M’Ma Douay et le diamant bleu

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C’est fou ce qu’un tel bijou peut déchaîner comme passions !
Dans une commune rurale il vient mettre en émoi le paisible café de Marguerite et ses habitués, dont les sujets de conversation portaient jusque là sur la féminisation de la gendarmerie et la fermeture annoncée du bureau de poste.
Et curieusement apporter la perturbation dans la triste masure qu’occupe cette pauvre vieille rhumatisante, affligée de ses deux benêts de grands fils !

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ACTE 1

Dans le café de MARGUERITE, qui n’a rien de très moderne.

MARGUERITE PRUNELLE LA BARONNE

ARSENE PAPELARD

JUSTIN

A une table, JUSTIN lit le journal en sirotant. C’est pour y lire son journal qu’il fréquente le café.

Au comptoir, ARSENE. L’œil rivé sur son verre, il semble absent. C’est pour des raisons d’ordre matrimonial qu’il est un habitué du café.

Derrière le comptoir, MARGUERITE : dos au public, elle finit de ranger les bouteilles sur l’étagère.

Elle se retourne, commence à essuyer les verres,

puis :

Marguerite – Il faisait encore froid ce matin.

Arsène( reprenant conscience ) Hein ?

Marguerite – Je dis : il faisait encore froid ce matin.

Arsène - ( un temps ) Ah ouais...

Marguerite – Quand même, on est à la fin du mois de Mai !

Arsène – Ouais.

Justin( levant le nez de son journal ) De toute façon, il n’y a plus de saison.

Marguerite – Ça, c’est vrai !!

Arsène( sentencieux ) Ils ont même dit à la télévision que dans l’Est, ça avait encore gelé.

Justin – Dans l’Est, c’est souvent.

Arsène – Oh, oh, oh... quand même!

Justin – Ah ben si ! Dans le Jura, c’est fréquent.

Arsène – Ah oui… mais… je ne parlais pas du Jura.

Justin – Le Jura, c’est quand même à l’Est.

Arsène – Ouais, mais je ne parlais pas de cet « Est » là !

Justin- ( hochant la tête et reprenant la lecture de son journal )

« Testela »… « Testela »… tu m’as l’air d’un « testela »… tiens !

Arsène – Ben si… il y a “Est” et “Est” Et mon service militaire, je l’ai fait dans l’artillerie à l’Est, et c’était pas le Jura.

Justin - Dans l’artillerie?

Arsène - Parfaitement.

Justin- (clin d’œil à Marguerite, et levant son verre) Ah! T’étais déjà dans les canons.

Arsène - Non, j’étais pas dedans! J’étais devant: j’étais manipulateur de théodolite simplifié.

Justin - Simplifié!… Ça me rassure. Et tu faisais quoi avec ce théo - truc - machin?

Arsène - Après le tir je disais où était tombé l’obus par rapport à la cible.

Justin - Ah oui, comme à la bataille navale… tu criais… « pan » - « raté »… « pan » - « touché » … « pan » - « coulé » !

Arsène - Non hein!… le théodolite mesure les angles, je parlais en degrés!

Justin - Ah ben oui, avec les canons (levant son verre), parler degrés, c’est naturel, pas vrai Marguerite?

( entre en coup de vent la gendarme PRUNELLE. Au signe qu’elle adresse à MARGUERITE, on devine qu’elle a un besoin urgent de faire pipi. Elle traverse la scène et disparaît par la porte proche du comptoir )

Justin - Ah, dis donc !… Ça urge !!

Marguerite – Oui.

Justin – C’est bien ça la France ! On veut féminiser la profession, et à la gendarmerie on n’est même pas capable d’adapter les vécés.

Arsène – Oh… Oh… Les femmes, elles veulent l’égalité avec les hommes, et ben, à la gendarmerie y a ce qui faut pour les hommes, et les femmes elles n’ont qu’à faire avec.

Marguerite – Y a ce qui faut, y a ce qui faut !… C’est un water à la turc !!

Arsène – Et alors ?

Marguerite – A chaque fois qu’elle y va, il y a la chasse d’eau qui lui mouille les pieds, et c’est pour ça que l’adjudant l’autorise à venir ici.

Justin( d’un air détaché ) Ouais ! Y a peut-être pas que la chasse d’eau qui lui mouille les pieds !!!

Marguerite( tout en préparant un verre de vin blanc)

En tous cas, elle est très gentille et elle fait bien son travail, et elle peut venir ici chaque fois que c’est nécessaire.

Arsène – Elle est gentille, elle est gentille !.. Heureusement !.. Manquerait plus qu’elle morde !

( retour de PRUNELLE, manifestement soulagée )

Prunelle( à MARGUERITE ) Merci.

Marguerite – Tenez, je vous ai préparé un petit blanc.

Prunelle – Ah non, non.

Marguerite – Mais si.

Prunelle - Non, non, merci.

Marguerite - Oh, allez !

Prunelle – Jamais quand je suis en tenue.

Marguerite – Il y a ce qu’il faut au vestiaire pour se changer.

Prunelle – Oui. Mais, non.

Marguerite – Mais si. En même temps, faut que je vous demande un renseignement.

Prunelle – Ah ! Alors, si c’est pour rendre service… C’est différent.

( elle sort côté toilettes )

Justin– Un renseignement ?

Marguerite – Ben oui, un renseignement.

Justin – Un renseignement ?… Marguerite, t’envisages quand même pas d’entrer dans la Gendarmerie ?

Marguerite – Dis donc pas de bêtises, Justin !!

( Retour de PRUNELLE. Elle a quitté son postillon, nom officiel du couvre-chef féminin dans la Gendarmerie, et revêtu un pare-poussière qui a beaucoup servi au mari de Marguerite quand il effectuait des travaux de peinture. Elle prend sur le comptoir son verre qu’elle lève. )

Prunelle – Santé !

