Molière en urgences

Une metteur en scène et sa troupe d’acteurs trouvent, grâce à la complicité de deux infirmières, un lieu de répétition dans un local situé dans un hôpital. C’est le point de départ d’une folle comédie où docteurs, malades, père avare, se croisent et s’affrontent dans un tourbillon incessant, sous l’œil du Docteur Leroy, grand mandarin, personnage imbu de lui-même et dont les décisions burlesques vont endiabler le spectacle.
Outre ses ballets, sa musique et ses chansons (de Lully), cette comédie est écrite… avec les mots de Molière… En effet on découvre divers personnages des comédies de Molière dans des situations totalement détournées et c’est un plaisir de retrouver les répliques connues adaptées à d’autres situations. Et on constate que l’on peut faire dire aux mots tout autre chose en les sortant de leur contexte. Un hommage à l’œuvre de Molière et à sa fantaisie qui réjouit tout public.

🔥 Ajouter aux favoris

Soyez le premier à donner votre avis !

Connectez-vous pour laisser un avis !

Lucrèce Sabine

Lucrèce Psyché

Un malade (Hervé) Sabine
Lucrèce

Sabine Sabine Lucrèce

MOLIERE EN URGENCES

De

Yves Carlevaris

ACTE I

Scène 1

Hall des Urgences. Un malade est assis sur les escaliers. Sabine entre en chantonnant et commence à ranger son bureau.
Lucrèce entre en tenant un chat « d’expériences », plein de fils électriques par la queue. Elle en menace Sabine en riant.

Le petit chat est mort.

C’est dommage; mais quoi, nous sommes tous mortels, et chacun est pour soi.
(Elle jette le chat dans une poubelle. Les infirmières soupirent et s’asseyent. Elles chantonnent la chanson de Sabine « Paissez »..)

Enfin un instant de repos entre deux invasions de malades...

(C’est une malade qui est bandée jusqu’à la taille. elle joue avec une bande Velpeau à laquelle elle a attaché une rose)

Je suis enflée de partout. C’est quantité de sériosités que j’ai dans le corps.)

( id) Moi, je cherche un bon médecin.
C’est une denrée fort rare de nos jours. Il y a Leroy.

Ah Leroy, capable de faire rendre gorge à véroles, fièvre, pleurésies, flux du sang et dysenteries...

Leroy, c’est le plus beau des médecins ! Notre teint de lis et de rose...

Notre nez bien fait, notre bouche rouge et nos grands yeux vifs... sont pour toi, Leroy.

1

Sabine Lucrèce Sabine Lucrèce

Sabine

Madame Lucette (Sophie)

Les infirmières

Almanzor (Thomas) Lucrèce
Sabine
Les infirmières

Colin (Hervé) Almanzor
Les infirmières

Un malade (Pascal) Sabine
Lucrèce
Les infirmieres Tous

Taisons-nous. Je rougis.
C’est ma foi vrai. Comment faites-vous ?
Je n’ai pas de mérite. C’est une vieille habitude.

Cela vous va très bien.

( elle chante) Paissez, chères brebis

Bee

Dans un coin, un malade en pyjamas, monsieur Almanzor, regarde la scène. Il a un goutte à goutte accroché à un pied à perfusion. On le verra circuler ainsi tout au long de la pièce.

(elle joue avec une bande Velpeau à laquelle elle a attaché une rose) Je suis enflée de partout. C’est quantité de sériosités que j’ai dans le corps.

Les herbettes naissantes Bee

( montrant sa fesse) Moi j’ai un entracte là. Là ? Un entracte ?

Il est fort mal placé !...

ces prés et ces ruisseaux, ont de quoi vous charmer bee

( id) Moi, j’ai des lassitudes dans les mufles des jambes... Ah bon ?...

Mais pour être toujours contentes

) Ma sœur est malade d’hypocrisie !
D’hypocrisie ? ( à Lucrèce) L’hypocrisie est un vice à la mode. Et tous les vices à la mode passent pour vertus.
toujours contentes en tes

bee bee bee

2

Sabine Lucrèce

Sabine Lucrèce Sabine La grange Tous

Almanzor Lucrèce Almanzor Sabine Lucrèce

Sabine Lucrèce Sabine Lucrèce

Scène 3

(un groupe composé de 7 personnes entre dans la salle des Urgences) Ils ont avec eux, une panière en osier, une table à repasser, un perroquet, un manequin. Ils traversent la salle et montent sur le plateau)

Seigneur ! Je m'étonnais bien si nous aurions longtemps du repos.

Criquet ! (elle lui fait signe de faire disparaître les malades) C’est Madeleine. (elle salue une femme de la main) Elle est en

compagnie de ses acteurs...
C’est ma foi vrai. (elle salue la femme à son tour) Mais chut !
Oh oui, chut !

mais on va où ????

CHUT !

Sabine et Lucrèce désignent une porte au fond La petite troupe l’ouvre, s’y engouffre et disparaît.

Scène 4

Et quel mal ont ceux-ci, s’il vous plaît ? Ne vous mettez pas en peine.
Est-ce quelque mal ?...
Les médecins sont obligés au secret.

Almanzor ! Va-t-en te faire pendre. Dehors !

(Almanzor s’écarte sans hâte, visiblement habitué à être rabroué . Il sort avant J)

Où en étions-nous avant d’être dérangées dans notre discussion ?

( elles chantent) Paissez, chères brebis Bee
Les herbettes naissantes

3

Sylvestre (de l’extérieur)
Lucrèce
(Sottenville entre en fauteuil roulant poussé par son fils)

Sottenville Sylvestre

Lucrèce Sylvestre Sottenville Sylvestre Sottenville

Sylvestre Lucrèce

Sylvestre Sottenville Lucrèce Sottenville

Ah traître ! (la main à son cœur) Ahhhhh ! N’as-tu pas de honte ? Fils indigne d’un père comme moi !

Monsieur de Sottenville, homme riche, est malade... A l’aide ! Quoi? La médecine serait-elle la seule à n’accorder aucun privilège aux gens d’importance ? Je ne puis le croire.

Mais non, soyez en repos.

Ah tout de même !

Ah ! tu m’as tué, tu m’as assassiné. Je meurs.

Vous me mettez au désespoir, mon père !

Il n’est plus temps et tu auras ma mort sur la conscience ! Ahhh ! (hoquet) Mon cœur s’arrête !

Ces dames vont le faire repartir.

Nous ne réussissons pas à tous les coups. ( à Sottenville) Donnez-moi votre pouls. Ouais! ce pouls-là fait l'impertinent. Allons donc, que l'on batte comme il faut. Je vois bien que vous ne me connaissez pas encore. Ah! je vous ferai bien aller comme vous devez.

Madame...
Ahhh
Pouvez-vous vous taire que j’entende battre le cœur. ( moins fort) Ahhh !

Scène 5

Entre Sylvestre poussant un fauteuil dans lequel est assis un vieux monsieur, une canne à la main, accompagné de son fils. Des malades passent.

Hola ! Quelqu’un !
Eh bien, qu’est-ce cette fois ?

4

Lucrèce Sottenville

Lucrèce Sottenville Sabine Lucrèce Sottenville

Sylvestre Sabine Lucrèce Sylvestre

Lucrèce Sabine Sylvestre Lucrèce Sylvestre

Lucrèce Criquet

Mieux que cela...

( très faiblement) Ahhh ! S’aller marier sans le consentement de son père ! Ah traître de fils !

Avalez.
( bas) Qu’est ce que c’est ? (bas) Un julep soporatif Pour faire dormir monsieur.

Je ne veux pas dormir,(L’infirmière lui pince le nez) s je ne veux pas et je veux crier tout mon soûl après mon pendard de fils qui s’est marié sans...
Il s’endort brusquement.

L’effet est rapide.
Il y a là dedans ce qu’il faut.
Il en a pour plusieurs heures. Qu’est ce qui s’est passé ?

Mon père a appris que je m’étais marié sans le prévenir. Soudain je l’ai vu comme atteint d’une vive douleur, je l’ai vu pâlir et changer de couleur, j’ai pensé le voir mourir d’apoplexie. Alors je l’ai conduit ici. C’est grave ?

C’est un simple échauffement de la bile.

C’est un homme en pleine santé.

Quoi ?

Il vous enterrera vous et vos enfants.

Tant mieux, je l’aime tellement. ( à part) Le traître, il feint d’être à l’agonie, pour que je rompe mon mariage.

Scène 6

(à une infirmière qui passe par fond J, montrant Sottenville)

Criquet, Oui

5

Lucrèce Criquet

Sabine Lucrèce Criquet

Sabine

Conduis monsieur dans une des chambres pour clients fortunés.
Il en reste une. La 7. (Elle s’appuie sur le dossier de la chaise de

Sottenville)

La 7 ? Nous y avons là bas nos petites affaires.

Bien rangées dans un placard. Faut-il qu’on les débarrasse ?

N’en faites rien. Si le malade devait rester plusieurs jours, nous aviserions. (Sylvestre sort avec son père et l’infirmière)

( désignant Sottenville) Pourquoi garde-t-il la main posée sur le cœur ?

NOIR

Scène 7

L’intérieur d’une remise, « le local des acteurs »
Ils déballent des costumes, d’autres font des exercices d’articulation : d’autres se maquillent.

Décidément nous aurons travaillé partout. Dans des caves, des greniers et toutes sortes de places inappropriées...

Et à présent dans ce lieu...
Indigne de nous.
En avez-vous un autre à proposer ? Certes non...
Je trouve qu’il règne ici une... Une quoi ?

Une odeur de... Ne sens-je point le lavement ? Voyez, je vous prie.

Eh il y a quelque petite chose qui approche de cela.

J’ai l’odorat et l’imagination toute remplie de cela, et il me semble que je vois une douzaine de lavements qui me couchent en joue.

6

La Grange

Pierrot
La Grange Madeleine Béjart La Grange
Melle du Parc Pierrot
Melle du Parc

Pierrot
Melle du Parc

MadeleineBéjart

Marie Claveau Madeleine Béjart

Pierrot Madeleine Béjart Jodelet Madeleine Béjart Jodelet
Melle du Parc Pierrot
Melle du Parc

Pierrot
Melle du Parc Marie Claveau

Lucrèce

Pierrot Madeleine Béjart Pierrot
La Grange

Si ma proposition vous déplaisait tant, que ne l’avez-vous écartée ?

Nous connaissons l’état de nos finances.
Eh oui, l’argent nous manque, c’est pourquoi... A titre personnel, je me réjouis d’être ici.
Et toi, Jodelet ?
Moi ?
Oui.

( désabusé comme toujours) Oh moi !

Pour moi qui joue avec succès les coquettes...

( perfide) Depuis trente ans.

Eh bien ? Où est le problème d’avoir trente années de coquetterie derrière soi ?

C’est qu’il vaut mieux les avoir devant. (effrayée) Ce lieu ne laisse pas d’être inquiétant.

Cette nuit, j’ai rêvé d’un poisson mort et le poisson mort signifie malheur.
Entrent les deux infirmières, Lucrèce et Sabine.

Scène 8

(à Madeleine) Alors, très chère amie, trouvez-vous l’endroit à votre convenance ?

Nous en parlions justement.
J’en pense tout le bien du monde ! Comme nous tous ici. Grâces vous soient rendues.
Nous vous sommes obligés.

7

Madeleine Béjart Lucrèce

Madeleine Béjart Sabine
Lucrèce Madeleine Béjart

Lucrèce
Sabine Madeleine Béjart Lucrèce

Sabine

Melle du Parc La Grange Sabine

La Grange Sabine Pierrot Sabine

La Grange Lucrèce Madeleine Béjart

Ici, nous allons pouvoir travailler notre art sans débourser un liard.

(à Madeleine) Le mal de votre affaire, c’est que vous êtes dans l’état où l’on voit souvent les artistes de nos jours. Vous êtes dénués d’argent.

C'est quelque chose à peu près de cela. Vous regardez autour de vous ?
C’est une pièce où l’on mettait les fous.

Jadis les fous. A présent les comédiens. La différence est petite car il faut être un peu fou pour être comédien.
(Coup de sifflet).
Excusez-moi, nous devons prendre congé.

Leroy est là. Le roi ?

C’est un médecin admirable. Le plus grand médecin de tous les temps.

Une femme était tenue pour morte il y avait quatre heures. Elle était prête à ensevelir lorsqu’avec une goutte de quelque chose ; il la fit revenir et marcher. Adieu.

Ciel !

Par quel miracle !

Il y avait un homme qui, depuis six jours, était à l’agonie. : on ne savait plus que lui ordonner. Tous les remèdes ne faisaient rien : Leroy s’avisa à la fin de lui donner de l’émétique.

Il réchappa ?
Non, il mourut. L’effet est admirable.

( à des acteurs qui veulent sortir) Où allez-vous ?
Remercier ce grand homme pour les bontés qu’il a pour nous. N’en faites rien. Leroy ignore tout de votre présence ici. Quoi ? Vous voulez dire que...

8

Sabine

Madeleine Béjart Lucrèce

Madeleine Béjart

Nous avons pris la chose sous notre bonnet. Demeurez ici, travaillez et que la discrétion soit votre règle.

Nous ferons comme vous dites.
Ainsi tout ira bien. Vous avez ici un assuré refuge.

( les deux infirmières sortent)

Attaquons Tartuffe, s’il vous plaît.

.

NOIR

Scène 10

9

Hall des Urgences.

Psyché

(Assise avec sa rose) Si vous n’êtes pas favorable au penchant de mon cœur, au moins, ne me forcez pas à en aimer un autre.

Entrent les infirmières Sabine, Lucrèce, Almonzor

Lucrèce

Sabine Lucrèce Sabine Lucrèce

Sabine Lucrèce

Plus que quelques minutes.

(elle se maquille fébrilement)

Mon Dieu, chaque jour, avant l’arrivée de Leroy, je tremble. Je sens mon cœur bondir d’allégresse.
Un froid soudain me prend presque partout.

Leroy n’a jamais pu choisir entre nous deux. Comment le pourrait-il ? Nous sommes toutes deux pareillement jolies

Plaisantes Intelligentes

Sabine

Lucrèce Sabine Lucrèce Sabine Lucrèce Sabine

Lucrèce Sabine Lucrèce Sabine Lucrèce Sabine Lucrèce Sabine

Lucrèce Sabine

Si on voulait aller dans les différences, on pourrait dire que mon sourire est un plus gracieux que le vôtre.

Mon regard est plus profond.

