Y a des cales en bourg

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C’est la joie de vivre et la bonne humeur qui règnent habituellement dans le petit bar de Gérald. Ses bons mots, les potins de la concierge mais surtout le côté burlesque de ses clients y sont pour beaucoup. Oui… mais voilà qu’aujourd’hui c’est la panique qui s’empare de tout ce petit monde : Le ticket de loto, fait en commun, a disparu ! L’infernale Eléonore, qui pense connaître le responsable de cette disparition, va être à l’origine d’une séance de déshabillage dont sera victime le sympathique Père Jack. Mais, plus incroyable encore, Louise la retraitée retrouvera son premier amour ! Tout ceci s’ajoutera à la situation d’agitation extrême déjà créée par le rendez-vous galant de la jolie Claire dont l’issue burlesque sera un des moments forts de la pièce.

Cette comédie nous réserve de joyeux moments et bien des surprises. On rit sans modération.

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ACTE I

 

Lever de rideau

Derrière le comptoir, Gérald essuie des verres. A la petite table centrale, Marianne et Eléonore sont absorbées par une partie de scrabble tandis qu'à la table au fond à gauche, le Père Jack est plongé dans son journal ; de temps en temps il prend des notes sur un petit carnet.

GERALD - Alors les joueuses, cette partie de scrabble, ça avance ?

(La porte s'ouvre, la concierge entre.)

Ah ! Bonjour madame Martin...

ELEONORE - La pip'lette, il n'manquait plus qu'elle !

Mme MARTIN - (négligeant la remarque) Bonjour tout le monde...

MARIANNE et PERE JACK - (ensemble) Bonjour madame Martin.

GERALD - Un petit rhum ? (Sans attendre, il la sert.)

MARIANNE - Dis-donc Gérald, ça fait dix minutes qu'on joue, il n'faudrait pas nous oublier... nous.

 

GERALD - (saisissant deux verres et une bouteille qu'il met sur un plateau, il balance un torchon sur l'épaule) Oh ! Excuse-moi Marianne (et très fort) deux Julienas... deux... comme d'habitude.

MARIANNE - Oh ! Tu n'pourrais pas être plus discret non ! T'es pas obligé d'l'annoncer à la cantonade qu'on boit du Julienas ! (Puis presque fâchée) Non mais c'est vrai ça... On pourrait nous prendre pour des poivrotes !

ELEONORE - Et nous, on n'est pas des poivrotes.

(Tous rient.)

GERALD - Bien sûr Eléonore, qui a dit ça ?

Mme MARTIN - Personne pardi... Tout le monde sait bien que vous n'êtes pas des poivrotes... Est-ce que j'ai l'air d'une poivrote, moi ? Pourtant je bois une vingtaine de petits rhums par jour.

MARIANNE - Oui, eh bien quand on en s'ra à une vingtaine de Julienas, on en r'parlera... En attendant, Gérald, (elle détache) de la dis-cré-tion.

ELEONORE - C'est ça... de la distraction !

(Tous rient.)

GERALD - C'est d'accord... à l'avenir je serai plus discret... là !

Mme MARTIN - (s'approchant) Qu'est-ce que vous en avez de la chance de pouvoir jouer au scrabble ! On a beau dire, mais le chômage a ses bons côtés. Moi je voudrais...

GERALD - (l'interrompant) Oh ! madame Martin, ce n'est pas gentil ce que vous dites là.

MARIANNE - C'est même méchant... Nous, on n'a pas d'mandé d'être au chômage.

ELEONORE - Non... on n'a pas d'mandé... Mais puisqu'on y est, il faut bien qu'on s'occupe.

MARIANNE - Mais si ça vous gêne, soyez rassurée, dans trois s'maines, vous n'nous verrez plus. On s'en va toutes pour trois mois faire un stage de reconversion... oui... c'est comme ça qui disent.

ELEONORE - Parfaitement, toutes, Claire et Sonia aussi. (Puis un peu hargneuse) Vous êtes contente ?

 

Mme MARTIN - (levant les bras et retournant au comptoir) Oh là là... si on ne peut plus causer maintenant ! (Elle boit une gorgée.)

GERALD - Si, madame Martin, on peut causer... mais il ne faut pas être méchante... j'aime mieux quand vous nous racontez les potins.

Mme MARTIN - Oh ! les potins... à part la fête des nougats...

GERALD - Ah oui... c'est vrai... ça doit commencer à bouger.

