'Adam et Eve, c'est ça ?
Juvénal : Ben oui
Suzie : Et nous sommes tous les descendants d'Adam et Eve ?
Juvénal : Ben ouais !
Suzie : Ils ont eu 3 enfants ?
Juvénal : Qu'est-ce que j'en sais, moi ?
Suzie : Ben si t'étais un croyant un peu informé, tu saurais qu'ils ont eu Abel, Cain et Seth !
Juvénal : Et alors ?
Suzie : Et alors ? C'était 3 garçons,
Juvénal : Mais où que c'est que tu veux en venir ?
Suzie : Mais réfléchis, y'a rien qui te choque
Juvénal : Ben non, quoi qui devrait me choquer ?
Suzie : Mais enfin, t'es complètement idiot...Si y'a pas de fille... comment ils ont pu avoir des enfants ?
Juvénal : Ben ils n’avaient pas de voisins ?
Suzie : Ben non puisqu'ils étaient seuls au monde !
Juvénal : C'est chiant, ton histoire !
Suzie : Ah, ce n’est pas la mienne d'histoire, c'est la tienne ! Le croyant, c'est toi !
Juvénal : ah ben ouais ! Ben, là, je ne vois pas !
Suzie : En fait quand tu y réfléchis, pour avoir des enfants, il faut une femme et à l'époque, il n'y en a qu'une. C'était qui ?
Juvénal : Ben Je ne sais pas !
Suzie : Mais enfin, Eve, leur mère !
Juvénal : Ben voilà, ils avaient une femme pour…(Moue horrifiée de Juvénal) Oh mon dieu ! Tu penses qu'ils ont...Quelle horreur !
Suzie : Tu imagines, ils auraient eu des enfants avec leur mère et ensuite auraient épousé leur fille ou leur nièce ? Et ils auraient continué entre cousins et cousines ?
Juvénal : Non, ça peut pas être ça, l'origine de l'humanité
Suzie : En même temps, quand je te vois, je me dis que c'est peut-être l'origine de ta famille !
Juvénal : Tu veux dire que j'ai une famille biblique ?
Suzie : Oui, on va dire ça !
Juvénal : Ou alors...
Suzie : Alors quoi ?
Juvénal : Y'a des femmes extra-terrestres qui sont arrivées sur Terre et qui ont épousé les fils ! Ah ! Qu'est-ce que tu dis de ça ?
Suzie : Que ça me conforte d'avoir bien fait d’éviter l'église ! Maintenant on va pouvoir préparer le voyage de noces. A nous les pays de rêve !!! Thaïlande ? Egypte ? Seychelles ? Promets-moi qu'on va au moins faire un beau voyage !
(Noir)
Tableau 6 : Juvenal et Suzie en touristes, Juvenal a un appareil photo autours du cou
Suzie et Juvénal en tenue de touristes, mines assombries
Juvénal : ben, dis-moi, t'as pas l'air contente d'être là ! !
Suzie : Disons que ça restera pas un souvenir impérissable
Juvénal : Ben quand même, tu voulais aller loin, on a fait un long voyage
Suzie : Tu parles, on est à Amsterdam.
Juvénal : ben ça fait quand même un sacré périple !
Suzie : Oui, 343 kilomètres dans ta Renault 5 et nuits en chambre dortoir avec vue sur les poubelles de la cour. T'as l'art d'offrir du rêve !
Juvénal : de toute façon, t'es jamais contente !
Suzie : Quand je pensais pays de rêve, je voyais un peu plus loin que les pays bas !
Juvénal : Ben oui, mais j'ai peur de l'avion et j'ai mal au cœur quand on va trop loin en voiture, alors là, c'est le plus loin qu'on pouvait aller !
Suzie : De toute façon, ce n’est pas tant Amsterdam qui me pose problème, c'est plus la personne qui m'accompagne. Tu es pénible à tout critiquer ! Pourtant le charme des canaux !!
Juvénal : Oui, c'est plein de watergangs, on pouvait aussi bien rester à Bourbourg !
Suzie : Mais que t'es chiant, et arrête de prendre des photos ! C'est mal vu dans le quartier !
Juvénal : ben, y'a des filles presque toutes nues dans les vitrines ! Je pourrais montrer aux copains !
Suzie : Ah, les filles pas de doutes que ça t'intéresse Mais pour le reste, t'as rien aimé ! le musée Van Gogh, la maison d'Anne Franck...
Juvénal : Ah c't’arnaque la maison d'Anne Franck !
Suzie : Ben pourquoi tu dis ça ?
Juvénal : Ben, on a dû payer 50€ pour y rentrer et en plus, elle habite plus là !
Suzie : Mais, enfin ! Je te l'ai déjà dit...Elle a été déportée ! Elle est morte en captivité !
Juvénal : Ben si elle est morte, faut qu'elle arrête d'inviter des gens, ils viennent pour rien !
Suzie : Mais qu'est-ce que tu peux être idiot...C'est un musée, cette maison, elle s'y cachait pour échapper aux nazis !
Juvénal : Ben c'est n'importe quoi, Quand tu te caches t'essaye d'être discret... alors que là, partout y'a des panneaux avec des flèches où qui est écrit : « Maison d'Anne Franck ». Les gens qui sont venus l’arrêter, ils ont eu qu'à suivre les panneaux ! Par contre les filles presque toutes nues dans les vitrines, elles ne se cachent pas, elles !
Suzie : Tu m'étonnes, elles vont même finir par gueuler tellement tu laisses de la bave sur les carreaux... oh, la honte ! Avec toi, le lèche-vitrine, ce n’est pas qu’une façon de parler.