Ma tête est plus fine

(à part) Mais ses traits sont plus lourds.

Leroy fixe mon dos avec insistance

Le mien avec satisfaction.

Je ne vois pas ce qui pourrait faire pencher sa balance de votre côté ou du mien.

Moi non plus. L’âge peut-être. Quel âge avez-vous maintenant ? Moi ?

Oui.
Ma foi, je ne sais pas.
Quoi, vous ne savez pas à peu près votre âge ? Non, est-ce qu’on songe à cela ? Et vous ?

Moi ? N’ai-je pas tous les mouvements de mon corps aussi bons que jamais ? et n’ai-je pas toutes mes dents les meilleures du monde ? Et y a-t-il femme de trente ans qui paraisse plus fraîche que moi ?

Trente ans ? C’est oublier les années de nourrice.

On entend un coup de sifflet bref.

Attention, il arrive !

Scène 11

Le grand Patron entre. Beau. Grand. Il illumine les lieux de sa suffisance souriante. Derrière lui un autre médecin, Villebrequin.

Leroy passe devant malades et membres du personnel médical, qui se trémoussent à son passage. Ballet au cours duquel Leroy se

10

Une malade Villebrequin Dr Leroy

Tous Bobinet

Dr Leroy Bobinet Dr Leroy Bobinet

villebrequin

Bobinet Dr Leroy

Bobinet villebrequin

Lucinde Leroy

mire de toutes les façons dans les petits miroirs tendus par malades et personnel hospitalier.
A un moment, il en a assez de ce rituel et les envoie promener.

Scène 12

Monsieur, j’implore votre assistance.

Que doit-elle faire ?

Rien. La nature, d’elle même, quand nous la laissons faire, se tire doucement du désordre où elle est tombée.

( se pressant autour de Leroy) A moi ! A moi ! Moi d’abord ! Ici !

(accompagnée de sa fille) Monsieur. J’ai une fille qui est tombée dans une étrange maladie.

J’en suis ravi, monsieur. Comment s’appelle votre fille ?

Lucinde.

Lucinde, quel beau nom à médicamenter ! Lucinde !

Je n’ai qu’elle de fille et j’aurais tous les regrets du monde si elle venait à mourir.

Qu’elle s’en garde bien ! Il ne faut pas qu’elle meure sans l’ordonnance du médecin !

Monsieur !

Ne vous inquiétez pas. J’ai des remèdes qui se moquent de tout et je l’attends à l’agonie. (aux autres docteurs) Voilà une malade qui n’est point tant dégoûtante et je tiens qu’un homme bien sain s’en accommoderait assez. (Elle rit)

Vous l’avez fait rire.

Tant mieux ; lorsque le médecin fait rire le malade, c’est le meilleur signe du monde.

Ha hon hon ! Ha hon hon ?

11

Bobinet

Leroy Bobinet

villebrequin Leroy

Malades et autres

Colin
Dr Leroy

Monsieur, ma fille est devenue muette. Sans que jusque ici on ait pu savoir la cause. C’est un accident qui a fait reculer son mariage.

Et pourquoi ?

Celui qu’elle doit épouser veut attendre sa guérison pour conclure les choses.

Et qui est ce sot-là qui ne veut pas que sa femme soit muette ?

Plût au ciel que la mienne eût cette maladie ! Je me garderais bien de la vouloir guérir. (Il lui tape dans le dos, elle tousse, elle rit) Applaudissements.

Amoi!Amoi!Moi!J’étaisavantvous! Ici!C’estàmoi!A moi ! Moi d’abord !

A moi ! Je vous donnerai de l’argent, si vous en voulez.

De l’argent ? Tu me prends donc pour un homme pour qui l’argent fait tout faire ? pour un homme attaché à l’intérêt une âme mercenaire ? Sache, mon ami, que quand tu me donnerais une bourse pleine de pistoles et que cette bourse serait dans une boîte riche cette boîte dans un étui précieux cet étui dans un coffret admirable ce coffret dans un cabinet curieux ce cabinet dans une chambre magnifique cette chambre dans un appartement agréable cet appartement dans un château pompeux ce château dans une citadelle incomparable cette citadelle (les malades et les infirmieres tapent du pied)dans une ville célèbre cette ville(idem) dans une île fertile cette île(idem) dans une province opulente cette province(idem) dans une monarchie florissante cette monarchie dans tout le monde et que tu me donnerais le monde où serait cette monarchie florissante où serait cette province opulente où serait cette île fertile où serait cette ville célèbre où serait cette citadelle incomparable où serait ce château pompeux où serait cet appartement agréable où serait cette chambre magnifique où serait ce cabinet curieux où serait ce coffret admirable où serait cet étui précieux où serait cette riche boîte dans laquelle serait enfermée la bourse pleine de pistoles que je me soucierais aussi peu de ton argent et de toi que de cela. (applaudissements des malades)

C’est ma fille.

(A Gorgibus) Dites-moi, un peu: Sent-elle de grandes douleurs ?

Gorgibus Villebrequin

12

Gorgibus Villebrequin
Dr Villebrequin Gorgibus Villebrequin Gorgibus Villebrequin Gorgibus Villebrequin

Leroy

Gorgibus Dr Leroy

Gorgibus Leroy Villebrequin Les Médecins

. Psychée

Leroy

Fort grandes.

C’est fort bien fait.

Va-t-elle où vous savez ?

Oui.

Copieusement ?

Je n’entends rien à cela.

La matière est-elle louable ?

Je ne me connais pas à ces choses là.

Y aurait-il moyen de voir de l’urine de l’égrotante ?

( Il tend un verre d’urine aux docteurs. Leroy intervient)

Voilà de l’urine qui marque grande chaleur... grande inflammation dans les intestins ; ( il en boit une partie) elle n’est pas tant mauvaise pourtant.

Hé quoi, monsieur, vous l’avalez ?

Ne vous étonnez pas de cela. Les médecins d’ordinaire, se contentent de la regarder ; mais moi... je l’avale parce qu’avec le goût, je discerne bien mieux la cause de la maladie. Mais, à vous dire la vérité, il y en avait trop peu pour asseoir un bon jugement. Qu’on la fasse encore pisser.

Elle ne veut pas pisser davantage. (il s’en va) Quoi ? Votre fille ne pisse que des gouttes. (pout lui) C’est une pauvre pisseuse.

Je vois bien qu’il faudra qu’on lui ordonne une potion... pissative !
Cris joyeux des malades. Leroy rejoint les infirmières

Ah de tous les côtés, mortelle est ma douleur, je souffre dans ma chair je souffre et j’ai si peur.

Non, ami malade,
Si tu veux être bien portant Avale donc mon Orvietan !

(Leroy chante)

13

Dr Villebrequin Pierrot Villebrequin Pierrot Villebrequin Pierrot Villebrequin Pierrot

Les Médecins Pierrot
Les Médecins Pierrot

Les Médecins Pierrot
Les Médecins Leroy

orvietan orvietan prenez en tout le temps

elle ouvre la bouche et avale le comprimé.

Pïglia lo su !
Signor monsu
Piglia lo piglialo piglialo su

( Puis reprise avec tous)

De quoi votre médecin, dit-il, que vous êtes malade ? Moi ? Malade ?
C’est du poumon que vous êtes malade.
Du poumon ?

Oui. Que sentez-vous ?
(montrant son cœur) Je sens des douleurs ici. Justement, le poumon.
Il me semble parfois que...
Le poumon.
D’autres fois...
Le poumon.
Je sens aussi des lassitudes...
Le poumon.
Et souvent, j’ai des envies de...
(Hurlant) LE POUMON

( chanté)

Le pou pou
Le poumon !
Le poumon !
C ‘est le poumon

Bis avec tous puis 3 ème bis et pose avec les infirmières

14

NOIR

15

Melle du Parc

La Grange Madeleine Béjart

Melle du Parc Pierrot

Madeleine Béjart

Melle du Parc Madeleine Béjart Melle du Parc

ACTE II

Scène 1

Local des acteurs.
Les comédiens sont en train de répéter. Entre Almanzor sans se faire remarquer.

« Mais comment consentir à ce que vous voulez ? » Sans offenser le Ciel dont toujours vous parlez ?

Si ce n’est que le Ciel qu’à mes vœux on oppose...

Tu es remarquable mais attention à ne pas donner trop de sensualité à Elmire ...

C’est malgré moi.
(l’imitant) Oui, j’en ai trop, je ne parviens pas à la contrôler.

(Marie rit)

Pierrot ! Reprenons juste avant que Orgon ne démasque Tartuffe.

A : « Mais comment consentir à ce que vous voulez ? » Oui.

« Mais comment consentir à ce que vous voulez ? » Sans offenser le Ciel dont toujours vous parlez ?

La Grange

Melle du Parc La Grange Melle du Parc

La Grange Melle du Parc La Grange

Melle du Parc La Grange Melle du Parc

La Grange Melle du Parc La Grange

Jodelet

Madeleine Béjart Pierrot

Si ce n’est que le Ciel qu’à mes vœux on oppose, Lever un tel obstacle est pour moi peu de chose, Contentez mon désir et n’ayez point d’effroi
Je vous réponds de tout, et prends le mal sur moi. (Elle tousse)

Vous toussez fort, madame.

Oui, je suis au supplice !

Vous plaît-il un morceau de ce jus de réglisse ?

C’est un rhume obstiné, sans doute ; et je vois bien Que tous les jus du monde ici ne feront rien.

Oui madame sans doute, et ma ferveur est telle Ouf, vous me serrez trop.

C’est par excès de zèle. De vous faire autre mal, je n’eus jamais dessein,
Et j’aurais bien plutôt

Que fait là votre main ?

Je tâte votre habit ; l’étoffe en est moelleuse

Ah de grâce, laissez, je suis fort chatouilleuse.

(Elle recule sa chaise, Tartuffe rapproche la sienne).

Tout conspire, madame, à mon contentement. J’ai visité de l’œil tout cet appartement ;

Ouvrez un peu la porte et voyez je vous prie, Si mon mari n’est pas dans cette galerie

Qu’est-il besoin pour lui du soin que vous prenez ? C’est un homme, entre nous, à mener par le nez.

(Melle du Parc court à la porte et revient. met un foulard sur les yeux de La Grange et disparaît sous la table.)
Personne ne s’y trouve, et mon âme ravie...

(apparaissant de sous la table) Tout doux ! vous suivez trop votre amoureuse envie...

Oui. Bien. ( à La Grange) Pour vous, je n’ai rien à vous dire ! (à part) Oui, il y aurait trop à dire !

16

Madeleine

Béjart

Béjart

Béjart

Béjart

Béjart

Béjart

Béjart

Béjart

Béjart

Béjart

Jodelet. C’est remarquable. Mais, vous ai-je pas dit que vous faites un rôle où l’on doit parler naturellement ?

Si.
Cela manque de... Qu’est ce que ce « tout doux » pour toi ? Tout doux ? C’est... tout doux ! Cela signifie : ‘suffit. Baste’ !

Ce « tout doux » est la clé de la scène. Orgon comprend qu’il s’est trompé sur Tartuffe, un homme qu’il révère... Ce « tout doux » est donc la traduction de son désespoir, un désespoir mêlé d’accablement, de fureur, de tristesse, d’humiliation, de remords ; c’est la plongée dans la terrible, dans l’infâmante désillusion.

Tout cela dans ces deux mots ?

Oui tout cela et plus dans ce « tout doux ». C’est la force des grands auteurs : savoir dire beaucoup en peu de mots. Toi, Jodelet, ta mission d’acteur est de trouver ton « tout doux ».

Triste, agressif, accablé, furieux, désespéré, humilié, plein de remords, mon tout doux ?

Les mots sont une coquille vide. On y met ce qu’on veut à l’intérieur. Nous allons voir la chose ensemble.

(bas à La Grange) Notre chef de troupe a trouvé sa proie. Elle ne la lâchera point.

Nous en voilà pour jusqu’à demain. Donne-moi un tout doux Sarcastique ! Tout doux !
Outragé.

Tout doux.

Triomphant...

Tout doux

Maintenant attention ! Tu vas réunir tous ces « tout doux » en un seul « tout doux. »

Tous les tout doux... ensemble ? Oui. Allez !

Jodelet Madeleine Jodelet Madeleine

Jodelet Madeleine

Jodelet Madeleine Pierrot

La Grange Madeleine Jodelet Madeleine Jodelet Madeleine Jodelet Madeleine

Jodelet Madeleine

17

Jodelet

Sans réfléchir.
Tout doux ! Non ! Tout doux ! Non ! Tout doux ! (ad lib)

Leroy entre (fond de scène) suivi des deux infirmières

Leroy

Marie Claveau Pierrot. Lucrèce Sabine

Leroy

La Grange

Leroy
La Grange Madeleine Béjart La Grange Lucrèce

(en déluge) Que se passe-t-il ici ? Quelle diable de cérémonie est- ce là? Qu’est ceci? Quel désordre? Quelle querelle! Quel grabuge ! Quel vacarme ! Quel bruit ! Quel différend ! Quelle combustion! Qu’y–a-t-il? Qui sont-ils? Qui êtes-vous? Des malades clandestins ?

(Il saisit Marie Claveau sous la table)
(bas) Mon Dieu ! Je le savais ! Je le savais !
Tais-toi.
(bas) Je suis assassiné par sa maudite entrée.
(bas) Je ne le suis pas moins. (à Leroy) Ce sont des amis.

(Passe entre les 2 infirmières les contourne et les saisit par le cou) Que me contez-vous là ? Des amis ici ? Dans quel but ? Regardez moi entre deux yeux. Qu’est ce donc qu’il se passe ici ?

Monsieur, vient-on ainsi se jeter au travers d’une comédie et troubler un acteur qui parle ?

Hé, tête bleue !
Cet idiot vient avec un air tranquille vous faire des questions... (vient vers La Grange) La Grange !
Et ne se soucie pas qu’on ait en tête d’autres affaires.

(à La Grange) Savez-vous bien à qui vous parlez ?...

(Jodelet se concentre).

(Entre le docteur Leroy).

Scène 2

18

La Grange

Almanzor Lucrèce

La Grange Dr Leroy Sabine Lucrèce Sabine Lucrèce Flore

Dr Leroy

Flore Almanzor Lucrèce Almanzor Dr Leroy Flore

Dr Leroy

Flore
Madeleine Béjart Dr Leroy

Non, morbleu ! Je ne le sais pas. Je ne le sais pas et ne m’en soucie guère !...

Hé fi, cela est vilain de jurer de la sorte !