Mme MARTIN - Pour bouger... ça bouge... c'est même un sacré chantier. Ils ont commencé la construction des podiums et les gars de la commune sont à préparer les chars... ça fait un de ces bazars ! En plus il y a les forains qui commencent à arriver ! (Elle boit à nouveau une petite gorgée.) Tiens... à propos de forains... te souviens-tu de Anna... la marchande de nougats ?

(Les joueuses et le Père Jack, soudain intéressés, lèvent la tête.)

GERALD - Qui ne se souvient pas de Anna... hein Marianne ?

MARIANNE - Tu parles ! l'Yvon en était tombé paf...

ELEONORE - Oui... mais elle aussi... elle était mordue. L'année dernière, après la fête, elle voulait même l'emm'ner avec elle... en Normandie.

Mme MARTIN - Et son boulot ? Il ne pouvait quand même pas laisser son boulot ! Si encore ça n'avait pas été aussi loin, ils auraient pu s'arranger, mais la Normandie... c'est pas la porte à côté.

MARIANNE - C'est vrai, je m'souviens maint'nant... elle était de Sées, dans l'Orne.

GERALD - Oui... c'était en quelque sorte sa fille-en-Sées.

(Tous pouffent sauf Eléonore.)

MARIANNE - ça y est... c'est parti... l'premier d'la journée.

PERE JACK - Et sans doute pas le dernier.

Mme MARTIN - Il est quand même pas mal pour un premier.

ELEONORE - (n'ayant pas compris) Mais pas du tout... Ils n'étaient pas fiancés !

MARIANNE - T'as rien compris. Gérald n'a jamais dit qu'ils étaient fiancés.

ELEONORE - Non mais, j'suis pas sourde quand même !

MARIANNE - Il a dit (elle détache) fille... en... Sées... qui habite Sées.

ELEONORE - Qu'est-ce que vous êtes compliqués !

MARIANNE - Si tu veux. (Un temps) N'empêche il en a pris un coup l'Yvon quand elle est partie... pendant des mois qu'il en a parlé, et Anna par-ci, et Anna par-là, on a bien cru qu'il allait tout plaquer pour aller la rejoindre.

GERALD - C'était devenu son Anna chronique.

(Tous rient de bon cœur sauf Eléonore.)

PERE JACK - Je l'avais bien dit qu'il y en aurait d'autres.

ELEONORE - J'vois pas c'qu'y'a d'marrant !

GERALD - Mais au fait, pourquoi vous nous parlez de Anna ?

Mme MARTIN - Pourquoi ? (Puis se redressant et regardant autour d'elle comme pour guetter la réaction que pourrait provoquer sa révélation.) Eh bien, parce que je l'ai vue.

TOUS ENSEMBLE - Quoi ?

Mme MARTIN - (fière d'apprendre la nouvelle) Oui... Anna est revenue.

GERALD - C'est pas une blague au moins ?

Mme MARTIN - Pas du tout, je lui ai même parlé.

GERALD - Diable ! Qu'est-ce qu'elle vous a dit ? Elle n'a quand même pas parlé d'Yvon ?

Mme MARTIN - Si, justement, elle m'a demandé si il venait toujours ici. Je ne pouvais quand même pas lui mentir... je lui ai dit oui... elle a semblé être contente, elle a même dit qu'elle passerait pour essayer de le voir.

MARIANNE - Ça alors...

ELEONORE - Ben dis-donc, quand l'Yvon va savoir ça !

MARIANNE - Il est capable de s'trouver mal !

GERALD - J'en ai peur.

PERE JACK - Mais non, il est capable de sauter de joie au contraire.

Mme MARTIN - (contente de l'effet produit et se frottant les mains) C'est pas tout ça, moi j'ai du boulot... je ne suis pas au chômage... moi… (Et elle s'apprête à sortir.)

TOUS ENSEMBLE - Oh !

Mme MARTIN - (se retournant) Tu mets ça sur ma note. (Et elle sort.)

MARIANNE - Sacrée pip'lette ! Elle n'est contente que quand elle lance des piques.

GERALD - Oh ! Il ne faut pas trop y faire attention ! (Puis s'approchant des joueuses) Alors Marianne, où tu en es ?

ELEONORE - Elle ne sait plus où elle en est, la pauvre... J'suis en train d'lui coller une pâtée à ma p'tite sœur, j'te dis pas !

MARIANNE - Tu parles ! Elle n'a pas d'mal, elle invente des mots.