Juvénal : Ben en même temps, si on les a mises là, c'est pour les regarder, non ?
Suzie : Oui, ça, c'est sûr !! t'es bien plus observateur que pour les tableaux de Van Gogh !
Juvénal : Van Gogh, C'est le rouquin qui dessine mal ? là aussi, une belle arnaque
Suzie : Une arnaque ? Mais c'est la plus belle collection qui soit !
Juvénal : Ils disaient qu'au rez-de-chaussée, que c'était des Autoportraits...
Suzie : Ben oui, et alors ?
Juvénal : y'avait pas un seul dessin de voitures.
Suzie : Auto portrait, ça ne veut pas dire qu'il dessine des voitures ! Ce sont des tableaux où il fait des portraits de lui-même !
Juvénal : C'est ça, ils faisaient que des selfies en peinture. Quand c'est ma nièce sur Instagram, tu trouves ça vulgaire !
Suzie : Tu es désespérant ! Tu m'as même passé l'envie des voyages !
Juvénal : Mais pourquoi que tu veux voyager ? On n'est pas mieux à Bourbourg ?
Suzie : Ben, si tu veux mon avis... c'est trop rural pour moi ! Je ne voyais pas ma reconversion comme ça !
Juvénal : Et comment que tu la voyais alors ?
Suzie : Je ne sais pas, bisness-woman, cheffe d’équipe, avec une dizaine de personnes en dessous de moi
Juvénal : Ben moi, j'ai un frère, dans son travail, y'a 4000 personnes en dessous de lui
Suzie : Ah bon ? 4000 ? c'est un grand patron, dis-moi ?
Juvénal : Ben non, il travaille pour la mairie !
Suzie : Mais comment il peut avoir 4000 personnes en dessous de lui ?
Juvénal : Ben, il est gardien de cimetière !
Suzie : Ah, je me disais aussi !
Juvénal : Enfin, voilà ! Pour le meilleur et pour le pire ! Comme il disait monsieur le maire !
Suzie : Et ben, on va attendre, peut-être qu'on finira par avoir le meilleur !!
Tableau 7 : Retour à la ferme, Suzie assise, Juvénal rentre dans la cuisine.
Juvénal : Ben pas fâché d'être rentré ! Après le mariage, ce qui est bien, c'est quand le couple trouve sa petite routine !
Suzie : La routine avec toi, je n’ai pas eu à attendre trop longtemps !
Juvénal (refermant sa ceinture) : Dieu qu'ça fait du bien !
Suzie : Ah non, ne me dis pas que t'as encore été faire tes besoins dans la nature !
Juvénal : Ben, tu lavais les waters ! J'voulais pas déranger
Suzie : Mais tu ne pouvais pas attendre un peu !
Juvénal : Faut jamais faire attendre ces choses-là ! C'est un truc à attraper un AVC.
Suzie : Un AVC ? Je te rassure, pour attraper un AVC, faudrait que t'ais un cerveau ! Mais c'est pénible, tu pollues tous les sentiers ! On en retrouve partout
Juvénal : Et alors, je ne fais rien de mal, au contraire, comme disait mon grand-Père : « Chier son lapin aux pruneaux dans la nature, c'est un peu lui rendre sa liberté ! »
Suzie : Tu parles, tes lapins viennent du clapier... en même temps, je préfère que tu les relâches dans la nature que dans le clapier. Mais c'est casse-pied, à chaque fois qu'un chasseur passe sur le coin, que ses chiens reniflent un caca sur le chemin, ça les attire tous devant la porte de la maison
Juvénal : Ben comme ça, ça fait diversion et je garde tout le gibier pour moi ! Et toi, y'a pas autre chose à faire que de lire le journal ? Peut-être aller remuer la terre !
Suzie : La terre, elle fait comme moi, elle se repose ! Oh, dis-donc, toi ! Tu peux parler ! Hier, t'étais sensé t'occuper des bêtes, non ?
Juvénal : Ben oui, et alors ?
Suzie : Ben, j'ai appris que monsieur a passé la journée au PMU
Juvénal : Et alors ? Au PMU, on s'occupe bien des chevaux, non ?
Suzie : Ben voyons, t'as réponse à tout, toi !... En attendant, je me tape tout le travail pendant que monsieur se la coule douce ! Tiens, c'est simple, je me croirais encore avec Gino
Juvénal : De qui tu parles ?
Suzie : De rien, de ton clone, en moins rustique ! Enfin, un fainéant comme toi ! PMU et canapé ! Tu ne fais même pas de sport, je suis sûre que t'en a jamais fait
Juvénal : Si, j'en ai fait quand j'étais jeune !
Suzie : et quel sport tu faisais ?
Juvénal : Ben, d'la mobylette !
Suzie : Ça m'aurait étonné ! Mais enfin, c'est pas possible d'être une feignasse pareille ! Tu pourrais faire des efforts !
Juvénal : Ben justement, non ! C'est quoi, un fainéant ? C'est un handicapé du sens de l'effort... C’est vrai, ça, ça ne te viendrait pas à l'esprit de dire à un cul-de-jatte qu'il pourrait essayer marcher !
Suzie : Par contre, pour te trouver des excuses à la con, là, tu fais des efforts !
Juvénal : Justement, je suis obligé de faire des efforts pour cacher mon handicap et ça me fatigue encore plus. Allez, on fait la paix (il lui fait une bise)
Suzie (le ren: En tout cas, vue ton haleine, t’as pas lesiné pour faire des efforts avec le coude… Tu pus l’alcool.