(bas, désignant Leroy) Monsieur est le grand médecin dont je vous parlais.

(Temps de stupeur).

Je suis confus de mes propos. Je ne sais comment l’affaire se fit. Quel est votre dessein et que voulez vous faire avec ces gens ? Je m’en vais vous expliquer.
L’histoire est fort étonnante, et difficile à croire.

Je voulais... Nous voulions...

Vous faire une surprise. (montrant Lucrèce et Sabine) Selon les souhaits de mesdames. Nous préparons pour vous...

Vous voilà belle comme un petit ange. Que vos dents sont nombreuses et vos lèvres appétissantes ! Ah que le ciel m’oblige en offrant à ma vue, les célestes attraits dont vous êtes pourvue.

Nous préparons un spectacle.
Est-ce une comédie ?
Va-t’en toi !
C’est dommage, ça devenait intéressant. Jouez-vous ?

Oui, monsieur.

Ah quel talent dans ce visage et dans ces yeux et dans...! Quel génie ! Pour moi, je suis ravi et je n’ai jamais vu une si charmante personne.

Nous préparons disais-je, un spectacle. Pour vous.
Pour moi ?

19

Madeleine Béjart Lucrèce et Sabine Leroy
Sabine

Lucrèce Sabine Dr Leroy Lucrèce Dr Leroy Lucrèce Dr Leroy Flore

Dr Leroy

Madeleine Béjart

Flore

groupe au

Dr Leroy Madeleine Béjart Dr Leroy Almanzor Pierrot Almanzor Madeleine Béjart

Dr Leroy

(désignant Lucrèce et Sabine ) Ces dames ont fait appel à moi. Oui.
Non?Vous?
Moi !

Et moi.
Nous deux.
Jamais l’une sans l’autre n’est ce pas ? Jamais. Vous le savez.
Un spectacle pour moi ? Et la raison ? Notre admiration pour vous.
Je ne puis le croire.

(Elle rit) Il faudra bien pourtant.
(désignant Flore) Cette jeune personne est fort gaie.
Une tragédie a pourtant marqué sa vie.
Je vous en prie. Ce n’est guère le moment de...(Elle rejoint le Fond, tournant le dos à Madeleine )
( regarde Flore avec envie) Une tragédie ? Et quelle ?
Elle a été enlevée à l’âge de quatre ans et emmenée en Alger.
Ciel !
(pour lui) Alger ? C’est loin.
Quoi ?
Je dis : Alger, c’est loin !

Elle a échappé à ses ravisseurs et est revenue dans notre pays. Là, elle a eu le malheur d’apprendre que sa mère n’était plus de ce monde.

Quelle terrible nouvelle. (va à Flore et la colle) Et monsieur votre

20

Flore
Dr Leroy

Flore

Dr Leroy Flore

Pierrot
Dr Leroy Pierrot
Dr Leroy Pierrot
La Grange Dr Leroy

Melle du Parc

père ?
Je suis sans nouvelle de lui et ne sais s’il est vivant ou mort.

Y a-t-il un homme qui n'ait, en vous voyant, des démangeaisons de le remplacer ?

Cela est fort généreux, mais pour l’heure, une autre affaire m’occupe.

Laquelle, joli mufle ?

(Elle s’échappe) Votre entrée intempestive nous gêne car, comme il a été dit, nous voulions vous faire une surprise.

(passe de cour à J) Oui, une comédie.
Quoi ?
Pourquoi ne pas lui donner une idée de la chose. Voulez-vous ? Je m’assois pour bien l’apprécier.
Holà-ho ! Un siège promptement !
Un passage de Tartuffe.
Tartuffe ? Qui est ce monsieur ?

(Madeleine Béjart lui parle à l’oreille. Les acteurs se mettent en place. Leroy rit en voyant Orgon se mettre sous la table)
.
Voilà qui menace d’être plaisant.

« Mais comment consentir à ce que vous voulez ? » Sans offenser le Ciel dont toujours vous parlez ?

(Du Parc se met en place, Leroy lui fait signe à Madeleine de la remplacér par Flore. Flore se met en place, elle tousse)

La Grange

Flore-Marianne
La Grange-Tartuffe

Si ce n’est que le Ciel qu’à mes vœux on oppose, Lever un tel obstacle est pour moi peu de chose, Contentez mon désir et n’ayez point d’effroi
Je vous réponds de tout, et prends le mal sur moi. (Elle tousse)

Vous toussez fort, madame.
Oui, je suis au supplice !
Vous plaît-il un morceau de ce jus de réglisse ?

21

Mariane-Flore

La Grange-Tartuffe Flore-Marianne
La Grange-Tartuffe

Flore-Marianne
La Grange -Tartuffe Flore-Marianne

La Grange -Tartuffe Flore-Marianne
La Grange -Tartuffe

C’est un rhume obstiné, sans doute ; et je vois bien Que tous les jus du monde ici ne feront rien.

Oui madame sans doute, et ma ferveur est telle Ouf, vous me serrez trop.

C’est par excès de zèle. De vous faire autre mal, je n’eus jamais dessein,
Et j’aurais bien plutôt

Que fait là votre main ?
Je tâte votre habit ; l’étoffe en est moelleuse

Ah de grâce (petit cri), laissez (Elle recule sa chaise), je suis fort chatouilleuse.
(Tartuffe rapproche la sienne).

Tout conspire, madame, à mon contentement. J’ai visité de l’œil tout cet appartement ;

Ouvrez un peu la porte et voyez je vous prie, Si mon mari n’est pas dans cette galerie

Qu’est-il besoin pour lui du soin que vous prenez ? C’est un homme, entre nous, à mener par le nez.

(La Grange court à la porte et revient).

Personne ne s’y trouve, et mon âme ravie...

(Flore-Marianne lui met un foulard sur les yeux et disparaît sous la table. Jodelet apparaît instantanément à sa place. La Grange enlève son foulard et regarde. Flore-Marianne est de nouveau devant lui. La Grange-Tartuffe remet son foulard et continue ce qu’il croit être un jeu érotique. Il veut l’embrasser, elle disparaît. Jodelet-Orgon surgit en ses lieu et place. La Grange-Tartuffe caresse Jodelet-Orgon l’enlace, le caresse, le sent longuement, à coups de nez redoublés... et ouvre les yeux).

Tout doux ! vous suivez trop votre amoureuse envie... (Leroy se lève. Applaudissements. Almanzor descend à cour).

C’est une étrange entreprise que celle de faire rire les honnêtes gens.
Ce personnage, ce... (vers Lagrange)

Tartuffe.

Jodelet-Orgon Dr Leroy

Masdeleine Béjart

22

Dr Leroy

Marie Claveau Almanzor Lucrèce
Marie Claveau

Qui ne parvient pas à triompher de la résistance d’une belle personne, m’indispose.

Ce qui sied bien à un sexe ne sied pas bien à l’autre. C’est vrai qu’il s’y prend mal.
Qu’est ce que vous faites là, vous ?

Il est beau qu’une femme soit insensible, et conserve son cœur exempt des flammes de l’amour : ce qui est vertu en elle devient un crime dans un homme.
Et comme la beauté est le partage de notre sexe, vous ne sauriez ne nous point aimer sans commettre une offense dont nous devons toutes ressentir.

Scène 3

Baste. Ce n’est pas dans ma coutume de rien blâmer, mais puisque vous me jouez la comédie, sans doute souhaitez-vous qu’elle me plaise, or, tel n’est pas le cas. (Tous les comédiens bougent)

Et, quelle comédie vous plairait-il que nous jouions devant vous ? Vous n’avez qu’à dire.

Attendez ! Voyons ! Quelle est cette comédie qui commence ainsi: «Qu’est ce donc, qu’avez-vous? Laissez-moi je vous prie... Mais encore dites-moi quelle bizarrerie »... Je l’ai vue jouée jadis par des soldats.

Des soldats ?
Et pourquoi pas des soldats ?
Nous avons le Misanthrope à notre répertoire.
Fort bien. (à Flore) Vous faites la jeune femme . Célimène ? J’ai beaucoup travaillé le personnage.
C’est moi la titulaire du rôle.
(à Leroy) Madame a trente ans de coquetterie derrière elle. Je souhaite que mademoiselle en soit l’héroïne.
Ainsi ferai-je, si Madeleine en est d’accord.

23

Dr Leroy

Madeleine Béjart Dr Leroy

La Grange Madeleine Béjart

Pierrot Dr Leroy Flore

Melle du Parc Pierrot
Dr Leroy Flore

Madeleine Béjart Dr Leroy
La Grange
Dr Leroy

Marie Claveau Madeleine Béjart

Lucrèce Sabine

Madeleine Béjart Flore
Marie Claveau Flore

Marie claveau Flore

Marie Claveau Flore

Ma foi...
Il n’y a pas de chansons dans cet ouvrage ?
Non.
C’est fort dommage. Mais quoi, nous en mettrons.

(Il fait quelques vocalises) Applaudissements.

Hélas, je dois m’occuper d’un homme qui est en train de frapper à la porte de la mort. Je pressens qu’il y faudra deux heures. Je reviens !
(bas à Flore) Sais tu bien que ton habit négligé, ton air languissant, ont fait lever en moi un étrange feu ?

(il sort)

Nous voilà dans de beaux draps. Ne l’avais-je point deviné ? L’on ne m’écoute jamais.

(face public)« Le Misanthrope » ! Nous allons lui donner ce spectacle.

(réactions négatives des comédiens. Elle va vers les infrmières))

et je suis sûr qu’en récompense, il nous laissera travailler ici.

Je m’y engage.

Nous nous y engageons.

(Elles sortent)

Scène 4

24

Tudieu Flore ! Vous lui avez tapé dans l’œil. Croyez-vous ?
Cela est fort gênant.
Pourquoi ?

Comment pourquoi ?

On est toujours bien aise d’être aimée. La grande ambition des femmes est, quoiqu’on en puisse dire, d’inspirer de l’amour.

Mais la sagesse...
La sagesse de la jeunesse, c'est de savoir jouir de ses appas.

Madeleine Béjart nous.

La Grange Madeleine Béjart

Pierrot
La Grange

Melle du Parc Jodelet
Marie Claveau Pierrot

Marie Claveau

Pierrot
Jodelet Madeleine Béjart

Melle du Parc Madeleine Béjart

Pierrot Leroy

Madeleine Béjart Pierrot

Merci Flore. Votre habile intervention nous a tirés d’affaire. A

Quelle est votre pensée ?

De grâce mettons-nous ici ; et puisque nous voilà habillés, et que Leroy doit venir dans deux heures, employons ce temps à répéter notre affaire.

Le moyen de jouer ce qu’on ne sait plus ?

Pour moi, je vous déclare que je ne me souviens pas d’un mot de mon personnage d’Alceste.

Je sens bien qu’il me faudra souffler le mien. Non ? Oh moi !
Et moi je me prépare fort à tenir mon rôle à la main Pour moi je n’ai pas grand-chose à dire.

Ni moi non plus. Mais avec cela je ne répondrais pas de ne pas manquer.

Et moi aussi. Et toi, Jodelet ? Oh moi !

Mais enfin vous me ferez devenir folle. Ne parlons point davantage.

Moi, je connais le rôle par cœur.
C’est bien. (montrant Flore) Tu lui souffleras. Leroy revient, suivi des 2 infirmières.

Scène 5

Quoi ? Déjà ?

Mon patient n’a pas eu la délicatesse d’attendre l’arrivée de son médecin pour trépasser.

C’est un mal avisé !
C’est un tour pendable qu’il vous a joué !

25

Flore
Dr Leroy

Flore
Dr Leroy Flore

Dr Leroy

Flore
Dr Leroy Flore

Dr Leroy

Dr Leroy

Lucrèce Dr Leroy Sabine

Je voudrais poser une question.

(charmeur) Et de quelle langue voulez-vous vous servir avec moi ?

De quelle langue ? Oui.

Parbleu de la langue que j’ai dans la bouche. Je crois que je n’irai pas emprunter celle de mon voisin.
(Rires)

Je vous en empêcherais bien ! Alors ? (la regardant intensément et vite pendant qu’elle dit « non » tout aussi rapidement) Espagnol ? Allemand ? Anglais ? Latin ? Grec ? Hébreu ? Syriaque ? Turc ? Arabe ?

(sensuelle) Français.

(idem) Porque no ? Alors cette question, quelle est-elle ?

Ce lieu nous enchante et votre accueil aussi. Serait-ce un effet de votre bonté de nous permettre après le spectacle du Misanthrope donné en votre honneur, d’y venir régulièrement afin d’y répéter nos rôles ?

J’aurai une joie sans égale à vous voir dans nos murs. Alegria !
(à Flore, bas) Vous pourriez dormir ici. Je dispose de chambres bien équipées où nous n’envoyons pas nos malades. Joie.

Alegria !

(il chante un chant flamenco)

Ay que locura ...

(à Flore) Peut-il y avoir un homme qui n’ait, en vous voyant, des démangeaisons de se marier.
(bas à Lucrèce) Je dis cela pour rire. Je vous adore.

Ah?
(bas à Sabine) Je dis cela pour rire. Je suis tout à vous.

Ah?

(il sort)

Vaya vaya de fiesta Vaya de baile Alegria alegria

26

Dr Villebrequin

Almonzor
Dr Villebrequin

Lucrèce Almonzor Sabine

Lucrèce Almonzor Villebrequin Almonzor

NOIR

ACTE III Scène 1

Villebrequin et Almonzor fument dehors. Les infirmières les rejoignent

Quoi que puisse dire Aristote et toute la philosophie, il n’est rien d’égal au tabac :

c’est la passion des honnêtes gens,

et qui vit sans tabac n’est pas digne de vivre... Non seulement il réjouit et purge les cerveaux humains,

mais encore il instruit les âmes à la vertu...
et l’on apprend avec lui à devenir honnête homme.

Ne voyez-vous pas bien, dès qu’on en prend, de quelle manière obligeante on en use avec tout le monde,

et comme on est ravi d’en donner à droit et à gauche,

partout où l’on se trouve ?

On n’attend pas même qu’on en demande,

et l’on court au-devant du souhait des gens.

(Almonzor est pris d’une quinte de toux, Villebrequin l’accompagne à l’intérieur. Les infirmières suivent.

Scène 2

Et viva viva la fantasia (bis)

27

Psychée

Hall des Urgences.
Derrière une grande vitre dépolie, on aperçoit des médecins et des malades aller et venir..
Psychée , sa rose à la main, est assise dans un coin..