Marguerite – Santé !

Justin – Santé !

Arsène – Santé !

Prunelle – Alors ? C’est quoi ce renseignement ?

Marguerite – Voilà ! Y a le maire qui est venu me voir hier soir. Il m’a dit qu’à la fin de l’année on allait fermer le bureau de poste.

Prunelle – C’est officiel, oui. Le bureau de poste va fermer.

Justin – C’est pas neuf, ça ! Il y a plus de deux mois que ça a été annoncé dans le journal !

Marguerite – Je sais bien ! mais, ce qu’il m’a dit, c’est qu’on allait créer un « Point Poste », et il voudrait qu’on l’installe ici, dans mon café, plutôt qu’à l’épicerie, parce que le café s’appelle « Au relais de la poste » et il pense que les gens s'y retrouveraient plus facilement.

Justin – C’est pas sot. Et puis, dis Marguerite, ça rapporte !

Arsène – Hé… et comme ça, on est sûr que le café, il ne fermera pas !!

Marguerite – Ça rapporte, ça rapporte… pas tant que ça ! Et puis, c’est de l’astreinte. Non, mais c’est pas la question… Voilà : dans le secteur, ces derniers mois, il y a eu deux attaques d’agences de banque, et une attaque à la Poste à côté, à BOURSENSAC. Alors, avant de dire oui, j’aimerais savoir où on en est de l’enquête.

Prunelle – Elle suit son cours.

Arsène – Elle piétine, quoi !

Prunelle – Pas du tout, elle avance.

Justin – C’est marrant ! Pour la Gendarmerie, une enquête, ou bien elle suit son cours, ou bien elle avance. Jamais elle ne recule !!

Prunelle – C’est normal puisqu’on n’abandonne pas.

Marguerite – Oui, bon ! Mais on en est où ?

Prunelle – Sur une enquête en cours, je dois garder le silence.

Justin – Conclusion : il faut lire le journal. Il n’y a qu’eux pour en parler !

Marguerite – Alors, je ne peux rien savoir. Même en confidence ?

( PRUNELLE hésitante hoche la tête )

Allez ! Ça ne sortira pas d’ici… hein les hommes ?

Justin – Sûr !

Arsène – Je ne dirai rien. ( doigt sur la bouche ) Chut !!

Prunelle – Promis ?

Marguerite – Promis !

Justin – Promis !

Arsène( lève la main droite et crache ) Juré !

Prunelle – Bon. Et bien, en recoupant les informations, on est parvenu à une conclusion : ( sur le ton de la confidence) C’est la même équipe qui a fait le coup les trois fois. Et d’après les témoignages, on tient un portrait du braqueur : 1 mètre 70, armé, cagoulé, et vêtu d’une salopette. ( à JUSTIN ) Alors ? On avance ou on n’avance pas ?

Justin – Ah, c’est sûr que s’il se promène comme ça dans la rue, il va tout de suite être reconnu !

Prunelle – Et en plus, il y a toujours un complice qui l’attend en voiture.

( un silence )

Justin – Et ?

Prunelle – C’est déjà pas mal, non.

Arsène( levant son verre ) Santé !

Marguerite – Santé !

Prunelle – Santé !

Justin – Santé !

Marguerite – Donc, d’après vous, ils seront bientôt arrêtés.

Prunelle – Oh, oh, oh... Comme vous y allez vous! Vous savez comme sont les juges : il faut d’abord accumuler suffisamment de preuves.

Justin – Autrement dit, ça vous rendrait service s’il y avait un nouveau braquage.

Marguerite – Ouais !… Ça ne m’avance pas beaucoup.

( La porte d’entrée s’ouvre, et LA BARONNE qui entre en trombe, s’arrête stupéfaite, fixant des yeux PRUNELLE, et laissant PAPELARD à moitié coincé dans la porte d’entrée. Elle porte une robe noire qui s’apparente plus à une robe de soirée qu’à une robe de deuil. Et elle porte en sautoir et très visible un diamant bleu )

La Baronne – Oh ! Ah, ça c’est inattendu !… Dans ce café perdu, il y a un artiste peintre !

( ébahissement général ) ( Elle s’avance vers PRUNELLE )

Non, non ! Ne dites rien ! Laissez-moi deviner…IM – PRES- SION – NISTE !!!

Prunelle- ( vexée ) Mais Madame, vous ne m’impressionnez pas du tout !

( Elle tourne les talons et sort côté toilettes)

La Baronne( à PAPELARD ) Mais dites quelque chose, vous !

Papelard – Monsieur, Monsieur.. . Madame… Pardon ! Je veux dire, Madame, Messieurs... Bonjour.

( retour de PRUNELLE sur scène : elle a quitté le pare-poussière et recoiffé son postillon. Elle traverse la scène dignement )

Prunelle – Salut !! ( elle sort )

La Baronne – Ah ! Et justement nous avions un renseignement à demander !!

Justin - De ce côté là, le bureau des renseignements, il serait plutôt fermé.

Marguerite( soupçonneuse ) Vous cherchez quelque chose ?

La Baronne( à PAPELARD ) Mais allez-y ! Expliquez, au lieu de rester là planté comme un ballot !

Papelard( au public ) Elle m’énerve…

Voilà… Ernest PAPELARD, premier clerc chez maître DUTERRIN, notaire…

La Baronne – Mais c’est ça !… ne vous gênez pas !… Parlez de vous !! Moi, je n’existe pas !! ( se présentant ) BARONNE de MÉTOMPIÉ sur la CRETONNE.

Papelard – Mais j’allais y venir.

La Baronne – Vous auriez quand même pu commencer par là, non ?

Papelard –...

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