Juvénal : J'espère au moins que les nouvelles sont intéressantes !
Suzie : Très intéressantes, oui ! Tiens, d'ailleurs, tu ne savais pas ? Vous êtes 17 eme !!!
Juvénal : Qui, Nous ?
Suzie : Et bien vous, les hommes français !
Juvénal : 17eme ? Pour quoi ? Je ne comprends pas !
Suzie : alors écoute ça ! Une récente enquête réalisée sur 25 pays nous a permis de constater que la France se classe 17 -ème pour la taille moyenne des pénis
Juvénal : Y'a des compétitions internationales de taille de zizi ?
Suzie : Oui, enfin, c’est une étude ! C'est scientifique !
Juvénal : Y'a des scientifiques qui mesurent la taille des zizis, mais ils ont fait quoi comme étude ?
Suzie : Mais qu'est-ce que j'en sais moi ! Enfin j'avoue que d'aller à bac + 12 juste pour faire ce genre de travail, c’est un peu étrange.
Juvénal : et on est 17eme ? Ça veut dire qu'en coupe du monde, on passe même pas le premier tour ! C’est des conneries tout ça, ils font des informations juste pour dire du mal de mon zizi !
Suzie : Oh ton zizi pour ce que t'en fais ! Et puis, cette fixation pour la taille ! Faut vraiment que ça vous obsède ! C'est typiquement un truc d'homme ! Se focaliser sur une des parties les plus insignifiantes de votre anatomie comme si ça allait changer la face du monde ! Qu'est-ce que ca peut faire quelques centimètres de plus ou de moins. Heureusement que vous êtes moins regardants avec le QI !
Juvénal : Le quoi ?
Suzie : Quotient intellectuel, mais là, même la 17eme place, avec toi, c'est pas gagné !
Juvénal : de toute façon, c'est des bêtises ! Comment qu'ils peuvent savoir ? Ils envoient des gens en porte à porte mesurer les zizis? J'en ai jamais eu ici en tout cas !
Suzie : ben si, y'en a un qui est passé l'autre jour quand tu n’étais pas là.
Juvénal : et qu'est-ce que tu lui as dit ?
Suzie : Et ben qu'il se déplaçait pour pas grand-chose !
Juvénal : Tu lui as dit ça ? Mais pour qui que je vais passer, moi ?
Suzie : Mais je rigole, andouille ! Y'a personne qui est venu. En même temps, y'a jamais personne qui vient ici. Y'a que toi
Juvénal : Ben en même temps, j'habite ici, c'est un peu normal ! Qui c'est que tu voudrais qui vienne ?
Suzie : Personne, justement... d’ailleurs, c'est un peu pour ça que je suis là... pour éviter les visites incongrues, les retrouvailles embarrassantes. Moi qui voulais m'isoler, je suis servie. Même sur Mars, il avait plus de chance de me retrouver.
Juvénal : Qui ça ?
Suzie : Personne !
Juvénal : Sinon, y'as pas des bonnes nouvelles dans ton journal ?
Suzie : Ah Si ! Tiens !
Juvénal : Ah bon quoi ?
Suzie : Ben un requin qui a bouffé un surfeur à la Réunion
Juvénal : Et c'est une bonne nouvelle, ça ?
Suzie : Ben pour le requin, oui ! Le président de l'association des surfeurs a demandé aux autorités locales, qu'on extermine les requins qui rodent sur la plage de Saint Paul. Ben voyons et la prochaine fois qu'un alpiniste décrochera dans un ravin, on demandera à raboter le mont Blanc ?
Juvénal : Et puis de toute façon les surfeurs, ça glande des heures, ça se lave pas, ça fume et ça boit.
Suzie : Tiens, on dirait que tu parles de toi !
Juvénal : Tu diras ce que tu veux, un surfeur, ça sert à rien!
Suzie : Ben si ça sert !
Juvénal : Ah bon et ca sert à quoi ?
Suzie : Ben à nourrir les requins !
Juvénal : Ah ben oui, tiens ! Remarque, le requin y'a de quoi se tromper, c'est vrai un surfeur, ça ressemble tellement à ce qu'on voit dans les supermarchés, un bout de viande sur une barquette en polystyrène ! Comment qu'il c'était déjà ce film, qu'on a vu l'autre jour avec des surfeurs ?
Suzie : « Point Break »
Juvénal : et l'acteur comment qu'il s'appelle déjà?
Suzie : Patrick Swayze, et il s'appelait vu qu'il est mort !
Juvénal : Ah bon, bouffé aussi par un requin ?
Suzie : Ah non, lui, c'est par un crabe! Cancer !...Quoi ? 150€ ?
Juvénal (en sursaut) : Où ça ? Où ça ?
Suzie : Mais t'es idiot ! Tu m'as fait peur ! C'est dans le journal ! La commune offre 150€ pour un concours de poésie !
Juvénal : Quoi ? À l'Ecole, à chaque fois que je les récitais, je ne gagnais rien
Suzie : Non, mais là, il faut en écrire une.
Juvénal : T'écris une poésie et tu gagnes 150 € ?
Suzie : Non faut encore que le jury te décerne la victoire !
Juvénal : Ben tu vois, je suis sûr que je pourrais gagner
Suzie (hilare) : Toi ? L'art et la culture, ça paraît tellement loin de tes préoccupations !
Juvénal : détrompe-toi ! (Il se redresse ; solennel) Les guerres passent ! Seules les œuvres de la culture restent ! La musique, l'architecture ne sont-elles pas les forces qui montrent le chemin à l'humanité montante ?