Le corps, cette guenille, est-il d’un prix à mériter seulement qu’on y pense? ... Oui, mon corps est moi-même, et j’en veux prendre soin. Guenille, si l’on veut; ma guenille m’est chère. (Elle sort)

Entrent les infirmières, poursuivant une discussion.

Lucrèce Sabine Lucrèce Sabine Lucrèce Sabine Lucrèce Sabine

Sylvestre Lucrèce Sylvestre Lucrèce

Lucrèce Sylvestre

Leroy n’a d’yeux que pour cette... Flore.
La pauvre chérie a perdu son père.
C’est triste. Mais qu’y faire ?
Je ne crains pas cette Flore. J’ai quelque chose qu’elle n’a pas. Moi, j’ai le secret de m’ouvrir la tendresse des hommes.

Moi de chatouiller leurs cœurs.

Moi de trouver les endroits par où ils sont sensibles...

Moi, je sais l’art de traire les hommes...

(elle avise Sylvestre)

Comment va votre père ?

Il dort. Hélas, ce n’est pas vers lui que va mon inquiétude.

Vers qui donc ?

A quoi sert-il de parler ?

Eh bien, nous sommes femmes consolatives, femmes à nous intéresser aux affaires des jeunes gens...

Scène 3

Allons, découvrez-nous votre cœur.

Je le veux bien. Il y a peu, j’ai rencontré une jeune fille, la plus douce et la plus touchante qu’on puisse jamais voir . Dès ce moment, je ne saurais plus vivre sans elle. Oui mais mes

28

Lucrèce Sylvestre

Lucrèce Sylvestre

Sabine Lucrèce Sabine

Lucrèce Sabine Lucrèce Almonzor :

Sylvestre

fréquentes visites sont rejetées de la mère. Voilà mon amour au désespoir. Je presse, supplie, conjure : point d’affaire. On me dit que la fille, quoique sans bien et sans appui, est de famille honnête et qu’à moins que de l’épouser, on ne peut souffrir mes poursuites.

Voilà votre amour augmenté par les difficultés.

Oui. Je consulte dans ma tête, agite, balance, raisonne, prend ma Résolution ; me voilà marié avec elle depuis trois jours.

J’entends. (bas à Lucrèce) La plus grande de toutes les folies est celle de se marier.

Mettez avec cela la découverte que mon père a faite
du secret de mon mariage, et par dessus tout cela l’indigence où

se trouve cette aimable personne et l’impuissance où je me trouve d’avoir de quoi la secourir.

Pauvre jeune homme. Votre histoire nous a émues... Notre poitrine oppressée le montre assez...
( elles chantent puis Sylvestre avec elles)

Aimez la aimez la aimez la Unissez vos cœurs vos désirs Vos soupirs

Il est mal en point.
Qu’y faire ? Il en va toujours ainsi avec les histoires d’amour. D’amour et d’argent... (Elles sont bipées )

Excusez moi j ‘ai envie d ‘aller....(il s’arrête) J’ avais envie d’aller

.

(elles emmènent Almonzor)

Scène 4

29

(à part, dans un coin du hall) Je suis perdu, je suis désespéré ; je suis le plus infortuné de tous les hommes. Oui, j’aime. Mais je dépends d’un père, et le nom de fils me soumet à ses volontés. Allez, allez, il ne faut pas me laisser mener comme un oison ; on se peut libérer un peu de la tyrannie d’un père. Quelle résolution

Angélique Sylvestre

Angélique

Sylvestre Angélique

Sylvestre

Angélique

Sylvestre

Angélique

Sylvestre Angélique Sylvestre Angélique

prendre ? A quel remède recourir ? Mourir ?... (Passe Psyché avec sa rose)
Pourquoi pas ? Mais seulement si j’échoue à lui prendre son argent ! Mais qui vois-je ? Angélique, mon épouse !

(Entre Angélique, elle bouscule Psycché)

Ah, Sylvestre, est-il vrai que votre père veut rompre notre mariage ?

Oui belle Angélique ; et ces nouvelles m’ont donné une atteinte nouvelle. Mais que vois-je ? Vous pleurez ? Pourquoi ces larmes ? Me soupçonnez-vous, dites moi, de quelque infidélité ? et n’êtes-vous pas assuré de l’amour que j’ai pour vous ?

Oui, Sylvestre, je suis sûre que vous m’aimez, mais je ne le suis pas que vous m’aimiez toujours.

Hé peut-on vous aimer qu’on ne vous aime toute sa vie ?

J’ai ouï dire Sylvestre que votre sexe aime moins longtemps que le nôtre et que les ardeurs que les hommes font voir sont des feux qui s’éteignent aussi rapidement qu’ils naissent.

Ah ma chère Angélique, mon cœur n’est donc pas fait comme celui des autres hommes, et je sens bien pour moi que je vous aimerai jusqu’au tombeau. (Il veut l’embrasser)

Je ne doute pas que vos paroles ne soient sincères. Mais vous dépendez d’un père qui veut casser notre mariage et je suis sûre que je mourrai si ce malheur m’arrive.

Non, belle Angélique, il n’y a point de père qui puisse me contraindre à vous manquer de foi, et je me résoudrai à quitter mon pays, et le jour même s’il est besoin, plutôt qu’à vous quitter. Ne pleurez donc point je vous prie, mon aimable Angélique, car vos larmes me tuent, et je ne puis les voir sans me sentir percer le cœur.

Puisque vous le voulez, je veux bien essuyer mes pleurs, et j’attendrai d’un œil constant ce qu’il plaira au ciel de résoudre de moi.

Le ciel nous sera favorable.
Il ne saurait m’être contraire si vous m’êtes fidèle.
Je le serai assurément.
Je serai donc heureuse. Au fait, comment va votre père ?

30

Sylvestre

Il va petitement comme un ladre qu’il est.

(Ils chantent ou fredonnent)

Aimons jusqu’au trépas La raison nous y convie Hélas ! si l’on n’aimait pas Que serait-ce de la vie

Ne songeons qu’à nous réjouir La grande affaire c’est le plaisir Soyons toujours amoureux C’est le moyen d’être heureux

Aimons jusqu’au trépas La raison nous y convie Hélas ! si l’on n’aimait pas Que serait-ce de la vie

NOIR

Scène 5

Local des acteurs. Ils répètent le Misanthrope.

(Jouant Célimène) Madame, on peut je crois, louer et ...et...

(soufflant) et blâmer tout,

Et blâmer tout
Et chacun a raison, suivant l’âge et le goût...

Il est une saison

Je sais. Il est une saison pour la galanterie Il en est une bien sûr propre

Aussi

Aussi propre à la pruderie.

Almanzor entre dans le local des acteurs sans se faire remarquer.

(elle sort)

31

Flore
Melle du Parc Flore

Melle du Parc Flore

Melle du Parc Flore

Scène 6

32

Flore

Melle du Parc Flore
Melle du Parc

Flore
Melle du Parc La Grange Madeleine Béjart Flore

Melle du Parc

Almanzor Melle du Parc Flore

Melle du Parc Flore Almanzor

On peut par politique, en prendre le parti, Quand de nos jeunes ans, l’éclat est amorti ;

Est tamorti

Est amorti

(insistant sur la liaison que n’a pas faite Flore) Tamorti ! L’éclat est tamorti ! Tamorti !... Il y a plaisir à travailler pour des personnes qui soient capables de sentir les délicatesses d’un art. Ce n’est pas le cas ici.(à Madeleine) Je souffle, je donne le ton, on me regarde sans comprendre.

Dites tout de suite que je suis idiote.
Je vous laisse conclure.
Tu ne dis rien ?
J’attends la fin des hostilités... Mesdames allons !

(face à Du Parc) Il me faut vous dire, chère, qu’à notre époque, nous jouons plus simplement. Ce qui était bon pour les actrices de votre temps, ne l’est plus pour celles du mien.

« Brisons madame un pareil entretien il pousserait trop loin votre esprit et le mien. » (elle se dirige vers la porte) Adieu mes amis. Madeleine, j’ai été fort heureuse d’être sous votre discipline. Vous me voyez, c’est pour toute ma vie.

(pour lui) Si je m’attendais à ça !...
(toujours à la porte) Ne m’appelez-vous pas ?

Non !
(sur place) Hé bien, je poursuis donc mes pas. Adieu ! Adieu !

Quelle infamie de chasser ainsi cette femme ! (Elle va pour sortir)

Scène 7

Pierrot
Melle du Parc Almanzor
La Grange Melle du Parc

Almanzir Melle du Parc

Almanzor

Flore veux pas.

La Grange Almanzor Flore Almanzor Pierrot

Marie Claveau Melle du Parc

La Grange Melle du Parc Flore

Madeleine Béjart Pierrot
Melle du Parc

Encore lui ?

Et si je veux qu’ils me chassent, moi !

Ah!

De quoi vous mêlez-vous ?

Voyez un peu cet impertinent qui veut empêcher des acteurs de chasser une actrice.

Je ne dis plus mot.
Il me plaît d’être chassée.

D’accord. Faites, chassez, comme il faut votre amie. Je vous aiderai si vous le voulez.

Je la veux chasser si je veux, et ne la veux pas chasser, si je ne le

Vous n’avez rien à lui commander. D’accord.
Je n’ai que faire de votre aide. Très bien.

Et vous êtes un impertinent de vous ingérer des affaires d’autrui.

(Ils le frappent. Almanzor fuit puis revient et asperge les acteurs avec sa perf).

Je le savais, je le savais !

S’aller jeter au travers d’une comédie et troubler (montrant Flore) une actrice comme vous.

Faire un affront comme cela à une comédienne de votre talent. Ma chérie !
Ma chérie ! (Elles s’embrassent)

(bas à Pierrot) Que leurs brusques changements d’humeur m’insupportent !
Ces changements d’humeur expliquent leur talent d’actrice.

(souriante) On continue ?

33

Flore

Leroy Madeleine Leroy Madeleine Leroy

Jodelet
La Grange Jodelet
La Grange Jodelet
La Grange Jodelet

Alceste Leroy
La Grange Leroy

Pierrot Leroy

La Grange

Avec joie.

(Entre Leroy).

Scène 8

34

Béjart

Béjart

Cela avance-t-il comme vous le souhaitez ? Ma foi ! Vous nous attrapez en plein travail. Voyons !
Quoi ? Tout de suite ?

Sans tarder. Le début.

(Ils jouent la première scène du Misanthrope). .
« Qu’est ce donc qu’avez vous ? »

« Laissez-moi je vous prie »

« Mais encore dites-moi quelle bizarrerie »

« Laissez-moi là vous dis-je et courrez vous cacher. »

« Mais on entend les gens au moins sans se fâcher. »

« Moi, je veux me fâcher et ne veux point entendre. «

« Dans vos brusques chagrins je ne puis vous comprendre... Et quoique amis enfin, je suis tout des premiers...

Moi ? Votre ami ? Rayez cela de vos papiers. ( interrompant ) C’est fort bien joué.
Merci. C’est un rôle que je maîtrise...
Mais on s’ennuie.

(à part) Et ce n’est que le début.
Il nous faut quelque action d’éclat pour le public s’engouffre dans la folie de la pièce. Reprenez le début.

Quoi ? Vous voulez que ?...

Madeleine La Grange Leroy
La Grange Leroy

La Grange Leroy
La Grange Leroy

La Grange Leroy
La Grange

Leroy
La Grange Leroy Madeleine Leroy

Pierrot
La Grange Madeleine La Grange

Leroy

Béjart

Faites ce que vous dit monsieur.
Quelle est votre idée ?
Que, tout en jouant, vous cassiez quelque objet. Que je casse ?

Lorsque j’ai vu la pièce... elle était jouée par des soldats... celui qui jouait votre rôle, détruisait chaises... tables... avec une telle rage qu’on n’entendait plus le texte. C’était d’un drôle !

J’imagine.
Il s’arrêtait parfois...
(aux acteurs) Oui, pour reprendre son souffle. Et on avait hâte que cela reprenne.

(idem) Le moyen qu’il en soit autrement.
A la fin, de la pièce, le décor était un champ de ruines.

Oui, oui. Mais monsieur, un acteur tel que moi a besoin d’une raison majeure pour entreprendre les choses.

Ah ?...
Eh oui !
Soit. Eh bien, votre personnage... a un volcan intérieur ... Indiscutablement.

Et lorsque la pièce commence, il sent une colère folle l’envahir... Alors, pour libérer son énergie, que fait-il ? Il casse autour de lui. Cela vous sied ?

( à part) C’est une imagination burlesque. Madeleine ? Casserai-je ?

Faites au mieux de nos intérêts.

Je vois mal comment introduire cette violence dans mon jeu d’acteur...

Vous préférez sans doute rester les bras ballants à attendre que votre camarade ait dit sa réplique, et ensuite, comme font les

Béjart

Béjart

35

Jodelet
La Grange Leroy
La Grange Leroy
La Grange Jodelet

Madeleine Béjart Marie Claveau Jodelet
Leroy

La Grange

Leroy Jodelet

La Grange Leroy

La Grange Jodelet
La Grange

acteurs, vous lever, vous asseoir, aller de droite et de gauche comme un égaré ?
(Les acteurs se remettent en place).

« Qu’est ce donc qu’avez vous ? » « Laissez-moi je vous prie. » Cassez !
Quoi ? Déjà ?...

Cassez !

Jodelet, voulez-vous bien me relancer ? (Il lève la chaise)

Volontiers. « Qu’est ce donc, qu’avez vous ? »

(La Grange lève une chaise en l’air et la fracasse sur le sol. Réaction apeurée des acteurs).

Mon Dieu !
(rentre sur scène) Je le savais, je le savais ! (elle sort) « Mais encore dites-moi quelle bizarrerie »
Cassez !

« Laissez-moi là vous dis-je et courrez vous casser vous cacher. » « Laissez-moi là vous dis-je et courrez vous cacher. »
(La Grange casse une chaise.)

(à Jodelet) Excellent, monsieur, votre réflexe de peur.
Oh, moi, c’était involontaire. « Mais on entend les gens au moins

sans se fâcher. »

« Moi, je veux me fâcher et ne veux point entendre. »

La table !

(La Grange s’essaye à casser une petite table. Il n’y parvient pas et s’acharne).

Tudieu madame la table, vous me résistez ?
(bas) Essayez avec le pied.
« Moi, je veux me fâcher et ne veux point entendre.