ELEONORE - Dis qu'je triche, l'temps qu't'y es. Primo : j'invente pas d'mots. Deusio…

MARIANNE - (s'esclaffant) Deusio !

ELEONORE - Oui... deusio, tu dis ça parc'que tu vois qu'tu perds.

MARIANNE - Comment j'perds ?

ELEONORE - Oui... Tiens... Il n'me reste plus que quatre lettres : deux “A”, un “N” et un “O”. J'utilise le premier “N” de nunuche et j'écris ANONA. Ça t'en bouche un coin, hein !

MARIANNE - Ah ! non, ça n'me bouche rien du tout. ANONNA, c'est du verbe (elle détache) A-NON-NER... Il te faut trois “N”.

(La porte s'ouvre, Yvon fait son entrée.)

YVON - Bonjour tout le monde. Alors les filles, ça va ?

MARIANNE - Les filles ! Non mais...

(Il leur fait une bise puis va serrer la main au Père Jack et ensuite à Gérald.)

GERALD - Bonjour Yvon. Tu tombes bien, j'avais justement une nou...

YVON - (l'interrompant un peu excité) Sers-moi un petit rhum.

ELEONORE - Tiens, t'es plus au Julienas maintenant ?

YVON - Non, j'ai décidé de faire comme la concierge. Elle n'est jamais malade, elle, ça doit venir de ça. Il parait qu'elle en boit une vingtaine par jour.

GERALD - (le servant) Et tu veux faire comme elle ! Eh bien tu n'es pas au bout !

YVON - Oh ! J'y arriverai, j'en suis déjà au quatrième.

GERALD - Attention quand même, parce que comme je te connais... à six t'es rond.

(Tous rient, sauf Eléonore.)

PERE JACK - Ça continue...

ELEONORE - Qui va à Sisteron ? Moi j'connais quelqu'un...

MARIANNE - (l'interrompant) Mais personne, allez... joue... on n'va pas y passer la journée sur cette partie.

YVON - Sacrée Eléonore ! Dis donc, je viens de voir le petit Michel d'Estaing...

ELEONORE - Le fils du président ?

(Tous rient.)

MARIANNE - Mais non grosse bête, Yvon veut parler du p'tit Michel, le commis d'Ange le boulanger.

ELEONORE - Ah ! bon... ben ç'ui-là... Il a un p'tit vélo dans l'crâne.

GERALD - C'est vrai qu'il n'est pas futé.

YVON - Tu ne connais pas sa dernière ?

PERE JACK - Moi je la connais, c'est même marqué dans le “Potin du bourg” : il s'est inscrit pour le concours de saut à l'élastique de dimanche.

YVON - Oui... c'est ça...

GERALD - Mais il est complètement fou ! Quand Ange va savoir ça... Vous vous rendez compte ?...

YVON - Se jeter dans le vide... de si haut... ça sera le sot de l'Ange !

(Tous rient sauf Eléonore.)

PERE JACK - Le sot de l'Ange ! Oh là là, si tu t'y mets aussi aux calembours...

ELEONORE - Ben moi, j'y comprends rien à vos cabans lourds !

MARIANNE - C'est pas cabans... Oh puis tu comprends rien ! C'est vrai qu'ils sont pas terribles, mais enfin on s'amuse bien.

PERE JACK - Et c'est le principal.

MARIANNE - N'empêche, quand il s'ra tout en haut, il aura intérêt à serrer les fesses le Michel.

YVON - Pour ça, il n'y aura pas de problème.

ELEONORE - Pas de problème pour serrer les fesses ?

YVON - Oui, parce que Michel serre haut !

(Eclat de rires général sauf Eléonore.)

GERALD - Michel Serrault... Oh là là, tu me bats. Bon... maintenant soyons un peu sérieux.

YVON - Mais je suis toujours sérieux.

GERALD - Oui... mais... (il hésite un peu) j'ai... j'ai une nouvelle à t'apprendre mais… (Il arrête un instant.)

PERE JACK - (comme un enfant et frappant sur la table) Il se dégonfle, il se dégonfle, il se dégonfle...

(Tout le monde s'arrête net et le regarde.)

ELEONORE - V'la qu'y r'tombe en enfance maint'nant !

(Le Père Jack se calme.)

YVON - Oh là là (les regardant alternativement) vous m'inquiétez, c'est pas une mauvaise nouvelle au moins ?

GERALD - Non... non... Mais je préfère quand même que tu...

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