Suzie : C'est beau ! C'est de toi ?
Juvénal : Ben non !
Suzie : Ça m'aurai étonné ! Ça doit être un grand homme qui a écrit ça !
Juvénal : Adolf Hitler !
Suzie : Comme quoi, vaut mieux parfois se méfier des beaux parleurs ! Ça me rappelle Gino !
Juvénal : Qui ?
Suzie : Personne, mais vas-y lance toi !
Juvénal : Me lancer ?
Suzie : Ben la poésie !
Juvénal : Tu penses ?
Suzie : T'as rien à perdre
Juvénal : mais si j'étais ridicule
Suzie : Bah ça changerait pas beaucoup de l'habitude !
Juvénal : Ben oui ! En fait, t'as raison ! Je me souviens, une fois, j'ai eu 12 sur 20 à une rédaction
Suzie :12 sur 20 ? Ah oui, quand même ! Victor Hugo n'a qu'à bien se tenir
Juvénal (prenant plume et stylo) : Je m'y mets !
Suzie : N'oublie pas, la poésie, ca 's’écrit avec des rimes !
Juvénal : Des rimes ?
Suzie : Ben oui, il faut que tes phrases se terminent sur la même sonorité ! Par exemple :
Je suis mariée à Juvénal
Pas que ce soit le mauvais cheval
Il est d'une bêtise abyssale
Et d'un physique un peu bancal !
Juvénal : Ah d'accord !
Hier, j'étais à la marre aux grenouilles
Et j'avais de l'eau jusqu'aux genoux !
Suzie : Ben ça ne rime pas !
Juvénal : Ben, y'avait pas assez d'eau ! Bon, ben je vais dans le bureau pour écrire mon poème à 150€ !
Suzie : C'est ça ! Fonce Alphonse ! (Rires) Fonce, Alphonse ! Ça te fait déjà une rime ! (Téléphone sonne) Allo, Colette ? Non, il n’est pas là ! Il compose une œuvre poétique à la gloire de sa plus grande passion... mais non, pas moi ! L'argent ! Oh il est tellement vénal que je me dis que pour quelques billets, il serait foutu d'entrer dans la pléiade ! Non, vas-y tu as le temps, je pense qu'avant qu'il ne trouve une rime, il se sera passé une solstice et deux équinoxes ! Oui, Gino est passé hier ? Prêt à tout me pardonner si je rentre ? Non, mais il me prend pour un jambon, je le connais le petit proxo... dès que j'aurais rappliqué dans son fief, j'ai bon la raclée... mais ses promesses, je les connais ! Un type qui t'a déjà cogné et qui te dit qu'il le fera plus, c'est comme s'il t' emmenait voir « Titanic » une deuxième fois en te disant : « cette fois-ci, le bateau ne coulera pas ! » . C'est un fondu de la mandale, le père Gino ! Il a l'impulsivité récurrente ! Non, et puis je suis mariée maintenant ! Je m'habitue un peu à ma condition de propriétaire terrienne. Tu sais le cochon, on finit par s'habituer et au final, je préfère quand même le cochon au maquereau ! Y'a moins d'arrêtes ! Dis-lui ce que tu veux ! Que je suis morte, tient, mieux, que je suis partie pour Djibouti, oui, la traite des blanches ! Je te laisse, revoilà le Arthur Rimbaud des Watergands ! (Revenant à Juvénal) Alors ? Ce poème ?
Juvénal : Ben je trouve pas de rimes
Et ça me déprime !
J'aurais voulu écrire ce poème
Me donner un esprit bohème
Agiter mon inspirations
Creuser mon imagination
Poser sur cette page blanche
Des alexandrins en avalanche
Hélas, il me faut l'avouer
Poète, je ne le serais jamais
À contre cœur, je pose la plume
Le cœur lourd comme une enclume !
Non, tant pis, je crois que ces 150€, je dois y renoncer ! Tiens je vais me boire un café !
Suzie : Le pire, c'est qu'il est tellement con que quand il a une fulgurance d'intelligence, il ne s'en rend pas compte !!!
Juvénal : C'est quoi ce café ? Il est dégueulasse !
Suzie : Ah oui, j'ai acheté du café commerce équitable !
Juvénal : C'est quoi, ce truc, il est moins bon que mon café.
Suzie : Tu parles de ton café transgénique récolté par des enfants de moins de 5 ans au milieu de pesticides toxiques ?
Juvénal : Ouais, celui-là
Suzie : Ton café, ce sont des gamins qui le récoltent ! Tu te rends compte !
Juvénal : Ben oui, ce n’est pas toi qui dit qu'il faut toujours faire plaisir à un gamin ? Et là, y'en a un qui fait mon café, et toi, tu veux le priver de ce bonheur ?
Suzie : Mais t'es stupide ? Un enfant, ce n’est pas fait pour travailler, ça doit aller à l 'école.
Juvénal : Mais ici, ils n’aiment pas l'école et là-bas, on voudrait les obliger aussi... alors que là, le gamin ben il peut travailler avoir une petite situation et toi tu voudrais qu'on l'exploite gratuitement dans une école !
Suzie : C'est clair que toi, t'as pas d’être beaucoup exploité à l'école. Enfin bon, TON café, il est sous l'évier... bonne dégustation !
Juvénal le prépare : T'en veux un ?
Suzie : Non merci
Juvénal : Alors, tu veux quoi ?
Suzie : Tiens puisque tu me le demande, je voudrais un chien ! on pourrait avoir un chien ? Après tout, y'en a dans toutes les autres fermes !