36

Leroy
La Grange

Leroy

La Grange Leroy

La Grange Leroy

La Grange

Leroy

Flore Pierrot Madeleine

Dr Leroy jolie.

Flore

Béjart

Alors votre sentiment ?

Je vais être franc avec vous, j’étais réticent à l’idée de... mais je dois avouer que cet attentat contre les objets procure un étrange plaisir...
( il joue) « Moi, je veux me fâcher et ne veux point entendre. »

(il casse un meuble, puis s’en prend à des sièges provoquant l’effroi de ses camarades tandis que Leroy, lui, hurle de joie).
ll me prendrait envie, en ce juste courroux, de me battre moi- même et me donner cent coups.

(empêchant La Grange de se battre lui même) Ce serait dépasser les limites de la bienséance.

Alceste est un atrabilaire et...

Et quelle est la couleur de la bile ? Verte. Je le sais. Je vois des vésicules biliaires tous les jours. Acide, grasse molle et ...? Verte.

Et alors ?

Alors nous devons compléter le portrait. (il avise une trousse à maquillage) Permettez ! (il barbouille de vert le visage d’La Grange)
N’est-ce pas du plus bel effet ?

Cela vous change son homme. (hurlant soudain et cassant) Mesdames les chaises, messieurs les tabourets, mesdemoiselles les banquettes...

Cassez, détruisez ! Fracassez ! (à Madeleine Béjart) En temps normal, je ne me serais pas permis de toucher à votre travail, je connais la susceptibilité des artistes... mais puisqu’il s’agit d’un hommage à moi rendu, j’ai voulu en toute modestie, orienter cette farce selon mon goût.

Une farce, le Misanthrope ?
(à part) Il connaît bien Molière.

(soudain énervée) Flore ! Pourquoi posez-vous cette question ? Le Misanthrope n’en serait pas une à vos yeux ?

Madame a raison. L’air que vous prenez prête à confusion, ma

Pardonnez-moi. Le Misanthrope est une farce, farce tout à fait farce. On ne peut plus farce. (elle chante, les autres aussi) Hu la ba ba la chou ba la ba ba la! Come Chamara ?

(Il casse la table avec le pied).

37

Tous

Flore Tous

Pierrot Flore

Melle du Parc Flore
Jodelet Pierrot

Marie Claveau Leroy
Pierrot
Leroy

Marie Claveau Leroy

Pierrot

Leroy Pierrot Leroy

Leroya Leroya Leroy c’est notre roi!

Leroy c’est notre roi ! Oui ma foi !

Mais le roi de quoi ?
J’ai mon idée mais je la dis pas.

Le roi de la Fistoula ! De la Vésicoula !
De la Clistera
De la pomm’ de terra

Le roi de l’Arroganza !

( qui a compris) Pardon ? (rectifiant) De l’Eléganza !

( rassuré) Ah !
Le roi de la Nullità !

(même jeu ) Hein ? De la Polentà !

Plaît- il ?
Artistica ! De la Polenta artistica !

( rassuré) Ah !

(chanté sur air « dara dara bastonnara)

Viva viva Nostro Leroy

Viva viva Nostro Leroy

38

Ce grand artista
Quia massacré il Misanthropa

Viva viva Nostro Leroy

Ce grand artista
Quia massacré il Misanthropa

Les acteurs frappent en cadence des barreaux de trépied. Leroy est aux anges.

Pierrot ( à part) Mon Dieu ! Protégez-nous des fous !

ENTRACTE

39

.

Almanzor

Sylvestre

ACTE IV Scène 1

Hall des Urgences. Derrière une paroi aux vitres teintées, on voit circuler malades et docteurs. Sylvestre, prostré dans un coin.

Scène 2

(à part) Je ne fais rien de la journée... j’attends le bon vouloir de ces messieurs. Qui connaît ma maladie ?

Scène 3

Mon père dormait. Je l’ai fouillé. Je n’ai point trouvé son argent. Où est-il ? Qu'est-il devenu ? L’aurait-on volé ?... (bas) Au voleur ! Au voleur !
Au voleur ! Ô ciel ! Je suis perdu, je suis assassiné, on me coupe la gorge. Que ferai-je pour le trouver ? Où courir ? Où ne pas courir ? Mon esprit est troublé, et j'ignore où je suis, qui je suis, et ce que je fais. Hélas, argent, pauvre argent, cher ami, mon père me prive de toi ; et puisque tu m'es enlevé, je perds mon support, ma consolation, ma joie, tout est fini pour moi, et je n'ai plus que faire au monde. Sans toi, il m'est impossible de vivre. C'en est fait, je n'en puis plus, je meurs, je suis mort, je suis enterré !... Quand on a à mourir, cela se fait le plus vite du monde.

40

On le voit monter sur un siège.
Peu après, entre Madeleine Béjart, un livre et des feuilles à la main. Lucrèce et Sabine entrent

Lucrèce Madeleine Béjart Lucrèce
Sabine

Scène 4

Vous ne répétez pas ?
Leroy a changé notre vision du Misanthrope. Nous y travaillons. Quel homme, n’est-ce pas ?
Un homme sans pareil !

Madeleine Béjart

Almanzor Lucrèce

Almanzor Sabine

Lucrèce

Sylvestre Sabine

Lucrèce

Madeleine Béjart Lucrèce

Madeleine Béjart Lucrèce

Sabine Sylvestre Lucrèce Sylvestre

(pour elle) Sans pareil, Dieu merci.

(Madeleine Béjart se sert un café puis écrit.).
Almanzor aperçoit derrière la vitre, Sylvestre, debout sur une chaise).

(aux infirmières) Sans vouloir vous déranger, il me semble qu’il y a là dedans quelqu’un qui a besoin de vos soins.

Laisse-nous.

Excusez-moi. Je croyais que la mort était de votre ressort.

La mort, dis-tu ?

(Elles aperçoivent Sylvestre en train de se pendre et se précipitent.)

Vite ! C’est notre jeune homme !

(Les trois femmes détachent Sylvestre et se relaient pour lui faire un bouche à bouche. Quand arrive le tour de Madeleine Béjart, Sylvestre se redresse)

Cela ira. Merci.
Vous nous avez fait une jolie frayeur, ma foi ! Laissez-nous vous

soigner. (elle ouvre la chemise de Sylvestre)
(refermant la chemise) Couvrez ce sein que je ne saurais voir.

(Elles lui tapotent les joues, le massent, etc)

Homme de bonne physionomie. Qui est-ce ? Il se nomme Sylvestre.

Je vous prie de me dire son histoire.

Il se trouve dans l’état où l’on voit très souvent la plupart des fils de famille, c’est à dire qu’il est un peu dénué d’argent.

Est-ce une raison pour vouloir mourir ?
Mon père menace de me déshériter si je ne romps mon mariage. Comment est la mariée...
Sans dot.

41

Sabine
Sylvestre Madeleine Béjart

Lucrèce Madeleine Béjart Sylvestre

Madeleine Béjart

Sylvestre Madeleine Béjart

Sabine Madeleine Béjart Sylvestre Madeleine Béjart Sylvestre Madeleine Béjart

Sylvestre Madeleine Béjart

Sans dot ? Sans dot.

(aux deux infirmières) Que diable allait-il faire dans cette galère ? (à Sylvestre) Votre père est riche ?

Il regarde Madeleine Béjart et s’interrompt.

Vous pouvez avoir confiance en madame comme en moi même.

Il est riche ?

Comme Crésus. Il faut qu’enfin j’éclate et décharge ma rate. C’est un avaricieux fieffé. Donner est un mot pour qui il a tant d’aversion, qu’il ne dit jamais je vous donne, mais je vous prête le bon jour. En un mot, il aime l’argent, plus que réputation, qu’honneur, et que vertu ; A vous dire vrai, il me donnerait, par ses procédés, des tentations de voler toute la fortune qu’il a sur lui.

Sur lui ? Vous avez dit sur lui ? Sur lui ! Y a-t-il rien de plus beau que ce « sur lui » ? Que ne le disiez-vous plus tôt ? Mais pourquoi garde-t-il tout cet argent sur lui ?

Il a peur qu’on le vole.
Il y a des craintes qui sont parfois justifiées.

Scène 5

Il vient de se réveiller.
Allez le voir.
Moi ?...
Quand le danger se présente, on l'affronte. Mon père va me...

Jouez la comédie. Allons, la mine résolue, la tête haute, les regards assurés.

( à Madeleine Béjart) Je ne saurais...

Imaginez-vous que je suis votre père, et répondrez moi fermement, comme si c’était à lui même. « Comment ! Pendard,

42

Sylvestre Lucrèce

Sottenville

Sylvestre Madeleine Béjart

Sottenville Sylvestre

Sottenville

Sylvestre Madeleine Béjart

vaurien infâme, tu as eu l’insolence de contracter un mariage clandestin ? Est ce là le respect qui m’est du, le respect que tu me conserves ? Réponds moi coquin, réponds moi !

Je me sens d’attaque.
Votre père s’impatiente. (Sylvestre entre chez son père)

Scène 6

Chambre de Sottenville.

Comment ! pendard, vaurien, infâme, tu as eu l’insolence de contracter un mariage clandestin ? Est ce là le respect qui m’est du, le respect que tu me conserves? Réponds-moi coquin, réponds-moi !

(Sylvestre reste une seconde comme ébahi et entrouvre la porte). (à Madeleine Béjart, très vite) Il me tient le même discours que

vous. Au mot près.
( idem) Les coïncidences ne sont pas toujours le fruit du hasard. (Sylvestre rentre chez son père).

Scène 7

S’aller jeter dans un engagement comme celui-là ! Comment as-tu osé ?
Je ne prévoyais pas les conséquences. Papa ! Mon petit papa ! (Il pleure)

Il est bien temps. Tu as tué ton père. Et maintenant ? Qu’est-ce qu’on fait ?

(Sylvestre à la porte).

Scène 8

(Passant la tête à la porte, à Madeleine Béjart, très vite, à mi- voix) Et maintenant ? Qu’est-ce qu’on fait ?

(Voix grave et large) Dites oui à tout ce qu’il vous demandera.

43

Sylvestre

Sottenville Sylvestre

Sottenville

Sylvestre Sottenville Sylvestre

Sottenville

Sylvestre Sottenville Sylvestre Sottenville

Criquet
y Sottenville

Ah oui ! (Sylvestre rentre chez son père). Scène 9

Que fais-tu ?

C’est que vous voir si bas est d’un choc si violent que mon cœur devient faible et mon corps chancelant... Je jure de vous obéir en tout, mon père. Je vous le dois. Vous êtes à l’agonie.

Moi ? Ah Oui, C’est vrai. Ahhhh ! Mon fils ! Tu reviens à de meilleurs sentiments. Voilà qui va le mieux du monde. Es-tu prêt à renoncer à ton mariage ?

Moi ?
Oui qui d’autre ? (il geint) Ahhh !

Oui... Pour vous plaire. Et parce que vous êtes sur la fin. (à part) Je me dédis s’il en réchappe ! (Il s’assied sur ses genoux)

A la bonne heure. Ahhh ! Un avocat, maître Mascarille va venir, j’espère, avant que je sois mort. Ahhh ! Avec mission de casser ton mariage.

Mon père, je l’accueillerai avec tout le respect nécessaire.

Ah ! mon fils !

Ah Papa !

Que la tendresse d’un père est aisément rappelée, et que les offenses d’un fils s’évanouissent vite au moindre mot de repentir!

(Entre Criquet pour les soins).

Scène 10

Alors comment va notre grand malade ?

Ahhh !

(Sylvestre sort de la chambre de son père).

44

Scène 11

45

Sylvestre

Madeleine Béjart Sylvestre Madeleine Béjart

Sylvestre Madeleine Béjart

Lucrèce

Sylvestre Madeleine Béjart

Sylvestre Lucrèce Sabine Sylvestre

Madeleine Béjart Sylvestre Madeleine Béjart

Sylvestre Madeleine Béjart

Hall des Urgences.

(du fond de scène à Madeleine Béjart) Ah madame, grâce à vous, j’ai soutenu sa colère, (va à cour et s’assied) mais il attend un homme de loi, je crains qu’il ne quitte les lieux avec lui, et (va prestement vers Béjart) que son argent...

Il faut agir vite.
Quel est votre dessein ?

Avec votre autorisation, délester monsieur votre père de son argent.

Vous l’avez.

Bien. Il reste une condition. C’est que mes mérites soient reconnus à leur juste valeur.

C’est bien ainsi que monsieur l’entend, n’est ce pas !

(Elle et Sabine font un signe à Sylvestre, symbolisant l’argent)

A combien estimez-vous vos mérites ?

(écrivant sur un papier) Je vais vous dire ça très vite. La moitié de la somme que nous allons tirer de votre père.

La moitié ? Tudieu !

Madame se conforme à l’usage...

Ni plus ni moins qu’à l’usage.

Pressé par les événements, il faut bien que je consente à tout. Mon père garde son argent avec lui,

Ah!
mais je ne sais pas où.

Nous ne quitterons point les lieux que nous ne l'ayions trouvé et mis en lieu de sûreté.

Mais par quel stratagème ?

Laissez-moi faire et pour que les choses ne souffrent aucune de ces querelles qui ruinent la confiance ; signez cet accord, s’il vous plaît.

Madeleine Béjart

Sylvestre Madeleine Béjart

Madeleine Béjart

Sabine Madeleine Béjart

Sabine et Lucrèce

Angélique Sylvestre Angélique Sylvestre Angélique

Sylvestre Angélique

(Elle lui tend le papier. Sylvestre lit et signe).
Topez là. (Elle le prend par le bras et va milieu scène) A un

moment, vous interviendrez dans l’opération. Je vous dirai quand.

Que dois-je faire cependant ?

Vous n’avez qu’à vous promener.

(Sylvestre sort)

Scène 12

(Les infirmières la rejoignent) Je vais avoir besoin de mes gens. Il va falloir les convaincre de me suivre.

La chose ira de soi.

Ne préjugeons rien. Mesdames, j’espère que je peux compter sur votre silence...

Nous n’avons rien vu, ni rien entendu.

(Toutes trois sortent).

Scène 13

Angélique. Elle aperçoit Sylvestre.

J’ai des élancements. Où?
Dans les reins.
Moi au cœur.

Tout beau ! Je puis fermer les yeux sur vos flammes secrètes tant que vous vous tiendrez aux muets interprètes mais, si la bouche vient à s’en vouloir mêler, pour jamais de ma vue il vous faut exiler.

Mais...