Juvénal : Ça pond des œufs, un chien ?
Suzie : Ben non !
Juvénal : On peut l'traire pour faire des fromages ?
Suzie : Non plus !
Juvénal : Ah, ben peut être que ça se bouffe !
Suzie : Non mais ça ne va pas ! qu'est-ce que tu vas chercher ?
Juvénal : Ben pourquoi tu veux un chien ? Ça ne sert à rien !
Suzie : Ben si, ça sert !
Juvénal : Mais ça sert à quoi ?
Suzie : Ben à avoir un peu d'affection !
Juvénal : On en avait un, il bouffait les poules, on a dû le faire piquer
Suzie : Mais je ne veux pas un gros chien, un petit ! Comme celui-là (elle tend une photo) c'était Bingo, mon yorkshire !
Juvénal : ah ben celui-là, c'est les poules qui l’auraient bouffées.... Mais si c'est de l'affection que tu veux, on peut avoir un enfant !
Suzie : Non mais un enfant, on ne le fait pas juste pour avoir de l'affection
Juvénal : Ben non, y'en a qui en font pour avoir du café ! (Rire)
Suzie : Crétin ! Et si notre enfant emmerde tes poules, tu voudras le faire piquer aussi ?
Juvénal : Ben non quand même, un enfant, on ne va pas le piquer... juste, je le foutrais à l'ADAS
Suzie : Parce que tu penses qu'on peut se débarrasser d'un gamin aussi facilement ?
Juvénal : Ben en fait, je ne sais pas !
Suzie : Ben non ! En France y'a des lois et c'est tant mieux ! Un enfant, tu l'assumes...jusqu'au bout !
Juvénal : Non, t'as raison, donc pas d'enfant. C'est un truc à emmerdes, ça ! Et pourquoi t'as besoin de plus d'affection ? Je ne t’en donne pas ?
Suzie : Toi, la seule affection que tu donnes, c'est la caresse que tu fais au lapin avant de lui briser la nuque.
Juvénal : ça c'est ma marque de fabrique, je la tiens de mon grand-père. Petite caresse pour le rassurer et tchac ! un coup sec… comme ça, le lapin est moins stressé ! Mais je peux être tendre, si tu veux !
Suzie : Mais la tendresse, on ne la propose pas ! On l'impose ou plutôt non, on l'appose ! ! Elle doit venir d'elle même ! Y'en a qu'un seul qui m'en a donné ! Cédric Berthoux
Juvénal : Qui c'est ce fumier ? J'm'en va te lui dire ma façon de penser à ce sagouin qui drague ma femme.
Suzie : Mais non Bourricot, C’est un souvenir de jeunesse, mon premier amour, en 3eme au collège Sainte Clothilde. Un petit blond bouclé avec des yeux rêveurs. Ses lèvres avaient le goût de diabolo grenadine ! Je me souviens, c'est à moi qu'il a donné son premier baiser. Il était tout tremblant. Moi aussi, note bien ! Un beau jeune homme, réservé, raffiné !!
Juvénal : Ben moi aussi, je suis raffiné !
Suzie : Toi, la seule chose que tu pourrais faire de plus raffinée, c'est un pet en alexandrin
Juvénal : Ben avec un peu d'entrainent, peut-être que je peux y arriver ! Il pétait en alexandrins, Frédéric Bertoux ?
Suzie : Cédric, il s’appelait, et il ne pétait pas !
Juvénal : Alors, il devait être bien malade ! Le pet, c'est gage de bonne santé !
Suzie : Alors, toi, pas de doute, tu finiras centenaire !
Juvénal : Oui, j'vais être centenaire !! Comme un chêne !
Suzie : Finir comme un chêne, c'est quand même un comble pour un gland !
Juvénal : Bref, c'était l'homme idéal, quoi !
Suzie : Oh, l'homme idéal, c'est comme le père noël ou l'égalité salariale entre les hommes et les femmes, ça fait longtemps que je n'y crois plus
Juvénal : Et bien moi, j'ai mon idée de la femme idéale !
Suzie : Toi déjà, la femme idéale, c'est celle qui veut bien avec toi !
Juvénal : Tu dis ça parce que t'as bien voulu avec moi ?
Suzie : Non, moi, c'est parce que tu étais le pigeon idéal !
Juvénal : Non, moi, c'est une femme qui sache retourner la terre, charger le foin, traire les vaches... D’ailleurs, faut que j’y aille aux vaches.
Suzie : Bref ta femme idéale, c'est un engin agricole ! Quoi !
Tableau 8 : Juvenal entre dans la cuisine
Juvénal : Ben, y'a d'ses abrutis à leur volant ! Comment qu'ils déboulent sur la petite route, un d'ces 4 va y'avoir un mort !
Suzie : forcément, avec ton tracteur, tu ne dépasses jamais le 30 à l'heure. Tu emmerdes tout le monde
Juvénal : Ben c'est eux qui roulent comme des fous
Suzie : En même temps, c'est un peu grâce aux fous du volant qu'on gagne des médailles aux jeux paralympiques
Juvénal : N'empêche, faudra pas s'étonner qu'un jour, j'en emplafonne un !
Suzie : Et puis, niveau sécurité routière, tu es mal placé pour gueuler ! ton tracteur, tu le reprends à chaque fois après avoir pris quelques canons, rouler avec 3 grammes, ça aussi c'est dangereux
Juvénal : Comme si le guignolet vin blanc était dangereux, ma mamie, elle en prenait un tous les matins, elle est morte à 90 ans
Suzie : Elle ne conduisait pas de tracteur ; L'alcool au volant, c'est dangereux
Juvénal : Oui, mais, là, l'alcool, y'a pas d'alcool dans le volant, y'en a que dans le chauffeur !
Suzie : N'empêche qu’un accident sur 4 est dû à l'alcool.
Juvénal : 1 sur 4? ça veut donc dire que les 3 autres qui ont un accident, ils boivent pas, donc on est moins dangereux qu'eux, en même temps, c'est logique !
Suzie : Logique ?
Juvénal : Ben oui, comme on sait qu'on a bu, on fait plus attention que les autres. C'est vrai, le patron du PMU, il me le rappelle souvent, t'es trop bourré, tu ne devrais pas conduire. Ça va, on est prévenu. Non, bourré sur un tracteur, je ne suis pas dangereux, simple, je suis un inoffensif du volant, contrairement aux chauffeurs de grosses bagnoles… Et puis, leurs grosses bagnoles, ben elles polluent !
Suzie : Elles polluent de moins en moins ! Le progrès, aujourd'hui, les voitures sont soumises à des normes et des contrôles !
Juvénal : Oui, tu parles, quand tu regardes chez Volkswagen, comment ils ont truqué les contrôles et à cause de ça les gens ils respirent des gaz toxiques.
Suzie : Décidément, faire respirer des gaz dangereux aux gens, c’est une sale manie, chez les Allemands !
Juvénal : Enfin, je te le dis, un jour, y'aura un drame sur cette route ! Tu verras !
Juvénal : Tiens, t'as racheté du parfum ?
Suzie : ça te plait ?
Juvénal : Ben, c'est que c'est l'argent jeté par les fenêtres ! Le parfum, on en met pour séduire et toi, t’as plus personne à séduire puisque tu es avec moi !
Suzie : Tu m'excuseras mais le parfum, c'est une façon de me faire plaisir à moi aussi ! Y'en a pas que pour Monsieur
Juvénal Et puis ton parfum, ça sent la cocote !
Suzie : Ça change de l'odeur de betterave !
Juvénal : Ah ben la betterave, elle nous fait vivre la betterave ! J'en ai deux cents hectares de Betteraves !
Suzie : Oh, je le sais que tu as de la betterave, j'en ai retourné 5 tonnes de tes betteraves. Non seulement, ça pue mais en plus, c'est lourd... comme toi !
Juvénal : Je ne pus pas, je sens le rustique !
Suzie : Justement, le rustique, ça pue !
Juvénal : Là, tu insulte mes origines ! Tu piétines la mémoire de mes ancêtres ! Tu rudoies mon patrimoine !
Suzie : mais c'est qu'il parle bien quand il veut
Juvénal : Tu te moquerais de moi comme ça si j'étais gravement malade ?
Suzie : Y'a pas un virus qui veut s'approcher de toi, avec ton odeur rustique !
Juvénal : Rigole pas ! S'il m'arrivait un truc grave ?
Suzie : Mais ce serait une excellente nouvelle !
Juvénal : Tu trouves ?
Suzie : Ben oui, Les grands drames te mènent immanquablement à la dignité, alors que tes petits traquas te font systématiquement passer pour un con... ainsi tu oseras plus facilement révéler que tu as un cancer plutôt qu'une hémorroïde
Juvénal : Vu comme ça... surtout que les hémorroïdes, ça m'arrive souvent
Suzie : Qu'est-ce que je disais... Toi, tu ne t'en iras pas dans un râle majestueux mais dans un pet foireux
Tableau 9 : Suzie assise devant la télévision, absorbée par le programme
Suzie regarde la télé reportage télé : Pour préserver sa suprématie, dans la meute, le male alfa a depuis longtemps éliminé ses concurrents. Il peut ainsi parader devant les femelles. Il sait qu’il va régner sur son harem.
Téléphone sonne
Suzie : Allo ? Colette ? Quoi ? Ne parle pas si vite ! Je ne comprends rien ! Gino ? Il a retrouvé ma trace ? Il arrive ici ? Tu es sure ? Ah, la poisse ! Oui, j'ai compris ! Finie la planque ! Ben t'en a de bonnes toi, je suis mariée ! Ça veut dire abandon de domicile conjugal ! Oui, et en même temps, si je reste et que Gino arrive, je suis morte ! Et puis, il va s'en prendre à Juvénal... Comment ça, qu'est-ce que ça peut me foutre ? Ben c'est mon mari, quand même! Non, ce n’est pas ça, mais... en fait, si, je me suis peut-être attaché. Bon, c'est vrai que ce n’est pas un monstre de séduction, il est sans finesse, il ne me fait pas rêver, il est chiant, il est pingre mais il est sincère, il ne triche pas ! Gino, il avait su me faire rêver, me séduire, il m'avait joué la grande sérénade et tu as vu le résultat. Les plus belles années de ta vie à faire le tapin, pendant que ce salopard retourne en faire rêver d'autres pour en faire tes voisines de trottoirs. Je connais trop bien les hommes, j'en ai même essayé un sacré paquet de males dans ma longue expérience et je pense les connaître mieux que le psy, parce que lui, ne s’allongeait pas avec eux dans le canapé. Que du narcissique qui se convainc qu'il t'a emmené au 7eme ciel, du doucereux plaintif qui vient t'évoquer ses misères avec madame, du mythomane salace qui se prend pour une star du porno, du furtif cyclothymique qui arrive avec des fantasmes et qui repart avec des scrupules. Ils jouent tous un rôle, ils trichent tous autant qu’ils sont. Juvénal a au moins cette honnêteté de ne pas te faire croire qu'il est un autre. Et puis, à chaque fois, ça me faisait tout drôle de les voir rejoindre leur femme. Tu ne vas pas le croire mais je devenais jalouse, oh pas des crétins qu'elles avaient épousés et qui venaient claquer leurs primes de panier chez moi, non, mais du fait de ne pas avoir un régulier avec qui tu puisse bâtir des petits projets... oui, c'est leur petite vie de couple que je jalousais... là, j'en ai trouvé un, pas le plus beau, pas le plus inspiré, mais c’est le mien ! En plus, il ne risque pas d'aller voir mes anciennes collègues ! Pas qu’il ne soit pas tenté, mais quand elles lui donneront leur tarif, il se sauvera en courant ! Fidèle par avarice, Il a les qualités de ses défauts. Alors, non, tu comprends, je ne veux pas que Gino lui fasse du mal ! (Elle raccroche)
Suzie : Mon pauvre Juvénal, je n’ai pas le choix, si je veux te sauver, je ne peux pas rester.