(rougissante) Adieu. Pour ce coup, ceci doit vous suffire, et je vous ai plus dit que je ne voulais dire.

46

Sylvestre Angélique Sylvestre Angélique Sylvestre Angélique Sylvestre Angélique Sylvestre Angélique

Sylvestre Angélique Sylvestre

Madeleine

Psyché

Béjart

(Elle feint de le libérer. Changeant de ton) : Attends ! ne m’emportes tu rien ?

Que vous emporterais-je ?
Tiens, viens ça, que je voie... Montre-moi... tes mains. Les voilà. (elle serre les mains de Sylvestre)
Les autres !
Les autres ?
Oui !
Les voilà.
N’as-tu rien mis ici dedans ?
Voyez vous même.

(le palpant lentement) Ces habits sont propres à devenir les recéleurs des choses qu’on dérobe... Allons, rends-le moi sans te fouiller.

Quoi ?

Ce que tu m’as pris.

Je ne vous ai rien pris du tout.

(Entre Angélique).
On entend hurler Sottenville :

« Sylvestre, que fait donc maître Mascarille ? Sylvestre ! »

(Angélique sort en courant. Sylvestre court derrière elle. Madeleine Béjart entre en scène.

Sylvestre ! Sylvestre ! Où allez-vous ? Votre père vous réclame. Revenez !
(Sylvestre hésite et entre chez son père.)

(Elle chantonne la chanson de Sylvestre et passe)

Ne songeons qu’à nous réjouir La grande affaire c’est le plaisir Soyons toujours amoureux C’est le moyen d’être heureux

47

Scène 14

48

Madeleine Béjart Flore

Madeleine Béjart Marie Claveau Madeleine Béjart Melle du Parc Flore

Madeleine Béjart

Pierrot Madeleine Béjart Marie Claveau Madeleine Béjart

Sabine Madeleine Béjart

Jodelet
La Grange

Local des acteurs.
Le sol est jonché de chaises brisées et de tables en piteux état.

Alors mes amis ? Que vous semble de mon projet ?

Vous avez d’étranges démons dans la tête. Après nous avoir mis sous la coupe d’un demi fou , Leroy... vous voulez maintenant qu’on s’intéresse à un jeune homme dont le père est avare. Pourquoi faire ?

Pour lui prendre son argent.
Mon Dieu, non !
Ou plutôt, le remettre à son fils après avoir prélevé notre part. Cela ressemble à du vol. Non ?
Quoi ? vous voulez qu’on vous aide à dérober un vieil homme ?

Mes amis, Nos deux dernières pièces ont été des échecs. Nos caisses sont vides. En aidant Sylvestre, nous allons gagner beaucoup d’argent et ainsi créer un nouveau et grand spectacle.

C’est tentant ! Si l’on était sûr que la chose fut sans risque... C’est sans risque.
Sans risque, sans risque...
Laissez-moi vous expliquer...

Scène 15

( passant la tête à la porte) Attention voilà Leroy.

Vite ! Vite ! Mettez-vous en place.

La Grange donne des coups de marteau sur le dessous d’une chaise .Ils commencent la scène)

« Qu’est ce donc qu’avez vous ? »
« Laissez-moi je vous prie. »
(à Leroy qui entre avec Sabine et Lucrèce)

La Grange

Dr Leroy La Grange

Dr Leroy Madeleine La Grange Flore

Dr Leroy Flore
Dr Leroy

Lucrèce Sabine Dr Leroy

Lucrèce

Dr Leroy

Madeleine La Grange Pierrot Leroy

Béjart

J’ai pensé qu’il pouvait être intéressant que mon personnage raccommode ce qu’il a cassé.

Pour le recasser ensuite ? Voilà.

(Leroy applaudit).

Alors, convaincus ?

Cela ajoute au texte.

Et donne une ampleur inégalée à mon jeu.

C’est une pièce qui va faire du bruit.

Oh toi, jeune chèvre ! (bas à Flore) J’ai bien envie de vous ausculter. (Il met son stéthoscope)

Je ne suis pas malade, moi.

(elle sourit, embrasse bruyamment le stéthoscope et s’éloigne)
(la main à l’oreille, grimaçant) Garce ! J’ai cru l’affaire faite.

Dommage.

(bas) Si le besoin... d’ausculter vous prend, nous sommes là...

(bas) Nous !

(bas) Mes chéries... évidemment. Pourquoi chercher ailleurs ce qu’on a sur place ?

(fort à Leroy) Monsieur, pardonnez-moi mais un grand malade vous attend.

Grand comment ? (à Madeleine Béjart) Votre représentation. Dans une heure.

Quoi ? Dans une heure ? Impossible.
Nous ne serons jamais prêts.

Vous le serez, vous dis-je, et quand même vous ne le seriez pas tout à fait, pouvez-vous pas y suppléer de quelques cabrioles comiques puisque c’est une farce ? Si vous avez un trou, vous pouvez aussi chanter ( il chante)

Oh oh je n’y prenais pas garde

Béjart

49

Madeleine Béjart Dr Leroy

La Grange Dr Leroy

Melle du Parc Dr Leroy Melle du Parc

Dr Leroy

Madeleine Béjart

Marie Claveau Madeleine Béjart

Tandis que sans songer à mal je vous regarde
Votre œil en tapinois me dérobe mon cœur !
Au voleur ! Au voleur ! Au voleur !
C’est une chanson que j’ai écrite tout à l’heure, entre deux clystères.

On sent qu’ils vous ont inspiré.

Adieu. Je suis fâché de vous quitter si tôt, mais il faut que je me trouve à une grande consultation qui se doit faire pour un homme qui mourut hier.

Pour un homme qui mourut hier ?

Oui, pour aviser et voir ce qu’il aurait fallu lui faire pour le guérir. Ah la médecine, c’est le métier le meilleur de tous ; car il y a parmi les morts, une honnêteté, une discrétion, la plus grande du monde et jamais on en voit se plaindre du médecin qui l’a tué.

(à part) Cela est épouvantable ! (à Leroy) Souffrez que je vous exprime le ravissement où me plonge vos paroles.

Vous avez là un œil que je me ferais crever, si j’étais vous. Il incommode l’autre, et lui dérobe sa nourriture.

(coquette) Cela n’est pas pressé. Je ne vois pas cette opération d’un bon œil.

(Leroy chante)

La farce la farce la farce
Ah mon dieu que j’aime la farce C’est souvent lourd à digérer Mais au théâtre c’est léger.
Il sort.

Scène 16

Or sus, à nous. Le temps nous est compté. Je vais vous expliquer mon plan. Vous me direz ensuite s’il vous agréé...

Ou bien ne pas...

(appelant doucement à la porte) Sylvestre !
(Sylvestre entre )
Voici le fils Sottenville. Sylvestre, voici mes amis acteurs qui, j’espère, vont nous aider dans notre entreprise. (il va serrer les mains des acteurs)

50

Sylvestre

La Grange Pierrot
Sylvestre
La Grange Madeleine Béjart

Pierrot

Marie Claveau Madeleine Béjart

Jodelet Madeleine Béjart Sylvestre
Marie Claveau

Madeleine Béjart

La Grange Madeleine Béjart Marie Claveau

Melle du Parc

51 La question est : Comment nous emparer des louis d’or de mon

père ? Sans user de violence. (il serre la main de La Grange) Si l’on tuait monsieur votre père, vous hériteriez, non ? Voilà une plaisanterie drôle à mourir.
J’aime mon père. Malgré sa ladrerie.

Nous ferons selon vos voeux. Nous resterons en de ça de la mort.

La Grange ! (Sylvestre l’aide à relever la table pour en faire un tableau. Elle dessine un plan) Je me suis inspirée d’une scène des « Fourberies ». Scapin. Monsieur de Sottenville attend la visite d’un avocat. Toi, Pierrot.

Moi ?

(Tous font les fous)

Mais écoutez-moi !

Pour forcer le vieux Sottenville à lâcher son argent, tu fais venir un compère déguisé en spadassin effrayant, toi, Jodelet.

Moi en spadassin effrayant ?

Pierrot te présentera à Sottenville comme le frère d’Angélique.

Jodelet, le frère de ma femme ?

Je sens mal les choses ! Oh que je les sens mal !

(elle va fond scène)

Tais-toi ! Ne perdons plus de temps. Lisez.

(La table est remise d’aplomb. Les infirmières entrent avec des boissons et des victuailles)

( à Madeleine Béjart) Alors, toujours Molière ? Je suis dans l’urgence.

(vers Madeleine) Se servir de ce génie pour une action de cette nature ! Honte à toi !

Moi, j’y vois une marque de dévotion.

Madeleine Béjart

Sabine
La Grange

Pierrot
La Grange Madeleine Béjart

(aux acteurs) J’y ai ajouté des soldats, comparses de Jodelet. Nous ne sommes pas assez nombreux. (aux infirmières) Il faudra la participation de quelques malades.

Nous les sortirons de leur lit.

( à Madeleine Béjart) Tu me proposes de faire de la figuration ? J’ai joué vingt premiers rôles...

Hélas !

Comment ? Petit impertinent ! Si je me jette sur vous...

(Elle le retient) Tête-bleu ! Me voulez-vous faire enrager aujourd’hui? Ah, les étranges animaux à conduire que des comédiens !

Il en va toujours de même chez les acteurs ? Souvent. Hélas.

(bas à Madeleine Béjart) Pourquoi ne me donnes-tu pas le rôle du Spadassin ?

Tu es trop violent. Je ne souhaite pas voir Sottenville mourir d’un transport au cerveau. Emporté par l’action, tu ne sais pas te maîtriser. Jodelet est plus pondéré.

Sa « pondération » - horrible mot pour un acteur - ne le garantit pas contre les trous de mémoire.

(à Jodelet) Tu es capable d’apprendre ces quelques lignes ? Oui. Ce n’est pas ce qui m’inquiète...
Quel est ton souci ?
Sottenville.

Sois sans crainte. Il sera tellement terrorisé qu’il donnera son argent sans dire un mot comme le vieil Argante dans les « fourberies de Scapin ».

Oui mais suppose qu’il réagisse différemment ?

Je compte sur toi pour procéder à quelques « ajustements » en cas de besoin.

Et Leroy ? Il va s’apercevoir de...

Sylvestre Madeleine La Grange

Madeleine

La Grange

Madeleine Jodelet Madeleine Jodelet Madeleine

Jodelet Madeleine

Jodelet

Béjart

Béjart

Béjart

Béjart

Béjart

Béjart

52

Madeleine Béjart

Madeleine Béjart

Melle du Parc Madeleine Béjart Jodelet
Pierrot

Madeleine Béjart Pierrot
Marie Claveau Madeleine Béjart

La Grange Marie Claveau

Pierrot
Marie Claveau Madeleine Béjart

Pierrot Madeleine Béjart

Pour Leroy comme pour le public en général, l’imprévu n’existe pas au théâtre. Quand Molière crachait du sang en jouant le malade imaginaire, tout le monde croyait à un jeu de scène et riait.

Sottenville et Leroy, participeront tous deux à l’action de notre comédie... à leur insu.

Ce sera l’irruption du réel dans l’artificiel. Voilà. Tu comprends ?
Presque.

Si je te saisis bien, tu te sers du spectacle donné en l’honneur de Leroy pour délester Sottenville de son argent. Leroy verra une comédie là où en fait se prépare un vol.

C’est cela.
C’est prendre un risque. Enorme...

Les caisses de la compagnie sont vides. Je ne laisserai pas passer cette opportunité exceptionnelle de m’emparer de cet argent sans lequel aucune création n’est possible. Ma tête est remplie de projets... mais comment les faire naître sans argent ? Et comment vous faire vivre ? C’est notre dernière chance. Alors ?

Leroy et toi, vous allez assister au spectacle. Sottenville va vous voir.

Evidemment ! Il va comprendre, il va appeler à l’aide, les autorités vont surgir et nous arrêter, nous frapper peut-être.

Nous tuer même ! Mon Dieu ! protégez-nous !

Si ! nous frapper !

Pierrot ! Marie, rassure-toi ! Nous serons sur le côté, dissimulés.

(Elle observe la configuration des lieux puis trace un trait au sol avec de la craie)

Pierrot ! Il ne faudra pas que Sottenville dépasse cette ligne.

Pas facile.

Si c’était facile crois-tu que je me serais adressé à toi ? Sylvestre, vous fouillerez la chambre de monsieur votre père, au signal de Pierrot.

53

Pierrot
Sylvestre
Marie Claveau Madeleine Béjart Sylvestre
Marie Claveau Madeleine Béjart Sabine
Lucrèce Madeleine Béjart

Jodelet Madeleine Béjart Jodelet

Madeleine Béjart

Lucrèce Sylvestre

Madeleine Béjart Flore

Madeleine Béjart Melle du Parc

Bien.
C’est noté.
Et si monsieur Sylvestre ne trouve pas l’argent...
Cela signifiera que Sottenville l’a sur lui.
Je l’ai déjà fouillé. Sans doute mal.
C’est des suppositions. J’en ai marre des suppositions ! Sabine et Lucrèce examineront à fond Sottenville. Quand ? Comment ?
Sous quel prétexte ?

(Elle passe une feuille aux deux infirmières) Suivez scrupuleusement mes instructions. (elles lisent) Si vous trouvez l’argent sur Sottenville, faites semblant de rien et donnez-lui tout de suite un produit soporatif.

Sylvestre, suivez bien mes consignes.

Dernier point.

Sois bref.

Nous allons jouer deux scènes des Fourberies. Mais Leroy attend le Misanthrope...

Que connaît-il au théâtre ? Pour lui, le Misanthrope est « une farce, » il aura donc une farce.
(Ricanements des acteurs)

Vous êtes sûr que l’argent de votre père est ici ? Aussi sûr que je vous vois.

Alors qui est pour se lancer dans cette aventure ?

Ce projet me déplaît. C’est péché de voler son père. Si je retrouvais le mien, je haïrais l’idée de le dérober.

Nous nous passerons donc de tes soins. D’autres pensent comme Flore ?

Moi, Madeleine, je t’apporte mon soutien.

54

Madeleine Béjart Marie Claveau Madeleine Béjart

Marie Claveau Les autres acteurs Madeleine Béjart Melle du Parc

Sylvestre Madeleine Béjart

Pierrot Madeleine Béjart Sylvestre
Marie Claveau

Madeleine Béjart Melle Du Parc

Madeleine Béjart

Je savais pouvoir compter sur ton intelligence. Je t’apporte mon soutien mais avec des réserves.