(Elle prépare des valises)
Juvénal (entre panique et choqué) : Holà ! C't affaire ! (Il s’assoie en état de choc et se sert un canon) Ben, mon dieu ! Je te l'avais dit qu'un jour ça arriverait !
Suzie : Qu'est ce qui se passe !
Juvénal : Ben c'est pas joli à voir !
Suzie : Ben raconte, déjà !
Juvénal : Ben voilà, Je ramenais ma remorque de betteraves sur le petit chemin devant la ferme. Tranquille ! J'avais bu que deux canons au café d la mairie... et là, Bim ! (Il reste songeur)
Suzie : Quoi, Bim ?
Juvénal : Ben Bim ! En même temps, c'est moi qui avais la priorité !
Suzie : Je ne comprends rien !
Juvénal : Ben voilà, Y'avait une voiture qui arrivait sur le chemin de la ferme ! Alors qu'à part moi, y'a jamais personne qui passe là!
Suzie : Et alors ?
Juvénal : Ben comme j'ai pas l'habitude et que je somnolais un peu... ben, y'a eu contact, quoi !
Suzie : Contact ?
Juvénal : Ben oui, entre mon tracteur et sa petite voiture rouge ?
Suzie : Une petite décapotable ?
Juvénal : Ben comment que tu sais ?
Suzie:(hésitante) Bah, une voiture rouge, c'est forcément décapotable !
Juvénal : Ah bon ? Ben si tu l'dis ! Enfin, bon, j'ai un peu roulé dessus !
Suzie : Sur la voiture ? Le chauffeur ?
Juvénal : Ben, en fait, un peu sur les deux !
Suzie : Et alors ?
Juvénal : Ben déjà, le tracteur y'a pris une sale griffe !
Suzie : Non, mais le chauffeur de l'autre voiture ?
Juvénal : Ben je crois qu’il ne va pas bien !
Suzie : C'est à dire ?
Juvénal : Tu crois qu'on peut vivre avec sa tête à 1m de son corps ?
Suzie : Ben non
Juvénal : C'est pour ça qu’il ne va pas bien, alors !
Suzie : Tu veux dire qu'il est décédé ?
Juvénal : Ben, si ce n’est pas ça, il imite drôlement bien le mort !
Suzie : Yeeesssss !!!!!
Juvénal : Hein ?
Suzie : Non, mais je veux dire, ça aurait pu être toi ! Je me réjouis que tu sois toujours en vie ! Ça a dû lui faire tout drôle de voir débouler ton tracteur…. J’aimerais tant savoir le dernier truc qui lui soit passé par la tête avant de mourir à ce salaud !
Juvénal : Ben ça je sais ! Le dernier truc qui lui est passé par la tête, c'est la roue de mon Massey Fergusson. Bon, ben y'a pu qu'à appeler la gendarmerie !
Suzie : Attends, Personne n'a rien vu ?
Juvénal : ben non, t'as vu le chemin, c'est loin de tout !
Suzie : Et si on faisait comme s’il ne s'était rien passé ?
Juvénal : Ben quoi qui s'est rien passé ?
Suzie : Une voiture et un corps à faire disparaître, dans une ferme aussi isolée, ça ne doit pas être compliqué !
Juvénal : Mais qu'est-ce que tu veux dire ?
Suzie : Eh bien, le conducteur en petits morceaux, ça pourrait nourrir tes cochons ! Et la voiture, y'a bien un endroit pour la faire disparaître !
Juvénal : Non, mais ça va pas ! On va avoir des problèmes en faisant ça !
Suzie : C'est toi qui vois, mais une voiture de sport démolie et un homme mort, ça va t’en faire des dommages et intérêts à payer ! Alors que si le gars disparaît dans ta porcherie... personne n'en saura jamais rien !
Juvénal : Nom de diou ! Je vais chercher ma scie ! Déjà, y'a un peu de temps de gagné, j'aurais pas besoin de lui découper la tête ! En même temps, c'est dommage, la cervelle, c'est ce qu'ils préfèrent les cochons !
Suzie : Qu'ils se consolent, celle-là était bien pourrie !
Juvénal : Bon je vais faire du découpage ! (il sort)
Suzie : Un héros ! Mieux, un male alpha ! Le mâle alpha ! Juvénal est le male alpha, je suis sous la protection de son arme absolue, un tracteur ! Bande de petits proxénètes miteux, venez donc affronter mon preux chevalier sur son fidèle destrier ! Il vous fera exploser la tête dans un duel sans merci !
Juvénal, c'est un sans doute le plus beau male !
Juvénal, le partenaire idéal,
Juvénal, pas de quartier pour le rival !
Juvénal, toute la pulsion animale,
Juvénal, un grand fauve, c’est du brutal !!
(Le téléphone sonne) Allo ? Colette ? Oui, tout va bien. Oui, Gino est arrivé ici, par contre, il ne repartira pas !! je ne peux rien te dire, sauf que tu n'en entendras plus jamais parler . Ah oui, et évite de manger du cochon dans les semaines qui viennent, il risque d'avoir un petit goût de maquereau. Il a fait la connaissance de Juvénal, mais très furtivement ! ….Quoi ? C'est qui ça, Charly ? Le frère de Gino ? Il veut reprendre le bisness familial ? Il va se lancer à ma recherche ? Alors dis-lui que c'est quand il veut ! Que le petit milieu du banditisme lillois, c'est minable, il ne connait pas la grand caïd de Bourbourg ! Le parrain de la haute Colme ! Le cador des watergangs ! Alors dis-lui que si l'envie lui prend de s'en prendre à moi, il rejoindra son frangin dans l'estomac de mes gorets ! Je te laisse, revoilà mon homme ! Mais oui, je te parle toujours du même !
Juvénal (couvert de sang) : Bon, j'reviens de la porcherie, il a mis les cochons en appétit. Ils se régalent, les bestiaux. J'espère qu’ils ne vont pas y prendre trop goût, parce que de l'humain, c'est chiant à découper !
Suzie : Dire que c'est les poulets qu'il craignait, le Gino, au final, c'est des porcs qui l'auront eu ! Et la voiture ?
Juvénal : j'l'ai foutue sous le fumier. Y'a personne qui ira chercher là-bas. Je me demande quand même si on a bien le droit de faire ça !
Suzie : T'inquiètes, ça sera notre petit secret à nous deux !
Juvénal : Ben à nous deux et aux cochons aussi un peu!
Suzie : Tu sais que tu es irrésistible comme ça ! Bestial ! Cruel ! (Elle l'enlace)
Juvénal : Fais attention, je suis tout taché !
Suzie : Mais c'est comme ça que je t'aime ! Sanguin et saignant T'es un féroce, toi !
Juvénal : Un quoi ?
Suzie : Un carnassier, quoi !
Juvénal : Ah non, j'te jure, Suzie, c'est les cochons qui ont bouffé, le gars ! Moi, j’avais pas trop l’appétit pour ça !
Suzie : Je me comprends !! mais Tu vas tout poser de suite, on va aller dans la chambre faire l'amour comme des bêtes !
Juvénal : Ben, Suzie ! On n'est pas dimanche!
Suzie : Et alors ? Avec un sex symbole, on ne s’emmerde plus avec un calendrier !
Juvénal : Sex-symbol, carrément ! Ah ben d'accord, dit comme ça... (il suit Suzie) Bon, mais dimanche, on fera quand même aussi ? Parce qu’il faut que je m'organise moi !
Suzie : Faut t’habituer, mon beau lion, à partir d'aujourd'hui, ce sera tous les jours dimanche
Juvénal : Ben dit, je devrais écraser des gens plus souvent, moi !
Tableau 10 : Suzie face scène et Juvénal assis dans un fauteuil
Suzie : Et voilà, voilà comment s'est construite notre idylle... il m'a retourné la tête, mon Juvénal ! Pour lui je serais prête à faire n'importe quoi. D'ailleurs, repose-toi mon lapin, tu ne vas pas te fatiguer pour rien. Je vais aller ramasser les betteraves, tu viendras relever les compteurs ! Je te sers un petit Pastis avant d'y aller ?
Juvénal : Ben euh oui, je veux bien !
Suzie : Tiens ! Et te fatigues pas trop ! Bisous, mon gros loup, j'y vais
Juvénal : Ben ça alors ! Si on m'avait dit qu'un jour, le travail se ferait tout seul... en même temps, suffisait de laisser mon charme agir et elle est prête à tout pour moi. Faudra juste que je vérifie qu'elle bosse bien ! Finalement, la vraie nature d'un homme, c'est de trouver une femme qui sache tout faire tourner les choses, pendant que lui, il supervise, entre sa grâce matinée, sa belote au PMU et sa sieste devant la télé !
Suzie (qui réapparait) : Juvénal ? Excuse-moi, je ne voulais pas interrompre ton rêve, parce que faut bien que tu réalises que tu rêvais, là ! Tu ne t'imaginais quand même pas que j'allais reproduire les mêmes conneries, que j'allais entretenir un nouveau fainéant qui allait m’user à la tâche et abuser de ma bonté ! Non, c'est fini, tu vas me retourner le champ, me ramasser les betteraves, me nourrir les poules et me traire les vaches ! Et au trot !
Elle met Juvénal dehors
Juvénal : Ben zut alors ! Ça valait le coup de se marier, tiens ! Tinder, eu s't'arnaque !!!
Suzie (qui s'installe dans le fauteuil) : Allez, à mon tour un peu ! Gino est mort, j'allais pas me laisser monter le bourrichon par celui-là ! Bonne mais pas conne ! Et oui, mon bon Juvénal, le male Alfa, c'est celui qui se dort la pilule en attendant que madame aille chasser pour lui, qu’il ait juste à manger et à dormir, même à chercher d’autres femelles... ça c'est vrai pour les lions, mais toi, t'es pas un lion... t'es un blaireau !!!