( bas) Sans réserve ou je ne te donnerai plus que des rôles mineurs.

(se mouche) Sans réserve.

Nous aussi.

Merci à tous.

(à la Grange) Jouer un Spadassin comme le ferai un débutant c’est drôle, non ?

(à Madeleine Béjart) Madame, je vous rappelle qu’un avocat est en route pour voir mon père.

Très juste. Avons-nous une robe d’avocat ?

(Melle du Parc fouille dans la malle et passe une robe à Pierrot).

Elle est trop grande pour moi.

Tes effets de manche n’en seront que plus beaux.

(à part) Tout cela paraît bien hasardeux ;

Ca c’est vrai !

mais quelle autre solution ?

Au fait, une dernière question sans réel intérêt : allons-nous gagner de l’argent ?...

De l’argent !

(Les acteurs crient de joie et chantent)

Sans argent
On fait ce qu’on peut Avec de l’argent
On peut ce qu’on veut

L’argent c’est le dieu Le dieu des dieux

Les choses pressent. Songeons à répéter, s’il vous plaît.

Madeleine Béjart

55

Madeleine Béjart

Marie Claveau Madeleine Béjart Marie Claveau Melle du Parc Madeleine Béjart Melle du Parc Madeleine Béjart

Sabien
Lucrèce
Sabine
Lucrèce Madeleine Béjart

NOIR

ACTE V Scène 1

Dans le hall.
Malades et soignants vont et viennent. Il y a là des répétitions de pas de danse, des gens qui achèvent de se maquiller et d’autres choses encore dans cette ambiance de kermesse.

(aux acteurs) Vous autres, tâchez de bien prendre, tous, le caractère de vos rôles et de vous figurer que vous êtes ce que vous représentez.

Madame, il nous manque un masque !
Faites au mieux.
Il n’y a qu’à moi qu’on demande des choses impossibles. (répétant) « ... que fait-là votre main ? »

(aux acteurs) Songez à bien soutenir la voix (fort) « ... que fait-là votre main ? »
sans hurler toutefois. Où sont Sabine et Lucrèce ? (elles sortent de chez Sottenville)
Ici, ici. Sottenville somnole.
Nous en avons profité pour nous changer.
Et nous repoudrer le museau.
Madeleine, quand devrons-nous intervenir ?

Au signal de Sylvestre... Jodelet, de l’autorité! Tu es un

méchant.
(montrant la porte de Sottenville) Tu dois faire peur à qui nous

savons.

56

Jodelet

Madeleine

La Grange

Madeleine

Leroy
La Grange Leroy Madeleine

Leroy

Pierrot

Leroy

Béjart

(dos aux acteurs,pour lui, grognant, twiste sur la G)
Ah oui, je suis un méchant. Un monstre de méchanceté. (twiste

sur la droite) Ah ! (Il sort fond cour) Soudain, cris divers « il arrive », il est là »

Les acteurs s’embrassent et disparaissent.

Mon Dieu, venez en aide à de pauvres comédiens !

Apparaît Leroy dans un fauteuil chamarré, poussé par les malades aux pyjamas galonnés d’argent. Il tient à la main un clystère d’or. Madeleine Béjart le place près d’elle, dans un coin, à l’abri des regards.

Monsieur le grand médecin, nous allons à présent jouer devant vous, le Misanthrope qui est, comme vous le savez, l’histoire d’un père qui veut rompre le mariage de son fils.

Mais ce dernier qui a plus d’un tour dans son sac, imagine un hardi stratagème pour s’emparer de l’argent de son père.

J’en ris par avance.

( à part) Moi aussi...

Pourquoi nous a-t-on placés dans ce coin obscur ?

C’est une demande des comédiens. Vous les impressionnez tant qu’ils ont souhaité ne pas voir vos réactions.

Je comprends.

Scène 2

La Grange fait les trois coups en tapant un gros barreau de chaise sur une table. Il a un sourire complice pour Leroy qui lui répond de même.

(tape à la porte de Sottenville) Qu’est-ce donc, qu’avez-vous ? (l’oreille colée à la porte. Bruits de barreaux de La Grange ) Mais encore dites-moi quelle bizarrerie... (l’oreille collée à la porte. Bruits de barreaux ) Mais on entend les gens au moins sans se fâcher. (l’oreille colée à la porte. Bruits de barreaux ) Dans vos brusques chagrins je ne puis vous comprendre...

(bas à Madeleine Béjart) Vous avez gardé ma mise en scène.

Béjart

Béjart

57

La Grange

Leroy

Almanzor

Madeleine Béjart

Pierrot

Monsieur de Sottenville

avant J)

Pierrot
Sottenville
Pierrot
Monsieur de Sottenville Pierrot

Monsieur de Sottenville Pierrot

Monsieur de Sottenville Pierrot
Monsieur de Sottenville Pierrot

Monsieur de Sottenville Pierrot
Monsieur de Sottenville Pierrot

Monsieur de Sottenviille Pierrot
Monsieur de Sottenviille

(bas) Cela va de soi. Nous avons changé d’acteur. L’un joue, l’autre tape.

Excellent !
C’est une nouvelle comédie ?
Chut !
(à la porte de Sottenville) Monsieur ?
(il ouvre sa porte) Pourquoi tout ce bruit ? (La Grange se retire

Monsieur, votre serviteur.
Je dormais. J’ai été réveillé par des coups et des cris. Vous aurez rêvé. Comment vous en va ?

Il m’est arrivé de me sentir mieux.

Vous avez mandé les services d’un avocat.

Et maître Mascarille ?

Maître Mascarille ? Qui est-ce ? Ah oui ! maître Mascarillle... Je le remplace. Sa femme est morte.

Encore, c’est la deuxième fois cette année. Sa femme... non, sa sœur.
Vous n’avez pas traîné.
Euh ! J’étais dans les environs.

Entrons dans ma chambre pour nous entretenir de nos affaires. Dans votre chambre ?
Sans doute. Nous y serons plus à l’aise pour parler.
Non.

Comment ça non ?
Je n’irai pas dans votre chambre. Et la raison ?

58

Pierrot

Madeleine Béjart Lucrèce
Monsieur de Sottenville Pierrot

Madeleine Béjart Sabine

Monsieur de Sottenville Monsieur de Sottenville Leroy
Sabine

Pierrot
Monsieur de Sottenville

Leroy
Madeleine Béjart Pierrot

Leroy
Madeleine Béjart Pierrot

Monsieur de Sottenville

La raison est que...

(Il interroge les infirmières du regard. Elles regardent Madeleine)

C’est interdit.
Il est interdit d’entrer dans la chambre d’un malade. Et pourquoi ?

Pourquoi ? Même jeu avec les infirmières)

Maladie.

Pourquoi? Entrer chez monsieur, c’est prendre le risque d’attraper sa maladie. ( à Sottenville) Vous êtes malade, non ?

Moi ?
Je ne m’en souvenais plus. Ahhhh !

Vous avez engagé mes infirmières ? c ‘est un tout petit rôle !

Demeurons ici. Nous serons bien pour arranger nos affaires.

Bien. Allons au fait. Il faut que la justice casse le mariage de mon fils.

(bas, désignant Sottenville) Qui est-ce ? (bas) Lui ?.... Un ancien de notre troupe.

Maître Mascarille m’a mis au courant de l’affaire.

(il fait un signe à Sylvestre qui pénètre discrètement chez son père.)

(bas, montrant Sylvestre) Et celui-là ? (bas) Notre dernière recrue.

Monsieur, si vous m’en croyez, vous tâcherez par quelque autre voie d’accommoder l’affaire.

Pourquoi ?

59

Pierrot

Sottenville Pierrot

Sottenville Pierrot

Sottenville Pierrot

Sottenville Pierrot

Sottenville Pierrot Sottenville Pierrot

Sottenville Pierrot

Sottenville

(collé, rapide et bas) Pourquoi ? ...Hein ?... Vous savez ce que c’est que les procès en ce pays ci et vous allez vous enfoncer dans d’étranges épines.

Pourquoi ?

(même jeu) Pourquoi? Mettez-vous par là. (Pierrot ramène Sottenville qui dépasse la ligne fixée) Mais pour plaider il vous faudra de l’argent, il vous en faudra pour l’exploit, pour les contrôles, la procuration, pour les consultations, pour le rapport des substituts, l’enregistrement du greffier, pour...

Alors que faire ?

Je me suis intéressé pour vous jusqu’à aller voir le frère de cette fille qui a été épousée... (il ramène Sottenville qui s’écarte de nouveau de la ligne)

Mais pourquoi ?

(même jeu) pourquoi ?... Euh... J’ai donc mis sur ce mariage le frère de cette fille, et je l’ai tant tourné de tous les côtés qu’il a prêté l’oreille aux propositions que je lui ai faites d’ajuster l’affaire pour quelque somme et il donnera son consentement à rompre le mariage pourvu que vous lui donniez l’argent que vous avez sur vous...

Comment sait- il que j’ai de l’argent sur moi ?

Vous avez de l’argent sur vous ? Je suis avocat vous pouvez tout me dire.

Où est cet homme ? Euh ! Pas loin. Allez le chercher.

Euh ! Monsieur, prenez garde, cet homme est fou. C’est est un de ces braves de profession, de ces gens qui sont tous coups d’épée, qui ne parlent que d’échiner...

Ici, nous ne risquons rien.

Monsieur, vous le savez comme moi, depuis quelque temps, personne n’est plus en sécurité nulle part. ( il ramène Sottenville qui s’est trop avancé )

Mais enfin que signifie ?

60

Pierrot Sottenville

Vous êtes trop visible de l’extérieur... Allez chercher cet homme.

Scène 3

Pierrot siffle.
Entre Jodelet en Capitan terrifiant.

Monsieur voici l’homme.

Leroy applaudit son entrée. Madeleine Béjart l’arrête. Jodelet fait le tour de la scène en grommelant, grognant, éructant.

(apercevant Pierrot) Arghh ! L’homme, fais-moi connaître un peu le père de Sylvestre.

Pourquoi, monsieur ?

Je viens d’apprendre qu’il veut me mettre en procès et faire rompre par justice le mariage de ma sœur.

Je ne sais pas s’il a cette pensée mais il ne veut point consentir à donner l’argent qu’il a sur lui et il dit que c’est trop.

Lui! lui! Par le sang! Par la tête! Je vous donne ma parole et vous jure sur mon honneur, par l’épée que je porte, par tous les serments que je saurais faire, qu’avant la fin du jour, je vous déferai de ce maraud fieffé, de ce faquin de Sottenville.

Monsieur, ce Sottenville se tiendra sur ses gardes et il a des amis Spadassins dont il se fera un secours contre votre ressentiment.

C’est ce que je demande, morbleu, c’est ce que je demande ! (mettant la main à l’épée) Ah, tête ! ah ventre ! Que ne paraît-il à mes yeux au milieu de trente personnes ! Que ne le vois-je fondre sur moi, les armes à la main ? (se mettant en garde) Comment ! Marauds, vous avez la hardiesse de vous attaquer à moi ? (bas à Pierrot) Il ne paraît pas effrayé.

Il cache son jeu. Double la mise.

( comme un fou furieux) Allons morbleu, tue ! ( poussant de tous côtés comme s’il avait plusieurs personnes à combattre) Point de quartier. Donnons. Ferme. Poussons. Bon pied. Bon œil. Comment, vous reculez ! Pied ferme, morbleu, pied ferme ! Tiens ! tiens ! Tiens ! ( il compte les victimes) Voilà qui vous

61

Pierrot

Jodelet

Pierrot Jodelet

Pierrot Jodelet

Pierrot Jodelet

Pierrot Jodelet

Sottenville

Jodelet Sottenville

Jodelet Sottenville Jodelet

Sottenville

62 apprendra à vous oser jouer de moi. (il feint d’apercevoir

Sottenville) Qui est cet homme là ?

Je vais vous le dire. Mon père avait pour prénom Jean Gilles et pour nom :
« Sottenville ! Cœur hardi et âme fière ! »
(il fait remuer sa canne dans tous les sens)

(à Pierrot, bas) C’est un nerveux.

Il eut la gloire d’assister au siège de Montauban. Par les mânes de mes ancêtres ! Cœur hardi et âme fière ! Vous m’avez menacé de mort. En garde !
(Jodelet regarde Pierrot qui ne sait trop que faire.)

Moi ? Pourquoi faire ?

Vous vouliez me tuer.

Moi ? Ah oui, c’est vrai. Eh bien je ne veux plus...
Quoi ?... On a quand même le droit de changer d’avis, non ? (criant brusquement à l’oreille de Sottenville qui ne réagit pas ) ( à part) Il n’a pas peur. J’avais dit qu’il y avait un risque. (il se met en garde mollement. Sottenville le désarme d’une feinte de canne. Jodelet est à bout de souffle. Il tombe. Pierrot l’évente comme un manager avec un boxeur.
Sottenville se lève de son fauteuil et au public, très simple)

(Il chante) Sum sum Sottenvillus Qui semper bataillat

Semper assasssinat Semper decapitat

Sum, sum, sum terriblus Sed semper elegantus Sum sum sum violentus Sed non sum sadicus

Sum, sum, Sottenvillus Qui semper bataillat Semper assasssinat Semper decapitat

(à Jodelet) Une petite question.
Il appuie sa canne sur l’estomac de Jodelet. Oui?Aquelsujet?

Sottenville

Jodelet

Sottenville. Jodelet. Sottenville Jodelet Sottenville Jodelet Sottenville

Jodelet

Sottenville Jodelet

Sottenville Pierrot Jodelet Pierrot Jodelet Pierrot

Leroy

Votre sœur va rompre le mariage d’avec mon fils. N’est-ce pas ? Je m’y engage.
( il appuie plus) Et l’affaire ne me coutera pas un liard.

Cela va de soi. (saluant) Bien le bonjour !

Je n’ai pas terminé.

Ah!

Tu m’as menacé, insulté. Répète après moi. « Monsieur, je vous demande pardon des mauvaises paroles que j’ai eues pour vous. »

(à part) Je bois le calice jusqu’à la lie... « Monsieur, je vous demande pardon des mauvaises pensées que j’ai eues pour vous. »

Corbleu ! Votre haleine est empestée.

Pour me donner du courage, je bois toujours avant d’entrer en scène.

Avant d’entrer en scène ?
Il veut dire avant de rencontrer quelqu’un d’important.

(bas) Je crois que je vais m’évanouir.
Laisse-moi faire... Mais qu’entends-je ? quels sont ces chants ? Je n’entends rien.

(il va vers la sortie) (bas) Or donc, chantez ! On entend des chants sauvages, scandés.

Sottenville Sottenville Sottenville Sottenville Vil vil vil Sottenville Nous t’attraperons Nous t’étriperons

J’adore « ce vil vil Sottenville »

Il chante.

Vil vil vil vil Sottenville

Sottenville appuie davantage.

63

Jodelet

Sottenville

Leroy Madeleine

Jodelet Pierrot

Un spadassin Melle du Parc Marie Claveau Spadassin Madame Andrée Spadassin Spadassin

Melle du Parc La Grange Melle du Parc La Grange Spadassin Colin

Gros René

Ah, ah ! Mes frères Spadassins arrivent, monsieur le faquin. Nous verrons si vous jouez les fiers à bras avec eux. Par ici! Sottenville est là !

(à part) L’ennemi est en nombre, la ruse s’impose. (Sottenville rentre chez lui).

(bas à Madeleine Béjart) L’acteur qui joue Sotenville est très bon. Oui, c’est un acteur malgré lui.

.
(Jodelet essaye en vain d’ouvrir la porte) Le lâche ! Il s’est

barricadé. Couard ! traître !Pendard !
Voilà qui n’était pas prévu, ma foi ! (discrètement vers Madeleine

Béjart) Que faire ? .

Entrée fracassante de personnages énormes et inquiétants. Ils portent des masques effrayants et costumes ad hoc. Ballet sans musique, uniquement rythmé par les coups frappés par La Grange, chef des Spadassins.

(diction déformée et gestuelle de cauchemar) Où est Sottenville ? Cherchons Sottenville
Frappons Sottenville.
Broyons Sottenville.

Pressons Sottenville. Trouvons Sottenville. Mordons Sottenville. Sus à Sottenville. Rongeons Sottenville. Pendons Sottenville. Ecrasons Sottenville. Mâchons Sottenville. Etripons Sottenville. Croquons Sottenville.

64

Tous (dont Leroy)

Sottenville Sottenville Vil vil vil Sottenville Sottenville Sottenville Vil vil vil Sottenville

( Pierrot leur fait signe de partir. Ils sortent à regret)

Scène 4

Pierrot tape à la porte de Sottenville.

Monsieur, la voie est libre.

La porte s’ouvre brusquement. Sottenville est habillé en femme. Il tient un sac de propreté rempli à la main.

Holà ! Ho ! cocher, petit laquais ! Ah petit fripon que de coups de fouet je vous ferai donner tantôt ! Petit laquais ! Petit laquais ! Où est-ce donc qu’est ce petit laquais? Ce petit laquais ne se trouvera-t-il point ? Ne me fera-t-on point venir ce petit laquais ? Est-ce que je n’ai point un petit laquais dans le monde ?

Voilà une curieuse apparition. (bas) Je vous ai reconnu !

Ah ?

Le frère de cette fille va vous reconnaître aussi et tous ses amis gens d’épée comme lui. Vous ne pensez pas qu’il vaut mieux donner son argent que d’avoir affaire à ces fous ?

(bas) Nous parlerons de cela plus tard. (bas) Mais il porte mon chapeau !
(bas) Et ma robe !
(bas) Il a fouillé dans nos petites affaires. (bas) Le butor !

Pierrot fait signe à Jodelet de partir.

Mais pourquoi ? On ne s’occupe plus de Sottenville ?

Pierrot le pousse dehors. On entend des chants au loin.

Monsieur...

65

Pierrot

Sottenville

Pierrot Sottenville Pierrot

Sottenville Lucrèce Sabine Lucrèce Sabine

Jodelet Pierrot

Sottenville Pierrot Sottenville Pierrot

Pierrot Sottenville

Sottenville Pierrot Sottenville Pierrot

Sottenville Pierrot

Sottenville Pierrot

Sottenville

Pierrot

Sottenville

Oui.
Ils reviennent.

Il nous faut sortir d’ici. Comment faire ?
Si je le savais ! Idée ! (Pierrot avise le sac de propreté que

Sottenville a à la main, il l’ouvre)

Qu’est ceci ?

Ce sont mes petites affaires d’homme.

Pierrot sort du sac des pantalons, un caleçon, etc etc. Et les met dans ses grandes poches d’avocat.

Mais que faites-vous ?

Je vous sauve.

Comment monsieur l’avocat ?

Entrez là dedans. Je vous chargerai sur mon dos comme un paquet de...

De quelque chose

Voilà, et vous porterai ainsi, au travers de vos ennemis, jusque dans ma maison où quand nous serons une fois, nous pourrons nous barricader et envoyer quérir main forte contre la violence.

(entrant dans le sac) L’invention est bonne.

La meilleure du monde. Vous allez voir. (à part) Merci Scapin. (Il essaye plusieurs fois de mettre le sac sur son dos, n’y parvient pas)

Par les mânes de mes ancêtres !

(Il fait quelques pas).
(Lui donnant un coup de pied)Attention !

(Criquet passe, Sottenville s’assoit et demeure immobile).

La voie est libre.

(Sottenville fait quelques pas et tombe de nouveau).

Sottenville ! Courage !

66

Lucrèce Sabine Lucrèce Sottenville Pierrot Sabine Leroy Lucrèce Sottenville Sylvestre Sabine Lucrèce

Sottenville Sylvestre Sottenville Pierrot

Sottenville Lucrèce

Sottenville Lucrèce Sabine Lucrèce

(Il découpe un bout du sac, on voit apparaître ses yeux et son nez. Pierrot fait signe aux deux infirmières d’approcher).

(montrant le sac) Halte là monsieur ! Qu’est ceci ?
Il me semble que je vois remuer dans ce sac.
(ouvrant le sac) Ciel ! n’est-ce point votre père ?
A ne rien vous cacher de la vérité pure, oui.
Mesdames, sa présence dans ce sac ne doit pas vous surprendre. Dans notre métier, rien ne nous surprend plus.

(bas à Madeleine Leroy) Cela est vrai ! Mais pourquoi ce chapeau?
J’avais froid à la tête.
Mon père souhaite quitter ces lieux.

La chose est possible.
Mais avant, nous devons vérifier son état de santé.

(Pierrot apporte un brancard et aide à y installer Sottenville)

Je suis au mieux.
Avez-vous oublié que vous êtes mourant ? Aaah, c’est la douleur qui me trouble l’esprit.

Mettez-vous bien jusqu’au fond et surtout prenez garde de ne vous point montrer et de ne branler pas quelque chose qui puisse arriver.

Laissez-moi faire je saurai me tenir. Permettez.

Elles entrent dans le sac et fouillent Sottenville.

Que font vos mains partout sur moi ?
Nous vérifions.
Chacun de vos organes.
(plongeant ses mains dans le sac) ) Cherchons partout !

67

Sabine Lucrèce Sottenville Sabine Lucrèce Sabine Sottenville Lucrèce Sabine Sabine Pierrot

Lucrèce
Sabine
Lucrèce
Sabine et Lucrèce Sottenville Pierrot

Flore Sylvestre Flore

N’oublions aucun lieu. Visitons tout !
Tout doux !
Furetons de tous les côtés. A gauche

A droite
Que diable est-ce là ? Les gens d’ici sont-ils insensés ? Je ne sens aucun gonflement suspect au pylore

Ni à l’estomac...

Ni dans le dos

(bas aux deux infirmières) Alors l’argent ? (Il rentre dans le sac avec les infirmières)

Ni sur les cuisses Niàlarate
Ni au foie
Ni ailleurs.

(Il sort du sac, les infirmières et Pierrot restent dedans) Mais enfin... quel est votre dessein ?
Ah ! Vous me chatouillez.

Scène 5

Apparaît Flore.

68

Cessez cette comédie !

(bas à Flor) De quoi vous mêlez-vous ?

(idem) Je me mêle du respect que l’on doit aux gens ! Y a-t-il rien de plus vil au monde que d’agir ainsi avec un homme malade ? N’est-ce pas là, le pire des crimes ?

Sottenville Sylvestre Sottenville Sylvestre Flore

Sottenville Sylvestre Sottenville Sylvestre Sottenville Sylvestre

Sottenville

Flore
Leroy
Flore Sottenvielle Pierrot Sottenville Pierrot Leroy

La Grange

C’est fort bien dit. (souffreteux) Aaaah !

Il n’est pas malade.

Quimoi?Ahhh!

Le menteur nous joue la comédie pour que j’accepte le divorce.

A menteur, menteur et demi. Et vous, n’avez-vous pas tenté de voler votre père ? Avec l’aide d’acteurs ?

Quoi ? Des acteurs ? Mon père...
Tu as fait cela, traître ?

Mon père, c’est votre ladrerie qui est la cause de tout.

Tu voulais dérober mes louis d’or ? Hors de ma vue, parricide !

Vous ne romprez point mon mariage, dussé-je en mourir! Infanticide !

Scène 6

Ah que n’aj-je à cette heure la fille que le ciel m’a ôtée pour qu’elle me vienne en aide !

(à part) Le pauvre homme ! Je crois que je vais pleurer. (bas à Flore) Faites, mais faites donc et je vous consolerai.

(à Sottenville) Votre fille est morte ? C’est une histoire triste.
Dites toujours, cela nous divertira. Hein ?

Nous attristera.
Ma fille a été enlevée, il y a quelque 16 ans. Ah ? Et quel âge avait-elle ?

69

Sottenville Flore Sottenville

Dr Leroy Sottenville Dr Leroy Sottenville

Flore Sottenville

Flore
Dr Leroy

Flore Sottenville Leroy Madeleine Flore

Sottenville Flore

Sottenville Sylvestre

Béjart

Quatre ans. Comment était-elle ?

Elle avait deux yeux, une bouche, deux petites jambes, et un grand sourire.

Rien d’autre qui pourrait la faire mieux connaître ?

Un bracelet.

Un bracelet ?

Oui, tout en or, que j’avais payé fort cher. Mais chez les Sottenville, quand on aime, on ne compte pas.

Un bracelet comme celui-ci ?

C’est cela. Ahhh ! Hélas à voir ce bracelet c’est ma fille que je perdis à l’âge que je dis. Et voilà tous les traits qui m’en peuvent rendre assuré. Ma fille ! Ah ! ah ! Pour le coup, je meurs vraiment.

Calmez-vous !

J’apprends qu’elle est ma fille et elle veut que je sois calme ! Holà ! Holà ! Oh qu’un seul instant change votre destin !

Mon petit papa !

Ma fille !

(à Madeleine Béjart) Elle joue avec beaucoup de naturel.

Oui, on croirait que c’est son vrai père.

Mon cœur est si surpris d’une telle merveille qu’en ce ravissement je doute si je veille.

Ô ciel, que d’aventures extraordinaires ! Je me sens défaillir.

Attendez, je vous prie. Avant, dites-moi... votre fils vous traite de ladre. Prendrai-je tout ceci pour de l’argent comptant ?

La peste m’étouffe si je le suis encore après ce qui m’arrive ! (appelant) Sylvestre !

(revenant) Mon père !

70

Sottenville

Mon fils !...

Pardonnez-lui.

Si tu me le demandes.

(à part) Il la tutoie !

Et donnez lui l’argent qu’il sollicite pour son amour. Comment le sais-tu ?

Les jeunes gens sont toujours en quête d’argent.

J’avais pris mes précautions et mis mon argent en lieu de sûreté.

Où cela ?

Sottenville va chercher dans son pantalon.

Que signifie ?

(se retourn) Oh mon papa, cela n’est guère convenable.

( l’imitant ) Oh mon papa, cela n’est guère convenable.

(à part) Elle l’appelle papa !
Il sort l’argent des poches de Pierrot

Voilà l’argent. (il sort des louis d’or de la doublure de sa veste) (à part) Ah ! voilà où il cachait son argent ! Je pouvais toujours

chercher.
Et si cela ne suffit pas, il y en a de reste. Je veux rattraper le

temps perdu. Ah ma fille ! (Il lui donne l’argent) Ma fille ? Vous avez dit ma fille ?
Elle l’est.
Je vous expliquerai plus tard.

Une bouffée de générosité s’empare de tout mon être. Profitons-en, cela ne va pas durer.

Ah ma fille. Que votre pauvre mère serait heureuse si elle nous voyait.

Flore

Sottenville

Sylvestre

Flore Sottenville

Flore Sottenville. Flore

Sylvestre Fllore Sottenville Sylvestre

Sottenville Sylvestre

Sottenville

Sylvestre Sottenville Flore Sottenville Sylvestre Sottenville

Sylvestre

Pour mon amour. (il empoche l’argent)

71

Madeleine Béjart

Sottenville Sylvestre

Flore Sylvestre

Angélique Sylvestre Angélique Sylvestre Sottenville

Leroy
Madeleine Béjart
Ce soir nous sommes fiers

Car grâce à toi, Molière Nous vous avons fait rire Rire rire et sourire
Merci Tartuffe merci Merci l’avare aussi-i

72 ( à Leroy) Excusez-moi. (elle rejoint Sylvestre, le pousse dans un

coin, prend son dû et rejoint sa place )

Scène 7

Où es-tu allé ?

Euh ! Chercher un mouchoir. Mon père, si Flore est ma sœur, je suis donc son frère !

Ah mon Sylvestre !
Ah ma Flore !
Entre Angélique, la femme de Sylvestre. Quoi vous caressez une autre femme ? Mon amour ! C’est ma sœur !
Vous ajoutez la goujaterie à la tromperie. Mais non. (Elle le gifle) Papa ?

Ma chère et tendre bru, Flore est ma fille. (elles s’embrassent)

Scène 8

(bas) Vous pourrez venir travailler ici à votre convenance.

(bas) Nous vous en remercions ! (à part) Nous sommes riches. Ce ne sera plus nécessaire.

Merci merci Psychée
Merci le Barbouillé
Merci, les femmes savantes

Tellement arrogantes

Merci Médecin Volant
Et merci Dom Juan
Merci le Misanthrope
C’est une farce choc
Le médecin malgré lui
Merci les fourberies
Merci Monsieur Jourdain Pourceaugnac, Georges Dandin Merci à Trissotin

merci à toi Scapin
Merci malade imaginaire

Merci à toi Molière. (bis)

(dernière phrase sur l’air de « mais pour être toujours contente)

Leroy Cette fois, la comédie est finie, non ?
Madeleine Béjart Oui. Allons tous faire noce et boire à la santé de la compagnie.

Deuxième vague de saluts.

FIN

73


Retour en haut
Retour haut de page